La moisson nouvelle/26

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Bibliothèque de l’Action française (p. 115-117).


LA RELIGIEUSE




Que vos jours radieux sont dignes de louange !
Que vos pas sont légers, que vos gestes sont doux !
Vous passez : on dirait qu’il vient du ciel un ange,
Qui, pour semer la paix habite parmi nous…

Gloire à vous, noble femme, esprit pur, âme austère,
Si grande et si sublime en sa simplicité !…
Vous ne soumettez pas vos désirs à la terre,
Vous passez près de nous comme un souffle d’été !…


Il est sur les coteaux où luit un soleil pâle
Des fleurs au cœur de pourpre, au teint magique et pur,
Qui n’ouvrent qu’au matin leur corolle d’opale :
Vous êtes de ces fleurs qui s’ouvrent dans l’azur…

Ainsi qu’un lys caché loin de tout souffle immonde,
Et que nul vent lointain un instant n’a touché,
Vous ne connaissez pas le souffle impur du monde,
Et nul regard charnel sur vous ne s’est penché.

Femmes du monde, nous aimons à reconnaître
En vous, ô noble front empreint de majesté,
La femme auguste que nous avons rêvé d’être,
Et la vierge au cœur pur que nous avons été !…


Tandis que de vos sœurs les troupes vagabondes
Pleurent un rêve cher et cruel, tour à tour,
Dans le rayonnement de vos heures fécondes
En votre âme grandit un immuable amour.

On vous voit, méditant au fond de la chapelle,
Souriante, parmi les feux éblouissants.
Vous entendez au loin la voix qui vous appelle,
Et vos rêves divins montent avec l’encens…

Gloire à vous, chaste vierge, offrande que Dieu cueille,
Lys de chair que le ciel lui-même a protégé,
O fleur que nulle main sacrilège n’effeuille,
Amour qui ne sera par nul mal outragé !…