L’Encyclopédie/1re édition/EXHÉRÉDATION

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EXHÉRÉDATION, s. f. (Jurispr.) est une disposition, par laquelle on exclut entierement de sa succession ou de sa légitime en tout ou en partie, celui auquel, sans cette disposition, les biens auroient appartenu comme héritier, en vertu de la loi ou de la coûtume, & qui devoit du moins y avoir sa légitime.

Prononcer contre quelqu’un l’exhérédation, c’est exheredem facere, c’est le deshériter. Ce terme deshériter signifie néanmoins quelquefois déposséder ; & deshéritance n’est point synonyme d’exhérédation, il signifie seulement dessaisine ou dépossession.

Pour ce qui est du terme d’exhérédation, on le prend quelquefois pour la disposition qui ôte l’hoirie, quelquefois aussi pour l’effet de cette disposition, c’est-à-dire la privation des biens que souffre l’héritier.

Dans les pays de droit écrit, tous ceux qui ont droit de légitime doivent être institués héritiers, du moins pour leur légitime, ou être deshérités nommément, à peine de nullité du testament ; de sorte que dans ces pays l’exhérédation est tout-à-la-fois une peine pour ceux contre qui elle est prononcée, & une formalité nécessaire pour la validité du testament, qui doit être mise à la place de l’institution, lorsque le testateur n’institue pas ceux qui ont droit de légitime.

En pays coûtumier où l’institution d’héritier n’est pas nécessaire, même par rapport à ceux qui ont droit de légitime, l’exhérédation n’est considérée que comme une peine.

La disposition qui frappe quelqu’un d’exhérédation est réputée si terrible, qu’on la compare à un coup de foudre : c’est en ce sens que l’on dit, lancer le foudre de l’exhérédation ; ce qui convient principalement lorsque le coup part d’un pere justement irrité contre son enfant, & qui le deshérite pour le punir.

L’exhérédation la plus ordinaire est celle que les pere & mere prononcent contre leurs enfans & autres descendans ; elle peut cependant aussi avoir lieu en certains pays contre les ascendans, & contre les collatéraux, lorsqu’ils ont droit de légitime, soit de droit ou statutaire.

Mais une disposition qui prive simplement l’héritier de biens qu’il auroit recueillis, si le défunt n’en eût pas disposé autrement, n’est point une exhérédation proprement dite.

Il y a une quatrieme classe de personnes sujettes à une espece d’exhérédation, qui sont les vassaux ; comme on l’expliquera en son rang.

Toutes ces différentes sortes d’exhérédations sont expresses ou tacites.

Il y a aussi l’exhérédation officieuse.

Suivant le droit romain, l’exhérédation ne pouvoit être faite que par testament, & non par un codicile ; ce qui s’observoit ainsi en pays de droit écrit : au lieu qu’en pays coûtumier il a toûjours été libre d’exhéréder par toutes sortes d’actes de derniere volonté. Mais présentement, suivant les articles 15 & 16 de l’ordonnance des testamens, qui admettent les testamens olographes entre enfans & descendans, dans les pays de droit écrit ; il s’ensuit que l’exhérédation des enfans peut être faite par un tel testament, qui n’est, à proprement parler, qu’un codicile.

On va expliquer dans les subdivisions suivantes, ce qui est propre à chaque espece d’exhérédation. (A)

Exhérédation des Ascendans : dans les pays où les ascendans ont droit de légitime dans la succession de leurs enfans ou autres descendans, comme en pays de droit écrit & dans quelques coûtumes, ils peuvent être deshérités pour certaines causes par leurs enfans ou autres descendans, de la succession desquels il s’agit.

Quoique cette exhérédation ne soit permise aux enfans, que dans le cas où les ascendans ont grandement démérité de leur part, on doit moins en ces cas la considérer comme une peine prononcée de la part des enfans, que comme une simple privation de biens dont les ascendans se sont rendus indignes ; car il ne convient jamais aux enfans de faire aucune disposition dans la vûe de punir leurs pere & mere ; c’est un soin dont ils ne sont point chargés : ils doivent toûjours les respecter, & se contenter de disposer de leurs biens, suivant que la loi le leur permet.

Le droit ancien du digeste & du code, n’admettoit aucune cause pour laquelle il fût permis au fils d’exhéréder son pere.

A l’égard de la mere, la loi 28 au code de inoff. testam. en exprime quelques-unes, qui sont rappellées dans la novelle 115 dont on va parler.

Suivant cette novelle, chap. jv. les ascendans peuvent être exhérédés par leurs descendans, pour différentes causes qui sont communes au pere & à la mere, & autres ascendans paternels & maternels : mais le nombre des causes de cette exhérédation n’est pas si grand que pour celle des descendans, à l’égard desquels la novelle admet quatorze causes d’exhérédation ; au lieu qu’elle n’en reconnoît que huit à l’égard des ascendans. Ces causes sont :

1°. Si les ascendans ont par méchanceté procuré la mort de leurs descendans ; il suffit même qu’ils les ayent exposés & mis en danger de perdre la vie par quelque accusation capitale ou autrement, à moins que ce ne fût pour crime de lese-majesté.

2°. S’ils ont attenté à la vie de leurs descendans, par poison, sortilége, ou autrement.

3°. Si le pere a souillé le lit nuptial de son fils en commettant un inceste avec sa belle-fille ; la novelle ajoûte, ou en se mêlant par un commerce criminel avec la concubine de son fils ; parce que, suivant le droit romain, les concubines étoient, à certains égards, au niveau des femmes légitimes : ce qui n’a pas lieu parmi nous.

4°. Si les ascendans ont empêché leurs descendans de tester des biens dont la loi leur permet la disposition.

5°. Si le mari, par poison ou autrement, s’est efforcé de procurer la mort à sa femme, ou de lui causer quelque aliénation, & vice versâ pour la femme à l’égard du mari ; les enfans dans ces cas peuvent deshériter celui de leur pere, mere, ou autre ascendant qui seroit coupable d’un tel attentat.

6°. Si les ascendans ont négligé d’avoir soin de leur descendant, qui est tombé dans la démence ou dans la fureur.

7°. S’ils négligent de racheter leurs descendans qui sont detenus en captivité.

8°. Enfin l’enfant orthodoxe peut deshériter ses ascendans hérétiques ; mais comme on ne connoît plus d’hérétiques en France, cette regle n’est plus guere d’usage. Voyez ce qui est dit ci-après de l’exhérédation des descendans. (A)

Exhérédation des Collatéraux, est celle qui peut être faite contre les freres & sœurs & autres collatéraux qui ont droit de légitime, ou quelqu’autre reserve coûtumiere.

Les lois du digeste & du code qui ont établi l’obligation de laisser la légitime de droit aux freres & sœurs germains ou consanguins, dans le cas où le frere institueroit pour seul héritier une personne infame, n’avoient point reglé les causes pour lesquelles, dans ce même cas, ces collatéraux pourroient être deshérités. C’est ce que la nevelle 22, ch. xlvij. a prévû. Il y a trois causes :

1°. Si le frere a attenté sur la vie de son frere.

2°. S’il a intenté contre lui une accusation capitale.

3°. Si par méchanceté il lui a causé ou occasionné la perte d’une partie considérable de son bien.

Dans tous ces cas, le frere ingrat peut être deshérité & privé de sa légitime ; il seroit même privé, comme indigne, de la succession ab intestat ; & quand le frere testateur n’auroit pas institué une personne infame, il ne seroit pas nécessaire qu’il instituât ou deshéritât nommément son frere ingrat. Il peut librement disposer de ses biens sans lui rien laisser, & sans faire mention de lui.

Ce que l’on vient de dire d’un frere, doit également s’entendre d’une sœur.

Dans les pays coûtumiers où les collatéraux n’ont point droit de légitime, il n’est pas nécessaire de les instituer ni deshériter nommément ; ils n’ont ordinairement que la reserve coûtumiere des propres qui est à Paris des quatre quints, & dans d’autres coûtumes plus ou moins considérable.

L’exhérédation ne peut donc avoir lieu en pays coûtumier, que pour priver les collatéraux de la portion des propres, ou autres biens que la loi leur destine, & dont elle ne permet pas de disposer par testament.

La reserve coûtumiere des propres ou autres biens, ne pouvant être plus favorable que la légitime, il est sensible que les collatéraux peuvent être privés de cette reserve pour les mêmes causes qui peuvent donner lieu à priver les collatéraux de leur légitime, comme pour mauvais traitemens, injures graves, & autres causes exprimées en la novelle 22. (A)

Exhérédation des Descendans, voyez ci-après Exhérédation des Enfans.

Exhérédation cum elogio, est celle qui est faite en termes injurieux pour celui qui est deshérité ; comme quand on le qualifie d’ingrat, de fils dénaturé, débauché, &c. Le terme d’éloge se prend dans cette occasion en mauvaise part : c’est une ironie, suivant ce qui est dit dans la loi 4, au code théodos. de legitim. hered.

Les enfans peuvent être exhérédés cum elogio, lorsqu’ils le méritent. Il n’en est pas de même des collatéraux ; l’exhérédation prononcée contre eux cum elogio, annulle le testament, à moins que les faits qui leur sont reprochés par le testateur ne soient notoires. Voyez Mornac, sur la loi 21. cod. dein off. testam. Bardet, liv. I. ch. xiij. & tome II. liv. II. ch. xviij. Journ. des aud. tom. I. liv. I. ch. xxxjv. (A)

Exhérédation des Enfans & autres descendans, est une disposition de leurs ascendans qui les prive de la succession, & même de leur légitime : car ce n’est pas une exhérédation proprement dite que d’être réduit à sa légitime, & il ne faut point de cause particuliere pour cela.

Si l’on considere d’abord ce qui s’observoit chez les anciens pour la disposition de leurs biens à l’égard des enfans, on voit qu’avant la loi de Moyse les Hébreux qui n’avoient point d’enfans, pouvoient disposer de leurs biens comme ils jugeoient à-propos ; & depuis la loi de Moyse, les enfans ne pouvoient pas être deshérités ; ils étoient même héritiers nécessaires de leur pere, & ne pouvoient pas s’abstenir de l’hérédité.

Chez les Grecs l’usage n’étoit pas uniforme ; les Lacédemoniens avoient la liberté d’instituer toutes sortes de personnes au préjudice de leurs enfans, même sans en faire mention ; les Athéniens au contraire ne pouvoient pas disposer en faveur des étrangers, quand ils avoient des enfans qui n’avoient pas démérité, mais pouvoient exhéréder leurs enfans desobéissans & les priver totalement de leur succession.

Suivant l’ancien droit romain, les enfans qui étoient en la puissance du testateur, devoient être institués ou deshérités nommément ; au lieu que ceux qui étoient émancipés devenant comme étrangers à la famille, & ne succedant plus, le pere n’étoit pas obligé de les instituer ou deshériter nommément ; il en étoit de même des filles & de leurs descendans. Quant à la forme de l’exhérédation, il falloit qu’elle fût fondée en une cause légitime ; & si cette cause étoit contestée, c’étoit à l’héritier à la prouver ; mais le testateur n’étoit pas obligé d’exprimer aucune cause d’exhérédation dans son testament.

Les édits du préteur qui formerent le droit moyen, accorderent aux enfans émancipés, aux filles & leurs descendans, le droit de demander la possession des biens comme s’ils n’avoient pas été émancipés, au moyen de quoi ils devoient être institués ou deshérités nommément, afin que le testament fût valable.

Ces dispositions du droit prétorien furent adoptées par les lois du digeste & du code, par rapport à la nécessité d’institution ou exhérédation expresse de tous les enfans sans distinction de sexe ni d’état.

Justinien fit néanmoins un changement par la loi 30. au code de inoff. testam. & par la novelle 18. ch. j. par lesquelles il dispensa d’instituer nommément les enfans & autres personnes qui avoient droit d’intenter la plainte d’inofficiosité, ou de demander la possession des biens contra tabulas, c’est-à-dire les descendans par femme, les enfans émancipés & leurs descendans, les ascendans & les freres germains ou consanguins, turpi personâ institutâ ; il ordonna qu’il suffiroit de leur laisser la légitime à quelque titre que ce fût, même de leur faire quelque libéralité moindre que la légitime, pour que le testament ne pût être argué d’inofficiosité. Cette loi, au surplus, ne changea rien par rapport aux enfans étant en la puissance du testateur.

Ce qui vient d’être dit ne concernoit que le pere & l’ayeul paternel, car il n’en étoit pas de même de la mere & des autres ascendans maternels ; ceux-ci n’étoient pas obligés d’instituer ou deshériter leurs enfans & descendans ; ils pouvoient les passer sous silence, ce qui opéroit à leur égard le même effet que l’exhérédation prononcée par le pere. Les enfans n’avoient d’autre ressource en ce cas, que la plainte d’inofficiosité, en établissant qu’ils avoient été injustement prétérits.

La novelle 115, qui forme le dernier état du droit romain sur cette matiere, a suppléé ce qui manquoit aux précédentes lois : elle ordonne, ch. iij. que les peres, meres, ayeuls & ayeules, & autres ascendans, seront tenus d’instituer ou deshériter nommément leurs enfans & descendans ; elle défend de les passer sous silence ni de les exhéréder, à moins qu’ils ne soient tombés dans quelqu’un des cas d’ingratitude exprimés dans la même novelle ; & il est dit que le testateur en fera mention, que son héritier en fera la preuve, qu’autrement le testament sera nul quant à l’institution ; que la succession sera déférée ab intestat, & néanmoins que les legs & fideicommis particuliers, & autres dispositions particulieres, seront exécutées par les enfans devenus héritiers ab intestat.

Suivant cette novelle, il n’y a plus de différence entre les ascendans qui ont leurs enfans en leur puissance, & ceux qui n’ont plus cette puissance sur leurs enfans ; ce qui avoit été ordonné pour les héritiers siens, a été étendu à tous les descendans sans distinction.

A l’égard des causes pour lesquelles les descendans peuvent être exhérédés, la novelle en admet quatorze.

1°. Lorsque l’enfant a mis la main sur son pere ou autre ascendant pour le frapper, mais une simple menace ne suffiroit pas.

2°. Si l’enfant a fait quelqu’injure grave à son ascendant, qui fasse préjudice à son honneur.

3°. Si l’enfant a formé quelqu’accusation ou action criminelle contre son pere, à moins que ce ne fût pour crime de lese-majesté ou qui regardât l’état.

4°. S’il s’associe avec des gens qui menent une mauvaise vie.

5°. S’il a attenté sur la vie de son pere par poison ou autrement.

6°. S’il a commis un inceste avec sa mere : la novelle ajoûte, ou s’il a eu habitude avec la concubine de son pere ; mais cette derniere disposition n’est plus de notre usage, comme on l’a déjà observé en parlant de l’exhérédation des ascendans.

7°. Si l’enfant s’est rendu dénonciateur de son pere ou autre ascendant, & que par-là il lui ait causé quelque préjudice considérable.

8°. Si l’enfant mâle a refusé de se porter caution pour délivrer son pere de prison, soit que le pere y soit detenu pour dettes ou pour quelque crime, tel qu’on puisse accorder à l’accusé son élargissement en donnant caution ; & tout cela doit s’entendre supposé que le fils ait des biens suffisans pour cautionner son pere, & qu’il ait refusé de le faire.

9°. Si l’enfant empêche l’ascendant de tester.

10°. Si le fils, contre la volonté de son pere, s’est associé avec des mimes ou bateleurs & autres gens de théatre, ou parmi des gladiateurs, & qu’il ait persévéré dans ce métier, à moins que le pere ne fût de la même profession.

11°. Si la fille mineure, que son pere a voulu marier & doter convenablement, a refusé ce qu’on lui proposoit pour mener une vie desordonnée ; mais si le pere a négligé de marier sa fille jusqu’à 25 ans, elle ne peut être deshéritée, quoiqu’elle tombe en faute contre son honneur, ou qu’elle se marie sans le consentement de ses parens, pourvû que ce soit à une personne libre.

Les ordonnances du royaume ont reglé autrement la conduite que doivent tenir les enfans pour leur mariage : l’édit du mois de Février 1556 veut que les enfans de famille qui contractent mariage sans le consentement de leurs pere & mere, puissent être exhérédés sans espérance de pouvoir quereller l’exhérédation ; mais l’ordonnance excepte les fils âgés de 30 ans & les filles âgées de 25, lorsqu’ils se sont mis en devoir de requérir le consentement de leurs pere & mere : l’ordonnance de 1639 veut que ce consentement soit requis par écrit, ce qui est encore confirmé par l’édit de 1697.

12°. C’est encore une autre cause d’exhérédation, si les enfans négligent d’avoir soin de leurs pere, mere, ou autre ascendant, devenus furieux.

13°. S’ils négligent de racheter leurs ascendans detenus prisonniers.

14°. Les ascendans orthodoxes peuvent deshériter leurs enfans & autres descendans qui sont hérétiques. Les exhérédations prononcées pour une telle cause avoient été abolies par l’édit de 1576, confirmé par l’article 31 de l’édit de Nantes ; mais ce dernier édit ayant été révoqué, cette regle ne peut plus guere être d’usage en France.

Il n’est pas nécessaire en pays coûtumier, pour la validité du testament, d’instituer ou deshériter nommément les enfans & autres descendans ; mais ils peuvent y être deshérités pour les mêmes causes que la novelle 115 admet ; & lorsque l’exhérédation est declarée injuste, tout le testament est nul comme fait abirato, à l’exception des legs pieux faits pour l’ame du défunt, pourvû qu’ils soient modiques. Voy. au digeste liv. XXVIII. tit. ij. au code liv. VI. tit. xxviij. aux instit. liv. II. tit. xiij. Furgole, tr. des testamens, tom. III. ch. viij. sect. 2. (A)

Exhérédation des Freres & Sœurs. Voyez ci-devant Exhérédation des Collatéraux.

Exhérédation Officieuse, est celle qui est faite pour le bien de l’enfant exhérédé, & que les lois mêmes conseillent aux peres sages & prudens, comme dans la loi 16. §. 2. ff. de curator. furioso dandis.

Suivant la disposition de cette loi, qui a été étendue aux enfans dissipateurs, le pere peut deshériter son enfant qui se trouve dans ce cas, & instituer ses petits-enfans, en ne laissant à l’enfant que des alimens, & cette exhérédation est appellée officieuse. V. Furieux & Prodigue. (A)

Exhérédation des Pere & Mere. Voyez ci-devant Exhérédation des Ascendans.

Exhérédation Tacite, est celle qui est faite en passant sous silence dans le testament, celui qui devoit y être institué ou deshérité nommément ; c’est ce que l’on appelle plus communément prétérition. Voyez Prétérition. (A)

Exhérédation des Vassaux ; c’est ainsi que les auteurs qui ont écrit sous les premiers rois de la troisieme race, ont appellé la privation que le vassal souffroit de son fief, qui étoit confisqué au profit du seigneur. L’origine de cette expression vient de ce que dans la premiere institution des fiefs, les devoirs reciproques du vassal & du seigneur marquoient, de la part du vassal, une révérence & obéissance presqu’égale à celle d’un fils envers son pere, ou d’un client envers son patron ; & de la part du seigneur, une protection & une autorité paternelle ; de sorte que la privation du fief qui étoit prononcée par le seigneur dominant contre son vassal, étoit comparée à l’exhérédation d’un fils ordonnée par son pere. Voyez le factum de M. Husson, pour le sieur Aubery seigneur de Montbar.

On voit aussi dans les capitulaires & dans plusieurs conciles à peu-près du même tems, que le terme d’exhérédation se prenoit souvent alors pour la privation qu’un sujet pouvoit souffrir de ses héritages & autres biens de la part de son seigneur : hæc de liberis hominibus diximus, ne fortè parentes eorum contra justitiam fiant exhæredati, & regale obsequium minuatur, & ipsi hæredes propter indigentiam mendici vel latrones, &c. (A)