L’Encyclopédie/1re édition/PLEIN

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PLEIN, REMPLI, adj. (Synon.) il n’en peut plus tenir dans ce qui est plein. On n’en peut pas mettre davantage dans ce qui est rempli. Le premier a un rapport particulier à la capacité du vaisseau ; & le second à ce qui doit être reçu dans cette capacité.

Aux nôces de Cana les pots furent remplis d’eau, & par miracles ils se trouverent pleins de vin. Girard. (D. J.)

Plein, s. m. en Physique, est un terme usité pour signifier cet état des choses où chaque partie de l’espace ou de l’etendue est supposée entierement remplie de matiere. Voyez Matiere & Espace.

On dit le plein, par opposition au vuide, qui est un espace que l’on suppose destitué de toute matiere.

Les Cartésiens soutiennent le plein absolu. Leur principe est que l’essence de la matiere consiste dans l’étendue ; d’où effectivement il est naturel de conclure, qu’il y a de la matiere partout où il y a de l’espace ou de l’étendue. Voyez Etendue.

Mais si ce principe est faux, la conséquence qu’ils en tirent devient nulle. Sur quoi voyez l’article Matiere.

A l’article Vuide on peut voir les argumens par lesquels on prouve qu’il y a du vuide dans l’univers. Chambers.

Plein, (Jurisprud.) se dit de ce qui est entier, complet & parfait.

Ainsi plein fief est celui qui est entier & non démembré, & qui releve nuement d’un seigneur.

Plein possessoire, c’est la pleine maintenue.

Pleine puissance & autorité royale, ces termes qui sont de style dans les ordonnances, servent à exprimer une puissance des plus étendues, & à laquelle il ne manque rien pour se faire obéir.

Pleine main-levée signifie une main-levée entiere & définitive. (A)

Plein, s. & adj. (Archit.) on dit le plein d’un mur pour en exprimer le massif.

Plein, s. m. terme d’Ecrivain ; c’est une certaine largeur ou grosseur du trait de plume, selon que la plume est maniée différemment. On distingue quatre sortes de pleins : le plein parfait, le plein imparfait, le demi-plein, & le délié. Voyez Barbedor, traité de l’écriture. (D. J.)

Plein, (Marechal.) le flanc plein, les jarrets pleins, la bouche à pleine main. Voyez Flanc, Jarrets, Bouche pleine, une jument pleine. Voyez Jument.

Plein ou Plain, terme de Tanneur ; c’est une cuve profonde de bois ou de pierre enfoncée dans la terre, dans laquelle les Tanneurs mettent les peaux qu’ils veulent plamer, c’est-à-dire, dépouiller de leur poil par le moyen de la chaux détrempée dans de l’eau, pour les mettre ensuite dans la fosse au tan.

Plein, se dit aussi de la chaux même qui est dans la cuve. Ainsi on dit un plein mort, ou vieux, pour exprimer un plein dont la chaux a déja servi : plein neuf ou vif pour celui dont la chaux est nouvelle.

Les Mégissiers, Chamoiseurs & Maroquiniers se servent aussi de pleins pour préparer leurs cuirs. Voyez Mégissiers, &c.

Plein, adj. (Blason.) on dit en terme de blason, porter les armes pleines d’une maison, pour signifier en porter les armes sans les écarteler & sans brisure. On dit aussi d’une maison qui ne porte qu’un émail, ou qu’une seule couleur dans l’écu de ses armes, qu’elle porte d’or plein ou d’or pur, de gueule plein. (D. J.)

Plein, jeu du, on nomme ainsi ce jeu, parce que les joueurs ne cherchent qu’à remplir & faire leur plein, c’est-à-dire, à mettre douze dames couvertes, & accouplées dans la table du grand jan, qui se nomme au trictrac indifféremment grand jan, ou grand plein. Ce jeu ne peut être joué qu’entre deux personnes. Il se joue dans un trictac garni de trente dames, quinze de chaque couleur. On ne joue qu’avec deux dez, & chacun se sert. On dispose son jeu tout de même que si l’on vouloit jouer au trictrac ; ensuite chacun empile ses dames sur la premiere case la plus éloignée du jour. Vos dames étant empilées, il faut abattre d’abord beaucoup de bois ; ensuite coucher six dames toutes plates sur les fleches du grand jan, parce qu’il est aisé de couvrir après qu’on a du bois abattu. Il est permis à ce jeu de mettre une seule dame dans le coin, qui se nomme au trictrac coin de repos. Les doublets s’y jouent doublement comme au revertier. Il faut bien prendre garde de ne point forcer son jeu, & tâcher d’avoir toujours les grands doublets à jouer. Celui qui a couvert le plutôt toutes ses dames dans sa seconde table, a gagné la partie ; mais il n’a pas le dez pour la revenche, ainsi l’on tire à qui l’aura.