La France juive/Livre Deuxième/III

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Marpon et Flammarion (p. 289-330).


III


LA RÉVOLUTION ET LE PREMIER EMPIRE




Le Juif pendant la Révolution. — David et Marat. — Le vol du Garde-Meuble. — Les tripotages juifs et le Directoire. — Napoléon Ier était-il Sémite ? — L’Empire et la Franc-Maçonnerie — Le grand Sanhédrin. — Le noble hommage rendu par les Juifs à la Papauté et au Clergé chrétien. — Ingratitude du Juif dès qu’il a été le maître. — Les outrages à Pie IX. — Ce qu’on aurait dû faire en 1806. — L’opinion de Portalis. — L’invasion juive. — Les mesures répressives. — Le décret de 1808. — Obligation imposée aux Juifs de prendre un nom. — Les noms juifs. — Mayer, Meyer et Maier. — Le recensement des Juifs sous Napoléon Ier. — Le maréchal Ney et les Juifs. — Rupture des Juifs avec Napoléon. — Rothschild après Waterloo. — Une erreur de Michelet.




La Révolution et le Premier Empire


Ou est le Juif pendant la Révolution ? — sur les routes. Il cherche un coin qui lui convienne, il pénètre par la brèche ouverte, il prend racine dans celle société dont on vient de briser les cadres. L’occasion est bonne, en effet. Dans les villes à peu près désertes et où l’échafaud a fait tomber la tête des plus honnêtes et des plus intelligents, il n’a plus à craindre cette attention vigilante dont il aurait été l’objet dans ce vieux monde où, anciens et jeunes, chacun se connaissait pour avoir prié ensemble à l’église, se tenait par mille liens traditionnels, se soutenait, s’aimait.

Dès le début, la Révolution eut, comme la République juive d’aujourd’hui, le caractère d’une invasion. L’élément français disparut, comme de nos jours, devant un ramassis d’étrangers qui s’emparèrent de toutes les situations importantes et terrorisèrent le pays. « Toutes les écumes bouillonnèrent, dit M. Forneron[1]. La Suisse nous a donné Marat, Hulin, Clavière, Pache, Saladin ; les pays Wallons ont envové Theroigne, Prolys, Cloots, Pereyra, Fleuriot, tous meneurs de meurtriers ; les déclassés de tous langages ont été accueillis comme des frères par ceux de Paris qui prétendaient fixer les destinées de la Fiance et peut-être celles du genre humain. »

À cette liste, il faut ajouter des Polonais comme Lazowski, des Allemands comme Freys, Trenck et Charles de Hesse ; des Italiens comme Gorani, Dufourni, Manini, Pio et Rotondo ; des Espagnols comme Guzman, Miranda, Maichena. Dans ce flot envahissant, le Juif passe inaperçu.

Pereyra, l’inséparable de Marat, l’ami de Gobel, qui pousse ce malheureux aux sacrilèges comédies que l’on sait, est authentiquement Juif ; d’après une tradition constante, Simon, le bourreau de Louis XVII, était Juif[2].

On a affirmé également que David était d’origine juive, comme le nom tend à le faire supposer, et l’on s’expliquerait ainsi par une haine de race les outrages prodigués au roi et à la reine par un homme que l’ancien régime avait comblé de bienfaits.

Que dites-vous de Marat ? Mara est le vrai nom. La famille a été chassée d’Espagne, elle s’est réfugiée en Sardaigne, puis en Suisse et, ne pouvant s’avouer ouvertement juive, elle s’est faite protestante. Avec la lèpre qui le ronge, la saleté au milieu de laquelle il vit, la haine qu’il témoigne pour la société chrétienne, c’est bien là en effet un fils de judaïsants, un Marane répondant aux bûchers d’Espagne par la guillotine de France.

M. Taine a certainement entrevu cela quand il a parlé des races mêlées qui ont produit cet être monstrueux, mais, lui aussi, il a tourné autour de la question. Ce qu’il a bien mis en relief, dans sa Psychologie des chefs Jacobins[3], c’est l’état mental de Marat, qui commence par la manie de la persécution pour arriver à la manie homicide.

La folie de Marat est cependant spéciale : c’est la névrose juive. Parmi les plus hardis dans leurs doctrines, nul étranger chrétien ne s’aviserait d’aller à Londres, à Berlin, à Saint-Pétersbourg, dire tranquillement : « Il faut faire tomber 270,000 têtes dans ce pays. » On n’oserait pas ; le Juif ose.

Cette audace intellectuelle, cette impudence énorme dont nous avons parlé souvent, car nous la rencontrons à chaque pas, dans les entreprises financières comme dans les entreprises politiques, ont pour base une idée imprimée dans le cerveau depuis des siècles. La religion, qui enseigne au Juif qu’il est supérieur aux autres hommes, qu’il doit anéantir tout ce qui n’est pas lui, que tout ce qui est sur la terre lui appartient, est le puissant véhicule de ces conceptions délirantes d’une forme particulière, elle est le principe premier de ces théories, elle constitue la logique secrète et invisible de ces aberrations incompréhensibles pour les superficiels.

La phrase classique « le hideux Marat » n’est juste qu’à moitié. Sans doute, la bouche sans lèvres, contractée par une sorte de trismus, est féroce, mais les yeux sont beaux ; s’ils étincellent de fureur dans le Marat à la tribune de Simon Petit, ils sont presque doux dans le portrait de Boze et dans celui de Mme Alais. Le Marat à la Bajazet, le Marat coiffé comme d’un turban de ce foulard dont le nœud forme une aigrette, ressemble à une vieille Juive d’Orient.

Regardez attentivement au musée Carnavalet le portrait qui faisait partie de la collection Saint Albin et surtout le buste en biscuit, vous apercevrez bien l’halluciné, le névropathe ; vous y découvrirez, comme dans Robespierre, d’ailleurs, comme dans beaucoup d’acteurs de ces scènes tragiques, cette asymétrie dans les deux côtés du visage qui révèle un être déséquilibré.

La cire modelée presque immédiatement après le coup de couteau de l’héroïne, par Mme Tussaud, fort habile, on le sait, dans ce genre d’ouvrage, et qu’on en chargeait ordinairement, donne la même impression. Cette fois nous avons la main, une main aux doigts effilés, qui n’est point la poigne d’un meurtrier, d’un violent, d’un sanguin qui frappe lui-même, mais d’un scélérat tout théorique. La mort a dégagé soudain sur ce visage calmé la dominante, le fond du Juif, une grande tristesse, presque touchante.

Sans doute il y avait plus d’un Juif parmi ces organisateurs de sociétés des Jacobins qui tombaient on ne sait d’où pour dénoncer, proscrire, envoyer de braves gens à la guillotine. Je ne pense pas qu’alors on ait beaucoup songé à leur demander leurs papiers.

Quand le goût de ces études sur le mouvement juif en France, dont nous ne faisons guère dans cet ouvrage que tracer le plan général, se sera répandu, de patients chercheurs auront l’idée de fouiller les archives départementales à ce point de vue, de s’enquérir de l’époque à laquelle certains habitants sont arrivés dans le pays et, dans la plupart des cas, j’en suis convaincu, ils trouveront une origine sémitique aux familles chez lesquelles la haine du prêtre est héréditaire.

A Paris, le premier soin des Juifs, pour se montrer dignes de leur émancipation, fut de se précipiter sur les diamants de la Couronne ; ils jouèrent le principal rôle dans le vol du Garde-Meuble. J’ai raconté ailleurs ce pillage du Garde-Meuble, si obscur encore, entouré de tant de mystères[4]. On croirait voir là un symbole. Le spectacle de ces trésors, patiemment accumulés pendant d’innombrables générations, couronnes royales, calices offerts par Suger, joyaux donnés par Richelieu, souvenirs magnifiques et glorieux, semés dans les ruisseaux par les fuyards, partagés à la hâte sur la berge de la Seine, enfouis dans quelque mare, trainant dans tous les estaminets, cachés sous des loques, n’est-il pas comme l’image même de tout le passé brillant de cette France, livrée aux hordes de la révolution cosmopolite ?

Comme l’affaire du Collier montée par Cagliostro, le vol du Garde-Meuble eut le caractère propre à toutes les entreprises juives ; il se rattacha par en haut à la politique supérieure de la Franc-Maçonnerie, il servit en bas à faire gagner un peu d’argent à Israël.

Les négociations engagées depuis longtemps entre les Francs-Maçons allemands et les Francs-Maçons français, pour obtenir la retraite de l’armée prussienne, restaient en suspens faute de ressources pécuniaires ; les diamants du Garde-Meuble fournirent les sommes nécessaires à acheter Brunswick.

D’Allonville, dans ses Mémoires secrets, est très explicite sur ce point[5].

La Commune de Paris, écrivait-il, ainsi que Dumouriez n’avait pas tardé à ourdir des intrigues pour essayer de sauver sa sanglante domination. Dohm, dont le nom se rencontre dans toutes les négociations occultes de la Prusse, qui, lors des insurrections de la Belgique, s’était lié avec l’abbé Tondu, journaliste alors à Horve, et depuis ministre des relations étrangères sous le nom de Lobrun ; Dohm en correspondance avec les Jacobins français par un nommé Benoît avait, dès le début de la campagne, fait comprendre à Mme de Ritz, puis à Lucchesini et à Lombard très en crédit près de Frédéric-Guillaume, les avantages qu’il pouvait personnellement tirer d’un accord secret avec la France et ceux que cette puissance procurerait à l’ennemi naturel de l’Autriche : mais la loyauté du monarque prussien et son désir de sauver la famille royale prisonnière mettaient obstacle au vœu très prononcé de ses entours à qui, d’ailleurs, il fallait de l’or et beaucoup d’or afin de les déterminer à satisfaire les désirs de ceux que les monarques avaient en horreur.

Pour franchir ce double obstacle il était nécessaire de ruiner l’armée prussienne et les lenteurs du duc de Brunswick y pourvurent ; de ramasser assez d’argent pour corrompre les ministres prussiens, et les diamants du Garde-Meuble le fournirent.

Billaud-Varennes, parti de Paris après les massacres du 2 et 3 septembre, s’était, dès le 11, rendu à l’armée et avait entamé les négociations dont les sommes promises et non encore payées retardaient seules la conclusion, 2 à 3 millions, fruits du pillage du 10 août, étaient tout ce que la Commune de Paris possédait et ce n’était pas assez. Que ne faites-vous voler le Garde-Meuble ? s’écria Panis, et la chose eut lieu le 16 septembre, par les soins de Tallien et de Danton, ce qui procura, en diverses valeurs, une somme de trente millions.

De premières ouvertures avaient facilité la fuite de Dumouriez d’une position dans laquelle il eût sans ressources été perdu ; d’autres empêchèrent qu’il ne fût déposté lors de la canonnade de Valmy ; et du 22 au 28 les négociations furent, comme nous l’avons déjà dit, suivies avec activité.

Les diamants de la Couronne alimentèrent longtemps le commerce des Juifs d’Allemagne. Danton et Fabre d’Eglantine, que Mme Roland accuse si formellement du vol, eurent leur part du pillage. Quelques Juifs subalternes qui s’étaient laissés prendre passèrent seuls en jugement.

Un des premiers individus coupables du vol du Garde-meuble, dit le Bulletin du Tribunal criminel, qui eut à subir la sanction de la loi, fut un Juif du nom de Louis Lyre, natif de Londres et âgé de 28 ans, exerçant la profession de marchand dans le quartier Beaubourg. il avait été accusé d’avoir participé au pillage commis dans les nuits des 11, 13 et 15 septembre et d’avoir vendu, dans le courant de ce mois, à un certain Moyse Trénel, des perles et des diamants, sa part dans le produit du vol. Il laissa un testament de mort, et le 13 octobre 1792, à dix heures et demie du soir, il subissait sa peine, montrant un courage et un sang froid dignes d’une meilleure cause.

Un autre Juif, demeurant rue des Vieux Augustins, Del campo, qui se faisait appeler Deschamps, fut également exécuté.

Tous les Juifs de Paris étaient dans l’affaire. Nous retrouvons dans les débats les Dacosta, toujours disposés à bien faire, Lyon Rouef, marchand forain et aubergiste, rue Beaubourg, ainsi que sa femme Leyde, Israël, Aaron Hombergue, les Anglés père et fils qui vendent au Juif Benedict Salmon une grande quantité de diamants. Ce Salmon avait déjà profité de l’occasion pour acheter 150,000 francs de perles fines. Quelques-uns paraissent avoir été plus craintifs ou plus scrupuleux que Trénel et Salmon. Nous lisons dans le Thermomètre du jour, rédigé par Dulaure et B. Chapet, à la date du lundi 24 septembre 1792.

« Une trentaine de diamants du Garde-meuble ont été remis dans une lettre au secrétaire-greffier adjoint de la Commune par les sieurs Anselme et You, Juifs, auxquels on les avait proposés pour les acheter. »

Les diamants de la Couronne, en tout cas, n’ont pas de chance avec les républicains et avec les Juifs. La première République les laisse ou les fait voler ; l’Empire et la Monarchie reconstituent ce merveilleux trésor, sous la République actuelle, le Juif Lockroy s’abouche avec les marchands au nez crochu qui se réunissent dans le sous sol du café de Suède et, pour faciliter à Israël une opération lucrative, propose et fait accepter une loi autorisant la vente de tous ces souvenirs du passé.


Ce furent les Juifs qui organisèrent le pillage des églises[6], la destruction des chefs-d’œuvre inspirés par la foi au génie de nos imagiers du moyen âge. Quelle plus magnifique occasion de satisfaire en même temps ses haines et ses cupidités, d’outrager le Christ et de s’enrichir ! Toute l’argenterie des églises, acquise à vil prix, passa entre ces mains rapaces. Le Trésor public, Cambon le constate lui-même, n’eut presque aucune part dans ces spoliations.

Souvent les Juifs achetèrent des églises entières avec une poignée d’assignats et, quand le calme fut rétabli, les louèrent très cher aux fidèles. J’ai raconté déjà comment ils avaient acheté et démoli l’église de Nicolas Flamel, Saint-Jacques de la Boucherie. Deux Juifs, Ottevuere et Stevens, se firent adjuger l’église de Saint-Leu-Saint- Gilles, dans la rue Saint-Denis, et, en 1802, la cédèrent en location aux abbés Morel et Girard qui la désservirent. D’année en année le loyer s’éleva de 3,000 à 10,000 francs. Enfin l’église fut rachetée par la Ville, moyennant 209,312 francs conformément au décret du 120 juillet 1810.

Les mobiliers d’émigrés étaient une autre occasion d’opérations fructueuses. Les membres de la Convention eux mêmes se concertaient avec des Juifs pour s’approprier les dépouilles des proscrits.

Dans les Crimes des sept membres des anciens comités de Salut public et de Sûreté générale, Lecointre, de Versailles, raconte qu’à la vente du château de Montbéliard, son collègue Bernard s’est entendu avec un Juif, nommé Trévoux, pour se faire adjuger, irrégulièrement et presque pour rien, des objets d’une grande valeur.

Il aurait en outre distrait de l’inventaire et fait emballer pour son propre compte une table en marbre bleu, des livres précieux, etc. Il se serait fait attribuer d’office, sans criées, une voiture, 18 lustres, 42 flambeaux de métal, 4 pieds de colonne.


La France corrompue et tripoteuse du Directoire offrait aux Juifs une proie presque aussi belle que la France de la troisième République.

Les Juifs, écrit Capefigue, dans son Histoire des Grandes Opérations financières, une fois Paris ouvert à leurs spéculations, y vinrent de toutes parts et y prirent de toutes mains ; ils débutèrent, d’abord timides, par le petit commerce, la fourniture des chevaux et la petite usure, l’agiotage limité sur les assignats ; ils n’avaient pas encore le pied assez ferme sur le sol pour oser la banque qu’ils laissaient aux Genevois ; ils se contentèrent d’acheter les vieux meubles des châteaux, les reliques des églises, les bijoux confisqués, de prêter quelques louis aux émigrés en échange de bonnes valeurs. Dans quelques départements, ils s’étaient établis sur le sol des cultivateurs, comme des corbeaux sur leur proie ; dans la haute et basse Alsace et dans la Lorraine, ils devenaient maîtres de la propriété foncière par des prêts sur hypothèque et des actes à réméré. A Paris, ils inondèrent les quartiers autour du Temple, devenu, en quelque sorte, leur ghetto. Qu’on les laissât marcher en liberté et dans une période de temps, ils seraient les maîtres du marché industriel et de l’argent.

Le Juif, alors moins dégrossi qu’aujourd’hui, est moitié brigand, moitié banquier ou plutôt commence par être brigand avant de s’établir banquier. C’est le temps du fameux Michel, Michel l’assassin, dont les petites filles ont fini par épouser des ducs et des princes, sans qu’ait disparu encore la sinistre légende qui s’attache à ce nom. Michel avait attiré dans un château des environs de Paris une famille d’émigrés qu’il avait égorgée pour s’emparer de l’argent et des bijoux qu’elle rapportait avec elle. Acquitté par un jury gagné, en dépit de preuves accablantes qui ont disparu avec le dossier complet de cette affaire, il n’en fut pas moins condamné par l’opinion publique.

Simon, qui entretient Mlle Lange, l’hétaïre à la mode, scandalise la ville de son faste et tout Paris bat des mains quand, au Salon de l’an VII, Girodet, dans un coin de son tableau de Danaë, représente le millionnaire en dindon gloussant et la queue en éventail.

Les Juifs cependant inauguraient cette politique qui va désormais être la leur : faire succéder à une révolution où l’on pêche en eau trouble le règne momentané d’un sauveur quelconque qui ratifie par la possession, sous un gouvernement régulier, la propriété de ce qu’on a dérobé. Le roi légitime les eût gênés alors, ils empêchèrent par tous les moyens son retour, il leur fallait un Schilo, comme l’avait été Cromwell, un Messie temporel, l’homme était tout prêt.

Napoléon était-il d’origine sémitique ? Disraeli l’a dit, l’auteur du Judaïsme en France le soutient. Il est certain que les îles Baléares et la Corse servirent de refuge à beaucoup de Juifs chassés d’Espagne et d’Italie qui finirent par se convertir au christianisme et, comme cela avait lieu en Espagne, prirent le nom des grands seigneurs qui leur avaient servi de parrain, Orsini, Doria, Colonne, Bonaparte. Michelet qui, avec son organisation de voyant, avait l’intuition de certaines choses profondes sur lesquelles il n’osait trop insister à cause de son parti, a touché ce point à deux ou trois reprises. « J’ai dit, écrit-il notamment dans son Dix-neuvième siècle, qu’un spirituel Anglais voudrait faire croire Bonaparte Juif d’origine. Et comme la Corse fut autrefois peuplée par les Sémites d’Afrique, Arabes, Carthaginois ou Maures, Maranes, disent les Espagnols, il semble appartenir à ceux-ci plus qu’aux Italiens. »

Franc-maçon certainement et très avant dans les secrets de la Maçonnerie, Jacobin farouche, ami de Robespierre jeune, Napoléon avait tout ce qu’il fallait pour jouer le rôle qu’on attendait de lui. La finance l’adopta, les Michel, les Cerfbeer, les Bedarride le commanditèrent lors de sa première expédition en Italie au moment où les caisses de l’État étaient vides. Il n’avait qu’à paraître pour que tout lui réussit : il prenait en un jour Malte l’imprenable[7], pour revenir en France faire le 18 Brumaire, il traversait tranquillement la Méditerranée sillonnée par les croisières anglaises. La Franc-Maçonnerie avait organisé autour de lui cette espèce de conspiration d’enthousiasme qui flotte dans l’air, se communique de proche en proche et finit par gagner tout un pays. Nous avons eu une répétition de cette espèce de carte forcée avec Gambetta, ce gros homme gonflé de mots qui avait été inepte et malhonnête pendant la guerre et que la France crut un moment être l’homme nécessaire.

Napoléon s’acquitta des obligations qu’il avait envers les Juifs, et s’occupa de faire entrer définitivement dans les lois l’égalité si inconsidérément accordée aux Israélites par la Constituante.

Le 26 juillet 1806, une première assemblée de députés Juifs se réunit à l’Hôtel de Ville, elle était composée des principales notabilités et de quinze rabbins sous la présidence de M. Furtado, de Bordeaux.

Un décret du 22 juillet avait chargé MM. Pasquier, Portalis et Molé de suivre, comme commissaires, toutes les affaires concernant les Juifs. L’assemblée devait résoudre un certain nombre de questions religieuses qui se résumaient en ceci : les Juifs, en acceptant les bénéfices de l’égalité, c’est à dire en entrant dans une société toute constituée à la constitution de laquelle il, n’avaient eu aucune part, daigneraient-ils modifier ce que leur religion avait de contraire à cette société ?

Le programme contenait notamment les interrogations suivantes :

1° La soumission aux lois de l’Etat en matière civile et politique est-elle un devoir religieux ?

2° La polygamie et le divorce sont-ils généralement consacrés et licites chez les Ebreux ?

3° Leur est-il permis de répondre aux appels du service militaire, de cultiver la terre, de s’occuper de travaux mécaniques ?

4° Les Juifs regardent-ils les chrétiens comme frères ou comme étrangers ?

5° L’usure est-elle autorisée à l’égard des nations étrangères ?

Les choses n’allèrent pas aussi aisément qu’on l’aurait cru. Les députés Juifs, sans caractère religieux, estimaient sans doute qu’il fallait tout promettre, quitte à ne rien tenir après, mais les rabbins paraissent avoir été animés de certains scrupules et avoir voulu défendre intégralement la vieille loi mosaïque qui n’assimile jamais le chrétien, le goy, le nacri à un Juif[8],

Un document des Archives : 44Note sur le Conseil des Ministres, séance du 5 septembre 180644, indique certaines difficultés intérieures[9].

Il y a dans l’assemblée quinze rabbins, si ce nombre ne suffit pas, on en peut faire venir trente autres. On joindrait à ces quarante-cinq rabbins trente des principaux membres de l’assemblée, et ces soixante et quinze individus formeraient le Sanhédrin, mais l’assemblée telle quelle est resterait en entier, elle serait seulement augmentée de trente rabbins nouvellement appelés… Ce grand nombre encouragerait les rabbins timides et agirait sur les rabbins fanatiques, en cas de résistance extraordinaire, en les plaçant entre la nécessité d’adopter les explications ou le danger d’un refus dont la suite serait l’expulsion du peuple juif. Ces querelles de famille conduiraient vraisemblablement au but qu’on se propose.

Mais avant de faire venir, pour mettre l’assemblée dans le cas de former dans son sein le grand Sanhédrin, un nombre aussi considérable de rabbins, il faut s’assurer si les quinze rabbins, députés actuels, seront de l’opinion des réponses faites aux questions et à quel point ils tiennent à des vues théologiques. Il serait, en effet, fort ridicule de faire venir à grands frais trente nouveaux rabbins pour déclarer que les Juifs ne sont pas les frères des Français.

Il y eut certainement force négociations secrètes pour arriver à une entente. La lettre adressée à l’Empereur, à la date du 1er avril 1806, par Molé chargé de cette épineuse affaire, en fait foi.

Ayant reçu de quelques juifs des ouvertures délicates et confidentielles, que je crois de nature à être soumises directement à Votre Majesté, j’en sollicite un moment d’audience particulière. Je la supplie de ne voir dans ma demande qu’une preuve de mon zèle ardent pour son service et de mon profond désir de seconder ses desseins dans la mission qu’elle m’a confiée.

Sire, de votre Majesté impériale et royale, le très humble,
très dévoué et très fidèle sujet,
Math. Molé.

A la suite de ces pourparlers, les réponses de l’assemblée générale des députés Juifs, conformes à celles que l’Empereur attendait, ayant été arrêtées dans les séances des 4, 7 et 12 août, M. Molé prit la parole le 18 septembre, pour annoncer la convocation du grand Sanhédrin. La mission de ce Sanhédrin, composé de soixante-dix membres sans compter le président, devait être de convertir en décision doctrinale les réponses déjà rendues par l’assemblée.

« Sa Majesté, avait dit Molé, a voulu qu’il ne restât aucune excuse à ceux qui ne deviendraient pas citoyens, elle vous a assuré le libre exercice de votre religion et la pleine jouissance de vos droits politiques, mais, en échange de l’auguste protection qu’elle vous accorde, elle exige une garantie religieuse des principes énoncés dans vos réponses. »

Les deux tiers des membres du Sanhédrin devaient être des rabbins parmi lesquels prendraient place d’abord ceux qui avaient fait partie de la précédente assemblée, les autres membres devaient être désignés par cette assemblée au scrutin secret. Le grand Sanhédrin se réunit le 4 février 1807 et ses séances durèrent jusqu’au 4 mars de la même année[10].

Elle était faite pour frapper l’imagination, la réunion, après tant de siècles, des descendants de cette race si longtemps proscrite. Pour la première fois depuis la destruction du Temple, un Sanhédrin rassemblait les membres de cette famille errante dans une ancienne chapelle qui, avant de devenir une annexe de l’Hôtel de Ville, avait été longtemps consacrée à saint Jean, le disciple bien aimé du Christ.

Les représentants d’Israël semblent avoir été émus par la solennité de ce spectacle.

Un de leurs premiers actes eut un caractère de grandeur qui n’est point habituel à ce qui sort d’eux.

Ils se rappelèrent les longues persécutions, les années innombrables qui s’étaient succédé toujours emplies d’angoisses aussi vives, toujours menacées de périls aussi redoutables. Ils se souvinrent que, pendant plus de douze cents ans, un homme seul avait constamment parlé pour eux, avait déclaré sans cesse qu’il fallait respecter la liberté de leur conscience, était intervenu auprès des rois pour protéger les persécutés, avait donné l’exemple de la tolérance en accordant aux Juifs, dans ses États, un traitement meilleur que partout ailleurs. Cet homme, toujours le même dans sa doctrine, toujours semblable dans sa bonté, cet homme qui ne meurt jamais, était le Vicaire de Jésus Christ[11]

Après tant d’années, les Juifs, enfin tranquilles, voulurent remercier le représentant du Ciel qui s’était fait si souvent l’avocat des proscrits près des puissants de la terre. Ces remerciements, les membres du Sanhédrin les formulèrent dans une adresse qui est certes une des pages honorables de l’histoire d’Israël.

Dans la séance du 5 février 1807, sur la proposition de M. Avigdor, on arrêta le projet d’adresse suivant :

Les députés israélites de l’empire de France et du royaume d’Italie au Synode hébraïque décrété le 30 mai dernier, pénétrée de gratitude pour les bienfaits successifs que le clergé chrétien a rendus dans les siècles passés aux Israélites de divers États de l’Europe ;

Pleins de reconnaissance pour l’accueil que divers Pontifes et plusieurs ecclésiastiques ont fait dans différents temps aux Israélites de divers pays, alors que la barbarie, les préjugés et l’ignorance réunis persécutaient et expulsaient les Juifs du sein des sociétés ;

Arrêtent :

Que l’expression de ces sentiments sera consignée dans le procès-verbal de ce jour pour qu’elle demeure à jamais comme un témoignage authentique de la gratitude des israélites de cette Assemblée, pour les bienfaits que les générations qui les ont précédés ont reçu des ecclésiastiques des divers pays d’Europe[12].

Ce louable mouvement n’a pas duré. Quand le Pape fut persécuté à son tour, les Juifs l’accablèrent d’outrages dans leurs journaux, ils pillèrent à Rome les effets des soldats qui étaient venus le défendre, ils organisèrent, ce qui peint la race, une ignoble émeute contre le cercueil de Pie IX.

Il convient de rapprocher la déclaration du 5 février 1807 du récit des infamies commises par les Juifs de Rome, récit fait précisément par deux Israélites convertis et devenus prêtres, les abbés Leman, qui ont publié une brochure sous ce titre : Lettre aux Israélites dispersés sur la conduite de leurs coréligionnaires de Rome durant la captivité de Pie IX au Vatican.

Le 20 septembre 1870, racontent les frères Leman, les zouaves pontificaux, défenseurs de Rome, reçurent l’ordre de Pie IX de ne plus continuer leur héroïque défense, et ils quittèrent les remparts pour se réunir, tristes, isolés, un à un, sur la place du Vatican en passant par le pont Saint-Ange. Leurs amis s’empressaient de leur apporter des vêtements civils. Or, à la tête du pont et dans tout son parcours, il y avait des troupes de Juifs qui, au milieu des clameurs et des insultes des révolutionnaires contre les zouaves, leur arrachaient, à eux-mêmes ou aux personnes qui les suivaient, les paquets de voyage, les vêtements, tout ce qu’ils pouvaient saisir, et, comme s’il s’agissait non de rapine mais de politique, les jetaient pardessus le pont dans le Tibre. Mais en bas il y avait leurs mariniers qui, avec leurs barques, recueillaient tout ce qui y était jeté.

Les Juifs pillèrent ensuite les casernes et enlevèrent tout, armes, uniformes, jusqu’à la literie et l’ameublement.

L’an dernier (1872), ajoutent encore les mêmes auteurs, il y eut, à la porte du Gésu, des scènes d’abomination et de férocité. On hurlait contre les chrétiens qui, paisibles et inoffensifs, S’étaient rassemblés pour prier ensemble. A la sortie, on les frappa. Eh bien ! Derrière ces gens qui hurlaient et qui frappaient on reconnaissait les Juifs du ghetto. On les reconnaissait ! Nous avons causé nous-mêmes avec des personnes qui les connaissaient par leurs noms et qui les ont aperçus du haut des fenêtres qui dominent la place du Gesu. Elles les ont vus lancer des balles de plomb « grosses comme des noix, de façon à provoquer l’effusion du sang et attiser la haine. »

Lorsque nous avons demandé des renseignements sur les scènes ignobles qui se sont passées devant le Quirinal et ailleurs, où les choses saintes ont été tournées en ridicule, les prêtre insultés, les madones souillées, les saintes images lacérées, on nous a toujours répondu : les buzzuri et les Juifs !

L’année dernière n’avons-nous pas vu le Juif Lévy, auteur d’un pamphlet odieux contre le Pape, faire déclarer, par le Congrès anticlérical qu’il avait organisé, que la prochaine réunion du congrès aurait lieu à Rome pour mieux braver, l’auguste captif du Vatican ?

Inexorable pour réclamer ce qu’on lui doit, Israël a une singulière façon de payer ses dettes !


En 1807, en tout cas, le cœur des Israélites débordait de reconnaissance. Les actions de grâces en hébreu votées à Napoléon semblent traversées par un souffle de poésie biblique. On croirait entendre un prophète de Sion remerciant un de ces Sin-Akké-Irib ou de ces Schal-Manou-Asir qu’on aperçoit dans les bas-reliefs ninivites précédés de grands Argyraspides et enfonçant dans la poitrine des vaincus

La roue aux dents d’acier au char écaillé d’or.

Napoléon, tous les rois ont été dissipés devant toi, leur sagesse s’est évanouie et ils ont chancelé comme un homme ivre. Au jour d’Austerlitz tu as brisé toute la force de deux Empereurs, la mort marchait devant toi et tu traçais à sa fureur le chemin qu’elle devait suivre, sans s’en écarter. Les générations passées que la mort a dévorées, que l’enfer a englouties ont dit au bruit de tes exploits : parmi les guerriers, parmi les braves, jamais aucun ne lui a ressemblé. Dieu l’a choisi pour gouverner les peuples, lui seul a fait autant de grandes choses que tous les héros des siècles passés.

En invitant les Israélites à se conformer aux lois du pays, en leur demandant « de faire tout ce qui dépendrait d’eux pour acquérir l’estime et la bienveillance de leurs concitoyens, » le Sanhédrin n’avait pu modifier ce tempérament juif sur lequel rien n’a prise, ni les mauvais procédés, ni les bons.

La lutte contre le Sémitisme, qui passa à peu près inaperçue au milieu d’un si grand nombre d’événements prodigieux accumulés en quelques années, n’en tient pas moins une place considérable dans le règne de Napoléon.

Par un phénomène, qui fera le perpétuel étonnement de l’histoire, le petit sous-lieutenant d’artillerie avait fait place soudain à un chef d’empire ayant, non pas seulement le sens de l’autorité totale, absolue, mais les traditions même des monarques d’antique dynastie. Ce parvenu, on est forcé de l’avouer, est le dernier souverain qui ait réellement gouverné la France.

Celui-là certes, pas plus que Bismarck, ne ressemble à ces rois mystiques que les fantaisistes historiens de l’école juive nous montrent poussés à la persécution par le zèle des moines. Il était exclusivement frappé du péril que faisait courir au pays cette infiltration incessante dans l’organisme social d’un élément de décomposition et de trouble.

Tous les hommes éminents de l’époque reconnaissaient, d’ailleurs, que la Constituante avait agi, dans cette question comme dans beaucoup d’autres, avec la précipitation et la légèreté qu’elle apporta à tout.

On eût pu faire sans doute quelque chose pour le Juif, s’inspirer, par exemple, de cette sagesse romaine qui distinguait entre le Citoyen romain et le Latin junior auquel on laissait la disposition de ses biens, auquel on permettait même d’étaler un luxe insolent, mais dont les richesses après la mort revenaient à l’Etat par moitié. Appliqué à des familles comme les Rothschild, ce système aurait donné d’excellents résultats et aurait fait rentrer dans le domaine public les excédants de bénéfices perçus, sans empêcher ces races mercantiles par excellence d’obéir à leur vocation pour les trafics d’argent. Rome avait encore le « Peregrinus » auquel il était défendu d’approcher de Rome, mais, aux plus mauvais jours de son histoire, l’affranchi n’était pas admis à entrer dans la curie d’une cité provinciale. Jamais le Peuple-roi n’aurait compris qu’un étranger, même naturalisé comme Spuller ou Gambetta, fût l’égal du fils des vieux citoyens qui avaient fondé la grandeur romaine.

Au moment de la réunion des députés Juifs en 1806, un jurisconsulte illustre, dont la haute et sereine intelligence était étrangère à toute influence fanatique, Portalis, se prononçait très clairement sur ce point dans un mémoire qui n’a pas moins de 39 pages et qui est un chef-d’œuvre d’impartialité et de bon sens.

L’Assemblée constituante avait cru que, pour rendre les Juifs bons citoyens, il suffisait de les faire participer indistinctement et sans conditions à tous les droits dont jouissent les citoyens français, mais l’expérience a malheureusement prouvé que si on devait pas manqué de philosophie on avait manqué de prévoyance et que dans certains milieux on ne peut se permettre de promulguer utilement de nouvelles lois qu’autant que l’on a travaillé avant tout à préparer et à former de nouveaux hommes.

L’erreur vient de ce qu’on n’a voulu voir qu’une question de tolérance religieuse dans le problème à résoudre sur l’état civil des juifs en France[13].

Les Juifs ne sont pas simplement une secte, mais un peuple. Ce peuple avait autrefois son territoire et son gouvernement : il a été dispersé sans être dissous, il erre sur tout le globe pour y chercher une retraite et non une patrie, il existe chez toutes les nations sans se confondre avec elles, il ne croit vivre que sur une terre étrangère.

Cet ordre de choses tient à la nature et à la force des institutions judaïques. Quoique tous les États aient en général un même objet, celui de se conserver et de se maintenir, chaque État en a pourtant un qui lui est particulier. L’agrandissement était l’objet de Rome, la guerre celui de Lacédémone, la culture des lettres celui d’Athènes, le commerce celui de Carthage et la religion celui des Hébreux.

C’est dans la nature d’une telle législation que les philosophes et les savants ont cherché l’explication de sa durée. On comprend en effet que, quand chez un peuple la religion, les lois, les mœurs et les usages de la vie sont la même chose, il faudrait, pour opérer quelque révolution dans les opinions et dans les coutumes de ce peuple, pouvoir changer à la fois toutes les institutions et toutes les idées reçues dont son existence se compose. Cela ne se peut, nous en avons, on quelque sorte, la preuve dans l’éternité même du peuple dont nous parlons.

La religion n’est ordinairement relative qu’aux choses qui intéressent la conscience, chez les Juifs la religion embrasse tout ce qui fonde et régit la Société. De là les Juifs forment partout une nation dans la nation, ils ne sont ni Français, ni Allemands, ni Anglais, ni Prussiens, ils sont Juifs.

De ce que les Juifs sont moins une secte qu’un peuple, il suit qu’il n’était pas prudent de les déclarer citoyens sans examiner s’ils pouvaient et s’ils voulaient même franchement le devenir ;

Il suit encore qu’il ne saurait être déraisonnable ou injuste de soumettre à des lois exceptionnelles une sorte de corporation qui, par ses institutions, ses principes et ses coutumes, demeure constamment séparée de la société générale.

En assimilant, sans précaution, les Juifs à tous les autres Français, on a appelé une foule de Juifs étrangers qui ont infesté nos départements frontières et on n’a point opéré sur la masse des Juifs plus anciennement établis en France les heureux changements que l’on se promettait du système de naturalisation qui avait été adopté. A cet égard, les circonstances présentes parlent suffisamment d’elles mêmes.

Les Juifs, à ce moment, n’avaient pas encore inauguré leur nouvelle manière, le grand mouvement financier qui sera, comme on dit « la gloire du XIXe siècle, » et qui consiste à faire aller, venir, revenir l’argent, danser et miroiter l’or, à chiffonner et à froufrouter les billets bleus de façon à ce que le regard papillotant et troublé par ces tours de passe-passe n’aperçoive pas que ce mouvement est très simple et qu’il consiste à introduire dans les poches de l’Israélite ce qui est dans les poches du chrétien, ils n’opéraient pas encore sans douleur, ils s’en tenaient au vieux jeu, à la classique usure et, délivrés de toutes les entraves monarchiques, armés de leurs droits de citoyens, ils s’en donnaient à cœur joie.

La malheureuse Alsace râlait sous le Vampire, priait, suppliait, criait, s’agitait, menaçait. Le brave Kellermann, qui avait conduit tant de charges héroïques, sentait son courage l’abandonner devant ce flot de Juifs Allemands qui s’abattaient sur l’infortunée province qu’il gouvernait.

Eperdu, il versait ses chagrins dans le sein de l’Empereur et il écrivait de Colmar, à la date du 23 juillet 1806 :

La masse des créances pour lesquelles ils ont obtenu des inscriptions est effrayante.

Les usures des Juifs sont si énormes qu’elles ont donné lieu à un délit qui ne s’était pas encore présenté dans les cours criminelles de l’Alsace. Ces cours ont eu à juger, depuis quelque temps, des causes pour de fausses quittances qu’on opposait aux Juifs dont la mauvaise foi a seule inspiré l’idée.

Les corps administratifs et judiciaires ont dû transmettre au ministre de Votre Majesté des détails plus étendus sur les maux, qui résultent de l’usure et de la mauvaise foi des Juifs.

L’empereur, avec cette attention qu’apportait aux moindres choses ce puissant cerveau qui embrassait le gouvernement du monde, non point dans son ensemble seulement, mais dans les plus minutieux détails, se faisait adresser des rapports constants sur cette question[14].

Le rapport qui lui fut envoyé à Firckenstein, le 25 août 1807, par Champagny[15], et sur lequel nous lisons : Objet urgent, renvoyé au Conseil d’État, section de l’intérieur, est incontestablement la base du fameux décret du 17 mars 1808.

Le premier moyen de prévenir ces désordres, disait le ministre, c’est de mettre l’autorité en mesure d’interdire toute espèce de trafic à l’homme qui aurait ainsi abusé de la facilité laissée par les lois pour les transactions civils. Ainsi les Juifs du dehors, sur les mœurs desquels on ne pourrait avoir de garanties positives, ne seront admis à venir trafiquer en France qu’après avoir dûment justifié de leurs facultés pour le faire honnêtement, car une présomption fondée porte à croire qu’un Juif incapable de remplir cette condition ne viendrait chercher en France qu’à exercer une industrie illicite et, sans doute, rien ne serait plus contraire aux intentions de Votre Majesté que de voir des Juifs étrangers abuser ainsi, à leur profit, de la protection qu’elle daigne accorder aux Juifs de ses Etats. Ainsi encore aucun Juif, autres que ceux faisant le commerce en gros, manufacturiers ou exploitant par eux-mêmes une propriété rurale, ne pourra faire de commerce sans être muni d’une autorisation expresse, qui sera donnée par l’administration locale, qui pourra être révoquée, et qui toujours dépendra de la certitude acquise qu’il n’abuse pas de ce commerce prétendu, pour de honteuses spéculations. Ces autorisations devront être visées lorsque le Juif trafiquera hors de son domicile, les colporteurs se trouveront soumis, à une surveillance particulière et on empêchera les juifs d’égarer la bonne foi hors des lieux où ils sont particulièrement connus.

Le décret du 17 mars 1808 était conforme à ces indications.

L’article 7 portait :

Désormais et à dater du 1er juillet prochain, nul Juif ne pourra se livrer à aucun commerce, négoce, trafic quelconque, sans avoir reçu, à cet effet, une patente du préfet du département, laquelle ne sera accordée que sur des informations précises et que sur un certificat : 1° du conseil municipal constatant que ledit Juif ne s’est livré à usure, ni à aucun trafic illicite, 2° du Consistoire de la synagogue, dans la circonscription de laquelle il, habite, attestant son bon ordre et sa probité. Cette patente sera renouvelée tous les ans[16].

L’article 16, dans le but d’arrêter le pullulement, disait :

Aucun Juif non actuellement domicilié dans nos départements du Haut et du Bas-Rhin ne sera désormais admis à y prendre domicile. Aucun Juif non actuellement domicilié ne sera admis à prendre domicile dans les autres départements de notre Empire, que dans le cas où il aurait fait l’acquisition d’une propriété rurale et se livrerait à l’agriculture, sans se mêler d’aucun commerce, négoce ou trafic.

L’article 17 stipulait, en outre, que la population juive ne serait point admise à fournir de remplaçants pour la conscription, tout Juif conscrit devait le service personnel.

Napoléon semble avoir été guidé dans ces mesures par une pensée unique, le désir de voir ses Juifs. En ceci, le sûr instinct de son merveilleux génie ne le trompait pas : Tout Juif qu’on voit, tout Juif avéré est relativement peu dangereux, il est parfois même estimable, il adore le Dieu d’Abraham, c’est un droit que nul ne songe à lui contester et comme on sait à quoi s’en tenir sur son compte, il est possible de le surveiller.

Le Juif dangereux, c’est le Juif vague, socialiste en paroles, agent provocateur, espion de l’étranger, il trompe à la fois les ouvriers qui se fient à lui, la police qui le paie et le gouvernement qui l’emploie, il pousse les naïfs dans la Commune, les dénonce ensuite aux Versaillais, s’éclipse quand on veut tirer l’affaire au clair et reparaît quand le calme s’est fait pour déclarer qu’il a souffert pour la bonne cause, c’est l’animal nuisible par excellence et en même temps l’animal insaisissable, il est fourré, en effet, dans tant de choses, qu’on ne sait par quel bout le prendre. Si vous l’arrêtez dans une émeute, il se réclame de sa patrie, la victorieuse Allemagne, qui sait faire respecter ses enfants, si vous essayez de l’expulser, il vous prouve qu’il a été naturalisé à un moment donné. Soldat de l’émancipation des peuples quand la démocratie est en haut, défenseur de l’ordre quand la réaction triomphe, il est le plus puissant agent de trouble que jamais la terre ait produit, et il traverse ainsi la vie avec la joie que donne aux Juifs la conscience d’avoir, sous des formes diverses, toujours fait du mal à des chrétiens.

Pour voir ses Juifs, Napoléon exigea d’abord qu’ils prissent des noms.

Le 20 juillet 1808, paraissait un décret concernant les Juifs qui n’ont pas de nom de famille et de prénoms fixes. En voici les principaux points :

Article 1er : — Ceux des sujets de notre Empire qui suivent le culte hébraïque et qui, jusqu’à présent, n’ont pas eu de nom de famille et de prénoms fixes seront tenus d’en adopter, dans les trois mois de la publication de notre présent décret, et d’en faire la déclaration par devant l’officier de l’état civil de la commune où ils sont domiciliés.

Article 2e : — Les Juifs étrangers qui viendraient habiter dans l’Empire et qui seraient dans le cas prévu par l’article 7 er seront tenus de remplir les mêmes formalités dans les trois mois qui suivront leur entrée en France.

Article 3e : — Ne seront admis comme noms de famille aucun nom tiré de l’Ancien Testament, ni aucun nom de ville. Pourront être pris comme prénoms ceux autorisés par la loi du 1 germinal an XI[17].

Article 4e : — Les Consistoires en faisant le relevé des Juifs de leur communauté seront tenus d’en justifier et de faire connaître à l’autorité s’ils ont individuellement rempli les conditions prescrites par l’article précédent. Ils seront également tenus de surveiller et de faire connaître à l’autorité ceux des Juifs de leur communauté qui auraient changé de nom, sans s’être conformés aux dispositions de la susdite loi.

Seront exceptés des dispositions de notre présent décret les Juifs de nos États ou les Juifs étrangers qui viendront s’y établir lorsqu’ils auront des noms et prénoms connus, et qu’ils ont constamment portés, encore que lesdits noms et prénoms soient tirés de l’Ancien Testament ou des villes qu’ils ont habitées.

Une circulaire aux préfets, signée du ministre de l’intérieur Crettet et datée du 8 septembre 1808, précisa davantage les formalités à accomplir.

Le décret du 20 juillet dernier, disait cette circulaire, impose aux Juif qui n’ont pas de noms de famille ou de prénoms fixes l’obligation d’en adopter.

Il importe que les Juifs soient informés de ce qu’ils ont à faire et que l’exécution du décret ait lieu d’une manière uniforme dans toutes les communes où il en existe.

Je vous invite à prendre un arrêté dans lequel sera imprimé le décret et qui prescrira les dispositions suivantes :

Un registre double, timbré et paraphé par le président du tribunal de première instance, sera ouvert à la mairie de chaque commune où il y a des Juifs, pour recevoir la déclaration de tous ceux qui sont Français et qui sont désignés dans les articles 1 et 5 du décret.

Tout majeur devra faire lui-même sa déclaration, les pères, et à leur défaut les

mères, la feront pour leurs enfants mineurs, les tuteurs pour leurs pupilles.

Le fils majeur sera tenu de prendre le nom de famille de son père existant, les frères et sœurs majeurs n’ayant plus ni père ni mère adopteront tous le même nom de famille.

La déclaration sera faite en ces termes :

Par devant nous, maire de la commune de……canton de…., arrondissement de……, département de…., s’est présenté Aaron qui a déclaré prendre le nom de…. pour nom de famille, pour prénom celui de……. et qui a signé avec nous le…. 1808.

Cette formule sera la même pour les Juifs qui sont dans le cas de l’article 5 du décret en substituant le mot conserver au mot prendre.

Elle sera suivie par les pères ou à défaut par les mères d’enfants mineurs et par les tuteurs avec la modification suivante qui a déclaré donner à Baruch ou à Sara, son fils ou sa fille mineure ou à sa pupille, né à le…… le nom de famille de…….

Il sera fait et reçu sur les deux registres une déclaration particulière pour chaque individu ; chacune sera signée par le maire ou par le déclarant.

Veuillez à cet effet faire ouvrir sans délai un double registre dans les communes où il en doit être établi et m’informer des mesures que vous aurez prises.

Ces registres, dont quelques-uns existent encore, seront intéressants pour reconstituer l’état civil des Juifs qui tendent de plus en plus à se perdre dans la collectivité tout en conservant, au point de vue de leurs intérêts, leur organisation distincte.

Il faut reconnaître néanmoins que, cette fois encore, la mesure du changement de nom ne fut pas exécutée comme elle aurait dû l’être.

Quand on donna des noms aux Juifs d’Autriche, sous Joseph II, on s’en remit de ce soin aux employés subalternes qui trouvèrent là une occasion de bénéfice. En payant quelques florins on avait un joli nom d’oiseau ou de fleur, un nom poétique ou de bon augure, on s’appelait brise du soir ou parfum du matin, Strauss, bouquet, Wolhlgeinch, bonne odeur, Edelstein, pierre précieuse, Goldader, veine d’or. Ceux qui ne payaient rien, en revanche, recevaient des noms ridicules ou désagréables, comme Galgenvogel, gibier de potence, Saenfer, ivrogne, Weinglas, verre à vin. En France, les Juifs furent laissés absolument libres le choisir leurs noms. La plupart, profitant de la tolérance de la loi pour les noms consacrés par l’usage, adoptèrent des noms de lieux, Lisbonne, Paris, Lyon, Marseille, les autres prirent des noms ordinaires, Picard, Flamand, Bourgeois, Clément, Laurent, beaucoup puisèrent dans le calendrier révolutionnaire et s’appelèrent Avoine, Seigle, Froment, Laurier.

Le nom le plus répandu est celui de Mayer[18]. Il est d’origine très reculée et figure dans l’Ancien Testament et dans le Talmud, il plait aux Juifs en évoquant pour eux l’image de quelque chose qui brille. Le vrai mot, en effet, est Meïr (éclatant, rayonnant), et dérive à la fois du mot or et du mot lumière.

Colin, Kahn, Kohn, Cahen sont autant de variations du mot hébreux Cohen (prêtre de la famille d’Aaron).

Les prénoms les plus usités chez les Juifs sont la traduction d’un mot hébreu : Maurice correspond à Moïse, Isidore à Isaac, Edouard à Aaron, James à Jacob, Alphonse à Adam.

La tolérance de la Restauration supprima en fait toutes les formalités qui auraient pu gêner les Juifs. Les tableaux dressés par ordre de l’Empereur, au contraire, sont des chefs-d’œuvre de vigilance, d’attention, de netteté dans les détails, ils contrastent avec le sans-gêne qui règne dans la France actuelle où chacun entre dans la patrie comme dans un moulin. Ils servent encore de plan et de modèle au comité anti-sémitique qui s’efforce de voir un peu clair dans nos affaires.

Les colonnes sont divisées ainsi : négociants, manufacturiers pour leurs commettants ; propriétaires exploitant des biens ruraux, exerçant des arts et métiers, faisant le brocantage, ayant concouru à la conscription, tombés au sort, servant en personne, remplacés, servant ou ayant servi volontairement, élèves fréquentant le écoles publiques ; relevés de créances hypothécaires.

La population juive de l’empire est répartie dans 38 départements, elle est de 78,993 individus, mais les Juifs de pays nouvellement annexés en Hollande et dans le nord ne sont point compris dans ce travail.

Le nombre des juifs est de 46,663 pour toute l’étendue de la France actuelle. On constate, dans le département de la Seine, la présence de 2,733 Israélites, on voit à quel point ils ont multiplié puisque quelques chiffres du Consistoire permettent d’en compter environ 42,000 avérés.

Lyon et le département du Rhône, qui sont infestés aujourd’hui, puisque le Juif Millaud est parvenu à s’y faire élire sénateur, sont presque intacts, on y compte en tout 58 chefs de famille faisant ensemble 495 individus. Nous lisons dans un des états que 40 familles juives se sont établies à Lyon depuis 1790, parmi leurs membres figurent 2 négociants, 2 propriétaires, 9 artisans exerçant des arts et métiers, 15 à 20 enfants fréquentant les écoles publiques.

Les Juifs adressèrent à l’Empereur supplique sur supplique pour être exemptés des rigoureuses dispositions du décret du 17 mars 1808. Les Juifs de la Gironde avaient été exemptés de suite, ceux de la Seine, sur lesquels les renseignements avaient été bons, avaient été l’objet de la même faveur.

Les états dressés à cette occasion nous fournissent encore quelques éclaircissements sur la population juive dans certains départements. Parmi les départements qui ont réclamé l’exemption sans l’avoir obtenue, nous trouvons la Moselle avec 6,506 Juifs, le Rhône 195, la Meurthe 3,489, la Meuse 405, la Côte d’Or 250.

Parmi les départements, qui ont demandé et obtenu l’exemption, figurent la Gironde avec 2,531 Juifs, les Landes 1,598, la Seine 2,733, les Basses-Pyrénées 127, les Alpes-Maritimes 303, l’Aude 4, le Doubs 86, la Haute-Garonne 107, l’Hérault 141, Seine-et-Oise 95, Vosges 345, le Gard 425, les Bouches-du-Rhône 948.

Parmi les départements qui n’ont rien demandé, nous relevons l’Allier avec 5 Juifs, l’Ille-et-Vilaine 11, le Finistère 11, le Loiret 7, Loir-et-Cher 10, Loire Inférieure 11, Marne 2, Pas-de-Calais 63, Seine Inférieure 47, Somme 14, Yonne 27, Ardennes 11, Charente 8, Charente Inférieure 70, Puy-de-Dôme 38, Haute-Vienne 29, Dordogne 1, Var 14, Vaucluse 631, Haut-Rhin 9, 915, Seine-et-Marne 132, Haute-Saône 5, Haute-Marne 44, Bas-Rhin 16, 155, Isère 4.

Les Juifs, cependant, comptaient des amis autour de Napoléon 1er. Ney, originaire de l’Alsace, était-il Juif comme on l’a souvent prétendu ? Ce nom, en tous cas, est assez commun chez les Juifs. La fatalité particulière qui a pesé sur cette famille, le mystérieux des catastrophes qui se sont abattues sur elle, me confirmeraient dans cette opinion. En tous cas, s’il faut en croire l’Allg-z-der-Jud, il portait Israël dans son cœur.

Lorsque le 10 novembre 1806, racontait ce journal, en 1865, le maréchal Ney occupa Magdebourg, il reçut la visite des autorités et des notables de la ville. Le maréchal avait demandé expressément que les notables de toutes les confessions lui fussent présentés. Après qu’ils eurent passé devant lui, il demanda s’il n’y avait point de représentant de la communauté israélite. La ville de Magdebourg, réplique un des assistants, jouit du privilège de ne point avoir de Juifs parmi ses habitants, il n’y en a qu’un ici et est toléré pour des raisons particulières. — Vous voulez parler des Israélites, repartit le maréchal, la France ne connaît pas de Juifs du reste, messieurs, là où domine la France il n’y a plus de privilèges et à partir de ce moment l’égalité des cultes est à Magdeburg l’unique principe admis.

« Il y a aujourd’hui à Magdeburg, disait en terminant le journal israélite allemand, 5,000 de nos coréligionnaires et l’un d’eux est membre du conseil municipal. »

Les Archives, qui rapportent ce fait, ne se prononcent pas nettement sur le fait de l’origine juive de Ney.

« Nous ajouterons, nous disent-elles, que Ney, originaire de Sarrelouis, a longtemps passé pour être d’extraction juive, il n’aura pas fallu beaucoup d’anecdotes comme celle que nous venons de rapporter pour lui faire cette réputation. Nous l’avons prouvé, l’affirmation de Disraeli sur Masséna parait tout au moins hasardée, elle n’est point, cependant, absolument improbable. En ce cas, le petit-fils du maréchal, le duc de Rivoli, qui a épousé récemment une Juive, Mme Heine, veuve elle-même du général duc de la Moskova, qui passait pour descendre des Juifs, aurait obéi à une sorte d’attraction de race que nous avons constatée assez souvent dans le cours de cet ouvrage. Pour le maréchal Soult, la supposition de Disraeli me parait absolument romanesque, quoiqu’il figure dans un Plutarque Juif en même temps que Jules Janin.

D’après le Petit Journal, le premier officier juif de l’armée française aurait été M. Marqfroy, mort il y a trois ans, à Biarritz, âgé de 95 ans.

Il avait fait les dernières campagnes de l’Empire et avait atteint le grade de capitaine.

Le père du défunt était propriétaire du château de Marracq à Bayonne, qu’il vendit à Napoléon 1er, et où celui-ci attira et retint le roi d’Espagne et son fils, plus tard Ferdinand VII.

M. Marqfroy, dans une audience qu’il avait eue de Napoléon 1er avait obtenu de faire admettre ses fils dans une école militaire.

Les écoles de l’Etat étaient jusqu’alors fermées aux Israélites.

Le défunt et son frère furent les deux premiers israélites admis dans, les écoles militaires de France.

Selon M. Kohn, les premiers officiers juifs auraient été MM. d’Alembert, Mardochée et Pollonais, sortis en 1809 le premier de l’École polytechnique, les deux autres de l’école Saint-Cyr[19].

Les Juifs, en présence des nouvelles mesures, se bornèrent en apparence à des doléances, mais le divorce était complet entre eux et l’empereur. Napoléon, qu’il fût ou non d’origine sémitique, personnifiait, même en matière financière, le contraire de l’esprit juif[20]. Par un contraste comme on en rencontre tant dans cet étonnant génie, cet homme si chimérique en certaines questions, ce poète en action à la façon d’un Alexandre ou d’un Antar était, dès qu’il s’agissait des finances publiques, l’économe le plus rigide, le plus méticuleux, le plus probe qu’on eût vu depuis Colbert. Pour des œuvres qui honoraient le nom français, pour des constructions, pour des encouragements aux artistes, pour des fêtes plus éclatantes que toutes celles qu’avait contemplées le monde jusqu’à lui, il jetait l’or sans compter, puis le lendemain il défendait l’argent de son peuple, l’argent des contribuables après tout, avec l’âpreté bourgeoise d’un Louis XII. Il était précisément, si l’on peut se permettre de rapprocher ces deux noms, le contraire de Gambetta, qui disait : « Prenez, pillez, creusez des déficits, je m’en bats l’œil, je ne suis pas d’ici… »

Les Juifs, abrités derrière Ouvrard, avaient profité du moment où Napoléon était occupé à gagner la bataille d’Austerlitz pour abuser de la candeur de Barbé Marbois, ministre du Trésor, et organiser à propos des bons d’Espagne le fameux coup de l’emprunt Tunisien, acheter en baisse, décider ensuite la France à garantir et vendre en hausse. On connaît la scène terrible qui eut lieu au retour, quand Barbé Marbois, sortant en pleurant du cabinet des Tuileries, dit à l’empereur : « J’espère, au moins, que Votre Majesté ne m’accuse pas d’être un voleur. — C’est bien pis, répondit Napoléon, la friponnerie est moins dangereuse encore que la bêtise : la friponnerie a des bornes, la bêtise n’en a pas. »

A partir de 1810, le Juif, qui avait soutenu jusqu’alors Napoléon et qui n’avait plus rien à en attendre de bon, se mit du côté de l’Europe. Le tout puissant Empereur eut contre lui désormais cette force mystérieuse de la finance à laquelle on ne résiste pas, même quand on est Napoléon 1er, ainsi que Léon Say, l’homme de Rothschild, le déclara un jour insolemment à la Chambre.

Admirable pour pousser, prôner, lancer, la Juiverie l’est également pour détruire ou plutôt pour miner, saper, ruiner en dessous. Quand le Juif est contre eux, chef d’empire ou simple individu, journaliste ou chanteuse d’opérette se sentent pris soudain par mille fils lilliputiens qui les empêchent d’avancer, « ils sont contrecarrés en tout, a comme l’explique si bien Disraéli, diffamés, déshonorés, démoralisés, ils ne savent à qui s’en prendre, rien ne leur réussit sans qu’ils comprennent pourquoi. Il faut, pour braver cette puissance occulte, devant laquelle Bismarck a reculé, des hommes comme Napoléon ou des écrivains au cœur droit, à l’âme ingénue qui ont médité la parole du Christ : « Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice car le royaume des cieux leur appartient. »

Sans doute, en entreprenant la campagne de Russie, Napoléon contribua à gâter ses affaires, mais, un peu plus tôt, un peu plus tard, la coalition financière aurait eu raison de lui.

Le futur banquier de la Sainte Alliance, Rothschild montra, lorsque l’heure du dénouement approcha, une activité sans égale, la grandeur même des événements semble avoir élevé au-dessus d’elle-même cette nature de Juif peu portée généralement aux actes d’héroïsme.

Quand le soir tomba sur Waterloo, quand l’Empereur eut essayé en vain d’entrer dans le dernier carré, Rothschild, qui guettait à Bruxelles, fut informé immédiatement de la défaite par les Juifs qui suivaient l’armée pour achever les blessés et dépouiller les cadavres. S’il arrivait le premier, en Angleterre avec la nouvelle, il gagnait vingt millions, il courut à Ostende, mais une tempête effroyable semblait rendre la traversée impossible. Perplexe un moment devant ces vagues qui déferlaient avec fureur, le banquier donna quand même l’ordre du départ.

« N’aie pas peur, aurait-il pu dire au capitaine, tu portes plus que la barque antique, tu portes l’infortune de César et la fortune de Rothschild. »

Bonaparte était mort, écrit Michelet, du siècle de fer était né le siècle d’argent par les emprunts qu’on fit pour la guerre même en pleine paix et pour toute chose. Un juif intelligent Olinde Rodrigues, au nom de Saint-Simon, écrivit l’Evangile de cette nouvelle religion.

Les Juifs, qui jusque-là étaient en République, se constituèrent en double royauté. Les Juifs allemands, plus tard ceux du Midi, créèrent deux réservoirs où se versèrent les capitaux.

Tandis que les premiers faisaient les fonds pour les armées de la Sainte-Alliance, les seconds se donnèrent au second Bonaparte.

Michelet semble indiquer un antagonisme ou du moins une rivalité. En réalité, la paix avait été signée sur les ruines de la France entre les Juifs des deux rites, toujours d’accord malgré les oscillations apparentes de la Bourse, ils allaient monopoliser l’argent de l’univers. Peuples et Rois n’étaient plus que des marionnettes dont les Juifs tenaient les fils. Les nations s’étaient battues jusque-là pour la patrie, la gloire, le drapeau, elles ne se battront plus désormais que pour enrichir Israël, avec la permission d’Israël, et pour la seule satisfaction d’Israël…



  1. Histoire générale des Emigrés.
  2. Ce Simon fut un des premiers et un des plus enthousiastes partisans de la laïcisation des hôpitaux. « Un jour, raconte Goret dans Mon Témoignage, madame Elisabeth lui demandait comment allait sa femme malade à l'Hôtel-Dieu.
    — Ah ! c'est un plaisir, répondit-il, de voir aujourd'hui les dames de l'Hôtel-Dieu, elles sont habillées comme ma femme, comme vous, ni plus, ni moins.
  3. Origines de la France contemporaine. La Révolution, tome III
  4. Revue de la Révolution (3 mars, 3 avril et 3 mai 1883).
  5. Mémoires secrets, tome III.
  6. Le vrai peuple était profondément attaché à la religion de ses pères. En 1793 les femmes de la Halle organisèrent encore des reposoirs pour la procession de la Fête-Dieu. Ces sentiments, du reste, étaient encore ceux des ouvriers d’origine française sous la Commune.
  7. « Il avait préparé de longues mains par des trames secrètes, dit M. Thiers, la tradition de l’île de Malte. Des Francs-Maçons comme le chevalier Dolomière et Bosredon y étaient renfermés, et le lâche grand maître Homspech lui en fit les honneurs, ainsi que des îles adjacentes, moyennant une principauté en Allemagne ou, à son défaut, 300,000 fr. de pension viagère, 600,000 fr. d’indemnité, 700 fr. de pension pour les chevaliers de la langue de France. Cafarelli Dufalga, un des officiers supérieurs à la suite de Bonaparte, en parcourant la place dont il admirait les fortifications, dit ce mot : Nous sommes bien heureux qu’il y ait eu quelqu’un dans la place pour nous en ouvrir les portes. »
        L’appui donné par la Maçonnerie à Napoléon a été indiqué par de Maistre, et bien mis en lumière par le P. Deschamps. Cambacérès le vice-empereur du temps, était à la fois : 1° grand Maître adjoint de grand Orient, 2° souverain grand maître commandeur du Suprême Conseil, 3° grand maître d’honneur du rite de Heredom de Kilwining, 4° chef suprême du rite français, 5° grand maître national des chevaliers bienfaisants de la cité sainte — Strasbourg, à Lyon, à Montpellier.
  8. Un rabbin qui avait concouru avec Grégoire, Zalkind Bourwitz dit expressément : « le Talmud défend seulement de voler l’étranger, (le nacri), mais il permet de profiter de son erreur. » Or, il est facile de comprendre qu’entre profiter d’une erreur et induire un gogo en cette erreur le chemin n’est pas long, Bischoffsheim n’a pas, à proprement parier, volé le nacri dans l’emprunt du Honduras, il a profité de son erreur, seulement il avait rédigé des prospectus pour lui faire concevoir cette erreur.
  9. Archives nationales : A. F. iv.
  10. Châteaubriant semble croire à quelque arrière-pensée de Napoléon d’occuper un jour Jérusalem. il écrit dans les Mémoires d’outre-tombe : « Remueur de tout, Napoléon imagina vers cette époque le grand Sanhédrin. Cette assemblés ne lui adjugea pas Jérusalem, mais, de conséquence en conséquence, elle a fait tomber les finances du monde aux échoppes des juifs, et produit par là dans l’économie politique une fatale subversion. »
  11. On trouve, à chaque page de l’histoire, trace de cette protection accordée aux Juifs par la papauté. Au XIIe siècle, saint Grégoire les défendit et les protégea dans tout le monde chrétien. Alexandre II félicita chaleureusement les évêques d’Espagne, qui avaient pris sous leur protection les Israélites persécutés. Innocent II et Alexandre III firent des démarches en leur faveur. Grégoire IX intervint pour eux en France, en Angleterre, en Espagne, il interdit, sous peine d’excommunication, qu’on troublât leurs fêtes. Clément VI leur accorda un asile à Avignon. Nicolas II écrivit à l’inquisition pour lui ordonner de ne point les contraindre à embrasser le christianisme par force. Clément XIII fît respecter pour eux cette liberté d’élever leurs enfants à leur guise que la Franc-Maçonnerie juive a enlevée aux Français dès qu’elle a eu le pouvoir.
        Le fait se comprend aisément. Des hauteurs où il planait, le Vicaire de Jésus-Christ n’apercevait que des égarés pour lesquels Il priait en étendant sur eux sa main protectrice, tandis que les chefs d’Etat, se plaçant au point de vue économique et social, étaient obligés de veiller à ce qu’on ne troublât pas l’ordre dans le pays qu’ils avaient pour devoir de défendre.
  12. Collection des actes de l’Assemblée des Israélites de France et du royaume d’Italie, par M. Diogène Tama. Salvador qui dans son livre Paris, Rome et Jérusalem, s’étend longuement sur le Sanhédrin de 1807, ne dit pas un mot de cette adresse.
        M. Théodore Reinach passe également sous silence ce fait caractéristique.
  13. C’est ce que disaient les marchands de Paris en 1777, en employant une autre forme. C’est le point de vue auquel se placent les anti-Sémites d’Allemagne, d’Autriche-Hongrie, de Roumanie, qui laissent absolument de côté la question confessionnelle.
  14. A la date du 30 mai 1807, avait été déjà rendu un premier décret portant sursis à l’exécution des jugements rendus en faveur des Juifs contre les cultivateurs.
        L’exposé des motifs disait :
        Napoléon… Sur le compte qui nous a été rendu, que dans plusieurs départements septentrionaux de notre Empire, certains Juifs, n’exerçant pas d’autres professions que celles de l’usure, ont, par l’accumulation des intérêts les plus immodérés, mis beaucoup de cultivateurs de ce pays dans un état de grande détresse, nous avons pensé que nous devions venir au secours de ceux de nos sujets qu’une avidité injuste aurait réduits à ces fâcheuse extrémités.
  15. Archives nationales, A. F, iv.
  16. L’autorité tint la main à ce que le décret fût rigoureusement exécuté. Rien que pour un déplacement de Nancy à Saverne, un décret était nécessaire. Nous citons au hasard l’autorisation accordée à Goudchaux, dont le fils ou le neveu fut ministre des finances en 1848, et sauva Rothschild par les complaisances qu’il eut pour lui aux dépens du Trésor.
        « Napoléon… Sur le rapport de notre ministre de l’intérieur, notre conseil d’Etat entendu, nous avons décrété et décrétons ce qui suit :
        Article 1er
        Le sieur Isaac Goudchaux, fils aîné de Jacob Goudchaux, Israélite et négociant à Nancy, est autorisé à prendre domicile à Saverne, département du Bas-Rhin.
  17. L’article 1er de la loi du 11 germinal an XI porte : « A dater de la publication de la présente loi, les nom en usage dans les différents calendriers, et ceux des personnages connus dans l’histoire ancienne pourront seuls être reçus comme prénoms sur les registres de l’état civil, destinés à constater la naissance des enfants et il est interdit aux officiers publics d’en admettre aucun autre dans leurs actes. »
  18. Le chroniqueur de l’Illustration a raconté jadis à ce sujet une amusante anecdote qui, hélas ! a autant d’actualité maintenant à Paris qu’en Allemagne, tant les Mayer sont nombreux chez nous.
        « De l’autre côté du Rhin, les Meyer avec un e, un a, un i, un y, pullulent autant et plus que les Durand en France : Meyer, Mayer, Mêyer, et les anas s’en divertissent.
        « Par exemple, un bourgeois de Berlin, Schultze ou Miller, arrive au théâtre en retard. La salle est pleine. Pas un fauteuil inoccupé, pas un strapontin libre. Et pourtant Müller ou Schültze tient à voir la pièce et à être assis convenablement.
        Que faire ? C’est bien simple. Dès que vient l’entracte, il se campe à l’entrée du couloir et crie d’une voix effarée :
        — Messieurs, le feu est chez M. Meyer !
        Le feu !… Chez M. Mayer ! Tout aussitôt, une cinquantaine de spectateurs se lèvent, très pâles, et tous les Mayer, les Meyer, les Meïer se précipitent vers la porte de sortie, pendant que, très tranquillement, le farceur berlinois choisit, parmi les stalles devenues vacantes, celle qui lui paraît la meilleure.
  19. La Notice sur l’état des Israélites en France par E.C.M. citait, sous la Restauration, parmi les militaires d’origine israélite « le général baron Wolff, maréchal de camp, commandeur de la Légion d’honneur, son frère, chef de bataillon, chevalier de la même Légion, le colonel Maurice, Alphonse Théodore Cerf-Beer, capitaine d’artillerie, chevalier de la Légion d’honneur, Gustave Mévil, capitaine d’artillerie, chevalier de la Légion d’honneur, Festel, capitaine, directeur du dépôt d’armes de Mutzig, officier de la Légion d’honneur, Worms fils, capitaine et chevalier, Lion Berr, capitaine aux Invalides, etc., etc. »
        Le pédicure de Napoléon 1er, un nommé Tobias, était juif, il exerça plus tard les mêmes fonctions près du duc de Berry. L’annuaire des Archives israélites nous raconte de ce Tobias un trait un peu burlesque, mais touchant quand même, car un homme qui respecte sa religion, même dans l’état de pédicure, est toujours respectable. « Un jour de Rosch-Haschanah, Tobias était à la synagogue lorsq’on vint le chercher en toute hâte de la part du duc de Berry. L’embarras du pédicure fut extrême, il alla prendre conseil du Grand Rabbin Michel Seligman. » Le vénéré pasteur s’associa aux scrupules de son religieux administré, il l’engagea néanmoins à se rendre aux ordres du prince, un refus, à cette époque de cléricalisme outré, pouvant avoir de graves conséquences, mais à s’arranger pour ne violer qu’à la dernière extrémité la solennité du jour.
        Tobias, très perplexe, arrive aux Tuileries.
        — Ah ! Que je souffre ! s’écrie le duc de Berry en l’apercevant, il me tarde d’être délivré de mes maux.
        Tobias se baisse, examine attentivement le pied, et appuie du doigt à diverses reprises sur la partie occupée par les cors.
        — Aïe ! crie le prince, vous me faites mal.
        — Voyez-vous, Monseigneur, réplique hardiment notre pédicure subitement inspiré, je remarque une violente inflammation, et, dans ces conditions, il y aurait un véritable danger à opérer. Patientez un jour ou deux, ayez soin d’entourer le pied de compresses, et je reviendrai vous débarrasser de votre cor.
        Grâce à ce subterfuge Tobias échappa à l’extrémité cruelle, pour un si scrupuleux pratiquant, de violer la solennité du Rosch-Haschanah. »
  20. Dans une discussion au Conseil d’Etat, il indiquait bien le caractère parasitaire de la race : « On ne se plaint point, disait-il, des protestants et des catholiques, comme on se plaint des Juifs. C’est que le mal que font les Juifs ne vient pas des individus, mais de la constitution même de ce peuple : Ce sont des sauterelles et des chenilles qui ravagent la France. »