Le Livre pour toi/En longeant le faîte des murailles épaisses

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LXXXVI


En longeant le faîte des murailles épaisses qui entourent la ville, de la terrasse où croît la jusquiame blanche, je vois des ânesses paisibles couchées sur la paille chaude, les troupeaux serrés que ramènent les pasteurs et les fours flambants où les ménagères apprêtent le repas du soir.

Il y a, sur des planches, des tomates, des pains dorés, des chapelets d’aulx et, suspendues auprès des portes, des guirlandes de petits oiseaux que les chasseurs rapportent après le coucher du soleil.

Une odeur appétissante monte jusqu’à moi vers les tours creuses où veille le taciturne souvenir.

Des goélands tournent en criant sur les lagunes, une cloche tinte et, parmi les toits fumants, se dresse un cyprès solitaire.

Quel jour, ô Sylvius, à cette heure du repos, entendrai-je ton pas sur le chemin et ton rire à mon seuil ?

Quelle nuit retrouverai-je, longuement appuyée sur mes lèvres, la douceur fraîche de ton baiser ?