Le Principe de relativité et la théorie de la gravitation/chap. 12

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CHAPITRE XII.

LA THÉORIE DES SURFACES DE GAUSS ET SON EXTENSION À UNE MULTIPLICITÉ POSSÉDANT QUATRE DIMENSIONS.


Nous avons donné un énoncé du principe de relativité généralisé et nous avons dit pour quelle raison cette généralisation s’impose ; nous pouvons maintenant comprendre comment il faudra l’exprimer.

Choisir un système de référence arbitraire, ou faire une transformation arbitraire de coordonnées, c’est introduire un état de mouvement arbitraire ou, d’après le principe d’équivalence, un champ de gravitation arbitraire. Par conséquent, les lois qui régissent les phénomènes physiques doivent, pour être exprimées sous la forme la plus générale, contenir implicitement ou explicitement, sous la forme la plus générale, les grandeurs qui caractérisent un champ de gravitation.

Le principe de relativité exige que les équations qui expriment ces lois conservent leur forme dans un champ de gravitation quelconque.

Cette condition d’invariance, ou plus exactement de covariance, limite considérablement les formes possibles pour les lois de la Nature.

57. Les longueurs et le temps dans un champ de gravitation.

L’influence d’un champ de gravitation sur la marche des horloges et sur la mesure des longueurs dépend du champ envisagé ou, ce qui revient au même, de l’état de mouvement équivalent. Nous allons prendre un exemple simple[1].

Imaginons un système en chute libre, par conséquent localement galiléen ; dans ce système les résultats de la théorie de la relativité restreinte sont applicables. Prenons un second système formé par un disque plan dont le mouvement, par rapport à est une rotation autour d’un axe normal au plan du disque, passant par le centre de ce disque et fixe dans le système Un observateur situé excentriquement éprouve l’action d’une force qui agit radialement vers l’extérieur ; cette force est interprétée par un observateur du système galiléen comme un effet d’inertie : c’est la force centrifuge. Mais, d’autre part, l’observateur entraîné avec doit considérer son disque comme un corps de référence immobile et doit interpréter la force qui agit sur lui et sur les corps au repos par rapport au disque comme l’effet d’un certain champ de gravitation. Il est à peine besoin de faire remarquer que ce champ de force possède une structure qui n’a aucun rapport avec celle du champ de gravitation au voisinage d’une masse attirante, mais conformément à la généralisation à laquelle nous autorise le principe d’équivalence, nous appelons quand même ce champ un champ de gravitation ou, si l’on préfère, un champ de gravitation géométrique.

L’observateur de prend deux horloges identiques marquant toujours la même heure tant qu’elles restent au même point. Il place l’une au centre du disque et transporte l’autre en un point du disque à la distance du centre ; les deux horloges sont immobiles dans le système du disque ; vont-elles rester synchrones ? certainement non. Examinons-les, en effet, du système galiléen celle qui est au centre n’a pas de vitesse, l’autre est en mouvement nous savons que cette dernière va marcher plus lentement. Cet effet sera constaté par l’observateur du disque, car il s’agit d’un effet bien réel et non d’une apparence, le temps propre au point situé à la distance du centre étant plus court que le temps du système galiléen qui est le temps au centre :

de sorte qu’au bout de quelque temps, en ramenant l’horloge du point au centre du disque, l’observateur constatera qu’elle est en retard sur celle qui est restée au centre.

À chaque distance correspond un temps propre ; c’est dire qu’il n’y a aucune synchronisation possible pour l’observateur du système il n’y a pas un temps unique valable pour le système du disque.

Cet exemple fait comprendre que, d’une façon générale, dans un système immobile dans un champ de gravitation, équivalent à un système accéléré par rapport à un système galiléen, il n’y a plus de définition possible du temps pour le système tout entier, plus de mesure possible par des horloges synchrones, car chaque point possède son temps propre.

La définition des coordonnées spaciales présente de même des difficultés insurmontables si l’on s’en tient aux coordonnées de la géométrie euclidienne. Reprenons l’exemple du disque tournant. Imaginons qu’en appliquant sur la périphérie du disque une règle très courte prise pour unité de longueur, on marque deux points et et que le rayon soit mesuré avec la même règle. Un observateur placé au centre appartient au système galiléen, puisque le centre est immobile ; cet observateur peut donc appliquer les résultats de la relativité restreinte : D’une part, pour cet observateur, le rayon du disque n’est pas changé par la rotation, car les rayons sont normaux à la vitesse ; d’autre part, l’unité de longueur qu’il voit passer sur la périphérie lui paraît plus courte que si le disque ne tournait pas (contraction de Lorentz-Einstein) ; l’observateur du centre est donc conduit à considérer la circonférence comme contenant l’unité de longueur un plus grand nombre de fois que si le disque était immobile dans le système galiléen ; il trouve que le rapport de la circonférence au diamètre est supérieur au nombre et le rapport qu’il obtient est d’autant plus grand, pour une même vitesse angulaire, que le rayon de la circonférence est plus grand. La géométrie de ce disque n’est donc pas euclidienne[2].

D’une façon générale, pour un système au repos dans un champ de gravitation, on ne peut plus définir les coordonnées spaciales comme on le fait en géométrie euclidienne. La notion même de ligne droite perd sa signification.

Il semble que, par ces difficultés, toute la théorie de la relativité soit remise en question, car tant que les coordonnées des événements ne sont pas définies, on ne voit plus quel sens attribuer aux lois de la Nature.

Einstein a résolu le problème par une admirable extension de la théorie des surfaces de Gauss.

58. Les surfaces et les coordonnées de Gauss.

Supposons une surface qui ne soit ni plane ni développable sur un plan. Dans une multiplicité à deux dimensions seulement, c’est-à-dire si l’on s’interdit de considérer, entre deux points de la surface, un chemin de traverse dans l’espace extérieur, cette surface est un univers non euclidien[3].

Gauss a montré qu’il est possible d’énoncer les lois de la géométrie de ces surfaces sous une forme indépendante du système de coordonnées. On comprend, dès à présent, qu’en ajoutant deux dimensions, on pourra, par une généralisation de la théorie de Gauss, énoncer les lois géométriques de l’Univers non euclidien à quatre dimensions.

Gauss est parti de l’idée qu’il doit être possible, par des opérations de géodésie sur la surface, de mettre en évidence la courbure de la surface en faisant simplement des opérations locales d’arpentage, par les procédés habituels, en appliquant la géométrie euclidienne du plan. En effet, en tout point de la surface, il y a un plan tangent et, dans une étendue limitée, la surface peut être confondue avec son plan tangent ; ceci est d’autant plus exact que l’étendue envisagée est plus petite, et devient rigoureux pour une étendue infiniment petite.

Traçons sur la surface une famille de courbes arbitraires désignons chacune de ces courbes par un chiffre et figurons les courbes entre deux de ces courbes, on peut imaginer une infinité de courbes représentant tous les nombres compris entre les deux nombres entiers qui désignent les deux courbes envisagées. Les courbes sont assujetties à la condition essentielle de ne pas se couper, de façon qu’il ne passe qu’une courbe par chaque point. Donc, à chaque point de la surface correspond une coordonnée bien déterminée. Traçons de même une seconde famille de courbes les courbes coupant les courbes Chaque point a ainsi deux coordonnées et

Fig. 16.

Deux points et infiniment voisins ont pour coordonnées respectives Les coordonnées de Gauss reviennent, en somme, à la coordination de deux nombres, la correspondance avec les points de la surface étant univoque et telle que deux points infiniment voisins soient représentés par des nombres infiniment peu différents.

Dans une étendue infiniment petite autour d’un point on peut confondre la surface avec son plan tangent et les courbes avec leurs tangentes ; on est donc ramené, en chaque point, à un système de coordonnées rectilignes, mais obliques ; la distance du point à un point infiniment voisin est

(1-12)

Si l’on s’est donné les courbes et on peut, en chaque point mesurer avec des règles les distances au point de trois points extrêmement voisins de ce point, correspondant à des valeurs connues des et pouvant être pratiquement confondu avec et confondus avec et on a trois équations permettant de calculer les qui sont ainsi déterminés par des mesures d’arpentage.

Les sont constants en chaque point, conformément à la géométrie euclidienne ordinaire, c’est-à-dire qu’ils sont indépendants des points choisis pour les mesures d’arpentage.

Mais, d’un point à un autre, les sont variables ; ce sont des fonctions de et de C’est seulement dans le cas d’une surface euclidienne qu’on peut trouver des courbes et telles qu’on ait en tout point

(2-12)

C’est précisément la possibilité d’un tel choix qui est caractérisée par le mot « euclidien ». Sur le plan, les courbes et deviennent ainsi des droites rectangulaires.

Dans le cas général, les étant en chaque point des fonctions de et de l’arpentage permet de connaître ces fonctions. Gauss a montré que la géométrie de la surface est alors entièrement déterminée, et que les lois de cette géométrie s’expriment d’une façon indépendante des coordonnées.

Les lignes de plus courte distance se nomment géodésiques. La longueur d’une ligne quelconque entre deux points est Cette ligne est minimum si la longueur des lignes infiniment voisines de la ligne considérée est constante, puisqu’une fonction est constante aux environs d’un minimum (ou d’un maximum) ; une géodésique rend donc stationnaire la valeur de l’intégrale ce qu’on écrira

(3-12)

En géométrie plane, les géodésiques sont des droites. En géométrie sphérique, non euclidienne si l’on ne considère que les deux dimensions de la surface, ce sont des arcs de grands cercles.

D’une façon générale, si l’on exprime on est conduit à une équation différentielle qui fait intervenir Quand on change de système de coordonnées, l’équation différentielle garde la même forme à condition que les aient les nouvelles valeurs correspondant aux nouvelles coordonnées. Les propriétés des géodésiques se trouvent donc exprimées sous une forme indépendante du système de coordonnées.

On peut aller plus loin et caractériser l’individualité de la surface ; il existe, en effet, une grandeur qui s’exprime au moyen des et de leurs dérivées premières et secondes : cette grandeur est un invariant, c’est-à-dire a une valeur numérique indépendante du système de référence employé : c’est la courbure totale

et étant les rayons de courbure principaux. La courbure totale est une caractéristique de la surface en chaque point.

Pour un plan, on a en tout point

Si on obtient les lois de la Géométrie de Lobatchefsky.

Si on a la Géométrie de Riemann (sphère).

59. Vue d’ensemble de la théorie d’Einstein.

La compréhension de la théorie d’Einstein sera facilitée en indiquant, dès le début, les idées générales.

On peut étendre la théorie de Gauss à un nombre de dimensions plus grand. Avec deux dimensions de plus, ce qui est le cas de l’Univers quadridimensionnel, on pourra confondre, en chaque point-événement, dans un domaine quadridimensionnel infiniment petit, l’Univers réel avec l’Univers de Minkowski tangent, comme en géométrie des surfaces on confond localement la surface avec son plan tangent.

Dans l’Univers euclidien tangent, le principe de relativité restreint s’applique. Cet Univers tangent est localement celui de l’observateur du boulet de Jules Verne, en chute libre, pour qui la loi galiléenne d’inertie est exacte dans son voisinage immédiat.

L’invariant fondamental, l’intervalle d’Univers entre deux événements infiniment voisins, est mis sous la forme suivante, qui est l’extension de (1-12) :

Il n’y a plus ici ni longueurs ni temps, sont quatre variables, quatre coordonnées d’Univers.

Les sont les grandeurs caractéristiques du champ de gravitation, au sens généralisé conformément au principe d’équivalence (no 55) ; ce sont ces grandeurs, les dix potentiels de gravitation, qui doivent figurer dans l’expression des lois des phénomènes, pour que ces lois conservent la même forme, quel que soit le système de référence (no 54).

Dans un Univers euclidien, l’équation générale des géodésiques est, comme nous l’avons vu dans l’étude de l’Univers de Minkowski,

(4-12)

étant les coordonnées d’espace rapportées à trois axes rectangulaires et le temps. Nous désignerons dorénavant par coordonnées galiléennes les coordonnées d’espace et de temps définies par

ou

Cette définition n’est possible que dans un Univers euclidien, et le mot galiléen a un sens plus spécial que le mot euclidien, puisque le système de coordonnées dit galiléen correspond à un choix particulier (trois axes rectangulaires d’espace en mouvement non accéléré) dans un Univers euclidien.

La géodésique (4-12) est l’extension quadridimensionnelle de la droite de la géométrie, et son équation est l’expression de la loi galiléenne d’inertie.

Dans l’Univers réel, et quelles que soient les coordonnées, une géodésique sera encore représentée par l’équation

(5-12)

qui exprime la loi d’action stationnaire.

Un champ de gravitation, au sens généralisé, comporte un élément arbitraire, puisqu’on peut modifier à volonté le champ de force « géométrique » par le choix des coordonnées[4]. Cependant tout n’est pas arbitraire : il y a un élément bien déterminé, la structure géométrique (quadridimensionnelle) de l’Espace-Temps en chaque point-événement. Les intervalles séparant un point d’Univers des points infiniment voisins, intervalles indépendant de tout système de coordonnées, sont des invariants et caractérisent la configuration de l’Espace-Temps, comme en géométrie les distances permettent la description complète d’une figure indépendamment de son orientation ; un autre invariant est la courbure totale, extension de la courbure de Gauss ; enfin les géodésiques ont une existence absolue.

Puisque, dans le champ de gravitation d’un astre, tous les corps tombent avec la même vitesse, malgré leurs poids différents, il faut porter son attention, non sur la prétendue « force attractive » qui est variable avec le corps, mais sur l’état de mouvement, c’est-à-dire sur la ligne d’Univers qui, étant la même pour tous les corps placés dans les mêmes conditions initiales, doit être une caractéristique de l’Univers lui-même.

Dès lors, il ne faut plus dire : la force de gravitation est une force attractive ; un corps abandonné à lui-même dans un champ de gravitation ne se meut pas d’un mouvement rectiligne et uniforme parce qu’il subit une force appliquée. Il faut dire : un corps abandonné à lui-même se meut toujours suivant la loi d’inertie, la loi d’action stationnaire

mais cette loi n’est plus celle de Galilée parce qu’il est impossible de trouver un système qui soit galiléen dans toute l’étendue de l’Univers parce que les lignes d’Univers naturelles, ou géodésiques (5-12) de l’Univers non euclidien, ne sont pas des « droites d’Univers ».

L’expérience prouve que les propriétés et la configuration de l’Espace-Temps sont liées à la présence ou au voisinage de la matière, et plus généralement, de l’énergie. La déformation de l’Espace-Temps à partir de la forme euclidienne entraîne une courbure des lignes d’Univers des mobiles libres, des géodésiques, et cette courbure se manifeste à nous par l’existence d’une force d’inertie qui nous a donné l’illusion d’une force attractive appliquée, parce que, en fait, elle se traduit à nos yeux par une telle apparence.

Il importe de noter que la déformation de l’Espace-Temps ne doit pas être considérée comme la cause de la gravitation. Entre la structure de l’Univers et la gravitation, il n’y a pas de lien de causalité, car c’est une seule et même chose. Les phénomènes de gravitation sont simplement des manifestations de la déformation qui existe en présence ou au voisinage de la matière, qui est soumise à une loi découverte par Einstein, mais dont la cause première reste un profond mystère.

60. Transformations de coordonnées.

Dans un système localement euclidien (chute libre), le principe restreint est applicable dans un domaine suffisamment petit. Soient donc les coordonnées d’espace par rapport à des axes rectangulaires quelconques, la coordonnée de temps. L’intervalle entre deux événements infiniment voisins

(6-12)

est indépendant de l’orientation des axes choisis, et est mesurable dans le système avec des règles et des horloges.

sont des coordonnées galiléennes. Introduisons maintenant de nouvelles coordonnées fonctions des anciennes : inversement, les anciennes coordonnées sont des fonctions des nouvelles variables

On en déduit

(7-12)

Substituant dans (6-12), prend la forme d’une fonction quadratique des

(8-12)

Les sont des fonctions des coordonnées, dépendant de la transformation

La forme de l’expression (8-12) n’est pas modifiée par une nouvelle transformation de coordonnées et l’on peut trouver facilement les valeurs des en fonction des

Les peuvent être groupés dans le tableau

(9-12)

Les seize se réduisent à dix, puisque Dans le cas de coordonnées galiléennes, on a

(10-12)

Nous écrirons l’expression (8-12) sous la forme

(11-12)

Comme exemple, faisons la transformation permettant de passer des coordonnées galiléennes à des coordonnées rapportées à des axes qui, dans le système galiléen, tournent autour de avec la vitesse angulaire Les formules de transformation sont les suivantes :

(12-12)

On en déduit :

(13-12)

Substituant dans (6-12), on a l’expression de l’invariant en fonction des

Le tableau des est le suivant :

(14-12)

Un point matériel libre décrit dans le système euclidien une droite d’un mouvement uniforme ; sa ligne d’Univers est Son mouvement n’est évidemment pas changé par le fait qu’on prend de nouvelles coordonnées et l’on a toujours Mais, dans le nouveau système de coordonnées, les ne sont plus des constantes, ce sont des fonctions des il en résulte que, dans le système des la géodésique devient courbe, le mouvement du point matériel n’apparaît plus comme rectiligne et uniforme. Nous attribuons alors la courbure de la géodésique à un champ de force, à un champ de gravitation (au sens généralisé) qui se manifeste dans le nouveau système ; ce champ est complètement déterminé par les puisque le mouvement du point matériel libre, indépendant de la nature du point matériel, ne dépend que de ces grandeurs. Nous voyons que l’apparition d’un champ de gravitation est liée à la variation des

Dans l’exemple que nous avons choisi, nous remarquons que

est le potentiel de la force centrifuge ( étant la vitesse de rotation). Par analogie, tous les sont regardés comme les « composantes » du potentiel généralisé du champ de gravitation.

Nous avons déjà remarqué (no 59) que dans le cas général d’une transformation arbitraire, les ne sont plus ni des longueurs, ni un temps ; ce sont des « coordonnées d’Univers ». Ainsi, dans l’exemple très particulier que nous venons de donner, n’est pas « le temps » du système tournant : il n’y a pas de temps défini pour ce système tout entier, comme nous l’avons précédemment montré (no 57).

On voit que la méthode suivie est calquée sur celle de Gauss, avec deux dimensions de plus. Au lieu des deux familles de courbes et on a quatre familles d’« espaces » tridimensionnels en chaque point d’Univers, ou événement, se coupent quatre espaces.

Il ne faudrait pas croire qu’une pareille coordination n’ait pas de sens, les coordonnées ne signifiant plus rien (dans le cas général) au point de vue des longueurs et du temps. Nous avons, en effet, insisté sur le fait, qui est la base même de la généralisation du principe de relativité, que les réalités physiques correspondent aux rencontres de lignes d’Univers de points substantiels. Ces rencontres s’expriment par des valeurs communes des coordonnées, quel que soit le choix de ces coordonnées ; tous les systèmes sont donc également bons pour exprimer les lois de la Nature, et la description de l’Univers peut se faire en coordonnées arbitraires, tout comme la géométrie des surfaces ; peu importe que ces coordonnées ne soient ni des longueurs ni des temps. Le principe de relativité généralisé peut s’énoncer : Tous les systèmes de Gauss (étendus à quatre dimensions) sont, en principe, équivalents pour formuler les lois de la Nature.

Veut-on cependant conserver les notices d’espace et de temps ? On peut le faire. Dans un système galiléen, c’est-à-dire où n’existerait pas de champ de gravitation, on pourrait prendre un corps de référence rigide par rapport auquel on repérerait les longueurs, et des horloges synchrones qui mesureraient le temps. Dans un champ de gravitation, il n’y a plus de corps rigides ni d’horloges synchrones : on envisagera alors comme corps de référence des corps non rigides auxquels seront liées des horloges, ou si l’on veut un système formé d’un réseau à trois dimensions, avec des horloges aux nœuds du réseau pour donner l’heure dans chaque cellule. De pareils corps de référence, qui non seulement sont en mouvement, mais changent de forme dans le champ de gravitation sont les « mollusques » d’Einstein. Le mollusque est équivalent à un système de Gauss, mais on conserve l’espace et le temps, chaque point du mollusque étant considéré comme point d’espace, chaque point matériel immobile par rapport à lui étant considéré comme au repos, tant que ce mollusque sert de système de référence.

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  1. A. Einstein, La théorie de la relativité restreinte et généralisée mise à la portée de tout le monde, p. 68.
  2. Remarque : Nous avons reproduit, à peu de chose près, le raisonnement d’Einstein. (La relativité restreinte et généralisée mise à la portée de tout le monde.) Il nous semble cependant que l’observateur immobile au centre doit trouver si, en effet, la circonférence est jalonnée par piquets équidistants, l’observateur trouve évidemment que la circonférence contient toujours le même nombre d’arcs élémentaires, que le disque soit au repos ou en rotation. Mais quand le disque tourne, chaque arc élémentaire est devenu plus court pour l’observateur, celui-ci estime donc que la circonférence s’est raccourcie.
  3. Il est euclidien dans l’espace à trois dimensions.
  4. L’élément arbitraire lié à l’indétermination des coordonnées est comparable à l’orientation arbitraire des figures géométriques.