L’Encyclopédie/1re édition/MERCURIEL

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MERCURIEL, Onguent, (Pharm. & mat. méd.) Voyez Mercure & Remedes mercuriaux.

Mercurielle, terre, (Chimie.) ou troisieme terre de Becher. Voyez Terres de Becher (les trois.)

La terre mercurielle est, selon Becher, le principe le plus propre, le plus spécifique des mixtes, celui dans lequel reside leur caractere constitutif, ineffaçable, immortalis quadam forma caracterismum suum observans. C’est à la présence de cette terre qu’il attribue la propriété qu’ont, selon un dogme chimique qu’il adopte formellement, les sels volatils des plantes & des animaux, arrachés même de ces substances par la violence du feu, de représenter l’image, ideam, des substances qui les ont fournies. La resurrection des animaux de leurs propres cendres, la régénération des plantes, des fleurs est, selon lai, l’ouvrage de la terre mercurielle. Il rapporte l’expérience fort singuliere d’un morceau de jaspe tenu en fusion dans un creuset fermé, dont la couleur abandonna entierement la matiere pierreuse, & alla s’attacher à la partie supérieure du creuset, & s’y disposer de la même maniere qu’elle l’est sur le jaspe, tant pour la diversité des couleurs, que pour la distribution des veines & des taches : & c’est à sa terre mercurielle qu’il attribue le transport, la migration de l’ame du jaspe, c’est ainsi qu’il nomme cette matiere colorée. C’est cette terre qui donne la métalléité aux métaux, c’est-à-dire leur mollesse, extensibilité, malléabilité, liquescibilité. Elle est la plus pénétrante & la plus volatile des trois terres : c’est elle qui, soit seule, soit unie a la seconde terre, que les chimistes modernes appellent phlogistique, forme les mouffetes, pousses ou vapeurs souterreines, qui éteignent la flamme des flambeaux & des lampes des mineurs, & qui les suffoquent eux-mêmes, ou les incommodent considérablement. Voyez Gas, Exhalaison, Mouffete, Pousse ; c’est cette terre pure, nue & résoute, ou réduite en liqueur, qui est le véritable alkahest. Voyez Alkahest & Menstrue ; cette liqueur est si pénétrante que si on la respire imprudemment, on est frappé comme de la foudre, accident qui arriva une fois à Becher, qui fut sur le point d’en périr. La terre mercurielle se masque, larvatur, quelquefois dans les mines sous l’apparence d’une fumée ou d’une eau, & s’attache aussi quelquefois aux parois des galeries sous la forme d’une neige légere & brillante. La terre mercurielle est le principe de toute volatilité ; elle est surabondante dans le mercure ordinaire, qu’elle met par cet excès dans l’état de décomposition. Voyez l’article Mixtion, & c’est par son accrétion au corps métallique parfait, absolutum, qu’elle opere la mercurification. Voyez Mercurification. Elle est le premier être, primum ens, du sel marin. Quelques chimistes la regardent comme le principe de l’arsenic ; les métaux cornés, les sels alkalis volatils & ammoniacaux lui doivent leur volatilité, &c. Ceux qui ont appellé ce principe mercure, & qui l’ont pris bonnement pour le mercure coulant ordinaire, ou même pour le mercure des métaux, se sont grossierement trompés. Cette terre est appellée mercurielle au figuré ; ce nom ne signifie autre chose, sinon qu’elle est volatile & fluide, fluxilis, comme le mercure.

Nous venons d’exposer sommairement les propriétés fondamentales & caractéristiques que Becher attribue à sa troisieme terre. Le point de vûe sous lequel ce profond & ingénieux chimiste a considéré la composition des corps naturels, lorsqu’il s’est trouvé forcé à recourir à un pareil principe, est véritablement sublime, plein de génie & de sagacité : la chaîne, l’analogie, l’identité des phénomenes qu’il a rapprochés, qu’il a liés, en les déduisant de ce principe, est frappante, lumineuse, utile, avançant l’art. Mais enfin on est forcé d’avouer que ce n’est pourtant là qu’une coordination de convenance, qu’un système artificiel, & qu’elle fait tout au plus soupçonner ou desirer un principe quelconque. Stahl qui a tant médité le Becherianisme, & qui a été doué du génie éminent propre à en sonder les profondeurs & à en dévoiler les mysteres, confesse & professe, confiteor & profiteor, ce sont ses termes en dix endroits de son Specimen becherianum, que l’existence du principe mercuriel, & son influence dans les phénomenes que lui attribue Becher, ne sont rien moins que démontrés ; qu’il penche très fort à se persuader que la troisieme terre de Becher ne differe qu’en nombre, & non pas en espece, de sa seconde terre, du phlogistique ; c’est-à-dire qu’une certaine quantité d’un même, seul & unique principe étant admise dans les mixtes, y produit les effets attribués aux phlogistiques ; & qu’une quantité différente y produit les effets attribues à la terre mercurielle. Voyez Mixtion. Et enfin il promet en son nom, & en celui de tous les vrais chimistes, une éternelle reconnoissance à quiconque rendra simple, facile, praticable la doctrine de Becher sur cette troisieme terre, comme il l’a fait lui sur la seconde, sur le phlogistique. (b)

Mercurielle, eau ou liqueur. Voyez sous le mot Eau & l’article Mercure, (Mat. méd.)

Mercurielle, liqueur ou huile. Voyez Mercure, (Mat. méd.)