Le Croyant/II

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Despret frères (p. Prologue-10).

PROLOGUE.

Dans l’aveugle transport d’une injuste colère :
« À quoi sert, dit l’impie, un Croyant sur la terre ?
» Son cœur est satisfait quand il peut, chaque jour,
» Murmurer à genoux, sans haine et sans amour.
» Quelques mots incompris d’une vaine formule,
» Qu’inventa des humains la faiblesse crédule. »


À quoi sert le Croyant !!! quel mot injurieux !
Mânes de nos héros, de vos palais des cieux,
Descendez un instant, venez, ombres heureuses ;
Venez, découvrez-nous les blessures nombreuses
Dont vous fûtes jadis couverts en combattant,
Et dites à l’impie à quoi sert le Croyant !
Guerrier de mon pays dont le bras magnanime
Planta notre étendard sur les murs de Solyme,
Toi dont jadis Le Tasse a chanté les exploits,
Ô Bouillon, apparais aux appels de ma voix !
Aux yeux du mécréant fais brandir cette épée
Qui du sang musulman fut si souvent trempée,
Et dis-lui qu’aujourd’hui d’autres Croyants encor
Dignement porteraient cet instrument de mort.


Vous aussi qui savez, même au milieu des larmes,
En contemplant le ciel, trouver encor des charmes ;
Et vous, nobles mortels que l’on voit ici-bas
Soutenir pour le Christ tant de rudes combats ;

Vous tous qui confondez et l’envie et la haine,
En consumant vos jours pour la faiblesse humaine ;
Aux cris de la douleur vous qu’on voit accourir,
Vous qui savez aimer, vous qui savez mourir,
Vous que l’Esprit Sacré si puissamment inspire,
Nous allons essayer de chanter sur la lyre
Vos sublimes vertus, votre saint dévoûment,
Et la pieuse ardeur de votre cœur aimant.