Aller au contenu

La Fille d’Eléazar/03

La bibliothèque libre.

TROISIÈME PARTIE


XXIII

Là-bas, dans le grand Paris, Jacob continuait sa vie solitaire et studieuse. La confiance bientôt s’était faite en lui. Son assiduité à l’ouvrage, l’aisance de sa traduction, son intelligence de la pensée antique, l’acheminaient à grands pas vers le titre auquel il aspirait et lui avaient valu de ses maîtres de captivantes promesses. Déjà, sans avoir.sollicité cette faveur, il avait chanté plusieurs fois la Paracha le samedi à la synagogue, invité par le Rabbin lui-même, que sa lecture douce, aux notes justes, avait charmé. Et voici qu’un matin, on lui confiait les offices des jours courants dans ce temple de la rue de la Victoire. D’un regard sur désormais, il envisageait l’avenir.

Les semaines et les mois se succédaient avec une rapidité apaisante. Les petites lettres qui lui arrivaient du pays, à dj très longs intervalles, ne lui apprenaient rien de nouveau <• sur le quartier et sur la ville. » Il imaginait donc toujours Debourah dans la maison paternelle, Débourah de qui l’image lui était devenue si chère, si précieuse à travers l’éloignement ! Et avec plus d’ardeur, il espérait. Son titre, il le posséderait avant six mois. Il s’efforcerait bien vite de donner ses sœurs aux bous jeunes hommes qui leur étaient promis, à Joseph et David qui sans doute ne seraient pas trop exigeants, vu leur caractère Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/406 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/407 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/408 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/409 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/410 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/411 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/412 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/413 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/414 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/415 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/416 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/417 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/418 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/419 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/420 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/421 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/422 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/423 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/424 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/425 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/426 Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/427 i2i BEVUE DES DEUX MONDES. année qu’il aidait à monter la baraque. Et tous ces invités qui allaient se réunir pour manger et boire là-dessous I... Et ses tantes Aurélie et Anaïs et grand’maman Saiïar qui arrivaient ?i la fin de la semaine par le train d’Oran avec cinq petits neveux et petites nièces qu’il ne connaissait pas encore! Mon Dieu, qu’il lui tardait d’être à ce jour pour aller les chercher, en aulomobile 1 II y avait du monde et des paquets jusque sur les épaules du vieux B:ptiste, le chauffeur ! Et de partout on ne se dérangeait que pour lui, pour fêter sa communion en même temps que la Souka ! Car en respect de l’usage, il avait fallu que la cérémonie coïncidât avec quelque autre fête religieuse... Aussi, comme il allait bien les récompenser, en s’appliquant de tout son cœur à lire sur la tiba la Gémara avec la traduction ! Sans faute !... Oh! il en était sur maintenant ! Il la savait presque de mémoire, et le talmid Jacob l’avait félicité l’avant- veilie en l’embrassant encore fervemment et en lui répétant tout bas : que Dieu te laisse à ta mère ! Il avait compris qu’il lui avait fait un grand plaisir... Et l’enfant courait, gambadait, délirant de bonheur, humant l’air empli des parfums de la fleur d’oranger, du citron et de la pâte d’amandes qui s’échappaient des cuisines ouvertes, en même temps que les voix d’Esther et de Rachelle, qui s’étaient mises à chanter à tour de rôle la grâce et l’intelligence de leur petit-fils chéri... Là-haut, les pièces les plus longues étaient semées de matelas, comme pour une nuit de noce. On avait aménagé des couchettes un peu partout, jusque dans la chambrette de Debourah, qui, depuis son mariage, servait de refuge aux pro- visions d’hiver et aux confiseries préparées avec les fruits de toutes les saisons, par les patientes grand’ mères, pour ce jour de la communion d’Eléazar... Partout, c’était l’air de grande fête, c’était le sourire sur tous les visages et le bonheur dans tous les cœurs! Elissa Rhaïs, (La dcniicrc partie an prochain numéroe)