L’Encyclopédie/1re édition/FUMETERRE

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FUMETERRE, s. f. fumaria, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleurs polypétales, anomales, ressemblantes aux fleurs légumineuses, & composées de deux pétales qui ont en quelque façon la forme de deux levres ; celle du dessus est terminée par une sorte de queue, & est unie à la levre du dessous, à l’endroit du pédicule. Le pistil est enveloppé d’une gaine & situé entre ces deux levres, comme une sorte de langue ; il devient dans la suite un fruit membraneux, qui est plus ou moins alongé, & qui renferme une semence arrondie. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

On compte dix à douze especes de fumeterre, entre lesquelles il suffira de décrire ici la principale fumaria vulgaris offic. C. Bauh. pinac. 143. Tournef. inst. 422. Boerh. ind. A. 308. Park. 287. J. Bauh. 3. 201. Ray, hist. 405. synop. 3. 204.

Sa racine est menue, blanche, peu fibreuse, plongée perpendiculairement dans la terre : sa tige, ou ses tiges, sont partagées en plusieurs branches anguleuses, creuses, lisses, de couleur en partie purpurine & en partie d’un blanc verdâtre ; ses feuilles inférieures sont alternes, portées sur de longues queues, un peu larges & anguleuses, d’un verd de mer, & finement découpées, comme les feuilles de quelques plantes à fleur en parassol. Ses fleurs sont ramassées en un épi qui ne sort pas de l’aisselle des feuilles, mais du côté opposé ; elles sont petites, oblongues, de plusieurs pieces irrégulieres, semblables aux fleurs légumineuses. Elles sont composées seulement de deux feuilles, qui forment une maniere de gueule à deux mâchoires, dont la supérieure finit en derriere par une queue, & l’inférieure est articulée avec elle dans l’endroit où l’une & l’autre tiennent au pédicule. On trouve dans le palais qui est le creux d’entre les deux mâchoires, un pistil enveloppé d’une gaine, & accompagné de quelques étamines garnies de sommets. A chaque fleur succede un fruit membraneux, arrondi, qui renferme une très-petite graine ronde, d’un verd foncé, d’une saveur amere & desagréable. Cette plante vient naturellement dans les champs, les terres labourées, & dans les endroits cultivés. Elle fleurit en Mai, & est toute d’usage, sur tout lorsqu’elle est fleurie. Voyez Fumeterre, (Mat. med.) (D. J.)

Fumeterre, (Pharmacie. Mat. med.) cette plante est une de celles qui sont appellées ameres par excellence. La fumeterre fraîche entre dans les infusions, les décoctions, & les bouillons appellés amers : on en exprime le suc, que l’on clarifie par ébullition ou par défécation. Voyez Suc.

On tient aussi dans les boutiques l’extrait de cette plante, qui se prépare en faisant évaporer au bain-marie le suc exprimé & clarifié jusqu’à la consistance requise. Voyez Extrait.

La fumeterre est une plante à laquelle on attribue de grandes vertus ; elle est recommandée dans les obstructions, dans la rétention des regles & des urines ; elle passe pour fortifier l’estomac & les visceres ; elle est presque toûjours un des ingrédiens des remedes qu’on prescrit dans la cachexie, les maladies chroniques, hypochondriaques, scorbutiques, la mélancolie, la jaunisse, &c. Riviere & Etmuller la recommandent beaucoup dans la cachexie & la mélancolie.

Cette plante est vantée comme un spécifique pour guérir la gale, même la plus invétérée : on en fait infuser une poignée dans du petit lait, qu’on fait prendre au malade ; ou bien on en donne le suc exprimé & clarifié, à la dose de 2, 3, 4 onces : elle procure de très-bons effets dans toutes les maladies de la peau ; elle est aussi réputée fébrifuge ; & on la mêle avec les autres remedes de cette classe. Le suc exprimé de cette plante se prescrit souvent & avec succès dans le scorbut ; on le mêle avec celui de cresson, de cochléaria, &c.

L’extrait est très-souvent employé dans les opiates apéritives, antictériques, & fébrifuges.

La fumeterre nous fournit, comme nous l’avons dit, plusieurs bons remedes, son suc, son extrait, &c. outre cela, on prépare avec son suc un sirop qu’on peut fort facilement faire prendre aux enfans auxquels on croit cette plante nécessaire. On distilloit autrefois cette plante ; & l’eau que l’on retiroit passoit pour être diurétique & sudorifique : mais cette eau ne se fait plus ; & en effet la fumeterre n’est pas d’une nature à être distillée. Voyez Eau distillée.

La fumeterre entre dans le syrop de chicorée composé ; le suc de cette plante entre dans l’électuaire de psyllium, dans les pilules angéliques : son extrait est prescrit dans la confection hamech & dans les pilules de Stahl. (b)