Le Journal de la Huronne/La Houille rouge/Avril 1917

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3 avril 1917.

René est arrivé à l’improviste en permission, il y a huit jours. Le reste n’existait plus pour moi. Je n’ai pas touché ma plume, de toute cette semaine-là. Je n’essaierai pas de conter mon bonheur ― trop court, hélas ! D’abord, je ne pourrais pas. Je ne saurais pas. Les mots me manqueraient. Et puis, pourquoi dire ma joie, puisque je ne dis pas ma peine ? Chaque jour, depuis quatre mois, ai-je avoué ma tristesse, mes rages impuissantes, ces alertes, ces faux pressentiments qui m’arrêtent le cœur quand une dépêche arrive, quand le téléphone tinte, quand une porte s’ouvre ? Si je parlais de lui, chaque fois que je pense à lui, ce journal ne contiendrait que son nom.

Je n’ai même pas à rapporter ses impressions. De vive voix, comme dans ses lettres, il s’interdit toute allusion à la guerre. Dès que j’ai voulu l’interroger sur sa vie, sur la paix possible, il m’a interrompue : « Oh ! tu sais, ma petite maman, là-bas, dans notre popote, on met à l’amende celui qui parle de la guerre ». Peut-être aussi voulait-il m’épargner. Car il sait que nous différons tellement d’opinion…

Mais, lui-même, pense-t-il toujours comme à l’époque où il s’est engagé ? Il a bien changé, en quatre mois. Je ne peux pas dire qu’il ait vieilli. Le mot serait ridicule, appliqué à ses dix-neuf ans. Il a mûri. Une sorte de stoïcisme semble remplacer son enjouement. Est-ce l’habitude de commander d’autres hommes ? Est-ce le voisinage, le spectacle, le risque de la mort ? Parfois, devant ce grand garçon, solide et pensif, je me demandais : « C’est lui, c’est bien lui, mon petit enfant ? »

Une consolation m’adoucit l’affreuse mélancolie du départ. Pendant quelque temps ― et l’offensive est prochaine ― je n’aurai pas à trembler pour lui. Il part pour un centre d’instruction, près de Châlons, où il va étudier je ne sais quel engin nouveau.

4 avril 1917.

Les États-Unis entrent dans la guerre. Puissent-ils l’abréger ! Comment n’y réussiraient-ils pas, grâce à leurs ressources insondables, à la puissance, à la diversité de leurs moyens d’action ? L’abréger, n’est-ce pas le but même qu’ils se proposent ?

Que de causes disparates ne donne-t-on pas de cette intervention… Aujourd’hui, avec Paron, nous cherchions à les rassembler. L’opinion générale, celle que les journaux ont imprimée dans les esprits, c’est que les Américains sont emportés par un de ces grands mouvements idéalistes qui parfois s’emparent des individus et des peuples, et que leur pays veut rendre à la France l’aide qu’elle lui apporta voici cent cinquante ans. Les atrocités allemandes, les soulevant d’horreur, les auraient décidément jetés dans le camp des alliés.

Puis la guerre n’est-elle pas contagieuse ? N’attrape-t-on pas la fièvre rouge comme la fièvre jaune ? Enflammés par le récit de tant d’exploits, ils brûleraient de devenir à leur tour des héros.

Mais on dit aussi que l’extension de la guerre sous-marine, paralysant leurs livraisons au continent, les a exaspérés. On murmure également qu’ils ne veulent pas laisser s’établir sur le monde commercial une prépondérance allemande… ou anglaise ; qu’ils ne sont pas fâchés de se constituer, à l’occasion du conflit actuel, une flotte et une armée surtout destinées à soutenir contre le Japon la guerre « inévitable ». Et, le président Wilson, en se ralliant au parti de la guerre, n’a-t-il pas recherché le suffrage des hautes classes, naturellement belliqueuses ? On chuchote encore que les Américains, qui ont consenti de fortes avances à l’Entente, courent après leur argent et veulent éviter la défaite de leurs créanciers. Enfin, ils auraient réfléchi que, grands fournisseurs de guerre, ils n’auraient pas de plus sûr ni de meilleur client que leur propre pays : ils auraient découvert l’Amérique.

Comment choisir parmi tous ces mobiles ? Mais mon vieil ami Paron, qui m’a d’ailleurs ralliée à son opinion, reste plus convaincu que jamais que les industriels et les financiers sont, dans chaque pays, les grands artisans de la guerre moderne. Et il en voit, dans le concours américain, une preuve nouvelle.

— Sans doute, toutes ces raisons ont-elles joué. Mais comme ont-elles joué ? Voilà l’intéressant. Oui, le peuple américain s’est souvenu de La Fayette ; oui, il a vibré au récit des exploits, il a frémi des atrocités. Mais qui donc attisa ces sentiments généreux, qui donc a soufflé dessus jusqu’à ce qu’ils aient pris feu ? Qui donc a, par la voix formidable de la presse, exalté l’opinion jusqu’à ce qu’elle s’imposât au pouvoir ? Qui ? Sinon ceux que lésait la guerre sous-marine, ceux qui appréhendaient également la faillite possible des alliés et l’hégémonie commerciale étrangère, bref tous ceux qui, leur pays jeté dans la guerre, verraient à la fois leurs craintes s’apaiser et leurs affaires s’accroître ?

Ganville, 10 avril 1917.

Pâques nous a ramenés à Ganville. Je n’y étais pas revenue depuis que mon fils est aux armées. Chaque fois que je passe devant sa chambre vide, je revois notre séjour de 1914, où nous étions tous deux seuls ici, où je l’ai sauvé de cette atroce typhoïde acharnée à me le prendre, où j’ai appris la déclaration de guerre à son chevet de convalescent. Penser que j’ai pu l’arracher à la stupidité de la nature, et que je n’ai pas le droit de le disputer à la stupidité des hommes !…

J’ai revu Mme Mitry, la femme de notre fermier. Son fils unique est au front depuis un an. De tous ceux du village qui servaient dans l’infanterie, il est le seul qui vive encore. Cela semble à sa mère une sorte de miracle quotidien… Qui la comprendrait, qui la plaindrait mieux que moi ?

Elle vit, comme moi, de lettre en lettre. Depuis une semaine, elle n’en a pas reçu. Peut-être, par une de ces cruelles mesures dont on invoque en haut lieu la nécessité, a-t-on suspendu la correspondance des soldats aux approches de l’offensive ?

Quand nous avons quitté Paris, on ne parlait autour de moi que de cette tentative imminente et décisive. Mais j’ai laissé Mme Mitry dans l’ignorance. Ils savent trop bien, dans les campagnes, que leurs enfants périssent surtout dans ces grands massacres à date fixée. C’est aux jours d’offensive que s’allonge la liste de leurs morts.

Elle m’a donné à lire la dernière lettre de son fils. J’en ai recopié un fragment. Quelle révolte désespérée ! Et pourtant, il était simple et doux, ce petit. « En première ligne, nous avions chacun un petit morceau de viande, et une boîte de sardines pour quatorze. Avec cela, monter la garde et rester huit jours sans dormir. Nous sommes descendus en réserve le 20 à 3 heures du matin. Le 20 au soir, il fallut remonter travailler en première ligne. Nous ne tenions plus debout. Nous avons refusé. On nous a promis le Conseil de Guerre. Mais rien ne nous fait peur. On ne peut pas nous rendre plus malheureux. On nous traite d’anarchistes. On le serait à moins. S’ils veulent qu’on y reste tous, ils n’ont qu’à le dire. Ceux qui disent que le moral est bon ne viennent pas le demander aux poilus de première ligne. »

Les journaux ne publient que des lettres en fanfare. Ils étouffent ces plaintes. Comment la foule ne se résignerait-elle pas à la guerre, dont on ne lui montre que la face héroïque, dont on lui cache les indicibles misères ? Mais voiler l’horreur vraie de la guerre actuelle, n’est-ce pas préparer les guerres futures ?

Ganville, 11 avril 1917.

Dans son message du 4 avril au Congrès, le président Wilson déclarait que les Alliés ne traiteraient pas avec les Hohenzollern. On est donc en droit d’espérer que le peuple allemand, afin d’obtenir la paix, se débarrassera de son empereur. Déjà, sous l’influence de la Révolution russe, le Reichstag a réclamé de profondes réformes politiques. Mais, chez nous, les partisans de la guerre indéfinie font bonne garde. Quoi ? L’abdication du kaiser arrêterait le massacre ? Ils voient le péril et renouvellent leur tactique, qui consiste à frapper d’avance de suspicion tout espoir de paix. « La révolution allemande, font-ils écrire dans leurs journaux, sera truquée, maquillée, camouflée. Destinée à sauver le kaiser, d’accord avec lui, elle ne sera qu’une duperie. Il ne faudra pas y croire. »

Paris 16 avril 1917.

Retour à Paris. Malgré moi, Je pense à cette définition du secret par un enfant : « Un secret, c’est quelque chose que tout le monde se dit tout bas. » Tout le monde, en effet, parle de l’offensive, qui doit rester secrète. Chacun apporte son butin. On donne les emplacements, les effectifs, les buts, la date et l’heure.

Elle fut d’abord fixée au 12 avril, à 9 heures du matin. Mais des voies ferrées, établies sur de la neige durcie, s’effondraient au dégel. Le génie demandait cinq jours pour les réparer. De leur côté, les Anglais, devant Arras, s’étaient lancés sans attendre, afin d’obtenir un effet de surprise. Le temps pressait. On sauta par-dessus le vendredi, qui tombait un 13, on choisit le samedi 14, enfin le lundi 16, aujourd’hui même. Des sacrifices qu’entraînera cette entre prise, naturellement, pas un mot. L’insensibilité à la mort des autres est absolue. Mais on entend : « C’est la décision, c’est la grande bataille, c’est la rupture. Tout est prêt. » On affiche de la confiance. Pourtant, les visages et les propos sont fébriles.

À vrai dire, il y a dans l’air d’autres raisons de nervosité.

Des délégués de tous les socialistes belligérants doivent se rencontrer à Stockholm le mois prochain. Que de malentendus dissiperait une telle réunion ! Comme elle hâterait la fin de la guerre… Aussi, la presse orthodoxe dénonce cette « manœuvre » d’un ton de fureur inouï.

D’autre part, le gouvernement provisoire russe, qui reconnaît le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et s’interdit toute annexion, a reçu des offres officieuses de l’Autriche. Il inclinerait vers la paix. Aussi lui a-t-on dépêché de Paris un socialiste notoire et patenté, qui va réveiller ces visionnaires et leur montrer le péril qu’ils côtoient. On va leur déclarer que s’ils font la paix avec les Empires Centraux, ils auront la guerre avec le Japon. Qu’ils choisissent. On va les enfermer dans un dilemme, en attendant mieux.

19 avril 1917.

Bien que les communiqués pavoisent, on a su dès le 17 que la tentative de rupture avait échoué. Elle s’achève. Tous ceux qui, à un titre quelconque, ont assisté à ce vain massacre, sont imprégnés de la même horreur. Certaines unités auraient perdu la moitié, les deux tiers de leur effectif. Au téléphone, afin de nous faire connaître les pertes totales sans citer de chiffres, un de nos amis nous dit tranquillement : « La population de Troyes. »

Sous le coup de la déception, les cœurs se libèrent. On conte maintenant le fameux Conseil du 6 avril à Compiègne, où fut décidée l’offensive. Les militaires étaient partagés. Un des futurs exécutants affirmait bien sa confiance dans son étoile, étalait ses décisions, tout l’avenir prévu et fixé dans ses ordres, assurait qu’il prendrait l’apéritif à Laon le premier soir. Mais les commandants de groupes d’armées doutaient d’une victoire stratégique. L’un d’eux s’entendit même âprement rabrouer : « Sans doute, général, parce que vous n’avez jamais remporté de victoire stratégique ». Devant ce manque de foi, le chef suprême aurait menacé de sa démission. Puis on s’évada de la technique. Abandonner l’offensive, ne serait-ce pas décourager les soldats, gorgés d’espérance ? Ne serait-ce pas permettre aux Allemands de frapper où bon leur semblerait un front dégarni ? L’extension de la guerre sous-marine permettrait-elle une longue patience ? Enfin, une âpre voix fit valoir l’intérêt d’une victoire purement nationale, remportée avant l’arrivée des Américains, et qui ne leur dût rien…

Aujourd’hui, les excuses pleuvent. J’entends des lambeaux de phrases : l’abstention russe ; le repli allemand ; la préparation insuffisante, qui laissait intactes les défenses et les mitrailleuses ennemies ; le mauvais temps, dont souffrit l’observation aérienne ; les ordres d’opérations d’une armée découverts par les Allemands, dix jours avant l’attaque, sur le cadavre d’un sergent… Que sais-je encore ?

Bref, la bataille apaisée, sur les morts innombrables une vilaine clameur s’élève, tout un croassement où s’entrechoquent les intérêts politiques et les ambitions militaires, les vanités déçues et les responsabilités inquiètes…

21 avril 1917.

La Censure déploie, dans la guerre à la Paix, le même zèle qu’au premier jour. On a célébré récemment, dans la basilique de Saint-Denis, une cérémonie destinée à obtenir la fin victorieuse des hostilités. Un journal voulut la signaler sous le titre : « La guerre va finir ». En dernière heure, on ne lui laissa que : « La guerre va… » Une autre feuille intitulait le compte rendu fantaisiste d’un spectacle de marionnettes : « Guignol veut la paix ». On l’amputa. Il dut imprimer : « Guignol veut la… » Le mot abhorré ne doit pas être placé sous les yeux du lecteur.

La censure ne laisse pas écrire que « la guerre est la folie de l’humanité ». Mieux encore. L’écrivain anglais Normann Angell a publié la Grande Illusion. Pour lui, l’illusion consiste à croire que la guerre peut procurer des conquêtes profitables. La censure interdit d’approuver Normann Angell. Elle ne veut pas que la guerre de conquêtes soit une illusion !

Cette même censure laisse passer les rumeurs les plus baroques, lorsqu’elles servent la haine. D’après une information qui a fait le tour de la presse et qui a soulevé des commentaires faciles à imaginer, les Allemands tireraient de la glycérine et de la graisse des cadavres de leurs soldats… Un traducteur tendancieux avait confondu les cadavres des animaux et ceux des soldats.

22 Avril 1917.

On jouait cet après-midi Shylock — personnifié par l’admirable Gémier — en l’honneur de la Société Shakespeare. La représentation, qui devait s’achever vers cinq heures, se prolongea jusqu’à sept heures. Le rideau tombé, l’orchestre attaqua une Marseillaise imprévue, tandis quelques spectateurs, fort en retard, se hâtaient déjà vers la sortie. Au bord d’une loge, une dame impérieuse les immobilisa, en décrétant d’une voix forte qu’on ne bougeait pas pendant la Marseillaise. L’incident est menu, mais significatif. Dans quel temple, au cours de quelle cérémonie, même au moment le plus recueilli, interdirait-on à quelques fidèles de se retirer discrètement ? En réalité, un nouveau culte s’installe, ombrageux, intolérant, farouche.

Avez-vous remarqué qu’un homme peut dénigrer impunément sa province, sa ville, sa maison, sa famille, ses amis, sa maîtresse, mais qu’il n’a pas le droit de risquer la moindre critique sur sa patrie ? Elle n’a pas de travers. Elle a toutes les vertus. Elle est divine. Le patriotisme devient la plus sombre des religions. Nulle n’exigea tant de victimes.

23 avril 1917.

Joffre, accompagné de Viviani, débarque à New-York. On pressa la remise de son bâton de maréchal afin qu’il pût l’emporter en voyage. Sans doute récoltera-t-il en Amérique un regain d’ovations. Non pas qu’il ait tout à fait cessé d’être populaire ici. Pendant sa promenade matinale au Bois, bien des mères, sur son passage, quêtent pour leur progéniture une auguste caresse. On a dit qu’il distribuait parfois des montres aux petits enfants. Un de ces bambins, ébloui par les étoiles qui constellent la manche du maréchal, s’est écrié : « Oh ! maman : la Grande Ourse ! »

25 avril 1917.

À partir d’aujourd’hui on n’a plus le droit de manger de viande le soir. Les boucheries ferment à une heure après-midi. Cette mesure ne frappe en réalité que les restaurants. Et encore les établissements de luxe sauront-ils y échapper. Elle éprouve surtout les restaurants populaires, les gros appétits des travailleurs manuels. La bourgeoisie, qui d’ailleurs s’approvisionnera le matin pour le soir, accepte stoïquement cette restriction nouvelle. Notre ami Villequier, qui ne cesse pas d’être héroïque, m’a déclaré d’un ton agressif que tout Français pouvait perdre impunément la moitié de son poids.

― À ce moment-là, mon cher Villequier, nous serons vraiment devenus le peuple le plus léger du monde.

28 avril 1917.

Millième jour de guerre !… À cette occasion, la grosse presse a consulté l’opinion, cette opinion qu’elle a faite. Naturellement, elle ne rapporte que des propos d’une orthodoxie farouche, des appels à la guerre sans fin. Écoutez le petit bourgeois : « Nous avons été attaqués. Nous serions propres si nous lâchions la partie ! » La pauvre veuve : « On sait bien qu’il faut les chasser et leur faire payer le plus cher possible tous leurs crimes. » Le modeste débitant, derrière son comptoir : « Vaincre à tout prix, sans s’occuper du reste. » Le glorieux blessé : « Nous savons tous pourquoi nous nous battons. Vous voyez comment ils m’ont arrangé ? Si c’est permis ! Ils ne seront jamais punis comme ils le méritent. Le temps n’y fait rien. » L’héroïque ouvrière de guerre : « Y a-t-il une seule Française qui veuille la paix sans la victoire ? S’il y en avait, je ne sais pas ce qu’on devrait leur faire. Je mépriserais mon pays, s’il n’allait pas jusqu’au bout. »

Quelle unanimité ! Et pourtant… Malgré la toute-puissante oppression du pouvoir, des révoltes désespérées secouent le monde ouvrier. Malgré le respect humain, la crainte de paraître tiède ou suspect, de ne pas « dire comme tout le monde », des soupirs montent de l’énorme masse populaire. Dans la rue, en wagon, dans les magasins, on surprend de timides cris de pitié : « Assez de sacrifices… La paix… La fin, vivement la fin. »

Ces plaintes, nos journalistes les ont certainement entendues, s’ils ont vraiment écouté la foule. Mais ils ne les ont pas rapportées. Ils ne pouvaient pas les rapporter. Et c’est une fois de plus la sophistication, la drogue empoisonnée.

Jamais, jamais on ne se rendra suffisamment compte de la duperie abominable dont la foule fut la victime quotidienne. Elle ne voit qu’une face des choses. Elle n’entend qu’un son. Elle ne connaît qu’une version du drame. On voile l’autre face, on étouffe l’autre son, on tait l’autre version. Quelle mentalité résisterait donc à ce traitement infligé tous les jours, depuis mille jours ?