La Vie nouvelle/Chapitre XXI

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La Vita Nuova (La Vie nouvelle) (1292)
Traduction par Maxime Durand-Fardel.
Fasquelle (p. 68-69).


CHAPITRE XXI


Après avoir traité de l’amour dans ces vers, il me vint à l’idée de dire à la louange de cette beauté des paroles où je montrerais comment cet amour s’éveille pour elle, et comment non seulement il s’éveille là où il dormait, mais comment, grâce à son action merveilleuse, il s’éveille là où il n’était pas en puissance.

Ma Dame porte l’amour dans ses yeux[1],
De sorte que ce qu’elle regarde s’embellit.
Où elle passe chacun se tourne vers elle
Et son salut fait trembler le cœur,
De sorte que baissant son visage on pâlit,
Et on se repent de ses propres fautes.
L’orgueil et la colère s’enfuient devant elle.
Aidez-moi, Mesdames, à lui faire honneur.
Toute douceur, toute pensée modeste,
Naissent dans le cœur de celui qui l’entend parler ;
Aussi est heureux celui qui l’entrevoit seulement.
Ce qu’elle paraît être quand elle sourit un peu
Ne peut se dire ni se retenir en esprit,
Tant est merveilleux un tel miracle[2].



  1. Negli occhi porta la mia donna Amore
  2. Commentaire du ch. XXI.