Le Combat spirituel (Brignon)/11

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Traduction par Jean Brignon.
(p. 55-57).


CHAPITRE XI.
De quelques considérations qui peuvent porter la volonté à ne vouloir que ce que Dieu veut.

AFin d’engager plus facilement notre volonté à ne vouloir rien que ce que Dieu veut, & ce qui est pour la gloire, souvenons-nous qu’il a daigné nous aimer & nous honorer le premier en mille manieres différentes. C’est lui qui nous a tiré du néant, qui nous a créé à son Image, & qui a fait toutes les autres créatures pour notre service ; c’est lui qui voulant nous donner un Rédempteur, nous a envoyé non pas un Ange, mais son Fils unique, qui a racheté le monde[1], Non pas au prix de l’argent & de l’or, qui sont des choses corruptibles, mais au prix de son Sang, & par la mort non moins infame que douloureuse ; c’est lui enfin qui à tous momens nous protege contre la fureur de nos ennemis, qui combat pour nous par sa grace ; qui afin de nous nourrir & de nous défendre en même-tems, est toujours prêt de nous donner le Corps de son Fils à la sainte Table.

Ne sont-ce pas là des témoignages certains de l’estime & de l’affection que ce grand Dieu a pour nous ? Qui pourroit comprendre jusqu’où va la charité pour des créatures aussi pauvres & aussi viles que nous sommes, jusqu’où doit aller notre reconnoissance pour le Bienfaiteur le plus libéral qui puisse être ? Que si les grands de la terre se voyant honorés par des personnes que la naissance ou la fortune a mises au-dessous d’eux, croyent néanmoins étre obligés de leur rendre quelque honneur ? Quel honneur ne doivent pas rendre des vers de terre au Souverain Maitre du monde, qui leur donne tant de marques de sa bienveillance & de son estime ? Il faut surtout nous ressouvenir que cette infinie Majesté mérite que nous la servions par le principe d’un amour très pur, qui ne cherchent qu’à lui plaire.

  1. I. Pet. 118.