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L’Encyclopédie/1re édition/SEIGLE

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SEIGLE, secale, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante dont la fleur n’a point de pétales, & qui est disposée en épi par petits bouquets. Chaque fleur est composée de plusieurs étamines qui sortent du calice ; le pistil devient dans la suite une semence oblongue, grêle, farineuse, & enveloppée de sa balle qui a servi de calice à la fleur, & qui s’en détache très aisément. Les petits bouquets sont attachés à un axe denté, & composent un épi plus applati que celui du froment. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

En anglois rye, genre de plante qui dans le système de Linnæus, a un calice formé de deux battans concaves, contenant deux fleurs ; ces deux battans sont droits, aigus, opposés l’un à l’autre, & plus petits que les feuilles de la fleur ; cette fleur consiste en deux feuilles, dont l’extérieure se termine par une longue barbe, & l’intérieure est plate & pointue ; les étamines sont trois filets capillaires qui pendent hors de la fleur ; les bossettes sont oblongues, & fendues au bout ; le germe du pistil est de forme turbinée ; les stiles au nombre de deux, sont chevelus ; les stigma sont simples ; la fleur enveloppe étroitement la graine, s’ouvre quand elle est mûre, & la laisse tomber ; la graine est unique, oblongue, un peu cylindrique, nue & pointue. Linnæi, gen. plant. p. 17.

Dans le système des autres Botanistes, le seigle a les mêmes caracteres que ceux du blé, excepté que son épi est plus plat, toujours barbu, & son grain plus foible & plus nud.

Cette plante tient le premier rang après le froment entre les grains frumentacés ; elle porte au commencement ses feuilles rougeâtres, qui deviennent ensuite vertes comme celles des autres blés, plus longues & plus étroites que celles du froment. Elle pousse six, sept tuyaux, & quelquefois davantage à la hauteur de cinq, six & sept piés, droits, semblables à ceux du froment ; mais plus grêles, plus longs, & montans en épis plutôt que le froment.

Les fleurs naissent aux sommités des tiges par paquets, composées de plusieurs étamines jaunes, & rangées en épi. Quand ces fleurs sont passées, il succede des grains oblongs, grêles, de couleur brune en dehors, blancs & farineux en dedans, plus petits, & plus obscurs que ceux du froment.

Ses racines sont des fibres déliées ; on cultive le seigle par-tout, principalement dans les terres maigres, légeres & sablonneuses ; on le seme au printems ou en automne, d’où vient que les Botanistes appellent le premier secale vernum vel minus, & le second, secale hybernum vel majus.

Le pain qu’on fait de seigle est noir, pesant, & ne convient qu’aux gens forts & qui travaillent ; sa farine est d’usage dans quelques cataplasmes émolliens & résolutifs.

Quelquefois le seigle dégénere de sa nature, sort considérablement de son enveloppe, grossit, se recourbe, prend la figure d’une corne, se noircit à l’extérieur, & contient au-dedans une substance farineuse, très-nuisible à la santé ; c’est ce qu’on nomme blé cornu, ergot, seigle ergoté. Voyez Ergot & Seigle ergoté.

Ménage de qui la reine Christine disoit plaisamment, qu’il savoit non-seulement d’où les mots venoient, mais encore où ils alloient, n’a jamais sû d’où le mot seigle venoit, quoiqu’il en ait tiré l’origine de l’italien segala. (D. J.)

Seigle, on a observé en Suede, que le seigle diminuoit chaque année de qualité, & à la fin n’étoit plus bon à rien. M. Cederhielm a proposé en 1740, dans les mémoires de l’académie de Stockholm, un moyen qu’il dit assuré & fondé sur l’expérience pour prévenir cet inconvénient ; il consiste simplement à ne point semer du seigle dans le même champ pendant deux années de suite, de cette maniere ce grain ne s’abâtardira jamais.

Seigle, (Diete & Mat. méd.) semence farineuse & ceréale. Voyez l’article Farine & Farineux, & Semences ceréales.

Tout le monde connoît l’usage diétetique du seigle ; on en fait du pain qui tient le premier rang après celui de froment ; qui lorsqu’on n’y emploie que la fleur de la farine, & qu’on le fait avec soin, est très blanc, assez bien levé, d’un goût assez agréable, bien meilleur que le petit pain de seigle à deux liards, qu’on vend dans les rues de Paris.

Les gens aisés de la campagne, & même les bons bourgeois des petites villes, mangent un pareil pain dans quelques provinces du royaume, comme en Champagne, en Anjou, dans la Sologne, le Rouergue, &c. les paysans en font dans ces mêmes pays & dans beaucoup d’autres, un pain grossier, c’est-à-dire dans lequel ils emploient une partie du son, & qui est ordinairement mal levé, dont la croûte est brûlée & la mie mal cuite & gluante. Il n’y a que les hommes très-vigoureux, que les organes robustes des paysans, dura messorum ilia, qui puissent s’accommoder d’un pareil aliment ; il est lourd & indigeste pour tout estomac, accoutumé à une nourriture plus légere.

Le bon pain de seigle passe pour rafraichissant & légerement laxatif ; cet aliment entre très-communément dans la diete que se prescrivent à eux-mêmes plusieurs personnes qui se prétendent échauffées, ou qui ont assez appris de théorie médicinale courante pour se croire les humeurs âcres, la bile exaltée, &c. on mêle aussi quelquefois dans la même vûe, de la farine de seigle avec celle de froment pour en préparer le pain, dont on fait son usage ordinaire.

La farine de seigle s’emploie assez communément avec les quatre farines résolutives ou en leur place.

Le seigle ergoté se trouvant mêlé en une certaine quantité parmi le bon grain dont on fait du pain, produit chez les personnes qui mangent ce pain, une maladie gangreneuse des plus funestes, qui a cela de particulier qu’elle attaque principalement les extrémités inférieures ; que la gangrène se borne ou se fixe d’une maniere assez constante, & que la terminaison par la séparation spontanée du membre affecté, est fort commune.

Cette terrible maladie est endémique dans la Sologne, où le paysan qui est très-pauvre, est réduit à cette nourriture empoisonnée.

Outre les ouvrages sur les maladies causées par l’ergot, qui sont indiqués à l’article Ergot ; on trouve dans le second volume des mémoires, présentés à l’académie royale des Sciences, par des savans étrangers, un mémoire de M. Salerne, médecin d’Orleans, sur les maladies que cause le seigle ergoté. Le traitement employé contre cette espece de gangrene, n’a rien de particulier. On n’a tenté jusqu’à présent que les secours généraux, les remedes communs de la gangrene. Voyez Gangrene.

Seigle ergoté (Botan.) c’est un seigle dégénéré de sa nature, & qui est très-nuisible à la santé : on en a parlé fort au long au mot Ergot, d’après le système de M. du Tillet. Voyez donc le mot Ergot.

Suivant M. Aimen, l’ergot du seigle est la même maladie que le charbon du froment. Si ces deux maladies different l’une de l’autre, ce n’est qu’à cause de la différence qui se trouve dans l’organisation de ces deux grains. Voici l’idée que M. Aimen donne de l’ergot du seigle.

1°. Les grains ergotés, plus gros & plus longs que les autres grains sains, sortent ordinairement de la balle, se montrant quelquefois droits, & quelquefois plus ou moins courbés.

2°. A l’extérieur ils sont bruns ou noirs ; leur surface est raboteuse, & souvent on y apperçoit trois sillons qui se prolongent d’un bout à l’autre ; enfin, l’extrémité extérieure des grains est constamment plus grosse que celle qui tient à la paille ; ce bout plus renflé est quelquefois fendu en deux ou trois parties : il n’est point rare d’appercevoir à leur surface des cavités qui paroissent creusées par des insectes.

3°. Quand on rompt l’ergot, on apperçoit dans l’axe une farine assez blanche, qui est recouverte d’une autre farine rousse ou brune ; cette farine viciée s’écrase entre les doigts. M. Aimen l’a quelquefois trouvée presqu’aussi noire que la poussiere du blé charbonné.

4°. Ces grains étant mis dans l’eau, surnagent d’abord, & ils tombent ensuite au fond ; si on les mâche, ils laissent sur la langue l’impression de quelque chose de piquant.

5°. Les balles paroissent saines, quoique celles qui sont extérieures soient un peu plus brunes quand les épis sont sains.

6°. Tous les grains d’un épi ne se trouvent jamais attaqués de l’ergot.

7°. L’ergot tient moins à la paille que les bons grains.

8°. M. Aimen attribue cet état du seigle à un défaut de fécondation ; il assure qu’on ne trouve jamais de germe dans les grains ergotés.

Mais quelle que soit la cause de cette dégénération du seigle, on peut se convaincre par ce qu’en ont écrit Dodart, Langius, Fagon, de la Hire, & autres modernes, que ces grains ergotés causent d’étranges maladies dans certaines années à ceux qui se sont nourris du pain fait de la farine où il est entré beaucoup de seigle ergoté.

Il est aisé de séparer la plus grande partie des grains ergotés, par le secours du crible, parce que la plûpart de ces grains malades sont beaucoup plus gros que les grains sains. Les paysans de Sologne font cette séparation dans les années où le grain n’est pas cher ; mais dans les années de disette, ils ne veulent pas perdre les grains ergotés ; & c’est alors qu’ils sont attaqués d’une gangrene seche qui leur fait tomber les extrémités du corps, sans presque sentir de douleur & sans hémorrhagie ; ensorte qu’on a vû de ces pauvres misérables à l’hôtel-dieu d’Orléans, à qui il ne restoit que le tronc, & qui ont encore vécu en cet état pendant plusieurs jours.

Comme l’ergot ne produit pas tous les ans ces fâcheux accidens, Langius a pensé qu’il pouvoit y avoir de deux sortes d’ergots ; l’un qui n’est point pernicieux, & l’autre qui occasionne la gangrene dont nous venons de parler. Il est cependant probable qu’il n’y a qu’une espece d’ergot, & que ce grain ne fait point de mal, 1°. quand les paysans ont soin de cribler attentivement leur grain ; 2°. quand il y a naturellement peu d’ergot mêlé avec le bon grain.

On prétend encore que l’ergot perd sa mauvaise qualité quand on l’a gardé un certain tems ; mais aussi c’est pour cette raison que les paysans doivent être attaqués de cette gangrene dans les années de disette, parce qu’alors ils consomment leur récolte presque aussi-tôt qu’ils ont fini la moisson. Du Hamel, traité de la culture des terres, tome IV. (D. J.)

Seigle, (Commerce.) Le seigle se vend par last, contenant 27 sacs & demi d’Amsterdam, 19 septiers de Paris, trois quarts de septiers de Rouen, & 17 razieres de Flandres. Quand le seigle est sec, le last pese ordinairement 3300 livres ; s’il n’est pas sec, 4200 livres. Dictionn. du Comm. (D. J.)