Le Livre pour toi/Écoute, j’ai regardé mourir

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LXVI


Écoute, j’ai regardé mourir les campanules blanches que j’aimais tant et j’ai songé.

Malgré l’amour éperdu qui t’a prosterné à mon seuil, malgré mes mains tendues qui t’ont relevé, mes bras repliés sur l’émoi de ta poitrine et l’aube qui nous retrouva enlacés, je ne t’ai rien donné de moi.

J’ai perdu les heures et les minutes, j’ai perdu les secondes hallucinées, elles sont tombées dans le passé.

Rien ne me rendra ce qui n’est plus, ces fleurs lumineuses des heures, mortes comme les campanules blanches que j’aimais tant.

Qu’attendre encore ?

Écoute, s’il te vient la lassitude de l’étreinte qui s’achève devant l’amour infini.

Si tu sens dans ton cœur trop lourd les mots éteints, le geste inutile, n’attendons pas.

Je te tendrai mon poignet où s’est gravée la douceur de ta bouche, et tu prendras ma ceinture pour l’attacher au tien.

Alors, sur le lit empourpré où s’épuisera magnifiquement notre jeunesse mortelle, comme un soir d’été dans la splendeur sanguinaire du couchant, ensemble, ô Sylvius, nous nous endormirons.