Les Lauriers de la montagne/Dédicace

La bibliothèque libre.


Les Lauriers de la montagne (Горскıй вıенацъ, 1847)
Traduction par Divna Vékovitch.
Berger-Levrault (p. xiii-xv).


DÉDICACE


AUX CENDRES DU PÈRE DE LA SERBIE[1]




Que parmi tous les siècles ce siècle soit fier :
Il sera pour tous les hommes l’ère terrible ;
Durant ce siècle huit héros sortirent
Du berceau de Bellone et parurent sur la terre :
Napoléon, Karl, Blücher, Wellington et Souvorof,
Karageorges, fléau des tyrans, Schvartzenberg et Koutouzof.
Le Dieu de la guerre les a enivrés d’un désir de gloire,
et il leur a désigné la terre comme arène.
Un lion peut sortir d’un grand buisson,
ainsi dans les grandes nations un génie peut éclore ;
il y trouve facilement des motifs de gloire,
et la couronne triomphale orne sa tête courageuse.
Mais pour les héros de Topola, pour l’immortel Karageorges,
Que de difficultés surgirent sur sa route !
il atteignit pourtant le but suprême ;

Il souleva le peuple, le baptisa, brisa les chaînes barbares,
d’entre les morts il ressuscita son peuple et ranima l’esprit serbe,
C’est le secret de l’immortalité — aux Serbes
oublieux de gloire il rendit des cœurs de lions.
Les forces du Pharaon oriental semblent glacées devant Georges ;
Avec Georges, les bras serbes se tendent vers la Gloire !
Stamboul, ce père de la peste sanguinaire, tremble devant Georges,
Les Turcs jurent sur son épée, sans trouver un plus noble serment !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Hélas, les héros marchent vers un tragique destin !
Ta tête fut destinée à être vendue pour sa couronne !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


À chacun les générations à venir feront justice ;
Sur Boris[2] et Voukachin[3] l’anathème furieux gronde.
L’affreux nom de Piso[4] n’ose pas souiller le calendrier ;
Oreste juge Égyste par sa foudre céleste.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Sur ta tombe lumineuse, en vain la haine immonde voudrait vomir des ténèbres,

Mais qui pourrait éteindre le rayon céleste de ton âme ?
Les ténèbres misérables peuvent-elles cacher la lumière ?
Elles s’en cachent ou l’allument même.
La flamme régénératrice brillera éternellement chez les Serbes,
Sa clarté et sa beauté seront de plus en plus grandes dans l’avenir.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Une mère serbe a pu mettre au monde un Douchan[5], nourrir un Obilitch[6] ;
et des héros comme Pojarsky, des glorieux et des nobles
Naissent encore parmi les Serbes ! Car ce pays respire la noblesse !
Arrière, malédiction lancée sur mon peuple, les Serbes sauront accomplir leur mission sacrée.


1847.
L’Auteur.
  1. Karageorges.
  2. Boris Godounow.
  3. Voukachin, d’après l’histoire serbe, tua le tzar serbe Ouroch, pour régner à sa place.
  4. Traître de Tibère.
  5. Douchan le Grand, empereur des Serbes.
  6. Miloch Obilitch, le plus populaire héros serbe.