LEÇON CINQUIÈME.
Fonctions dérivées des sinus et cosinus d’angles, et des angles exprimés par les sinus et cosinus. Développement de ces quantités en séries.
Les angles n’entrent dans l’Analyse que par le moyen de leurs sinus et cosinus, qu’on dénote par les mots et placés comme caractéristiques avant les angles. On a ainsi les fonctions angulaires et dont la propriété générale, tirée de la nature du cercle, est qu’en prenant deux angles quelconques et on a
Cela posé, pour avoir les fonctions dérivées de et il n’y aura qu’à mettre à la place de et développer ensuite les fonctions
suivant les puissances de les coefficients de dans ces développements seront les dérivées cherchées. Or, par les formules précédentes, on a
Ainsi tout se réduit à développer en séries les quantités et
J’observe d’abord que, quelle que puisse être la série du développement de elle ne saurait être que de la forme
étant des nombres positifs et qui vont en augmentant ; car le sinus devant être nul lorsque l’angle est nul, il est évident que son expression en série par les puissances de l’angle ne peut contenir aucune puissance négative.
J’observe ensuite que, par les formules générales, en faisant et égaux à on a
donc, étant on aura
D’un autre côté, on a
et
donc on aura
cette série devant être identique avec la suivante,
qui exprime la valeur de la comparaison des premiers termes qui renferment la même puissance donnera
donc
Ainsi on est assuré que le premier terme de la série de est par conséquent, les deux premiers termes de la série de seront faisant ces substitutions dans les expressions ci-dessus de et et n’ayant égard qu’à la première puissance de on aura
donc la fonction dérivée de
sera
et la fonction dérivée de
sera
Le coefficient est une constante encore inconnue, mais que nous déterminerons ci-après par la nature du cercle.
Connaissant ces premières fonctions dérivées, on pourra de la même manière trouver toutes les suivantes. Ainsi, la première dérivée de étant la dérivée de celle-ci sera et la troisième dérivée sera et ainsi de suite.
Donc, en général, si on aura
et, faisant ces substitutions dans la série du développement de on aura
On aura de même
et ces substitutions donneront
Faisons pour abréger
on aura
d’où l’on tire, par les théorèmes connus,
Ainsi on aura, quel que soit l’angle les séries
Il semble qu’on aurait pu déduire immédiatement ces séries de celles qu’on a trouvées ci-dessus pour et en y faisant mais nous avons voulu éviter ici, comme nous l’avons déjà fait plus haut, les difficultés qui pourraient naître de ce que le développement de n’est généralement vrai que tant qu’on ne donne pas à des valeurs particulières.
Maintenant il est visible que ces séries sont nécessairement convergentes, en prenant l’angle tel que soit égal ou moindre que l’unité, et il est visible en même temps qu’on aura alors
car les termes ayant les signes alternatifs, et allant en diminuant, les sommes du second et du troisième, du quatrième et du cinquième, etc., seront toutes négatives ; et au contraire les sommes du troisième et du quatrième, du cinquième et du sixième, etc., seront toutes positives.
D’un autre côté, il est démontré rigoureusement par les théorèmes d’Archimède que le sinus est toujours moindre que l’arc, et que la tangente est plus grande que l’arc, du moins dans le premier quart de cercle ; ainsi on aura
mais
donc
d’où l’on tire
ainsi l’on aura, par la nature du cercle,
Si donc on prend l’angle moindre qu’un droit et assez petit pour que soit moindre que l’unité, on aura nécessairement
1o
|
|
|
par conséquent,
2o
|
|
|
par conséquent,
Comme ces conditions doivent avoir lieu, quelque petit que soit il résulte de la première que ne peut pas être moindre que car, si on aura or la condition
donc, quelque peu que surpassât l’unité, il serait toujours possible de prendre tel que
tandis que cette quantité doit toujours être
Il résulte ensuite de la seconde condition que ne peut pas être plus grand que l’unité ; car, quelque peu que surpassât l’unité, il serait toujours possible de prendre assez petit pour que l’on eût
tandis qu’on doit avoir toujours
Donc, puisque la valeur de ne peut être ni moindre ni plus grande que l’unité, il s’ensuit qu’on aura nécessairement
Donc la fonction dérivée de est simplement et la fonction dérivée de est désignant un angle quelconque, c’est-à-dire un arc dans le cercle dont le rayon est l’unité.
Ainsi l’on aura en général, pour un angle quelconque
formules connues, et dont la découverte est due à Newton.
Nous venons de considérer les sinus et les cosinus comme fonctions des angles. On peut réciproquement considérer les angles comme fonctions de leurs sinus ou cosinus, et en cherchant les fonctions dérivées. On désigne communément cette fonction par les mots ou placés avant le sinus ou le cosinus, comme caractéristiques.
Soit
mettant pour et supposant
on aura
or
de plus
par les formules trouvées plus haut ; donc, faisant ces substitutions et restituant la valeur de on aura, en ordonnant les termes par rapport à l’équation identique
laquelle donne, par la comparaison des premiers termes affectés de
La comparaison des autres termes donnera les valeurs de mais il est plus simple de les déduire immédiatement de celle de
Soit maintenant
mettant pour et pour on aura
or
faisant ces substitutions, et mettant pour et leurs valeurs en séries, et on aura, après avoir restitué la valeur de et ordonné les termes suivant les puissances de cette équation identique
et la comparaison des deux premiers termes affectés de donnera
d’où résulte
Donc, puisque étant le sinus d’un angle, en est le cosinus et étant le cosinus, en est le sinus, il résulte de ce que nous venons de trouver que la fonction dérivée d’un angle, exprimé par son sinus, est égale à l’unité divisée par le cosinus, et que la fonction dérivée d’un angle, exprimé par son cosinus, est égale à l’unité divisée par le sinus, et prise avec le signe