La Cité de Dieu (Augustin)/Livre III/Chapitre IV
Quelqu’un me dira : Est-ce que vous croyez à ces légendes ? Non, vraiment, je n’y crois pas ; et Varron même, le plus docte des Romains, n’est pas loin d’en reconnaître la fausseté, bien qu’il hésite à se prononcer nettement. Il dit que c’est une chose avantageuse à l’État que les hommes d’un grand cœur se croient du sang des dieux. Exaltée par le sentiment d’une origine si haute, l’âme conçoit avec plus d’audace de grands desseins, les exécute avec plus d’énergie et les conduit à leur terme avec plus de succès. Cette opinion de Varron, que j’exprime de mon mieux en d’autres termes que les siens, vous voyez quelle large porte elle ouvre au mensonge, et il est aisé de comprendre qu’il a dû se fabriquer bien des faussetés touchant les choses religieuses, puisqu’on a jugé que le mensonge, même appliqué aux dieux, avait son utilité.