Le Livre d’un inconnu/35

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XXXV


Au ciel, comme les mâts d’un immense navire,
Se dressent, ô Paris, tes clochers et tes tours ;
À leurs pieds, dans la rue aux sinueux détours,
La foule en flots pressés vit, circule et respire ;

Flux, reflux incessant, mer où sombre et chavire
Maint naufragé perdu sans espoir de secours,
Phosphorescente houle où le gaz fait reluire
Des trésors étalés au coin des carrefours.


Cependant, fiers géants aux grands murs droits et lisses,
Vous montez dans les airs, austères édifices,
Battus par le grand vent pur et vivifiant,

Et quand s’apaise en bas le tumulte des rues
Dans le déchirement lent et grave des nues
Vous voyez l’aube en pleurs paraître à l’Orient.