Les Chroniques de Sire Jean Froissart/Livre I, Partie II/Chapitre LXXXIII

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Texte établi par J. A. C. Buchon (Ip. 394-395).

CHAPITRE LXXXIII.


Comment le chanoine de Robertsart et le sire de Pinon déconfirent les Navarrois de Roussy.


Sitôt que le chanoine de Robertsart fut venu en la place où le sire de Pinon et les Navarrois se combattoient, il abaissa son glaive et férit dedans de grand’volonté, et en abattit de première venue, ne sais deux ou trois. Il et ses gens, qui étoient frais, reculèrent tantôt les compagnons qui s’étoient tout le jour combattus, et reboutèrent bien avant sur les champs et en ruèrent maints par terre. Là fut le dit chanoine très bon chevalier et y fit maintes appertises d’armes, et tenoit une épée à deux mains dont il donnoit les horions si grands que nul ne les osoit attendre. Que vous ferois-je long record ? Il déconfit là ces pillards ; et en y eut de morts là sur la place plus de cent et cinquante ; et ceux qui purent réchapper furent encore rencontrés de ceux de Laon qui les partuèrent ; et crois bien qu’il n’en échappa mie quinze, de trois cents, que tous ne fussent morts et pris. Cette courtoisie fit monseigneur le chanoine de Robertsart au seigneur de Pinon, dont il lui sçut grand gré ; et ce fut bien raison. Or revenrons au siége de Saint-Vallery.