Le Livre pour toi/Le gerfaut plane

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Le Livre pour toiE. Sansot et Cie. (p. 167-168).



LXXXI


Le gerfaut plane, la montagne est abrupte et déchirée.

Aux flancs de ses plus hauts rochers, l’océan qui la couvrit de ses ondes amères a laissé la trace étoilée des coquilles, comme, sur le sable des grèves, se marquent les pas sautillants des oiseaux.

C’est là que me sont apparus les derniers vestiges du donjon de la princesse blonde, dont la chevelure, aujourd’hui, repose dans un coffret de verre.

Pendant les heures longues des jours et des nuits, la persévérance du vent en a ouvragé, comme une rare dentelle, les pierres condamnées, et des esprits inquiets gravissent les marches invisibles où s’aventuraient ses pieds fins.

Qu’est-elle maintenant, Sylvius, cette femme d’autrefois à jamais endormie ? Une cendre légère dispersée dans la vallée, un souffle dans la fraîcheur des matins, un parfum qui se joint au parfum de l’aspic, quand fleurissent les jours glorieux du printemps.

Et voici son unique héritage : sous la boîte fragile, cette soie emmêlée comme les écheveaux des brodeuses aux doigts lisses, qui chantent en travaillant.