La Cité de Dieu (Augustin)/Livre VI/Chapitre XI

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La Cité de Dieu
Texte établi par RaulxL. Guérin & Cie (Œuvres complètes de Saint Augustin, tome XIIIp. 131).
CHAPITRE XI.
SENTIMENT DE SÉNÈQUE SUR LES JUIFS.

Entre autres superstitions de la théologie civile, ce philosophe condamne les cérémonies des Juifs et surtout leur sabbat, qui lui paraît une pratique inutile, attendu que rester le septième jour sans rien faire, c’est perdre la septième partie de la vie, outre le dommage qui peut en résulter dans les nécessités urgentes. Il n’a osé parler toutefois, ni en bien ni en mal, des chrétiens, déjà grands ennemis des Juifs, soit qu’il eût peur d’avoir à les louer contre la coutume de sa patrie, soit aussi peut-être qu’il ne voulût pas les blâmer contre sa propre inclination. Voici comme il s’exprime touchant les Juifs : « Les coutumes de cette nation détestable se sont propagées avec tant de force qu’elles sont reçues parmi toutes les nations ; les vaincus ont fait la loi aux vainqueurs ». Sénèque s’étonnait, parce qu’il ignorait les voies secrètes de la Providence. Recueillons encore son sentiment sur les institutions religieuses des Hébreux : « Il en est parmi eux, dit-il, qui connaissent la raison de leurs rites sacrés mais la plus grande partie du peuple agit sans savoir ce qu’elle fait ». Mais il est inutile que j’insiste davantage sur ce point, ayant déjà expliqué dans mes livres contre les Manichéens[1], et me proposant d’expliquer encore en son lieu dans le présent ouvrage, comment ces rites sacrés ont été donnés aux Juifs par l’autorité divine, et comment, au jour marqué, la même autorité les a retirés à ce peuple de Dieu qui avait reçu en dépôt la révélation du mystère de la vie éternelle.

  1. Voyez surtout les trente-trois livres Contre Fauste.