Le Mahâbhârata (traduction Ballin)/Volume 1/Chap8

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Traduction par Ballin, L..
Paris E. Leroux (1p. 54-58).


CHAPITRE VIII


DISPOSITION DE L’ARMÉE


Argument : Préparatifs de l’armée Kourouide. Conjuration. Dhritarâshtra demande au cocher de lui montrer la chute de Çalya. Prouesses du roi de Madra et des Pandouides. Dénombrement des forces qui restaient de chaque part.


367. Sañjaya dit : La nuit étant passée, le roi Douryadhana dit à tous les siens : Que les grands guerriers se préparent !

368. Et cette armée, connaissant les intentions du roi, se prépara (au combat)… On se hâta d’atteler les chars et on courut contre l’ennemi.

369. On mettait en bon ordre les éléphants, les fantassins se préparaient, d’autres, par milliers, garnissaient les chars de tapis.

370. Ô maître des hommes, on entendait le son des instruments de musique destinés à exciter au combat les armées et les soldats.

371. Alors, ô Bharatide, toutes les forces qui restaient des armées parurent réunies, et ayant chassé l’image de la mort,

372. Les grands guerriers qui avaient élu le roi de Madra, Çalya, se séparèrent, pour distribuer toutes les forces dans les (diverses) parties de l’armée.

373. Ayant rencontré ton fils, tous les soldats, Kripa Kritavarman, le fils de Drona, le Soubalide, Çalya,

374. Et les autres princes qui restaient, firent une convention d’après laquelle il ne fallait qu’en aucun cas un (guerrier) seul combattit les fils de Pandou.

375. Certes (dirent-ils), celui qui (étant) seul, combattrait les fils de Pandou, ou qui abandonnerait (un autre guerrier) les combattant, serait coupable des cinq crimes et des fautes moins graves.

376. Nos camarades doivent combattre en se protégeant réciproquement. Tous ces grands guerriers ayant fait ainsi cette convention

377. Et ayant mis le roi de Madra à leur tête, se hâtèrent de courir sur les ennemis. De même, tous les Pandouides, ayant rangé leur armée en bataille pour le grand combat,

378, 379. S’avancèrent contre les Kourouides, ô roi, pour se battre de toutes parts. Ô prince, cette armée puissante en chars et en éléphants, (était) comme un océan bouleversé.

380. Dhritarâshtra dit : J’ai entendu (le récit de la mort) de Bhîshma, de Drona, de (Karna) fils de Râdhâ. Raconte-moi en détail la chute de Çalya et celle de mon fils.

381. Comment Çalya fut tué dans la bataille par Dharmarâja, et comment mon fils Douryadhana (tomba sous les coups) du fort Bhîmasena.

382. Sañjaya dit : Ô roi, écoute-moi avec fermeté, raconter les combats, la destruction des hommes et la perte complète des éléphants et des chevaux.

383. Ô roi, Drona et Bhîshma étant tués, et le fils du cocher abattu, la grande espérance de ton fils était que

384. Çalya, en combattant, tuerait tous les fils de Prithâ, ô vénérable. Ayant conçu cette espérance dans son cœur, ô Bharatide, et ayant pris courage,

385. Ton fils se considérait comme ayant un protecteur, quand il eut eu recours au grand guerrier, le roi de Madra, (pour diriger) l’armée,

386. Ô roi, quand, après la mort de Karna, les fils de Prithâ poussèrent des rugissements, une grande crainte s’empara des Dhritarâshtrides ;

387. Et le majestueux roi de Madra, les ayant encouragés et ayant, ô grand roi, rangé l’armée en un ordre de bataille, heureux et d’une imposante manière,

388. Alla à la rencontre des fils de Prithâ, en agitant Bhâraghna, son arc brillant et très rapide.

389. Le grand guerrier, étant monté sur son excellent char (attelé de chevaux) du Sindhou, son cocher, ô grand roi, faisait briller ce char (sur lequel il était) placé.

390. Ce héros (dont la vue) effraie ses ennemis, était couvert par le char, ô grand roi et il s’y tenait ferme, éloignant la peur (du cœur) de tes fils.

391. Dans la marche en avant, le roi de Madra, revêtu de son armure, accompagné des héros de Madra et des fils de Karna, difficiles à vaincre, se tint sur le front de l’armée rangée en ligne de bataille.

392. Douryodhana était au milieu, protégé par les héros de Kourou (forts comme des) taureaux. À gauche, était Kritavarman entouré par les Trigartes ;

393. Le Gotamide sur le côté droit, avec les Çakas et Yavanas. Açvatthâman, entouré par les Kambodgiens, se tenait par derrière.

394. Le grand guerrier Soubalide, entouré d’une grande armée de chevaux, avec le grand guerrier Kitavien (Oulôuka), s’avançait, accompagnés de toute l’armée.

395. Et les grands archers Pandouides, dompteurs de leurs ennemis, ayant rangé leur armée en trois corps, couraient contre la tienne.

396. Dhrishtadyoumna, Çikhandin et le grand guerrier Satyakide, accouraient rapidement pour combattre l’armée de Çalya.

397. Alors, ô excellent Bharatide, le roi Youdhishthira, entouré de sa puissante armée, courut vers Çalya lui-même, avec l’intention de le tuer.

398. Le rapide Arjouna, destructeur de multitudes d’ennemis, attaqua le grand archer Hridikien et les troupes des conjurés.

399. Bhîmasena et les grands guerriers Somakas, désireux de tuer leurs ennemis dans la bataille, assaillirent le Gotamide.

400. Les deux fils de Mâdrî, accompagnés de leur armée et de leurs soldats, s’approchèrent pour combattre Çakouni et le grand guerrier Ouloûka,

401. Et tes grands guerriers, irrités, porteurs de diverses armes, se retournèrent, par dizaines de mille, pour combattre les Pandouides.

402, 403. Dhritarâshtra dit : Ô Sañjaya, après la mort de Bhîshma, du grand archer Drona, et du grand guerrier Karna, les Kourouides, (ainsi que) les Pandouides étaient restés en petit nombre, (survivants) à la bataille. Les fils de Prithâ, enragés, exerçant leur force (contre les miens), que restait-il tant de mon armée que de celle des ennemis ?

404. Sañjaya dit : Ô roi, apprends de moi ce qui était resté des armées, (après) les combats (précédents), comment les ennemis et nous étions préparés au combat.

405. Ô excellent Bharatide, onze milliers de chars, dix mille sept cents éléphants,

406. Deux centaines de mille chevaux en entier, et trois dixaines de millions d’hommes : telle était ton armée, ô excellent Bharatide ;

407. Six milliers de chars, six milliers d’éléphants, dix milliers de chevaux et une dizaine de millions de fantassins, ô Bharatide,

408. Voilà ce qui restait de l’armée des Pandouides (à mettre) en bataille. Ceux-là seulement se réunirent pour le combat, ô excellent Bharatide.

409. Ô Indra des rois, excités (par la colère), désirant la victoire, soumis fermement aux désirs du roi de Madra, nous nous levâmes pour rencontrer les Pandouides.

410. De même, les héros Pandouides, victorieux dans les combats (précédents), s’approchèrent (de nous) avec les tigres des hommes, les glorieux Pâñâlas.

411. Ainsi, ô grand roi, ces tigres des hommes, désireux de se tuer réciproquement, s’approchèrent (les uns des autres) au point du jour.

412. Alors commença entre les tiens et les ennemis, qui se tuaient les uns les autres, un combat terrible, épouvantable.