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Le catholicisme en Corée, son origine et ses progrès/4

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IVème PARTIE
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L’ÉGLISE DE CORÉE S’ORGANISE.
DIVISIONS EN PLUSIEURS TERRITOIRES ECCLÉSIASTIQUES.

§ I. — VICARIAT APOSTOLIQUE DE SÉOUL.
(M-É. de Paris).


Mgr. MUTEL, PREMIER VICAIRE APOSTOLIQUE DE SÉOUL. Sacre de Mgr. Demange. — En 1911, le chiffre des catholiques en Corée avait atteint 77 000, soit un gain de 60 000 en vingt ans. Le Saint Siège décréta la division de ce territoire en deux Vicariats. Le tiers environ de la Mission de Corée, d’une superficie de 53 700 kilomètres carrés avec une population totale de plus de 7 000 000 d’habitants, dont 26 004 chrétiens, le tout compris dans les 4 provinces méridionales (Kyeng-syangto Nord et Sud, Tjenlato Nord et Sud) devint le Vicariat Apostolique de Taikou. Le reste de l’ancienne Mission, comprenant les neuf provinces suivantes : Hamkyengto Nord et Sud, Hpyengan-to Nord et Sud, Hoanghaito, Kyengkeuito, Tchyoung-tchyengto Nord et Sud, soit un territoire d’une superficie de 114 700 kilomètres carrés, avec une population d’environ 8 000 000 d’habitants, dont 51 996 catholiques, devint le Vicariat Apostolique de Séoul. Mgr. Mutel, jusqu’alors Vicaire Apostolique de Corée, fut nommé Premier Vicaire Apostolique de Séoul. Le Père Demange, à qui l’on doit la création en 1906 d’un Journal Hebdomadaire qui, supprimé en 1910 par les Japonais, lors de l’annexion de la Corée, se transforma en Bulletin exclusivement religieux ayant maintenant encore près de six mille abonnés, fut créé Évêque d’Adras, et nommé premier Vicaire Apostolique de Taikou. Il fut sacré à Séoul le 11 Juin 1911 par Mgr. Mutel, assisté de NN. SS. Choulet et Lalouyer.


ACCROISSEMENT DU SÉMINAIRE DE LA MISSION DE SÉOUL. — En cette même année 1911, le Séminaire de la Mission de Séoul, bâti seulement pour 40 élèves, est obligé de s’agrandir une première fois, et en 1914 une seconde fois, car le nombre de ses élèves est porté à la centaine, chiffre qui à chaque rentrée triennale s’est maintenu toujours depuis. Accroissement providentiel d’un heureux résultat pour l’avenir ! Les ordinations vont bientôt de ce fait pouvoir se succéder d’une manière régulière et fournir des ouvriers plus nombreux.


Vue de Séoul
(Au centre on aperçoit la Cathédrale)


MIGRATION DE CATHOLIQUES. — Les coréens sont très migrateurs. Pour beaucoup, leur domicile n’étant pour ainsi dire qu’un campement, ils l’abandonnent sous le moindre prétexte pour aller chercher fortune ailleurs.

Hawai, le Mexique, la Sibérie, le Japon depuis 1904 surtout ont pris bien des âmes, qui sans doute n’ont pas su conserver la foi. Le Kanto, dont nous avons déjà parlé, et dont le premier apôtre avait été le regretté Père Bret, avait lui aussi attiré depuis quelques années bon nombre de coréens : l’annexion de la Corée au Japon en 1910 ne fit qu’accroître cette émigration et bon nombre de nos chrétiens y furent attirés d’autant plus facilement, qu’ils étaient sûrs d’y retrouver des missionnaires parlant leur langue. Aussi en 1920 comptait-on dans cette région près de 8 000 catholiques, administrés par trois missionnaires ou prêtres envoyés de Séoul, après entente avec le Vicaire Apostolique de la Mandchourie septentrionale, dont relevait ce territoire.


ÉCOLES PRIMAIRES. — Après la guerre russo-japonaise, ç’avait été par toute la péninsule, et cela sous l’influence du Japon, un véritable engouement pour les écoles, engouement qui ne fait que s’accentuer avec les années. Les missionnaires de Séoul auraient bien voulu avoir sous la main les maîtres catholiques capables de donner l’instruction aux enfants chrétiens ; malheureusement ces maîtres étaient rares et les écoles de garçons, malgré de lourds sacrifices, n’ont pu jusqu’à présent être fondées en nombre suffisant. Un meilleur résultat fut obtenu pour les écoles de filles, grâce aux Sœurs de Saint Paul de Chartres, qui surent former quelques religieuses enseignantes. En 1923, dix écoles de filles sont ainsi dirigées par ces dévouées maîtresses. Parmi ces écoles, celle de Chemoulpo a attiré l’attention du Gouvernement Général, à tel point qu’une distinction honorifique a été accordée au P. Deneux, son fondateur et directeur.


VIE RELIGIEUSE PLUS INTENSE. — Le Jubilé de 1912 avait porté en Corée d’heureux fruits, en augmentant dans tous les districts le nombre des confessions et des communions de dévotion, et ces fruits n’ont fait désormais qu’augmenter. Les centres où résident les missionnaires et les prêtres coréens ont continué à se multiplier, les églises ou chapelles ont continué à se bâtir par toute la contrée. Alors qu’en 1890, il n’y avait aucune église en Corée, en 1923, le seul Vicariat de Séoul compte une vingtaine d’églises de style européen, 23 chapelles publiques et 114 oratoires.


Église de Ryong-syo-mak, province du Kang-Ouento
(Vicariat Apostolique de Séoul.)

Parmi ces églises, non seulement celles de Séoul et de Chemoulpo, mais aussi plusieurs de celles bâties en province ont un certain cachet, et pourraient avec avantage figurer dans les petits villages d’Europe. Telle l’église de Ryong-syoumak, construite par le P. Chizallet, telle celle de Euitjyou (du prêtre coréen Sye Paul), celle de Ouen-tjyou (du P. Jaugey), celle de Kong-syeiri (du P. Devise), celle de Keum-sari (du P. J. Gombert), etc. etc. D’autres missionnaires ont construit leurs églises dans le style coréen, telles celles du P. Bouyssou à Hponai, celle du P. A. Gombert à Ansyeng, celle du P. Bouillon à Tjyang-eo-ouen, du P. Polly à Katjai, etc. Les prêtres, obéissant fidèlement aux décrets du Souverain Pontife sur la Communion fréquente et la Communion des Enfants, se sont mis à confesser de plus en plus souvent, étant donné que leur résidence était de plus en plus fixe, et la dévotion des fidèles ainsi aidée a fait de sensibles progrès. Un simple rapprochement de chiffres permettra de constater le progrès réalisé dans ces dernières années. Si nous prenons le chiffre des catholiques de l’année 1904, la Mission de Corée avait alors 59 593 catholiques, or nous trouvons un chiffre à peu près égal en 1921 pour la seule population du Vicariat de Séoul, soit 59 761. D’autre part, l’exercice 1904 donne 99 946 communions de dévotion, celui de 1921 en donne 316 583. Le nombre des communions a donc plus que triplé et la moyenne arithmétique serait de onze communions par an et par chrétien en âge d’y participer. Certaines stations chrétiennes sont particulièrement remarquables sous ce rapport. Je n’en citerai qu’une pour exemple : c’est la chrétienté de Tjyang-ho-ouen, où réside le P. Bouillon et où vivent un millier de chrétiens. Cette chrétienté à elle seule a eu en 1923 plus de 36 000 communions.


Intérieur de l’église d’Ansyeng


LES CHRÉTIENS JAPONAIS EN CORÉE. — Depuis l’ouverture de la Corée aux Européens, ce furent surtout les Japonais qui vinrent s’installer dans la péninsule. Leur nombre augmenta peu à peu au fur et à mesure que le Japon y prenait une plus grande influence. Sur ce nombre se trouvèrent bientôt plusieurs centaines de Catholiques, venus en majeure partie de Nagasaki. En 1910-1911, un premier recensement dénombrait 653 chrétiens japonais dispersés sur tout le territoire. Pour administrer ces chrétiens, dont la langue était inconnue des missionnaires de Corée, Mr Kleinpeter fut cédé à la Mission par le diocèse de Nagasaki. Il se construisit, avec l’aide de ses ouailles, un presbytère et une maison de réunion non loin de la Cathédrale de Séoul, et de là rayonna un peu partout pour exercer son ministère. Depuis 1920, c’est le P. Poyaud qui est chargé des Japonais de Séoul seulement. Les Japonais disséminés en province ont maintenant l’avantage de rencontrer des prêtres coréens, voire même des missionnaires qui peuvent les comprendre en leur langue. Il faudrait avoir des ressources suffisantes pour pouvoir payer un catéchiste japonais capable, car il y aurait beaucoup de bien à faire parmi les japonais païens qui viennent en Corée, et qui, de ce fait, auraient plus de facilité à se faire catholiques que s’ils étaient restés au Japon, où le respect humain et les relations de famille les retiennent plus fortement éloignés de la vérité.


REVUE LATINE POUR LES PRÊTRES INDIGÈNES. — En 1912, un bulletin mensuel, rédigé en latin, prit naissance au Séminaire de la Mission de Séoul, et était composé en vue des prêtres indigènes des deux vicariats de Corée. Outre les nouvelles générales, il contenait des plans de sermons, des articles de controverse, des cas de conscience, en un mot tout ce qui pouvait intéresser les prêtres coréens. Les premières années, cette revue était seulement polycopiée, puis la guerre l’interrompit. Reprise ensuite et perfectionnée par le P. Guinand, supérieur du Séminaire depuis 25 ans, elle émigra enfin à Hongkong, où elle se publie actuellement, afin de lui assurer une plus grande diffusion dans toutes les Missions d’Extrême-Orient.


GUERRE DE 1914-1918. LA POUSSÉE PROTESTANTE. — Avec le mois d’Août 1914 commencèrent pour la Mission de Séoul des années d’épreuves. Plus d’un tiers des missionnaires (13 sur 30) sont mobilisés et envoyés en France. Leur absence se fait cruellement sentir. Il fallut assurer l’administration de toutes les chrétientés. Mais, malgré tout, les stations furent visitées deux fois l’an comme en temps normal. Bientôt aussi le Séminaire fournit de nouveaux collaborateurs indigènes, six prêtres coréens purent en effet être ordonnés en 1917 et 1918, et ainsi prirent la place d’une partie des absents. Malheureusement le Père Doucet, Provicaire de la Mission, vétéran des années de la persécution, disparaît en 1917 après avoir travaillé quarante ans avec un zèle magnifique à la Propagation de la foi. Le Père Poisnel, curé de la Cathédrale, lui succéda comme Provicaire. Durant la guerre, ce ne fut pas seulement le personnel missionnaire qui se trouva réduit, mais il faut signaler aussi la diminution des ressources de la Sainte Enfance et de la Propagation de la Foi, heureusement et providentiellement compensée par des aumônes reçues des catholiques d’Amérique. Le ministère apostolique fut encore entravé durant cette période par la propagande shintoïste et bouddhique, très favorisée par les autorités. La poussée protestante de son côté ne perdait rien de sa vigueur, au contraire. Alors que nos moyens étaient si diminués, les diverses sectes nous étaient de plus en plus supérieures, et à quel degré, soit en personnel, soit en ressources ! Enfin les missionnaires mobilisés revinrent en 1919. Trois toutefois, les PP. Meng, Guillot, Boulo, tombés au champ d’honneur, manquaient à l’appel, et un quatrième, le P. Bodin, à peine revenu à Séoul, mais toujours souffrant des suites d’intoxication par les gaz, dut s’en éloigner bientôt et chercher à se rendre utile dans un climat plus chaud. Il est maintenant au Collège Général de Pinang.


LES JAPONAIS ET L’ÉGLISE CATHOLIQUE EN CORÉE APRÈS L’ANNEXION. — L’annexion de la Corée au Japon se fit en 1910, nous l’avons dit plus haut. De cette situation politique nouvelle, la Mission Catholique n’a pas eu à souffrir matériellement, et a joui depuis lors d’une plus grande sécurité, c’est incontestable. Mais il est impossible de ne pas constater aussi que c’est depuis cette date que les conversions de païens sont moins nombreuses. À la suite du mouvement insurrectionnel pour l’indépendance en Mars 1919, mouvement qui secoua un temps toute la péninsule, plusieurs catholiques furent enveloppés dans des sévices immérités, mais c’est généralement pour avoir été confondus par la police avec les adhérents des sectes protestantes, qui avaient trempé dans le mouvement. Les hautes autorités japonaises d’ailleurs n’ont pas manqué de rendre justice à l’Église Catholique en constatant le loyalisme dont les fidèles ont fait preuve dans ces circonstances. En 1920, le Gouvernement général de Chosen (nom actuel de la Corée) accorda à la Mission Catholique de Séoul le bénéfice de la personnalité civile, pour les biens ecclésiastiques de la capitale seulement, mais bientôt, en 1921, cette mesure fut généralisée pour toute la Corée et pour toutes les sociétés de Mission.


Église (style coréen) à Toitjai


BRIGANDAGES ET TROUBLES AU KANTO. Captivité du P. Tchoi Pierre. — La Chine, comme chacun sait, est un pays charmant. Si charmant qu’il soit, il n’a pas su encore se défendre des brigands qui y pullulent. Un prêtre coréen du Kanto, le P. Tchoi Pierre, fut leur victime. Le 19 Juillet 1919 une bande de brigands chinois envahit tout à coup le village de Tjoyangha, pilla toutes les maisons et, après avoir saccagé la chapelle, emmena le prêtre comme otage. Il serait trop long de conter ce qu’il eut à souffrir, et à quelles épreuves il fut soumis. Obligé de suivre partout jour et nuit la horde qui le détenait, il dut assister à plusieurs combats entre brigands et soldats réguliers, vit tomber des morts à ses côtés ; sa coiffure fut même effleurée d’une balle, mais heureusement il n’avait pas été touché.

Pendant ce rigoureux hiver de Mandchourie, il ne put une seule fois durant six mois coucher dans une chambre chaude, et dans la crainte qu’il ne s’évadât, les brigands lui avaient percé l’oreille afin de l’attacher comme on ferait d’un vil animal. Les autorités françaises et japonaises s’essayèrent longtemps en vain à le faire élargir, mais les chrétiens coréens furent plus heureux dans leurs démarches, ils se cotisèrent pour essayer de racheter leur Père, et quand la somme parut assez forte aux brigands, liberté fut donnée au P. Tchoi de regagner sa résidence de Tjyoyangha. C’était en Février 1920. Il dut faire à pied, et par quels chemins ! 600 lys, soit 60 lieues, et put enfin se retrouver sain et sauf au milieu de ses généreux chrétiens. À côté du brigandage, qui ne cesse pour ainsi dire jamais dans cette région, de grands troubles survinrent là aussi, causés par les menées des Indépendants coréens. Sous prétexte de lever des subsides pour le soi-disant gouvernement provisoire de Corée, leurs agents firent de véritables coupes réglées dans toute la région. Mais à l’automne 1920, les choses se gâtèrent. Les japonais intervinrent, et ils le firent avec une justice sommaire qui malheureusement atteignit parfois des innocents. Nos chrétiens, à qui les missionnaires avaient conseillé de se tenir à l’écart du mouvement, s’aperçurent alors combien ils avaient eu raison.


30ème ANNIVERSAIRE DE LA CONSÉCRATION ÉPISCOPALE DE Mgr. MUTEL (1920). — Lorsque la guerre éclata, la Mission de Séoul se préparait pour 1915 à fêter solennellement les noces épiscopales d’argent de son Vicaire Apostolique, mais les événements vinrent interrompre tous ces projets, et ce ne fut qu’en 1920, le 21 Septembre, que le clergé, prêtres coréens et missionnaires de nouveau au complet, et les chrétiens coréens purent fêter le trentième anniversaire de la Consécration épiscopale de leur premier pasteur. Plus de 70 prêtres étaient réunis : parmi eux, il y avait 30 prêtres coréens, tous ordonnés par l’heureux jubilaire. En l’année 1921, le Souverain Pontife, à la prière de S. Ex. Mgr. P. Fumasoni-Biondi, alors Délégué Apostolique au Japon et qui en automne 1920 avait fait la Visite apostolique des Missions de Corée, accorda au vénéré Vicaire Apostolique le titre de Comte Romain et d’Assistant au Trône Pontifical.


CRÉATION DU VICARIAT APOSTOLIQUE DE WONSAN (1920) et DOUBLE SACRE ÉPISCOPAL À SÉOUL (1921).Mgr. Mutel, désireux, vu son grand âge, de se voir déchargé d’une partie du fardeau à lui imposé par l’administration de son immense vicariat, vit en 1920 ses désirs comblés, et par l’élection d’un Coadjuteur en la personne du Père Devred, et par la création du Vicariat de Ouensan dans la partie Nord-Est de sa Mission. À la tête de cette nouvelle région ecclésiastique, le Saint Siège plaça le Révérendissime P. Abbé Boniface Sauer de la Congrégation des Moines Bénédictins de Sainte Odile, (Bavière). Le jour de la Consécration du Coadjuteur de Séoul avait été fixé au premier Mai 1921, et toutes les pièces nécessaires arrivèrent à temps pour permettre à Mgr. Sauer de se faire sacrer le même jour. Comme l’a écrit un missionnaire : « L’hiver des persécutions a passé, les pluies des afflictions se sont écoulées, les fleurs des martyrs ont paru sur notre terre de Corée, exhalant leur parfum et émettant de généreux rameaux. C’est ainsi que pour la Mission de Séoul s’ouvrit en 1921, le beau mois de Marie. » Mgr. Mutel était le prélat consécrateur, assisté de Mgr. Demange de Taikou et de Mgr. Castanier d’Osaka. Mgr. Choulet et Mgr. Combaz honoraient la cérémonie de leur présence. À ce double sacre, les autorités japonaises et le corps consulaire tinrent à assister, et au déjeuner qui suivit la cérémonie, le Gouverneur Général l’Amiral Baron Saito prononça un discours très significatif et très remarqué, rendant hommage à la modestie et au courage des missionnaires catholiques.


les quatre évêques actuels de corée.
Mgr MUTEL
Mgr DemangeMgr DevredMgr Sauer


SYNODE DE SÉOUL DE 1922 et PROMULGATION D’UN NOUVEAU DIRECTOIRE POUR LE CLERGÉ DU VICARIAT. — Le coutumier promulgué jadis par Mgr. Blanc étant devenu incomplet et désuet, un nouveau directoire fut préparé en 1921 et distribué à tous les missionnaires et prêtres coréens, qui eurent six mois pour le travailler et transmettre leurs observations, et le texte définitif ayant été établi pendant les mois d’été, Mgr. Mutel promulgua le nouveau directoire le 21 septembre 1922. À la retraite de cette année là, l’officialité fut installée à Séoul avec quatre juges synodaux européens et quatre juges synodaux coréens.


JEUNESSE CATHOLIQUE. — Depuis une quinzaine d’années et plus, ici ou là, en divers districts, des sociétés de Jeunesse catholique s’étaient formées sous la direction de plusieurs missionnaires. En 1922, un réglement général leur fut donné, de nouvelles sociétés se fondèrent et se groupèrent toutes en fédération. À l’heure actuelle, cette fédération réunit 19 sociétés avec 1018 membres actifs, 269 membres auxiliaires et 75 aspirants. À ne considérer que le nombre, on pourrait conclure à un beau résultat, mais il ne faut pas exagérer la valeur présente de cette association, qui est encore loin d’être entrée dans une période d’activité vraiment organisée.


Groupe de chrétiens coréens à Séoul


MAISON DE FAMILLE pour étudiants et essai de fondation d’une ÉCOLE COMMERCIALE. — Le P. Krempiff, en 1922, avait lancé dans la revue religieuse des Missions de Corée, l’œuvre de la Maison de Famille pour étudiants. Les catholiques coréens, malgré leur pauvreté, souscrivirent plus de 6 000 yens, ce qui permit de construire une maison provisoire où une cinquantaine de jeunes catholiques peuvent recevoir l’hospitalité. La fondation d’une École supérieure de Commerce a été aussi lancée, mais les charges sont tellement grandes, que la Mission n’a pas encore pu prendre cette œuvre à son compte. Un comité catholique coréen a pu, aidé par la Mission, trouver quelques fonds, qui ont permis à cette école de végéter, mais il manque pour la faire vivre et un personnel capable et des ressources suffisantes.


DIRECTOIRE DES CATÉCHISTES. — L’œuvre des catéchistes est d’une importance que proclament de plus en plus tous les missionnaires, malheureusement les ressources actuelles ne permettent pas d’entretenir un personnel rétribué. Les jeunes catholiques s’essaient d’une part à se constituer catéchistes volontaires, d’autre part, il y a à la tête de chaque chrétienté un chef, dont le rôle est de remplacer le missionnaire absent pour la direction des chrétiens. Pour aider ces précieux auxiliaires, qui sont au nombre de plus de 600, le P. Legendre a rédigé un Directoire, résumé de tout ce qu’il est nécessaire de savoir pour la bonne administration des Chrétiens. Dans ce but aussi, une retraite annuelle de catéchistes, dont l’initiative est due au P. Polly en 1910 et qui se faisait depuis plus ou moins régulièrement dans diverses résidences, a été instituée pour tous les catéchistes de tous les districts. Ceux-ci doivent désormais se réunir chaque année près du missionnaire, et durant 3 ou 4 jours, écouter ses avis et se retremper dans la ferveur par les exercices spirituels.


IMPRIMERIE DE LA MISSION DE SÉOUL. — Nous avons vu plus haut comment l’imprimerie fut fondée à Séoul ; depuis lors, elle a poursuivi son travail chaque année pour toute la Corée. Outre une Revue religieuse, qui tire chaque quinzaine à six mille exemplaires de 28 pages, cette imprimerie a imprimé au cours de l’année 1933 quarante mille volumes ou brochures, soit environ un million cinq cent mille pages. Même l’œuvre des tracts a été inaugurée, suivant en cela l’initiative de Mgr. Demange qui l’avait commencée dans son vicariat.


SŒURS DE S. PAUL DE CHARTRES. — Ces dévouées religieuses ont à Séoul un noviciat, un orphelinat et une crèche, plus une classe de français pour les enfants européens. À Chemoulpo, elles ont un orphelinat et une crèche également. Dix écoles soit à Séoul, soit à Chemoulpo, soit ailleurs ont pour maîtresses des religieuses indigènes de cette congrégation. À l’heure actuelle, ces religieuses comptent dans le vicariat de Séoul : 11 sœurs françaises, 40 professes coréennes, 17 novices, 14 postulantes et 9 aspirantes. Les orphelinats de Séoul et de Chemoulpo depuis leur fondation ont élevé et nourri plus de cinq mille enfants. Deux dispensaires à Séoul et à Chemoulpo essaient de faire quelque bien, malgré leurs faibles ressources.


CAUSES DES MARTYRS DE CORÉE. — Il y a pour la Corée deux causes de martyrs actuellement traitées en cour de Rome. La cause des Martyrs de 1839 et 1846, qui comprend 82 Martyrs, parmi lesquels les Vénérables Imbert, Maubant Chastan et Kim André. Cette cause est sur le point de se terminer, puisque la Congrégation générale s’est tenue à Rome le 18 Mars dernier (1924). La cause de 1866 comprend 26 martyrs, soit Mgr. Berneux, Mgr. Daveluy, les PP. de Bretenières Dorie, Pourthié, Petitnicolas, Aumaître, Huin, plus 17 martys coréens. Le Procès apostolique de cette cause est en train de se terminer à Séoul. Mgr. Mutel a été heureux en 1921-1922 de trouver enfin dans les archives coréennes (Annales de la Cour de Corée et Journal du Royaume) des documents très intéressants pour les deux causes. Ces documents donnent soit les sentences des martyrs Confesseurs de la foi, soit l’énoncé des motifs de leur arrestation et de leur condamnation à mort.


LES DOUZE MARTYRS CORÉENS
de la Société des Missions Étrangères de Paris


Le NORD-OUEST DU VICARIAT APOSTOLIQUE DE SÉOUL EST ATTRIBUÉ AUX MISSIONNAIRES AMÉRICAINS DE MARYKNOLL. — Après avoir divisé son immense vicariat une première fois en 1911 (création des 2 Vicariats Apostoliques de Séoul et Taikou) et une 2ème fois en 1920, (création du Vicariat Apostolique de Wonsan, cédé aux Bénédictins), Mgr. Mutel eut encore la joie en 1922 de voir la S. C. de la Propagande attribuer la région du Nord-Ouest aux Missionnaires américains de Maryknoll. Comme nous le dirons plus loin (§. IV — Territoire du Hpyenganto), cette attribution n’aura que d’heureux résultats, étant donné la nécessité toujours plus grande de s’opposer à la propagande protestante sans cesse plus active, particulièrement dans cette région.


PERSONNEL DE LA MISSION AU DÉBUT DE 1924. — 1 Évêque Coadjuteur, 1 Provicaire, 23 Missionnaires français (M-É de Paris). 3 Missionnaires américains et 1 frère de la Société de Maryknoll, 30 prêtres coréens, 18 catéchistes rétribués, 614 catéchistes volontaires, (chefs de chrétienté), 112 femmes catéchistes, 143 maîtres et 64 maîtresses d’école, 26 grands séminaristes, 61 petits séminaristes, 25 élèves au cours préparatoire, soit au total 112. — 11 Sœurs françaises de Saint Paul de Chartres, (en 2 communautés : Séoul et Chemoulpo) et 80 religieuses indigènes (professes, novices, etc). Nous parlerons plus loin du Monastère des Moines Bénédictins de Séoul. (voir § III. — Vicariat Apostolique de Wonsan.)


§ II. — VICARIAT APOSTOLIQUE DE TAIKOU.
(M-É. de Paris).


Durant les 12 premières années de son existence, (1911-1923) comme Mission distincte, le Vicariat de Taikou n’a rencontré aucun événement extraordinaire qui lui soit particulier. Sur 4 missionnaires mobilisés, un, le P. Maurice Canelle, fut tué en 1918.

La nouvelle Mission avait à organiser les œuvres générales nécessaires à une Mission distincte et qui justifient sa séparation, tout en continuant l’œuvre d’évangélisation.


TRAVAIL D’ORGANISATION. — Au point de vue matériel tout était à faire et la crise mondiale, qui commença trois ans après la naissance de Taikou et continue, rendait cette création laborieuse. Néanmoins, par une protection très spéciale, dont une grotte votive à Notre Dame de Lourdes perpétue le souvenir reconnaissant, on put construire l’évêché en 1913, le séminaire en 1914, le couvent des religieuses en 1915, la maison de réunion de la Jeunesse catholique en 1916. L’église autrefois bâtie par le P. Achille Robert devenait cathédrale ; elle fut notablement agrandie, et, pour garder les proportions, les flèches furent surélevées, en 1918. Le séminaire avait été conçu sur un plan d’ensemble ; en construisant, comme il est dit plus haut, la première partie qui pouvait loger 70 élèves, et la chapelle, Monseigneur Demange pensait bien laisser l’achèvement de ce plan à ses successeurs. Les vocations augmentant au delà de toute prévision, on dut bâtir de nouveau et le plan total fut réalisé en 1919. Et comme la santé des séminaristes laissait souvent à désirer, pour leur procurer un changement d’air régulier et complet, une villa assez spacieuse est la dernière construction qui ait été faite, terminée pour la rentrée de 1923.

La première retraite qui suivit la création de la Mission fut un quasi-synode. Un projet de Directoire avait été établi par le Vicaire Apostolique et son Conseil ; polycopié en français pour les missionnaires et en latin pour les prêtres indigènes, avec pages blanches intercalées, et envoyé à chacun, plusieurs mois à l’avance, pour être retourné avec les observations et desiderata de tous. Ces observations furent étudiées en neuf séances et le projet, définitivement fixé, devint Directoire promulgué le jour de la Pentecôte 1912 et obligatoire depuis cette date. Les innovations apportées par ce nouveau règlement entrèrent en exercice cette même année. On peut signaler, parmi elles, celle des retraites annuelles des catéchistes, qui réunissent entre les deux administrations ces collaborateurs, autour de leur propre missionnaire, aidé d’un confrère, et établissent plus d’unité, d’entrain et de constance dans le travail de ces 400 ouvriers si utiles. Le principal exercice de cette retraite consiste dans l’explication du Règlement des catéchistes, publié également en 1912, et qui contient les extraits du Directoire, les règles qui concernent les catéchistes. Des résultats visibles, notamment le chiffre des baptêmes de moribonds, qui doubla presque, à la suite de ces retraites, montrèrent l’utilité de cette initiative, qui se continue, avec une régularité dont missionnaires et catéchistes doivent être loués.


TRAVAIL D’ÉVANGÉLISATION. — Une nouvelle Mission peut l’être de deux façons : ou parce qu’elle s’établit dans un pays qui n’a pas été évangélisé précédemment, ou parce qu’elle continue dans un cadre ecclésiastique nouveau, l’évangélisation qui existait déjà. C’est dans ce second sens seulement que Taikou est une Mission nouvelle. Bien que ses parties extrêmes n’aient jamais vu le missionnaire, dans sa majeure partie, elle fut évangélisée dès les débuts du christianisme en Corée. Dans les causes des Martyrs qui sont en cour de Rome, elle est représentée, bien que, pour un trop grand nombre des témoins qu’elle a fournis à Jésus-Christ, l’éloignement de Séoul n’ait pas permis les enquêtes qui auraient donné, sur la terre, le titre que ces martyrs possèdent auprès de Dieu.

En 1911, Taikou recevait 26 004 chrétiens, dont un millier appartenaient radicalement à la Mission de Séoul et devaient lui retourner. Après avoir rendu, en 1922, ces fidèles, au nombre alors de 1 115, la Mission compte, dans les statistiques de 1923 : 31 457 fidèles, sur lesquels 755 sont inscrits comme non-pratiquants. Cela représente donc un accroissement de 6 500. En fait, les baptêmes d’adultes, ajoutés à l’excès des naissances sur les morts, devraient donner un nombre plus fort. La différence est due, partie à l’émigration, partie à des défections. Pour ces dernières, en effet, nous cessons de compter, dans le nombre total des chrétiens, ceux qui ont définitivement abandonné la pratique de la religion. En vérité, ce nombre n’est pas très considérable : avant l’annexion de la Corée par le Japon, les néophytes pouvaient espérer que leur qualité de fidèles d’un missionnaire étranger les soustrairait aux vexations des mandarins et certaines conversions, étant intéressées, n’étaient pas solides ; depuis l’arrivée des Japonais, qui a précédé, d’un an, la création de la Mission de Taikou, les Coréens n’ont aucun avantage à se convertir et trouvent même, dans leur entrée dans une église réputée étrangère, plusieurs inconvénients, aussi les défections des nouveaux baptisés sont-elles peu nombreuses. Se conformant au triple but qui est indiqué, dans le Règlement de la Société des Missions Étrangères de Paris, comme le programme de l’apostolat, la Mission nouvelle s’est efforcée de continuer le travail des missionnaires de Corée : 1o. l’établissement d’un clergé indigène ; 2o. la solide formation chrétienne des fidèles existants et 3o. la conversion des infidèles.


Séminaire de Taikou


1oŒUVRE DU CLERGÉ INDIGÈNE. — Quatre prêtres indigènes, ordonnés depuis plusieurs années, firent en 1911 partie du clergé du nouveau Vicariat, dont ils étaient originaires. Il n’y avait alors, au grand séminaire de Séoul, aucun élève des provinces méridionales, dont tout l’espoir se réduisait à l’avenir de 6 latinistes, dont le plus avancé devait, à la rentrée suivante, commencer la philosophie, les 5 autres terminant seulement leur 3ème année de latin. La nouvelle Mission souffrit longtemps de cette pénurie des débuts. Dès l’automne de cette première année, 15 enfants commencèrent le latin, encore au séminaire de Séoul, qui voulut bien les garder, jusqu’au moment où Taikou aurait son séminaire. La question d’un séminaire unique pour plusieurs Missions, a ses partisans et ses adversaires, qui ont sans doute raison les uns et les autres, suivant les conditions des pays où la question se pose. En Corée, les faits sont clairement favorables à la création de séminaires dans chaque Vicariat. Il semble bien que le principal avantage de la division de la Corée a été la multiplication des vocations religieuses indigènes. Taikou qui, par suite de l’éloignement de Séoul, était resté si en arrière, a montré que les vocations ne lui manquaient pas. À la rentrée de Septembre 1923, il y avait, au séminaire de St. Justin 105 séminaristes, dont 15 à la section préparatoire. Huit prêtres sont sortis de ce séminaire, depuis 1918, mais c’est seulement à partir de 1926, que l’on pourra moissonner un peu largement. Le principal obstacle à cette œuvre s’est révélé, les dernières années surtout, dans les santés, qui, on ne sait trop pourquoi, s’accommodent mal de l’internat, dont les conditions matérielles sont cependant telles que les inspecteurs Japonais les ont, à l’occasion, trouvées supérieures à celles de beaucoup d’établissements similaires. Deux séminaristes de Taikou ont été envoyés à Rome, en 1919. Tous deux sont morts : un à Rome même, l’autre quelques mois après son retour : tous deux de maladie de poitrine, dont cependant l’examen médical, fait avant leur envoi, n’avait pas trouvé de germe.


Cathédrale de Taikou


2oFORMATION CHRÉTIENNE DES NÉOPHYTES. — On n’a eu, pour l’administration des chrétiens, qu’à continuer les excellentes méthodes léguées par les premiers évêques et missionnaires de Corée. Il n’est pas téméraire d’attribuer à ces méthodes, assez sévères, (tout fidèle doit, chaque année, quel que soit son âge, réciter devant le missionnaire son catéchisme et ses prières, comme ses enfants et petits enfants) le maintien dans une ferveur, que bien des pays catholiques nous envieraient, de ces pauvres gens, pour la majorité desquels les secours de la religion sont encore réduits au minimum. Le Directoire s’est surtout préoccupé de donner à la résidence, dans laquelle le missionnaire passe la plus grande partie de l’année, une forme se rapprochant, autant que possible, de celle de la paroisse : instructions religieuses de la messe dominicale, catéchismes d’adultes et d’enfants, cérémonies liturgiques expliquées, vie eucharistique plus intense. Les deux décrets de S. S. Pie X, sur la communion des enfants et la communion fréquente, ont été d’un grand secours dès le début. Alors que la population catholique n’a augmenté que d’un sixième environ en 12 ans, le chiffre des communions est passé de 57 mille à 209 mille. Le nombre des chapelles était de 19 au début de la Mission, il est actuellement de 73. La plupart sont très modestes, mais donnent cependant au bon Dieu le plus bel édifice de la localité, et permettent la vie sociale catholique, impossible quand chaque famille doit célébrer les fêtes dans sa petite maison particulière. Les missionnaires, seuls ou à peu près, pendant longtemps, puis avec une meilleure collaboration de leurs chrétiens, ces derniers temps, ont donné le plus clair de leurs ressources et de leurs ennuis à la question des écoles, pour un résultat souvent négatif. Les règlements japonais, de plus en plus exigeants, et ne s’accommodant que d’un budget public, nous amèneront, vraisemblablement, dans un avenir peu éloigné, à la condition de nos confrères du Japon qui ont dû renoncer aux écoles primaires. Elles ne nous seront pas interdites par la loi, tant que le gouvernement se trouvera incapable d’assurer l’instruction obligatoire dans ses écoles à lui, mais elle le sera, en fait, à nos ressources qui, mises en entier à cette seule œuvre, n’y suffiraient pas. Quant aux écoles secondaires, toutes les démarches faites auprès des congrégations enseignantes sont restées infructueuses. En confier la direction à des missionnaires de la Mission, étant possible en théorie, ne l’est pas en pratique, vu le nombre vraiment trop limité des missionnaires apostoliques. Vouloir les mettre sous une seule direction indigène, serait les vouer, non seulement à l’insignifiance absolue en matière d’éducation morale, mais à la ruine. C’est qu’en effet, la difficulté matérielle n’est pas celle qui donne le plus de soucis aux missionnaires ; l’esprit des écoliers, dont les grèves presque journalières, dans les établissements protestants et même du gouvernement, indiquent la tendance, sans aller jusqu’à ces excès dans nos écoles, y pénètre largement, de sorte que l’on se demande, non sans raison, si ces écoles ne nous préparent pas des générations de tièdes. Le même esprit a empêché Monseigneur Demange de donner à l’œuvre de la Jeunesse catholique, dont il s’occupe personnellement depuis son arrivée à Taikou, les développements qui étaient dans son plan. Il voulait étendre cette œuvre dans tous les districts. En fait il y a des sociétés particulières, dans beaucoup de districts ; les unir serait les mettre, toutes, en présence des dangers, que l’inconstance et l’esprit utopique de la jeunesse actuelle leur ferait courir, tandis que ces dangers localisés peuvent ne pas exister partout en même temps.

L’évolution de la Jeunesse Coréenne est le point noir de l’avenir. Dans combien d’années, ou de générations, le mouvement, venu d’outre-mer, se tassera-t-il ? C’est le secret de Dieu.


3oCONVERSION DES INFIDÈLES. — Les écoles et l’œuvre de la Jeunesse catholique, voulaient être, en même temps que des œuvres de préservation des fidèles, des instruments d’apostolat. La Jeunesse catholique a obtenu et obtient encore quelques résultats, mais très limités. L’École des Sœurs de S. Paul de Chartres, à la paroisse de la Cathédrale, amène, chaque année, de nombreux baptêmes, non seulement des fillettes qui la fréquentent, mais de leurs familles. C’est la seule. On pourrait développer, avec les mêmes avantages, ces écoles des Religieuses et les autres œuvres de l’excellente Congrégation de Saint Paul, mais, pour cela, la Mission de Taikou, par son éloignement de Séoul, se trouve dans une situation analogue à celle dans laquelle elle se trouvait avant la division, pour l’œuvre du séminaire. Le Vicaire Apostolique a fait bien des appels pour des catéchistes, persuadé que c’est le seul moyen de faire, à proprement parler, de l’évangélisation chez les paiens. Les résultats de ces appels sont modestes. Il y a actuellement 10 catéchistes prédicants, dont 3 seulement sont définitivement établis. Il ne faut pas les confondre avec les 400 catéchistes résidents qui sont chargés des chrétiens, et, ne recevant aucune rétribution, ne s’occupent qu’accidentellement des païens. L’œuvre des Tracts a été inaugurée en 1921. Elle a donné des résultats et semble devoir en donner davantage, mais il est difficile d’attribuer à tous les éléments des conversions, la part qui leur revient, et cela a, du reste, peu d’utilité, du moment que la semence est jetée. Il reste que, comme par le passé, le double agent des conversions le plus assuré est la multiplication des districts ayant un prêtre en résidence et l’action personnelle des chrétiens, de sorte que, en travaillant aux deux premiers buts, on travaille au troisième. Le chiffre le plus bas de baptêmes d’adultes instruits, en un an, a été 397 ; le plus élevé, cette année, 557 ; celui des adultes, baptisés à l’article de la mort a été, cette année, de 343 ; celui des enfants de païens moribonds de 1 471. On doit ajouter en terminant ces considérations sur le travail des conversions, que le prêtre indigène ne le cède pas pour l’esprit missionnaire à son confrère européen, et n’a pas l’idée de se considérer comme simple curé des fidèles. À un moment où l’avenir du recrutement européen promet si peu et où, heureusement, l’œuvre du clergé indigène semble en bonne voie, il y a dans cette considération, une raison d’optimisme justifié.


PERSONNEL DE TAIKOU AU DÉBUT DE 1924. — 1 Évêque, 15 missionnaires français, 12 prêtres indigènes, 12 sœurs dont 9 indigènes, 10 catéchistes prédicants, 400 catéchistes résidents.


§ III. — VICARIAT APOSTOLIQUE DE WONSAN
(Ouensan)
(Pères Bénédictins de Ste. Odile. — Bavière)


LES PÈRES BÉNÉDICTINS DE Sainte ODILE EN CORÉE. — (Février 1909). — En 1908 Mgr. Mutel, voulant doter son Vicariat de professeurs habiles, était allé en Europe, pour trouver une congrégation, qui voudrait bien se charger en Corée des Œuvres scolaires. Après bien des démarches, et ne trouvant pas en France de sociétés qui puissent s’y dévouer, il réussit à intéresser à ce projet les Bénédictins de la Congrégation de Sainte-Odile de Bavière. Plusieurs moines arrivèrent bientôt et fondèrent un monastère qui, prieuré d’abord, fut érigé en Abbaye en 1913. Le Père Prieur Boniface Sauer en fut nommé premier Abbé. L’œuvre pour laquelle ils étaient venus en Corée, semblait au commencement donner les plus belles espérances. Le but poursuivi par les Bénédictins était de former des maîtres chrétiens pour les petites écoles de province. En dehors de cette œuvre principale, les Pères avaient ouvert un atelier de menuiserie et de peinture, une forge, et des cours de jardinage, embryon d’une future école industrielle. On y voyait déjà 60 apprentis. Mais bientôt des difficultés spéciales, nées de la législation japonaise, forcèrent les Bénédictins à interrompre les cours de l’École Normale. Seule l’École industrielle prospérait encore, quand la guerre de 1914 éclata et arrêta tout progrès dans cette voie.


CRÉATION DU VICARIAT APOSTOLIQUE DE WONSAN (Ouensan). — La Divine Providence, qui avait appelé les dignes fils de Saint Benoit en Corée, les réservait pour une autre œuvre. En effet, la guerre finie, les Bénédictins, jusqu’alors confinés à Séoul, exprimèrent à Mgr. Mutel le désir de se rendre utiles, demandant une partie du Vicariat de Séoul pour exercer leur zèle. L’affaire fut portée devant la S. C. de la Propagande, qui en 1920 accorda aux Bénédictins la partie Nord-Est de la Corée, soit les deux provinces du Hamkyengto Nord et Sud, avec la région du Kanto en territoire chinois, région habitée surtout par des émigrés coréens et où, comme nous l’avons vu plus haut, se trouvaient déjà trois prêtres du Vicariat de Séoul. À cette région le Saint Siège adjoignit en 1922 les deux intendances de Yenki et Ilan, appartenant jusqu’alors à la Mandchourie septentrionale. Tout ce nouveau territoire ecclésiastique est désigné sous le nom de Vicariat de WONSAN ; (Ouensan), Mgr. Sauer, (nous l’avons déjà signalé) en est devenu le premier Vicaire Apostolique, avec le titre épiscopal d’Appiaria.


L’église de Ryong-tjyeng, avec les enfants des deux écoles Catholiques de la ville.
(Actuellement dans le Vicariat Apostolique de Won-San.)


ORGANISATION ET CRÉATION D’ŒUVRES DIVERSES. — Sacré en même temps que Mgr. Devred, le 1er Mai 1921, Mgr. Sauer se rendit immédiatement après à Changchoun pour régler avec Mgr. Gaspais, Coadjuteur alors du Vicariat Apostolique de la Mandchourie Septentrionale, l’affaire des chrétiens du Kanto. Cette région, nous l’avons vu plus haut, quoiqu’en fait administrée par les Missionnaires de Séoul, ne l’était que par délégation de juridiction, et pourtant formait la partie principale du nouveau Vicariat Apostolique de Wonsan, étant donné qu’en Corée proprement dite, les deux provinces Nord et Sud du Hamkyengto, cédées aux Pères Bénédictins, ne renfermaient qu’environ cinq cents chrétiens. Il fut entendu entre les deux Évêques que, après avoir obtenu l’approbation du Saint Siège, le Vicariat apostolique de la Mandchourie Septentrionale céderait définitivement à celui de Wonsan les deux intendances chinoises de Yenki et Ilan. Un décret de la S C. de la Propagande, daté du 19 Mars 1922, sanctionna cette convention. De par cette décision du Saint Siège, le Vicariat de Wonsan est devenu le plus grand, comme superficie, des trois Vicariats Apostoliques de Corée. Il s’étend maintenant du 30° 8′ lat. jusqu’au 48° 4′ lat., c’est-à-dire presque du centre de la Corée jusqu’à Habarosk, et compte 204 000 kilomètres carrés avec une population d’environ 3 000 000 d’habitants, dont plus de 2 000 000 sont coréens, les autres chinois et japonais, (ces derniers environ 100 000). Au 1er Mai 1923, le Vicariat comptait 10 875 catholiques, dont 9 032 coréens, 1 843 chinois et 100 japonais.

Pour créer un mouvement chrétien plus fort et pour empêcher les enfants catholiques de fréquenter les écoles protestantes ou païennes, les Bénédictins ont essayé de fonder le plus possible d’écoles primaires, là où elles n’existaient pas déjà. Grâce à ces efforts, le Vicariat compte actuellement une trentaine d’écoles avec plus de 2 000 élèves. Pour développer encore cette œuvre si importante, il faudrait avant tout des Religieuses : c’est seulement une question d’argent qui a empêché jusqu’à présent les Sœurs Bénédictines de Sainte Odile de venir en Corée, pour prendre la direction des écoles de jeunes filles dans le Vicariat de Wonsan. La première œuvre que Mgr. Sauer commença, fut la création, en automne 1921, d’un petit Séminaire, qui provisoirement fut installé dans l’Abbaye de Saint Benoit de Séoul. Plus tard, quand les circonstances le permettront, il sera transféré à Wonsan en même temps que le monastère. Il compte actuellement 31 élèves. Mgr. Sauer a songé aussi aux chrétiens chinois si dispersés dans son grand vicariat. La station chinoise de Yenki, depuis 14 ans sans titulaire, fut rouverte à la fête de Noël 1922. Une autre station sera fondée cette année 1924 au bord du Sungari. Dans cette région se trouvent beaucoup d’immigrants, parmi lesquels un certain nombre de chrétiens du Shantung, disséminés pour la plupart dans les immenses friches de ce pays jusqu’alors à peu près désert. Deux missionnaires destinés à cette mission particulièrement difficile, se préparent maintenant, l’un dans la Mission de Kirin, l’autre dans celle du Shantung méridional.


PERSONNEL DE LA MISSION DE WONSAN (1924). — Le personnel de cette Mission compte actuellement, en y comprenant celui de l’Abbaye de Séoul : 1 Évêque, 18 prêtres bénédictins, 12 frères européens, 7 frères coréens, 4 catéchistes prédicants, 110 catéchistes chefs de chrétientés, 54 maîtres d’écoles et 12 maîtresses d’écoles. Pour cette grande Mission un personnel triple de celui-ci serait nécessaire pour fonder aisément les œuvres que comporte tout territoire ecclésiastique organisé et pour assurer leur progrès dans l’avenir.


§ IV. — TERRITOIRE DU HPYENGANTO
(M-É. de MARYKNOLL)


LA RÉGION NORD-OUEST DU VICARIAT APOSTOLIQUE DE SÉOUL EST ATTRIBUÉE AUX MISSIONNAIRES AMÉRICAINS DE MARYKNOLL. — En l’année 1922, la S. C. de la Propagande jugea opportun d’augmenter le nombre des ouvriers apostoliques en Corée, et fit appel cette fois à la Société américaine des Missions Étrangères de Maryknoll (N. Y.) Cette Société, fondée aux États-Unis en 1911, administre déjà un territoire chinois, que lui ont cédé les missions de Canton et du Koangsi. Elle a bien voulu accepter la direction d’une mission nouvelle dans la région Nord-Ouest du Vicariat apostolique de Séoul, soit les 2 provinces nord et sud du Hpyenganto. Cette région est d’une superficie d’environ 43 300 kilomètres carrés : ce qui fait le 1/5 de la Corée. Sa population totale est de 2 300 361 habitants, dont 4 890 catholiques, administrés jusqu’à ce jour par 5 prêtres de la Mission de Séoul. Cette double province est travaillée depuis longtemps par les Protestants Américains, qui y sont fortement installés. On y compte, en effet, plus de 50 000 adeptes de l’erreur. C’est dire le travail qu’il reste à faire aux nouveaux Ouvriers apostoliques : c’est signaler aussi les difficultés particulières qu’ils y vont rencontrer.


ARRIVÉE EN CORÉE DES PREMIERS MISSIONNAIRES CATHOLIQUES AMÉRICAINS. — Au mois de Mai 1923, le Rév. P. J. B. Byrne, supérieur de la future Mission du Hpyenganto, arriva à Séoul, et au mois de Septembre suivant il alla s’installer à l’ancienne ville de Euitjyou, où une résidence, déjà depuis plusieurs années assez confortablement installée, permettait de réunir plusieurs missionnaires. Quelques mois après, deux autres missionnaires et un frère de la même Société viennent rejoindre leur Supérieur. En Avril 1924, l’un d’eux a pris la direction de la chrétienté de Euitjyou. Un autre est allé s’établir à Yeng-you, près de Hpyengyang. Le P. Byrne compte bientôt aller prendre position dans la nouvelle ville de Euitjyou (Sin Eui-tjyou) située à 4 lieues de l’ancienne, sur les bords du Yalou, et gare frontière du chemin de fer Coréen. Il a déjà pu acheter en cet endroit un terrain assez grand pour y fonder dans un avenir prochain une résidence avec toutes les œuvres que cela comporte.

En automne 1924, des renforts plus sérieux sont promis soit en missionnaires, soit en religieuses de la société affiliée à celle de Maryknoll. Ils travailleront un certain temps encore sous la juridiction du Vicaire Apostolique de Séoul, puis, quand le Saint Siège jugera le moment opportun, il sera créé définitivement un nouveau territoire ecclésiastique indépendant.