Le Jeu des épées/Le Pèlerin
LE PÈLERIN
Voici cette ombre au bord du sentier de soleil
Et le clapotis d’or d’un ruisseau sous les saules,
Ô pèlerin de deuil qu’ont apâli les geôles
Du barbare et maigri les marches sans sommeil.
Trêve à ton vain voyage ! Ici rira l’éveil
De la naïade au vert des roseaux que tu frôles,
Et tu sauras ravir, pâmé sur ses épaules,
La rose des baisers à son rêve vermeil.
Mais redressant d’un geste ascétique ton torse,
Et les larmes aux yeux, et l’âme, hélas ! sans force,
Tu tournes tes pas las, là-bas, vers le manoir.
Car, tonnerre de bronze en le silence agreste,
Sonne, des tours du bourg ravagé par la peste,
Le bourdon qui te somme à quel noir désespoir !