L’Encyclopédie/1re édition/DIAPASON

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DIAPASON, f. m. terme de la Musique greque, par lequel les anciens exprimoient l’intervalle ou la consonnance de l’octave. Voyez Octave.

Les facteurs d’instrumens de musique nomment aujourd’hui diapasons, certaines tables où sont marquées les mesures de ces instrumens, & de toutes leurs parties. Voyez l’article Diapason. (Luth.)

On appelle encore diapason, l’étendue de sons convenable à une voix ou à un instrument. Ainsi, quand une voix se force, on dit qu’elle sort de son diapason ; & l’on dit la même chose d’un instrument dont les cordes sont trop lâches ou trop tendues, qui ne rend que peu de son, ou qui rend un son desagréable, parce que le ton en est trop haut ou trop bas. (S)

Diapason, terme de Fondeur de cloches, est un instrument qui leur sert à déterminer la grosseur, l’épaisseur, & le poids des cloches qu’ils fondent. On l’appelle aussi échelle campanaire, brochette, & bâton de Jacob. Voyez Brochette & Cloche.

Diapason, s. m. (Org.) celui dont les Facteurs se servent pour trouver les longueurs & largeur des tuyaux d’orgue, est une figure triangulaire (fig. 29, Pl. d’org.) dont le côté O, VIII est égal à la longueur du plus grand tuyau du jeu dont on veut trouver les proportions, & qui, dans la figure, est le bourdon de 8 piés bouché, sonnant le 16. Voyez Bourdon de 8 piés bouché & l’article Jeux. La ligne VIII, III, est le périmetre du tuyau, ou la circonférence, lorsque les tuyaux sont cylindriques.

La longueur & la largeur du plus grand tuyau d’un jeu étant données, il faut trouver la longueur & la largeur de tous les autres qui doivent être semblables ; pour cela sur les lignes O, VIII & VIII, III, qui font ensemble un angle III, VIII, O, rectangle en VIII, on trace un diapason en cette maniere. On divise la ligne O, VIII, en deux parties égales au point IV, & on éleve la perpendiculaire IV ut, dont la longueur est déterminée au point ut, par la rencontre de la ligne III, O, qui est l’hypothenuse du triangle O, VIII, III, auquel est semblable le triangle O, IV, ut, dont les côtés O, IV, & IV ut, homologues à ceux du grand triangle qui comprennent l’angle droit, sont le côté O, IV, la longueur & le côté IV, ut, la largeur du tuyau ut, qui sonnera l’octave au-dessus du premier tuyau, dont la longueur O, VIII, & la largeur VIII, III, avoient été données, & qui doit toujours être un ut. Pour trouver les autres intervalles intermédiaires, il y a différens moyens que nous allons faire connoître succintement. Premierement il faut connoître les rapports des sons que l’on veut faire rendre aux tuyaux. Ces sons de notre système diatonique, sont dans les rapports des nombres de la table suivante.


Système diatonique
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Intervalles diatoniques. Rapports des sons. Noms des sons.
VIII. Octave, 1 à 1 UT
VII. Septieme maj. 8 à 15 SI
7. Septieme mineure, 5 à 9 si
VI. Sixte majeure, 3 à 5 LA
6. Sixte mineure, 5 à 8 sol
V. Quinte, 2 à 3 clef de sol SOL
4. Triton, 32 à 45 fa
IV. Quarte, 3 à 4 FA
III. Tierce majeure, 4 à 5 MI
3. Tierce mineure, 5 à 6 mi
II. Seconde majeure, 8 à 9
2. Seconde mineure, 15 à 16 ut
Unisson ou son fondamental. 1 à 1 clef d'ut ut

Connoissant ces rapports, il est facile de trouver sur la ligne O, VIII, les points ut, RE, MI, &c. car il suffit de regarder les termes des rapports ci-dessus, comme les termes d’une fraction qui exprimera combien de parties de la ligne O, VIII, il faut prendre.

L’antécédent des rapports doit être pris pour numérateur, & le conséquent des mêmes rapports doit être pris pour dénominateur. Le dénominateur marquera en combien de parties la ligne totale O, VIII doit être divisée, & le numérateur combien on doit prendre de ces parties en commençant à les compter par l’extrémité O ; ainsi le rapport des sons qui forment l’octave étant 1 à 2, il faut transformer ce rapport en la fraction  ; laquelle fraction marque qu’il faut prendre la moitié O, IV, de la ligne O, VIII, pour avoir l’octave IV, ut.

Le rapport du son fondamental ou de l’ut donné à sa quinte, est 2 à 3, qu’il faut transformer de même en la fraction , qui marque qu’il faut prendre les de la ligne totale O, VIII, pour avoir la quinte SOL sol, ainsi des autres. Les parties de la ligne O, VIII, interceptées entre le point O, & les points UT, RE, MI, FA, &c. sont les longueurs, & les lignes IV ut, Sol sol, RE re, & terminées par la rencontre de la ligne O ut, sol re, III : sont les largeurs des tuyaux semblables qui rendront les sons ut, RE, MI, FA, SOL, LA, SI, UT, & les demi-tons intermédiaires dans les rapports de la table ci-devant QEI. Ce qu’il falloit trouver.

On trouve de même facilement la partition de l’octave IV, II, en considérant la ligne O, IV, comme la ligne totale qu’il faut diviser ; en en prenant la moitié pour l’octave, on aura le point II ; & en prenant des parties de la ligne O, IV, comme on a pris des parties de la ligne O, VIII, on aura dans l’étendue de IV, II, des divisions qui termineront les longueurs des tuyaux, qui rendront les sons dont on aura employé les rapports. Si on veut encore ajouter une octave, on regardera la ligne O, II, comme la ligne totale qu’il faut diviser, & de laquelle on prendra la moitié O, I, pour avoir l’octave de O, II, & on trouvera les divisions de l’espace I, II ; comme on a trouvé celle de l’espace VIII, IV. Pour une quatrieme octave, on prendra l’intervalle I , en divisant la ligne totale O, I, en deux parties égales au point , & on repartira cet espace I , comme on a reparti l’espace VIII, IV. Pour une cinquieme octave, on prendra la moitié de la ligne O , en la divisant en deux au point , & divisant l’espace , comme l’on a divisé les autres. Pour une sixieme, il faut prendre la moitié de la ligne O , & en général prendre toujours pour ligne totale la partie de la ligne O, VIII, qui restera du côté de O, & opérer sur cette partie, comme on a opéré sur la ligne totale O, VIII. Si on veut trouver les octaves en descendant, comme, par exemple, l’octave comprise entre le seizieme pié & le huitieme pié, li faut regarder la ligne O, VIII, comme étant la moitié de la ligne O, XVI, & partant il faut ajouter à la ligne O, VIII, du côté VIII, une ligne qui lui soit égale ; ensorte que la ligne totale ait 16 piés, & faire la partition de cette ligne O, XVI, dont il n’y a que la moitié dans la planche, comme on a fait celle de la ligne O, VIII. Si il y a ravalement à l’orgue, on doublera la ligne O, XVI, pour avoir l’octave de 32 piés, qui sera compris entre le XVI pié, & l’extrémité XXXII, de la ligne O, XXXII, que l’on repartira, comme on a reparti la ligne O, VIII, & les autres.

Les tuyaux construits sur ces mesures, seront semblables, à cause de la similitude des triangles, & en raison triplée inverse des termes des rapports ; ils rendront des sons qui seront dans les mêmes rapports que les nombres qu’on aura employés ; ainsi si on a employé les nombres qui expriment les rapports des intervalles diatoniques, ainsi qu’ils sont contenus dans la table ci-devant, les tuyaux rendront des sons qui seront éloignés du son du plus grave, qui est le son fondamental des mêmes intervalles. Autrement prenez les nombres suivans A, qui contiennent le systême tempéré, ou les nombres B, qui font la partition de l’octave en douze demi-sons égaux.

Si on fait usage des nombres A, il faut diviser la ligne totale O, VIII, ou O, IV, ou O II, si c’est une premiere, seconde, troisieme octave, en 1620 parties, & marquer les points ut, SI b si, LA, ♯ sol SOL, &c. vis-à-vis les parties de la ligne O, VIII, exprimées par les nombres A de la table ; ainsi le nombre 810 qui est la moitié de 1620, se trouvera au milieu de la ligne totale, dont il suffit de diviser la seconde partie de 810 jusqu’à 1620 ; puisque la premiere partie de 1 jusqu’à 810 est ajoûtée à toutes les largeurs ; après avoir marqué les points sur la ligne qui répond au nombre A de la table, on menera les verticales IV, ut SOL sol, RE ré, &c. qui seront rencontrées & terminées par l’hypothenuse O, ut, sol, ré III ; ces lignes verticales sont les largeurs des tuyaux, dont les lignes O, IV, O SOL, O RE, O, VIII, &c. sont les longueurs.

Si on veut diviser l’octave en douze demi-ton, égaux, on se servira des nombres B de la table, comme on s’est servi des nombres A ; ensorte que le plus grand 100.000, réponde à l’extrémité VIII, de la ligne O, VIII, & le plus petit 50.000, au milieu de cette même ligne.

Les facteurs ont une pratique peu exacte à la vérité, mais cependant qu’on peut suivre sans inconvénient, puisque lorsque l’on taille les tuyaux, on laisse toujours quelques pouces de longueur de plus qu’il ne faut, qu’on réserve à oter, lorsque les tuyaux sont places, & qu’on les accorde ; ils divisent de même que dans les méthodes précédentes la ligne totale O, VIII, en deux parties égales, pour avoir l’étendue VIII, IV, qui répond à une octave ; ils partagent ensuite cette partie VIII, IV, en trois parties égales, dont une SOL, IV, ajoutée à l’autre moitié O, IV, de la ligne totale, donne la quinte SOL, qui est le seul intervalle juste de cette partition ; ensuite ils divisent le tiers SOL IV, en cinq parties égales, pour avoir les quatre divisions sol ♯, LA, si ♭, SI ; & les deux autres tiers VIII, SOL, en sept parties égales, ce qui donne les points ut ♯, Re mi, ♭ MI, FA fa ♯. Par où ils achevent leur partition qui n’est rien moins qu’exacte, mais qu’on peut cependant pratiquer, en observant de donner toujours aux tuyaux plus de longueur qu’il ne leur en faut.

Quoique nous tolérions la pratique des facteurs, il faut cependant observer qu’il est beaucoup mieux de ne s’en point servit ; car quoique les tuyaux soient amenés à leur longueur en les coupant, lorsqu’on les accorde, il n’est pas moins vrai qu’ils ne sont plus des corps semblables, puisqu’on ne peut réformer le diapason vicieux des grosseurs : il est pourtant requis que les tuyaux aient leurs grosseurs, suivant le diapason ; c’est-à-dire qu’ils soient semblables, pour qu’ils rendent la plus parfaite harmonie qu’il est possible. Cet article est de MM. Thomas & Goussier.