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Les Martyrs/Remarques sur le livre VII

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Garnier frères (Œuvres complètes de Chateaubriand, tome 4p. 414-427).

LIVRE SEPTIÈME.


1re Remarquepage 102.

Le roi d’Ithaque fut réduit à sentir un mouvement de joie en se couchant sur un lit de feuilles séchées.

Τὴν μὲν ἰδὼν γήθησε πολύτλας δῖος Ὀδυσσεύς,
Ἐν δ' ἄρα μέσσῃ λέκτο, χύσιν δ' ἐπεχεύατο

(Odyss., liv. v, v. 486.)


2e. — page 102.

Il étoit accompagné d’une femme vêtue d’une robe, etc.

« Nec alius feminis quam viris habitus, nisi quod feminæ sæpius lineis amictibus velantur, eosque purpura variant, partemque vestitus superioris in manicas non extendunt, nudæ brachia ac lacertos : sed et proxima pars pectoris patet. » (Tacit., de Mor. Germ., XVII.)


3e. — page 103.

Je ne sais quelle habitude étrangère, etc.

Est-il nécessaire d’avertir que cette habitude étrangère avoit été produite par la religion chrétienne ?


4e. — page 103.

Remerciez Clothilde.

Encore un nom historique emprunté, ou un anachronisme d’accord avec les anachronismes précédents.


5e. — page 103.

Dans une hutte qu’entouroit… un cercle de jeunes arbres.

« Colunt discreti ac diversi, ut fons, ut campus, ut nemus placuit… Suam quisque domum spatio circumdat. » (Tacit., de Mor. Germ., XVI. Voyez aussi Hérodien, liv. VII.) Dans quelques cantons de la Normandie, les paysans bâtissent encore leurs maisons isolées au milieu d’un champ qu’environne une haie vive plantée d’arbres.


6e. — page 103.

Une boisson grossière faite de froment.

C’est la bière : Strabon, Ammien Marcellin, Dion Cassius, Jornandès, Athénée, sont unanimes sur ce point. Au rapport de Pline, la bière étoit appelée cervisia par les Gaulois. Les femmes se frottoient le visage avec la levure de cette boisson. (Pline, liv. XXII.)


7e. — page 103.

L’odeur des graisses mêlées de cendres de frêne, dont ils frottent leurs cheveux.

C’étoit pour leur donner une couleur rousse. On peut voir là-dessus Diodore de Sicile, liv. v ; Ammien Marcellin, liv. xvii ; Saint Jérôme, Vit. Hilar., etc.


8e. — page 103.

Le peu d’air de la hutte, etc.

« Je suis, dit Sidoine, au milieu des peuples chevelus, forcé d’entendre le langage barbare des Germains, et obligé d’applaudir aux chants d’un Bourguignon ivre, qui se frotte les cheveux avec du beurre… Dix fois le matin, je suis obligé de sentir l’ail et l’oignon, et cette odeur empestée ne fait que croître avec le jour. » (Sid. Apoll., Cam. 12, ad Cat.) Voilà nos pères.


9e. — page 104.

Une corne de bœuf pour puiser de l’eau.

C’est la corne de l’uroch : on y reviendra.


10e. — page 105.

Voilà, me dit l’esclave… Le camp de Varus.

L’emplacement de ce camp porte encore le nom de bois de Teuteberg. Voici l’admirable morceau de Tacite, dont mon texte est la traduction abrégée : « Prima Vari castra lato ambitu et dimensis principiis, trium legionum tanus ostentabant ; dein semiruto vallo, humili fossa, accisæ jam reliquiæ consedisse intelligebantur. Medio campi albentia ossa, ut fugerant, ut restiterant, disjecta vel aggerata. Adjacebant fragmina teloram, equorumque artus, simul truncis arborum antefixa ora ; lucis propinquis barbaræ aræ, apud quas tribunos ac primorum ordinum centuriones mactaverant : et cladis ejus superstites pugnam aut vincula elapsi referebant hic cecidisse legatos, illic raptas aquilas ; primum ubi vulnus Varo adactum, ubi infelici dextra et suo ictu mortem invenerit ; quo tribunali concionatus Arminius ; quot patibula captivis, quæ scrobes, utque signis et aquilis per superbiam illuserit. » (Ann., i, 61.)


11e. — page 105.

On n’osa même plus porter leurs images aux funérailles.

« Et Junia saxegesimo quarto post Philippensem aciem anno supremuin diem explevit, Catone avunculo genita, C. Cassii uxor, M. Bruti soror… Viginti clarissimarum familiarum imagines antelatæ sunt, Manlii, Quinctii, aliaque ejusdem nobilitatis nomina : sed præfulgebant Cassius atque Brutus, eo ipso quod effigies eorum non visebantur. » (Tacit., Ann., iii, 76.)


12e. — page 105.

La légion thébaine.

Tout ce qui suit dans le texte est tiré d’une lettre de saint Euchère, évêque de Lyon, à l’évêque Salvius. On trouve aussi cette lettre dans les Actes des Martyrs.


13e. — page 106.

Les corps de mes compagnons sembloient jeter une vive lumière.

L’autorité pour ce miracle se trouve dans le martyre de saint Taraque. (Act. Mart.)

Le Tasse a aussi imité ce passage dans l’épisode de Suénon.


14e. — page 106.

Vers Denis, premier évêque de Lutèce.

Je place, avec Fleury, Tillemont et Crevier, le martyre de saint Denis, premier évêque de Paris, sous Maximien, l’an 286 de notre ère.


15e. — page 106.

Cette colline s’appeloit le mont de Mars.

On voit que j’ai choisi entre les deux sentiments qui font de Montmartre ou le mont de Mars ou le mont des Martyrs.


16e. — page 107.

Depuis ce temps je suis demeuré esclave ici.

Notre religion, féconde en miracles, offre plusieurs exemples de chrétiens qui se sont faits esclaves pour délivrer d’autres chrétiens, surtout quand ils craignoient que ceux-ci perdissent la foi dans le malheur. Il suffira de rappeler à la mémoire du lecteur saint Vincent de Paul, et saint Pierre Pascal, evêque de Jaën en Espagne. (Voyez Génie du Christianisme, tom. II, édit. de 1830.)


17e. — page 107.

De les exposer aux flots sur un bouclier.

« On lit, dit Mézeray, en deux ou trois poëtes, dans le scoliaste Eustathius, et même dans les écrits de l’empereur Julien, que ceux qui habitoient proche du Rhin les exposoient (les enfants) sur les ondes de ce fleuve, et ne tenoient pour légitimes que ceux qui n’alloient point au fond. Quelques auteurs modernes se sont récriés contre cette coutume, et ont maintenu que c’étoit une fable inventée par les poëtes ; mais ils ne se fussent pas tant mis en peine de la réfuter, s’ils eussent pris garde qu’une épigramme grecque dit que le père mettoit ses enfants sur un bouclier. » (Av. Clov., pag. 34.)


18e. — page 107.

Ma plus belle conquête est la jeune femme, etc.

Le christianisme, à cause de son esprit de douceur et d’humanité, s’est surtout répandu dans le monde par les femmes. Clothilde, femme de Clovis, amena ce chef des François à la connoissance du vrai Dieu. (Voyez Greg. Tur.)


19e. — page 108.

Vous êtes né dans ce doux climat, voisin, etc.

La Grèce étoit voisine de la Judée, comparativement au pays des Francs.


20e. — page 109.

Ségovia, prophétesse des Germains.

Le nom de cette prophétesse germaine se trouve dans Tacite.


21e. — page 109.

D’un Romain esclave, etc.

On voit ici un grand exemple de la difficulté de contenter tous les esprits. Un critique plein de goût, que j’ai souvent cité dans ces notes, trouve cet épisode de Zacharie peu intéressant. La reine des Francs, à genoux sous un vieux chêne, ne lui présente qu’une copie affoiblie de la scène de Prisca et de Valérie. D’autres personnes, également faites pour bien juger, aiment beaucoup au contraire l’opposition du christianisme naissant au milieu des forêts, chez des barbares, et du christianisme au berceau, dans les catacombes chez un peuple civilisé.


22e. — page 109.

Déclare que la vertu n’est qu’un fantôme.

« Brutus s’arrêta dans un endroit creux, s’assit sur une grande roche, n’ayant avec lui qu’un petit nombre de ses amis et de ses principaux officiers ; et là, regardant d’abord le ciel, qui étoit fort étoilé, il prononça deux vers grecs. Volumnius en a rapporté un qui dit : Grand Jupiter, que l’auteur de tous ces maux ne se dérobe point à votre vue ! Il dit que l’autre lui étoit échappé. Le sens de cet autre vers étoit : Ô vertu ! tu n’es qu’un vain nom ! »


23e. — page 110.

Un nouvel Hérodote.

« Hérodote se rendit aux jeux olympiques. Voulant s’immortaliser, et faire sentir en même temps à ses concitoyens quel étoit l’homme qu’ils avoient forcé de s’expatrier, il lut dans cette assemblée, la plus illustre de la nation, la plus éclairée qui fut jamais, le commencement de son Histoire, ou peut-être les morceaux de cette même Histoire les plus propres à flatter l’orgueil d’un peuple qui avoit tant de sujet de se croire supérieur aux autres. » (Larcher, Vie d’Hérodote.)


24e. — page 110.

Un peuple qui prétend descendre des Troyens.

Dans le second chapitre de l’Épitome de l’Histoire des Francs, on lit tout une fable racontée, dit l’auteur, par un certain poëte appelé Virgile. Priam, selon ce poëte inconnu, fut le premier roi des Francs ; Friga fut le successeur de Priam. Après la chute de Troie, les Francs se séparèrent en deux bandes ; l’une, commandée par le roi Francio, s’avança en Europe, et s’établit sur les bords du Rhin, etc. (Epit. Hist. Franc., cap. ii, in D. Bouq. Coll.)

Les Gestes des rois des Francs racontent une fable à peu près semblable (cap. i et ii). C’est sur ces vieilles chroniques qu’Annius de Viterbe a composé la généalogie des rois des Gaules et des rois des Francs. Dans ces deux livres supposés, il donne vingt-deux rois aux Gaulois avant la guerre de Troie : Dis ou Samothès ; Sarron, fondateur des écoles druidiques ; Boardus, inventeur de la poésie et de la musique ; Celtès, Galatès, Belgicus, Lugdne, Allobrox, Pâris, Remus. Sous ce dernier roi arriva la prise de Troie et Francus, fils d’Hector, s’échappa de la ruine de sa patrie, se réfugia dans les Gaules, et épousa la fille de Remus.


25e. — page 110.

Que ce peuple, formé de diverses tribus des Germains…

Véritable origine des François. J’ai expliqué le mot Franc d’après le génie de notre langue, et non d’après l’étymologie que veut lui donner Libanius, et qui signifieroit habile à se fortifier. (In Basilico.)


26e. — page 110.

Le pouvoir… se réunit.

Ceci n’est exprimé formellement par aucun auteur, mais se déduit de toute la suite de l’histoire. On voit dans Tacite (de Mor. Germ.) que l’on élisoit des chefs dans les assemblées générales, et l’on trouve dans le même auteur (Ann. et Hist.) des Germains conduits par un seul chef. On remarque la même chose dans les Commentaires de César. Enfin, sous Pharamond, Clodion, Mérovée et Clovis, les Francs paroissoient marcher sous les ordres d’un seul roi.


27e. — page 110.

La tribu des Saliens.

Il y a des auteurs qui ne veulent faire des Saliens que des grands ou des seigneurs attachés au service des salles de nos rois. Il est vrai que le mot sala remonte très-haut dans la basse latinité. Dans un édit de Lothaire, roi des Lombards, on lit : Si quis bovolam de sala occiderit, componat (sol. 20).

« Qui en la sale Baudouin Lagernie,
« Avoit de Foise envoyé une espie. »
(Du Cange, Gloss., voce Sala.)

Mais il est plus naturel de considérer les Saliens comme une tribu des Francs, puisqu’on les trouve comme tels dans l’histoire. Les Francs appelés les Saliens, dit Ammien Marcellin, s’etoient cantonnés près de Toxandrie. Sidoine leur donne aussi ce nom. Au rapport de Libanius, Julien prit les Saliens au service de l’empire, et leur donna des terres. Au reste, on trouve des Saliens gaulois sur le territoire desquels les Phocéens fondèrent Marseille. Il y avoit chez les Romains des prêtres de Mars et des prêtres d’Hercule appelés Saliens ; comme si tout ce qui s’appeloit Salien devoit annoncer les armes et la victoire.


28e. — page 110.

Elle doit cette renommée…

Je place ici l’origine de la fameuse loi salique. L’histoire la fait remonter jusqu’à Pharamond. Les meilleurs critiques font venir comme moi la loi salique de la tribu des Saliens. La loi salique, telle que nous l’avons, ne parle point de la succession à la couronne ; elle embrasse toutes sortes de sujets. Du Cange distingue deux lois saliques : l’une, plus ancienne, et du temps que les François étoient encore idolâtres ; l’autre, plus nouvelle, et que l’on suppose rédigée par Clovis après sa conversion. (Voyez Pittion, Jérôme Bignon, Du Cange et Daniel.)


29e. — page 110.

Les Francs s’assemblent.

Les premières éditions portoient : « Les Francs s’assemblent deux fois l’année, aux mois de mars et de mai. » J’avois voulu indiquer par là le changement survenu dans l’époque de l’assemblée générale des Francs ; mais cela étoit inexact et ne disoit pas ce que je voulois dire : j’ai corrigé, comme on le voit ici. Le premier exemple d’une assemblée générale des Francs remonte à Clovis : ce roi y tua de sa main un soldat qui l’avoit insulté l’année précédente. (Grégoire de Tours.)

Tacite dit que les Germains tenoient leurs assemblées à des jours fixes, au commencement de la nouvelle et de la pleine lune (de Mor. Germ.). Nos états généraux, que l’on croit être nés des assemblées du champ de Mars, me paroissent plutôt avoir une origine gauloise. (Voyez les Commentaires de César.)


30e. — page 110.

Ils viennent au rendez-vous tout armés.

C’est ce que disent tous les auteurs.


31e. — page 110.

Le roi s’assied sous un chêne.

« Maintes fois ay veu que le bon sainct, après qu’il avoit ouy messe en esté, il se alloit esbattre au bois de Vicennes, et se seoit au pié d’un chesne, et nous faisoit seoir tous emprès de lui : et tous ceulx qui avoient affaire à lui venoient à lui parler, sans ce qu’aucun huissier ne autre leur donnast empeschement. Et demandoit haultement de sa bouche s’il y avoit nul qui eust partie. Et quand il y en avoit aucuns, il leur disoit : Amis, taisez-vous, et on vous delivrera l’un après l’autre… Aussi plusieurs fois ay veu que audit temps d’esté, le bon roy venoit au jardin de Paris, une cotte de camelot vestuë, ung surcot de tiretaine sans manches et un mantel par-dessus de sandal noir : et faisoit estendre des tappiz pour nous seoir emprès de lui, et là faisoit despescher son peuple diligemment, comme vous ay devant dit du bois de Vicennes. » (Joinville, Hist. du Roy saint Loys.) L’usage de faire des présents au chef des peuples germaniques remonte jusqu’au temps de Tacite. « Mos est civitatibus ultro ac viritim conferre principibus vel armentorum, vel frugum, quod pro honore acceptum, etiam necessitatibus subvenit. Gaudent præcipue finitimarum gentium donis, quæ non modo a singulis, sed publice mittuntur. » (Tacit., de Mor. Germ., xv.)


32e. — page 110.

Les propriétés sont annuelles.

« Arva per annos mutant. (Tacit., de Mor. Germ., XXVI.) Neque quisquam agri modum certum aut fines proprios habet : sed magistratus ac principes in annos singulos, gentibus cognationibusque hominum qui una coierunt, quantum et quo loco visum est, agri attribuunt, atque anno post alio transire cogunt. » (Cæsar, de Bell. Gall., lib. vi.)


33e. — page 110.

Le lait, le fromage, etc.

(Voyez Cæsar, de Bell. Gall., lib. iv ; Pline, lib. ii ; Strabon, lib. VII. Tacite dit Lac concretum.)


34e. — page 110.

Un bouclier… un cheval bridé.

« Munera non ad delicias muliebres quæsita, nec quibus nova nupta comatur, sed boves et frenatum equum, et scutum cum framea gladioque. » (Tacit., de Mor. Germ., xviii.)


35e. — page 110.

Il saute… au milieu… des épées nues.

« Nudi juvenes, quibus id ludicrum est, inter gladios se atque in festas frameas saltu jaciunt. » (Tacit., de Mor. Germ., xxiv.)


36e. — page 110.

Une pyramide de gazon.

« Funerum nulla ambitio… sepulcrum cespes erigit. » (Tacit., de Mor. Germ., xxvii.)


37e. — page 111.

Chasser l’uroch et les ours.

César, Tacite et tous les auteurs parlent de la passion des barbares pour la chasse. Quant à l’uroch ou bœuf sauvage, en voici la description : « Tertium est genus eorum qui Uri appellantur. Ii sunt magnitudine paulo infra elephantos ; specie et colore et figura tauri. Magna vis est eorum et magna velocitas ; neque homini neque feræ quam conspexerint parcunt. Hos studiose foveis captos interficiunt… Amplitudo cornuum et figura et species multum a nostrorum boum cornibus differt. Hæc studiose conquisita ab labris argento circumcludunt atque in amplissimis epulis pro poculis utuntur. » (Cæsar, de Bell. Gall., lib. vi.)


38e. — page 111.

Nous eûmes le bonheur de ne rencontrer aucune de ces grandes migrations, etc. ; jusqu’à l’alinéa.

Tout ce passage est nouveau. Je l’avois supprimé dans les épreuves de la première édition. Les personnes qui le connoissoient l’ont réclamé ; j’ai cru devoir le rétablir.


39e. — page 112.

Mon livre, vous irez à Rome.

Parve, nec invideo, sine me, liber, ibis in Urbem.

Ovide mourut dans son exil à Tomes : on a prétendu avoir retrouvé son tombeau en 1508, près de Stain, en Autriche, avec ces vers :

Hic situs est vates quem divi Cæsaris ira
Augusti patria cedere jussit humo.
Sæpe miser voluit patriis occumbere terris,
Sed frustra ! hunc illi fata dedere locum.

Ces vers sont modernes. Le poëte avoit fait lui-même l’épitaphe que l’on connoît :

Hic ego qui jaceo tenerorum lusor amorum,
Ingenio perii Naso poeta meo, etc.

Je ne sais si le vers que j’ai choisi pour l’épitaphe d’un poëte mort exilé dans un désert n’est pas plus touchant.


40e. — page 112.

Qui s’accusoit d’être le barbare.

Barbarus hic ego sum, quia non intelligor illis.


41e. — page 112.

Ces tribus avoient disparu.

Elles s’étoient embarquées. « Une petite tribu de Francs, sous Probus, dit Eumène, se signala par son audace. Embarquée sur le Pont-Euxin, elle attaqua la Grèce et l’Asie, prit Syracuse, désola les côtes de l’Afrique, et rentra victorieuse dans l’Océan. » (Eumène, Panég. Const.)


42e. — page 112.

La Providence avoit ordonné que je retrouverois la liberté au tombeau d’Ovide.

Ainsi ce livre est motivé, et il y a une raison péremptoire pour la description des mœurs et de la chasse des Francs. Cet incident, fort naturel d’ailleurs, et employé par plus d’un poëte, va faire changer la scène.


43e. — page 112.

La hutte royale étoit déserte.

« Quemcumque mortalium arcere tecto nefas habetur. Pro fortuna quisque apparatis epulis excipit. Cum defecere, qui modo hospes fuerat, monstrator hospitii et comes ; proximam domum non invitati adeunt : nec interest ; pari humanitate accipiuntur. Notum ignotumque, quantum ad jus hospitii, nemo discernit. » (Tacit., de Mor. Germ., XXI.)


44e. — page 113.

Une île… consacrée à la déesse Hertha.

Voyez Tacite, Mœurs des Germains, ch. xl.) Mon texte est la traduction abrégée de tout le morceau.


45e. — page 113.

Ils étoient rangés en demi-cercle, etc. ; jusqu’à l’alinéa.

« Ils ne prennent point leurs repas assis sur des chaises, mais ils se couchent par terre sur des couvertures de peaux de loup et de chien, et ils sont servis par leurs enfants de l’un et de l’autre sexe qui sont encore dans la première jeunesse. À côté d’eux sont de grands feux garnis de chaudières et de broches, où ils font cuire de gros quartiers de viande. On a coutume d’en offrir les meilleurs morceaux à ceux qui se sont distingués par leur bravoure… Souvent leurs propos de table font naître des sujets de querelles, et le mépris qu’ils ont pour la vie est cause qu’ils ne font point une affaire de s’appeler en duel. » (Diod., liv. v, traduction de Terrasson.) Toutes ces coutumes attribuées aux Gaulois par Diodore se retrouvoient chez les Germains. Quant à la circonstance de la table séparée que chaque convive avoit devant soi, elle est prise dans Tacite, de Mor. Germ. Voici un passage curieux d’Athénée : « Celtæ, inquit (Posidonius), fœno substrato, cibos proponunt super ligneis mensis a terra parum extantibus. Panis, et is paucus, cibus est : caro multa elixa in aqua, vel super prunis aut in verutis assa. Mensæ quidem hæc pura et munda inferuntur, verum leonum modo ambabus manibus artus integros tollunt, morsuque dilaniant ; et si quid ægrius divellatur, exiguo id cultello præcidunt, qui vagina tectus et loco peculiari conditus in propinquo est… Convivæ plures ad cœnam si conveniant, in orbem consisident. In medio præstantissima sedes est, veluti cortus principis ejus nimirum qui cæteros vel bellica dexteritate, vel nobilitate generis anteit, vel divitiis. Assidet huic convivator : ac utrinque deinceps pro dignitate splendoris cua excellunt. Adstant a tergo cœnantibus, qui pendentes clypeos pro armis gestent, hastati vero ex adverso in orbem sedent ac utrique cibum cum dominis capiunt. Qui sunt a poculis, potum ferunt in vasis ollæ similibus, aut fictilibus, aut argenteis. » (Athen., lib. IV, c. XIII.) Il y auroit bien quelque chose à dire sur cette version du texte grec ; mais, après tout, elle est assez fidèle ; elle ne manque pas d’une certaine élégance, et elle a été revue par Casaubon, très-habile homme, quoi qu’on en dise. Le texte par lui-même n’ayant aucune beauté, j’ai préféré citer cette version de Dalechamp, accessible à plus de lecteurs.


46e. — page 113.

Il y avoit… un Gaulois appelé Camulogène.

Souvenir historique. (Voyez les Commentaires de César.) Tout le monde sait que Lutèce est Paris.


47e. — page 113.

Les quarante mille disciples des écoles d’Augustodunum.

Les écoles d’Autun étoient très-florissantes. Eumène les avoit rétablies. Lors de la révolte de Sacrovir, il y avoit quarante mille jeunes gens de la noblesse des Gaules rassemblés à Autun. (Tacit., Ann., iii, 43.) On sait que Marseille du temps de Cicéron et d’Agricola étoit appelée l’Athènes des Gaules. Sur Bordeaux, on peut consulter Ausone, qui nomme les professeurs célèbres de cette ville.


48e. — page 113.

La révolte des Bagaudes.

Il y a plusieurs opinions sur les Bagaudes. J’ai adopté celle qui fait de ces Gaulois des paysans révoltés contre les Romains.


49e. — page 113.

Les prêtres du banquet… ayant fait faire silence.

« Silentium per sacerdotes, quibus tum et coercendi jus est, imperatur. » (Tacit., de Mor. Germ., xi.)

50e. — page 114.

Ces avides possesseurs de tant de palais, qui sont assez à plaindre, etc.

C’est le mot du Breton Caractacus, prisonnier à Rome. (Voyez Zonare.)


51e. — page 114.

Il sent en lui quelque chose qui le porte à brûler le Capitole.

C’est un roi des barbares ; je ne sais plus si c’est Alaric, Genseric ou un autre, qui a dit un mot à peu près semblable.


52e. — page 114.

L’assemblée applaudit à ce discours, en agitant les lances.

« Si displicuit sententia, fremitu aspernantur : sin placuit, frameas concutiunt. » (Tacit., de Mor. Germ., XI.)


53e. — page 114.

Ignorez-vous que l’épée de fer d’un Gaulois…

Allusion à l’histoire de ce Gaulois qui mit son épée dans la balance où l’on pesoit l’or qui devoit racheter les Romains après la prise de leur ville par Brennus.


54e. — page 114.

Les Gaulois seuls ne furent point étonnés à la vue d’Alexandre.

Voyez la note LVIII du livre VI. Pour le reste de ce paragraphe, jusqu’à l’alinéa, on peut avoir recours à l’Histoire romaine de Rollin, tome VII, page 330, où l’auteur a tracé toutes les conquêtes des Gaulois. On peut remarquer que j’ai sauvé l’invraisemblance du discours de Camulogène, en faisant étudier ce Gaulois aux écoles d’Autun, de Marseille et de Bordeaux.


55e. — page 115.

Nous défendons à nos enfants d’apprendre à lire.

Selon Procope, les Goths ne vouloient point qu’on instruisît leurs enfants dans les lettres ; car, disoient-ils, celui qui est accoutumé à trembler sous la verge d’un maître ne regardera jamais une épée sans frayeur. (De Bello Goth., lib. i.)


56e. — page 115.

Je ne me donnerai pas la peine de recueillir l’œuf du serpent à la lune nouvelle.

« Angues innumeri æstate convoluti, salivis faucium corporumque spumis artifici complexu glomerantur, anguinum appellatur. Druidæ sibilis id dicunt in sublime jactari, sagoque oportere intercipi, ne tellurem attingat. Profugere raptorem equo : serpentes enim insequi, donec arceantur amnis alicujus interventu. Experimentum ejus esse, si contra aquas fluitet vel auro vinctum. Atque ut est magnorum solertia occultandis fraudibus sagax, certa luna capiendum censent… Ad victorias litium ac regum aditus, mire laudatur. » (Plin., lib. XXIX, cap. III, XII.)


57e. — page 115.

Tu mens, repartit le Gaulois.

C’est le démenti des barbares qui mène encore aujourd’hui deux hommes à se couper la gorge. La vérité des mœurs dans tout ce livre, et surtout dans la scène qui le termine, m’a toujours paru faire plaisir aux juges instruits et faits pour être écoutés.


58e. — page 115.

Le lendemain, jour où la lune avoit acquis toute sa splendeur, on décida dans le calme ce qu’on avoit discuté dans l’ivresse.

« Cœunt, nisi quid fortuitum et subitum inciderit, certis diebus, cum aut inchoatur luna aut impletur. (Tacit., de Mor. Germ., XI.) De reconciliandis invicem inimicis, et ejungendis affinitatibus, et adsciscendis principibus, de pace denique ac bello, plerumque in conviviis consultant… Gens non astuta nec callida, aperit adhuc secreta pectoris licentia joci. Ergo detecta et nuda omnium mens postera die retractatur : et salva utriusque temporis, ratio est. Deliberant, dum fingere nesciunt ; constituunt, dum errare non possunt. » (Tacit., de Mor. Germ., XXII.)