Les Merveilleux Voyages de Marco Polo dans l’Asie du XIIIe siècle/Partie II/Chapitre 26

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CHAPITRE XXVI

Les largesses du grand Khan


Le grand Khan se fait informer si, dans toute l’étendue de ses États, certains de ses sujets ont eu leur récolte perdue par l’intempérie des saisons ou pour un autre motif. Ceux qui ont ainsi souffert, il les exempte d’impôts pour cette année et leur donne de ses propres récoltes, afin qu’ils puissent se nourrir et faire les semailles. C’est là le fait d’un bon prince. Pendant l’hiver, il agit de même envers ceux qui ont perdu du bétail.

Quand la récolte est abondante, il achète d’importantes quantité de grain et le fait amasser dans de vastes greniers, où on le garde si bien qu’il se conserve trois ou quatre ans. C’est du grain de toute espèce : froment, orge, mil, riz. Quand il arrive disette d’une sorte de grain, le souverain fait prendre dans ses greniers celui qui manque. Si on le vend un pesant de la mesure, il en fait donner quatre mesures pour le même prix jusqu’à ce que la cherté cesse.

Le grand Khan distribue de larges aumônes aux pauvres de Cambaluc. Il choisit les familles les plus misérables qui logent parfois à six, huit ou dix dans une maison. Le nombre en est considérable. Il leur fait donner chaque année assez de blé pour leurs besoins. En outre, ceux qui veulent aller chaque jour demander l’aumône dans sa cour sont admis librement et reçoivent un grand pain chaud. Ils sont chaque jour trente mille mendiants et cela dure toute l’année. Ainsi se manifeste la grande bonté du prince qui a pitié de son pauvre peuple. Celui-ci l’aime tant qu’il l’adore comme un dieu.