L’Origine de nos Idees du Sublime et du Beau/PIV XX
Pichon et Depierreux, (p. 269-270).
C’est pour expliquer la véritable cause de la beauté visuelle, que j’appelle le secours des autres sens. S’il paraît que l’uni est une cause principale de plaisir à l’égard du toucher, du goût, de l’odorat et de l’ouie, on ne fera point de difficulté pour l’admettre au rang des élémens de la beauté visuelle, surtout quand nous avons montré précédemment que cette qualité se trouve presque sans exception dans tous les corps auxquels on accorde généralement la beauté. On ne peut pas douter que les corps raboteux et angulaires ne picotent et n’irritent les organes du toucher, en causant une sensation de douleur, qui consiste dans la violente tension ou contraction des fibres musculaires. Au contraire, l’application des corps unis relâche ; le léger frottement d’une main douce soulage les crampes et d’autres violentes douleurs, il porte un adoucissement sur des parties souffrantes en relâchant leur tension non-naturelle ; très-souvent ce frottement suffit pour dissiper des enflures et des obstructions. Rien ne flatte le sens du toucher comme des corps unis. Dans un lit bien uni et bien doux, qui cède avec une molle résistance, on jouit d’une grande volupté, qui dispose à un relâchement général, et, plus que toute autre chose, à celui qu’on nomme sommeil.