Le Livre d’un inconnu/37

La bibliothèque libre.
Anonyme ()
Le Livre d’un inconnuAlphonse Lemerre (p. 80-81).


XXXVII

RETOUR D’AUTOMNE


Ô printemps, verts bourgeons, frais parfums des lilas,
Il me semble vous voir et vous sentir encore,
Et pourtant c’est l’automne, et des prochains frimas
L’annonce est dans ce ciel si limpide et sonore ;
Dans ce beau ciel limpide aux rayons attiédis,
Dans la blonde douceur de ces après-midis
Si courts déjà, qu’Octobre, hélas ! encore abrège ;
Dans ces coteaux jaunis, dans ces bois semés d’or
Que l’hiver, dérangeant leur féerique décor,
Recouvrira bientôt d’un blanc manteau de neige.

Octobre, mois bien triste et bien doux à la fois !
C’est le temps, ô Paris ! et l’heure où tu revois,

À la lueur du gaz éclatant dans tes rues,
Couler à flots pressés tes vivantes cohues ;
C’est l’instant du retour : l’asphalte, déserté
Par les grandes langueurs des mois brûlants d’été,
Sonne ferme et durci sous le pied qui le foule.
Au seuil des magasins encombrés par la foule
Les étalages sont tout neufs et tout pimpants,
Dans l’éclat rajeuni des ors et des clinquants.
L’air vif fouette le sang : chacun va, vient, désire ;
L’intrigue, se nouant dans le jeu du sourire,
Ébauche des premiers chapitres de romans ;
Et puis c’est l’heure aussi, c’est l’heure et c’est le temps
Où dans les bois, parmi les houx et la fougère
Bleuâtre, monte au ciel une brume légère.