Le Lalita-Vistara, ou Développement des jeux/Chapitre IX

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Traduction par Philippe-Édouard Foucaux.
Texte établi par Musée Guimet, Paris (Annales du Musée Guimet, tome 6p. 110-112).

CHAPITRE IX

Cependant, Religieux, un Brahmane, Pourôhita du roi, nommé Oudâyana, père d'Oudajin, entouré de cinq cents Brahmanes, au temps de l'astérisme Hasta que précède celui de Tchitra, étant allé trouver le roi Çouddhôdana, lui parla ainsi : Il faut que vous sachiez, ô roi, que des parures doivent être faites pour le jeune prince. Le roi lui dit : Bien ! très bien ! qu'on en fasse. Et alors le roi Çouddhôdana lit faire par cinq cents Çâkyas cinq cents parures, telles que : parures pour les mains, parures pour les pieds, parures pour la tête, parures pour le cou, anneaux avec un sceau, boucles d'oreille, brasselets (pour le haut du bras), ceintures, tissus d'or, réseaux avec des clochettes, réseaux de perles, chaussures ornées de la pierre précieuse Maṇi, écharpes ornées de diverses choses précieuses, bracelets d'or, colliers, diadèmes. Et quand il les eut fait faire, au moment de la conjonction de l'astérisme Pouchya, ceux-ci (les Brahmanes) étant venus trouver le roi Çouddhôdana lui parlèrent ainsi : Eh bien, sire, que le jeune prince soit paré !

Le roi dit : Le jeune prince est suffisamment paré et honoré par vous. Moi aussi, j'ai fait faire tous les ornements pour le jeune prince.

Ceux-ci dirent : Pendant sept jours et sept nuits, que le jeune prince attache nos parures à son corps ; alors notre peine ne sera pas sans fruit.

En ce moment, la nuit étant finie et le soleil s'étant levé, le Bôdhisattva entra dans le jardin appelé Vimalavyoûha. Là, Mahâ Pradjâpatî Gâutamî prit le jeune prince sur sa poitrine ; et quatre-vingt raille femmes étant venues au-devant du Bôdhisattva, regardèrent son visage. Dix mille jeunes filles étant venues aussi regardèrent son visage. Cinq mille Brahmanes étant venus aussi au devant du Bôdhisattva, regardèrent sou visage. Là, les parures qu'avait fait faire le fortuné roi des Çàkyas furent attachées au corps du Bôdhisattva. Elles ne furent pas plutôt attachées que, par la splendeur du corps du Bôdhisattva, elles furent obscurcies, ne brillèrent plus, n'étincelèrent plus. Ainsi, par exemple, devant l'or d'un fleuve du Djambou, un amas d'encre répandu tout près, ne brille pas, ne resplendit pas, n'étincelle pas ; de même aussi, ces parures, en contact avec la splendeur du corps du Bôdhisattva, ne brillent pas, ne resplendissent pas, n'étincellent pas.

Ainsi tous les ornements qui sont attachés au corps du Bôdhisattva sont assombris, exactement comme un amas d'encre.

Alors la déesse du jardin, appelée Vimalâ, ayant montré sa personne majestueuse, et se tenant en avant, parla en ces Gàthàs, au roi Çouddhôdana et à cette grande assemblée des Çâkyas :

1. Si toute cette terre réunie aux trois mille (mondes), avec ses villes et ses villages, était remplie et couverte d'or brillant et sans tache, elle serait éclipsée par une seule parcelle de l'or du Djambou, car l'autre or ne brille pas, dépourvu de splendeur. Mais fût-elle pareille à l'or du Djambou, cette terre tout entière,

2. À l'instant où le guide du monde, rempli de modestie et de majesté, laisse échapper un rayon de ses pores, elle ne brille pas, ne resplendit pas, n'étincelle pas ; elle ne le peut, à cause du rayonnement de Sougata, le protecteur (du monde) ; elle est comme de l'encre. Celui-ci, bien orné, rempli de cent qualités, a des parures qui ne brillent pas, lui dont le corps est bien sans tache. Les clartés de la lune et du soleil, les étoiles, ainsi que les rayonnements de la pierre Mani,

3. Les lumières de Çakra et de Brahmâ ne brillent pas devant cotte plénitude de majesté de celui dont le corps porte les signes qui sont les fruits de la vertu antérieure. Quel besoin a-t-il d'ornements vulgaires ouvrages des autres ? Qu'on retire ces ornements ; ne troublez pas celui qui rend sages ceux qui ne sont pas sages ; il n'a pas besoin d'ornements artificiels, celui qui produit les meilleures pensées. Ces parures d'esclave, donnez-les ! cherchez-en de vraiment pures et sans tache.

4. Né en même temps dans le beau palais royal que le fils du roi, Tchandaki en sérail bien paré.

Les Çâkyas étonnés eurent le cœur rempli de la plus grande joie : La prospérité du fils de la famille de Çâkya sera suprême et étendue ! (Telle fut leur pensée.)


Après avoir parlé ainsi et avoir couvert de Heurs le Bôdhisattva, cette divinité disparut en ce lieu même.

Chapitre nommé : Les parures, le neuvième.