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La Rue de Jérusalem/Partie 2/Chapitre 15

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Le Constitutionnel (feuilleton paru du 16 nombre 1867 au 21 mars 1868p. 432-443).


XV

Pistolet cherche.


Nous savons que Clampin, dit Pistolet, enfant de Paris et par conséquent diplomate de naissance, voyageur autour du monde, ancien zéphyr, etc., avait été engagé par M. Badoît pour chercher les assassins de Jean Labre, frère du baron Paul d’Arcis, en concurrence avec la police ordinaire, dont tous les efforts étaient restés vains.

Nous savons que ce même Pistolet était ami des dames, appartenait à la jeunesse dorée qui fréquente les troisièmes galeries du théâtre Bobino et cédait à la passion du jeu jusqu’à risquer des piles de sous au sort si dangereux du bouchon, qu’on appelle le godet à Bruxelles, la galoche en Normandie, la pigoche en Anjou, et la drû en Bretagne.

Je suppose que, dans d’autres pays, on doit se servir encore d’autres noms.

C’était sa passion pour le jeu, jointe à la peur de passer pour un homme de police, qui l’avait conduit à ce fameux estaminet de L’Épi-Scié, situé derrière La Galiote, au boulevard du Temple. Ne pouvant avouer, près des dames, ni son emploi officiel de mouche, chez M. Badoît, ni sa profession libérale de tueur de chats, il s’était fait Habit-Noir in partibus et bandit honoraire. Cette position n’est pas si rare qu’on le pense, et il y avait de bien bizarres orgueils ; mais étant donné le tact extraordinaire, l’expérience prématurée et l’œil pénétrant de notre héros, car Pistolet est notre héros, il eût été difficile que son passage dans ce pandémonium ne lui révélât pas quelque chose.

À l’estaminet de l’Épi-Scié, nous l’avons mentionné ailleurs[1], se tenaient les basses assises de cette ténébreuse association que la justice ne put jamais atteindre qu’une fois et par son extrémité la plus infime.

La tourbe qui servait d’armée à l’état-major des Frères de la Merci, réuni autour de l’Habit-Noir ou Père-à-tous, s’assemblait à l’estaminet de L’Épi-Scié, dont la situation exceptionnelle, une porte sur la ville, une porte sur les champs, se prêtait admirablement à de semblables réunions.

Pistolet avait rencontré là, entre autres curieuses physionomies, le messager cul-de-jatte du Plat-d’Étain, connu sous le nom de Trois-Pattes, et qui devait mettre un terme à l’aventureuse carrière du bandit Lecoq, dit Toulonnais-l’Amitié, dans les bureaux de M. J.-B. Schwartz, banquier des princes.

Trois-Pattes, dont nous n’avons pas à refaire ici l’histoire, avait une influence considérable parmi les membres de l’association et Pistolet savait bien ce qu’il faisait naguère à la ferme de la Goret en jetant le nom de Trois-Pattes comme garantie.

Trois-Pattes, dont le vrai nom était Andréa Maynotti, usant d’un déguisement hardi, s’était glissé au milieu même des Habits-Noirs pour assurer sa terrible vengeance. Il possédait la confiance du colonel Bozzo ; il avait inspiré une romanesque affection à la petite-fille du Père-à-tous, la belle et infortunée comtesse Corona.

Grâce à ses relations avec Trois-Pattes, Pistolet avait pu entrevoir plus d’une fois le vieux colonel et la belle comtesse.

Mais il est temps de mettre sous les yeux du lecteur les faits et gestes de Pistolet entre le moment où il avait quitté M. Badoît à Alençon et l’heure où nous le retrouvâmes dans l’enclos de M. le baron d’Arcis.

Passant par-dessus le voyage en patache, dont nous avons dit un mot et qu’il avait fait en compagnie de Louveau, dit Troubadour, nous arriverons au château neuf où l’avait conduit, quelques heures auparavant, la piste de ce même malfaiteur.

Il y avait autour de l’homme qui habitait le Château-Neuf deux sortes de mystères : un mystère de comédie et un mystère sérieux.

Le premier, dont il s’entourait en qualité d’héritier prétendu d’un trône et de chef d’une conspiration, était factice et tout théâtral ; le second, que l’arrivée de Paul Labre et de Mlle Ysole de Champmas dans le pays avait rendu plus rigoureux, était de tout point nécessaire.

Le fils de saint Louis, en thèse générale, n’était pas de ceux qui peuvent se montrer impunément à leurs anciennes connaissances. Il avait un passé délicat.

Par cette dernière raison surtout, la porte du château neuf était strictement fermée à tous ceux qui n’avaient point le mot de passe.

Pistolet, ignorant ce que nous savons, et préoccupé de choses totalement étrangères au métier actuel du maître de céans, eut beau escalader les murailles et rôder, selon son habitude, il ne découvrit rien.

Il fut même trompé par l’apparence extérieure de cette maison murée, mais sourdement pleine d’activité et de bruits.

Ce qui transpirait hors de ces murs c’était la « conspiration. »

Nous ne saurions trop répéter que le métier de cette conspiration était de faire du bruit et de paraître. Elle était purement et simplement un leurre.

La petite noblesse du pays, enrégimentée dans ce complot voleur, travaillait sans le savoir au profit des Habits-Noirs.

Mais nulle contrée n’est assez sauvage pour échapper complètement à l’œil de l’autorité. Nos lecteurs se demanderont sans doute comment l’autorité pouvait rester aveugle en face de ces conciliabules notoires jusqu’à l’effronterie.

La réponse à cette question est nette et facile : elle appartient à l’histoire même des différents imposteurs qui jouèrent successivement ou ensemble ce rôle de fils de Louis XVI.

Les écrits laissés par Naundorff et Mathurin Bruneau, les documents publiés par le duc de Normandie ne laissent aucun doute sur le système adopté par le gouvernement de Louis-Philippe à leur égard. Il fut toujours et partout le même.

Le gouvernement de Louis-Philippe favorisait indistinctement et jusqu’à un certain point compatible avec la prudence d’État, tous les Louis XVII, — parce que son principal adversaire était le parti légitimiste, et que l’existence d’un fils de Louis XVI une fois admise, le principe même de la loi légitimiste tombait en ruine.

Pistolet vit donc la conspiration et fut sur le point de faire une marque à la porte de cette maison qui, évidemment, ne contenait pas ce qu’il cherchait.

Mais, avant de sortir du parc, il aperçut, dans une ombreuse allée, un vieillard au sourire doux qui semblait avoir plus de cent ans.

Ce vieillard s’appuyait au bras d’une jeune femme merveilleusement belle, en qui Pistolet reconnut la comtesse Corona.

Il se dit :

— Puisque voici les amis de mon ami Trois-Pattes, c’est là : je reviendrai.

Nous l’avons trouvé revenu après sa visite à la maison de Paul Labre.

Certes, cette visite l’avait rejeté bien loin de la comédie entrevue par lui au château neuf. Aucun écho de la conspiration n’arrivait jusqu’à la demeure de Paul Labre, et pourtant, l’instinct détectif était si étrangement développé chez notre gamin qu’au premier indice rencontré sur sa route, il flaira la piste.

Voici quel fut cet indice :

En sortant du logis de Paul Labre, Pistolet, qui suivait la marge des champs, entendit dans un chemin creux un jeune gars qui pleurait et un homme qui le consolait, disant :

— Tu es bête ! à ta place, moi, j’aurais bientôt de quoi.

Le jeune gars était Vincent Goret, l’éclopé, chassé pour ses trente-cinq sous de casse.

L’homme était de Paris et Pistolet se souvint de l’avoir vu jouer la poule à l’estaminet de l’Épi-Scié.

C’était plus qu’il n’en fallait pour éveiller son attention.

Pistolet se coucha le long de la haie pour écouter mieux.

— C’est d’aller chez ta mère, reprenait l’homme. Elle a de l’argent plus gros qu’elle. Tu demandes cent francs du premier coup, pas vrai ?…

— Cent francs ! répéta l’innocent, épouvanté à l’idée d’un pareil trésor.

— Deux cents si tu veux… et je te prêterai mon couteau pour si la vieille se rebiffe maladroitement.

L’éclopé s’éloigna de lui.

— Je n’ai point d’affaires avec vous, l’homme ! dit-il. Si ma m’man ne veut pas me donner mes trente-cinq sous, y a la rivière. Je n’ai point de bonheur à être en vie.

Et il partit, ses sabots à la main.

Presque aussitôt après et au moment où il allait monter la route conduisant au château neuf, Pistolet entendit des cris du côté du hameau des Nouettes.

C’étaient Cocotte et Piquepuce qui accomplissaient la besogne commandée par Annibal.

— Venez, mes amis ! disaient-ils, venez, bons chrétiens ! le fils de Mathurine Goret va faire un malheur sur sa propre mère !

Et les paysans curieux de courir.

Pistolet ne fit ni une ni deux, il s’élança à la tête des paysans en criant :

— Villageois ! qui m’aime me suive ! La morale avant tout !

Personne ne l’aimait ; mais chacun le suivit parce qu’il prenait le chemin de tout le monde.

Dès le premier moment sa tournure et son aspect avaient éveillé les soupçons de Piquepuce et de Cocotte qui avaient reconnu en lui un sans-gêne de Paris.

Le vicomte Annibal fut prévenu. Une fois jouée la farce du pauvre petit couteau que le gars avait tiré de sa poche comme le noyé se retient à un brin d’herbe pour effrayer et arrêter la mégère, on aurait certainement fait un mauvais parti à Pistolet s’il n’avait payé d’audace.

Heureusement pour lui, dans cette armée qui assiégeait le coffre-fort de la Goret, il y avait plusieurs généraux, dont l’entente était loin d’être parfaite. Chacun d’eux pouvait avoir ses soldats.

Heureusement encore, le témoignage de Mèche vint à l’appui de ce nom de Trois-Pattes, lancé par notre gamin avec tant d’à-propos.

Après la bagarre, Pistolet, comme nous l’avons vu, sortit derrière l’éclopé, faisant du zèle et se donnant à lui-même mission de conserver ce précieux otage.

Il attendit Mèche dans l’étable et lui dit :

— Ça t’étonnerait-il que nous aurions, l’an prochain, un carrosse à nous deux et un cordon bleu dans une cuisine à nous ? Veille dur, dis-moi tout et file si tu vois des gendarmes.

Il l’enleva en un temps de polka ; puis, la quittant brusquement, il exécuta une culbute et disparut pour courir après le pauvre Vincent.

Il le rejoignit au détour du chemin et lui dit, entrant résolument dans son nouveau rôle :

— Garçon, si tu retournes chez les Mathieu, tu es perdu de bout en bout !

Le fils Goret le regarda avec défiance.

— Je vas payer ma casse et tout sera fini, répondit-il. C’est du bon monde, les Mathieu.

— Tout sera fini, jusqu’à demain que viendront les gendarmes pour te prendre, poursuivit Pistolet.

L’innocent s’arrêta court.

— Je n’ai point d’affaires avec vous, l’homme… commença-t-il, selon sa coutume.

Mais les larmes lui vinrent aux yeux et il s’écria :

— Oh ! là là ! les gendarmes ! y en a-t-il de quoi me mener jusqu’à l’échafaud, pour ce que j’ai tiré l’eustache de ma pochette contre ma prop’mère ?

— On ne sait pas, répliqua Pistolet d’un air important. Le monde sont méchants dans ce pays-ci. Moi, je m’intéresse à toi, bancroche. Il y a là-haut un brave Monsieur qui te prendra chez lui, si je veux, et qui te protégera contre les gendarmes.

— Le Monsieur du château neuf ? demanda l’éclopé.

— Juste. Un fameux Monsieur.

— On dit qu’il est sorcier, et qu’il a jeté un sort à ma m’man.

Pistolet haussa les épaules.

— Aimes-tu mieux les gendarmes ? demanda-t-il.

C’est tout au plus si le fils Goret avait envie de faire un choix.

— Y a la rivière, gronda-t-il d’un air sombre. À vivre je ne suis point heureux.

— Bêta ! fit Pistolet qui croyait n’être point compris, tu n’as qu’à attendre un petit peu pour être riche !

Les yeux du gars étincelèrent.

— On m’a déjà dit ça, oui ! prononça-t-il tout bas. Et que toutes les filles me suivraient comme si j’avais un charme ! Et que je boirais à même la bouteille au remède comme ma m’man… L’homme, si j’étais riche, je mangerais la soupe du matin au soir, car j’ai faim toute la journée !

Ceci fut lancé avec une telle énergie que Pistolet, nature littéraire, comme tous les sauvages de Paris, se mit à rire et pensa :

— Cet animal-là gagnerait deux francs par jour à jouer les imbéciles à Bobino !

— En route ! ajouta-t-il, on va te faire vivre et te mettre à l’abri des gendarmes.

Il tourna brusquement le coude du chemin pour monter vers le château.

Vincent le suivit la tête basse.

Tous deux entrèrent dans une brèche du mur en construction et s’engagèrent dans les fourrés du parc.

Pistolet marchait maintenant avec lenteur et précaution ; il semblait laborieusement réfléchir.

— Vois-tu, dit-il en s’arrêtant à deux ou trois portées de fusil du mur, je cherche la manière de m’en servir ; ça n’ira peut-être pas tout seul.

— C’est soif que j’ai, répondit l’innocent, retombé au fond de son apathie.

Pistolet tressaillit et lui planta sa main sur la bouche en murmurant :

— Fais le mort !

Comme le gars étonné essayait une résistance machinale, Pistolet, usant de son grand moyen, lui « passa la jambe » et l’étendit à terre sans bruit aucun.

— Fais le mort ! répéta-t-il avec un accent de véritable menace, ou tu ne seras jamais riche ! Je ne suis pas ici pour toi, ma vieille ; si tu me gênes, tant pis pour ta peau !

L’innocent n’avait garde de se révolter.

Il resta étendu dans l’herbe et ne bougea plus.

Pistolet s’éloigna de quelques pas et prêta l’oreille.

Un bruit venait des massifs voisins.

— C’est tout de même taquinant de ne pas bien connaître les localités, pensa le gamin qui hésitait. On ne voit pas le château d’ici et je ne sais pas à qui j’ai affaire.

Il se retourna vers l’éclopé qui le regardait avec ses gros yeux étonnés, et son doigt levé lui ordonna impérieusement le silence.

Puis il se coucha tout de son long, disant :

— On va tâcher de savoir !

Et il se prit à ramper dans l’herbe, clairsemée sous les arbres, avec une telle adresse, que les Indiens de Cooper lui auraient certainement fait compliment, s’ils l’avaient vu.

À mesure qu’il avançait, le bruit des voix devenait plus distinct.

Il y avait là évidemment plusieurs personnes qui s’entretenaient. Le sens de leur conversation échappait encore à notre gamin.

Le premier mot qu’il entendit fut le nom de Paul Labre.

Il s’arrêta tout ému.

À travers une autre machination qu’il commençait à entrevoir, mais dont il ne détaillait pas encore bien les rouages, il se trouvait tout à coup porté au centre même de sa besogne.

C’était pour Paul Labre qu’il était ici et il ne l’avait point oublié.

Il avança de nouveau, retenant son souffle.

Pendant qu’il rampait, le frôlement des herbes l’empêchait d’entendre, et il regrettait amèrement chaque mot perdu.

Au bout d’une trentaine de pas, les branches du fourré s’éclaircirent, puis laissèrent pénétrer une large lueur.

Trente pas encore, il aperçut le blanc profil du château neuf qui tranchait dans la verdure.

En même temps, son regard, fixé droit devant lui, distingua entre les feuilles plusieurs costumes sombres, parmi lesquels se détachait le clair vêtement d’une femme.

Il fit un dernier effort, tourna un gros tronc d’arbre et se trouva, caché qu’il était dans un buisson, en face d’une sorte d’assemblée, gravement assise autour d’une table rustique qui supportait les restes d’un premier déjeuner.

Il y avait là quatre hommes, dont faisait partie le centenaire au paisible sourire, et la charmante personne que Pistolet avait déjà vue appuyée à son bras : le colonel Bozzo et la comtesse Corona.

Ce ne fut point sur eux que s’arrêtèrent les yeux du Parisien, mais bien sur celui qui parlait en ce moment.

Sa voix, facile à reconnaître, était celle qui avait prononcé le nom de Paul Labre.

Cet homme avait une belle taille un peu trop chargée d’embonpoint, un teint très blanc et une abondante chevelure bouclée, châtain foncé. Son profil aquilin rappelait vaguement les portraits et médailles des princes de la maison de Bourbon.

Il parlait avec lenteur et affectait dans sa pose une sorte de majesté. Il semblait se défendre contre une accusation.

Voici ce qu’il disait au moment où Pistolet put prêter l’oreille à ses paroles :

— Dans l’affaire du général de Champmas, j’agissais pour l’association et avec l’agrément de l’association ; dans l’affaire présente, et grâce à moi, l’association va doubler d’un seul coup son capital. Mes mesures sont prises : je suis prêt à les soumettre au conseil.

— Va promener dans les parterres, Fanchette, ma mignonne chérie, dit tendrement le vieillard.

Il attira vers ses lèvres desséchées le front charmant de la comtesse Corona, qui s’éloigna d’un pas nonchalant et gracieux.

Quand elle fut partie, un des assistants, que Pistolet reconnut pour être le fameux M. Lecoq de La Perrière, prit la parole et dit sèchement :

— Mon beau Nicolas, on t’avait mis entre les mains un joli coup de commerce. Papa et moi, nous venons de parcourir les titres de propriété ; c’est superbe. Mais tu n’es pas de force, mon bonhomme. Ton passé te bat dans les jambes. On a vu M. Badoît hier à Alençon, ce matin à La Ferté-Macé. M. Badoît ne peut pas être seul. En outre, Mlle de Champmas et Paul Labre se rencontreront bien quelque jour, hé ! bonhomme ?

On doit penser si Pistolet était tout oreilles.

Le beau Nicolas répondit avec un majestueux dédain :

— Vous oubliez deux pierres d’achoppement sur ma route, mon maître : le général et la femme Thérèse Soulas. Si vous êtes habile, je ne suis pas manchot. J’espère que Mlle de Champmas et Paul Labre se seront rencontrés ce matin.

— Oh ! oh ! fit le vieillard en prenant une pose plus attentive. Écoute, l’Amitié, avant de juger ; c’est un garçon qui a de l’économie et de la capacité.

— Procédons par ordre, reprit le fils de saint Louis : pour l’affaire présente, la combinaison est mûre. J’ai ce qu’il faut pour payer la loi, dès que Mathurine Goret sera morte.

— Très bien, approuva paternellement le vieux. Nous savons cela.

— Pour l’affaire Labre, poursuivit le royal jeune homme, c’est plus compliqué, et maître Lecoq pourra voir qu’on s’entend jusqu’à un certain point à balancer une opération…

Il fut interrompu par l’écho lointain d’un coup de feu.

— Est-ce déjà le tonnerre ? fit le colonel qui jeta un regard craintif vers le ciel chargé de lourdes nuées. Je n’aime pas l’orage, il m’agite.

— On a tiré vers les coulées du Foux, dit Lecoq en s’orientant.

Le fils de saint Louis resta impassible.

— C’est bien cela, murmura-t-il avec une intention marquée : vers les coulées du Foux.

Puis il ajouta de sa voix lente et froide qui, cette fois, mit un frisson dans les veines de Pistolet :

— Ne vous occupez plus de M. Paul Labre. Il ne vivra pas vieux. Sa note vient d’être acquittée !



  1. Les Habits-Noirs (1re série).