Aller au contenu

Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste/Chap.02

La bibliothèque libre.
Gauthier-Villars et Fils (1p. 48-78).

CHAPITRE II.

INTÉGRATION PAR LES SÉRIES.


Définitions et lemmes divers.

20.La méthode de Cauchy, pour démontrer l’existence de l’intégrale des équations différentielles, a été appliquée par d’autres géomètres à la démonstration d’un grand nombre de théorèmes. Comme cette méthode et ces théorèmes nous seront utiles dans la suite, je suis forcé d’y consacrer un Chapitre préliminaire. Pour cette exposition, je ferai usage d’une notation que j’ai déjà introduite dans un autre Mémoire et qui m’évitera des longueurs et des redites.

Soient et deux séries développées suivant les puissances croissantes de et de supposons que chacun des coefficients de la série soit réel et positif et plus grand en valeur absolue que le coefficient correspondant de la série  : nous écrirons alors

ou, s’il est nécessaire de mettre en évidence les variables par rapport auxquelles se fait le développement,

On voit sans peine que, si est une série qui converge pour certaines valeurs de et de (représentant, par conséquent, une fonction de et de holomorphe pour ), on pourra toujours trouver deux nombres réels et positifs et tels que

Dans le cas où la fonction s’annule pour on peut écrire

Supposons que outre les arguments et par rapport auxquels on la suppose développée, dépende en outre d’une autre variable les nombres et seront des fonctions généralement continues de si ces deux nombres ne s’annulent pour aucune des valeurs de envisagées, on pourra leur assigner une limite inférieure ; on pourra donc donner à et des valeurs constantes assez grandes pour que les inégalités précédentes subsistent.

21.Le calcul des inégalités définies dans le numéro précédent repose sur les principes suivants, que je me borne à énoncer sans démonstration, à cause de leur évidence :

io Si la série converge, il en sera de même de la série toutes les fois qu’on aura

2o On peut additionner un nombre quelconque d’inégalités de même sens

3o Si l’on a un nombre infini d’inégalités de même sens,

on pourra écrire, en introduisant un argument nouveau,

4o On peut multiplier deux inégalités de même sens.

5o Si l’on a

et, d’autre part,

on pourra, dans l’inégalité (1), à la place de substituer dans le premier membre et dans le second membre On pourra donc écrire

6o Il est permis de différentier l’inégalité

(1)

par rapport à l’un des deux arguments et

7o Il est permis d’intégrer une inégalité ; mais cela peut s’entendre de deux manières ; on peut d’abord intégrer l’inégalité (1) par rapport à l’un des deux arguments et en prenant 0 comme limite inférieure d’intégration.

On trouve alors

Il va sans dire que, dans le calcul des intégrales, doit momentanément être regardée comme une constante.

8o Mais il peut arriver également que les fonctions et dépendent non seulement des deux arguments et mais d’une autre variable sans qu’on la regarde comme développée suivant les puissances de cette variable.

Supposons que l’inégalité (1) soit vraie pour toutes les valeurs de comprises entre et on pourra intégrer cette inégalité par rapport à en regardant et comme des constantes, et écrire

pourvu, bien entendu, que les limites d’intégration soient comprises entre et

22.Considérons une fonction

développée suivant les puissances de et de Il arrivera souvent que et dépendront d’un certain paramètre et qu’on pourra les développer suivant les puissances de ce paramètre. Écrivons donc

(1)

Supposons que, dans la fonction on substitue à la place de et de leurs développements (1) ; alors deviendra une fonction de de ad inf. ; et de ad inf. ; de plus elle pourra être développée suivant les puissances de de sorte qu’on aura

On voit aisément que ne dépend que de et de et et, en général, de

Supposons maintenant que l’on ait

Dans substituons, à la place de et de leurs développements (1), de sorte que l’on ait

On voit aisément qu’il vient

On s’en rend compte en appliquant le cinquième principe du numéro précédent, ce qui montre que

Nous conviendrons d’écrire, pour abréger, au lieu de

Théorème de Cauchy.

23.Le théorème de Cauchy se trouve aujourd’hui dans tous les Traités classiques ; aussi me bornerais-je à l’énoncer sans démonstration si je ne me proposais de le compléter en quelques points.

Considérons les équations différentielles

(1)

Je suppose que les fonctions et sont développées suivant les puissances croissantes de la variable indépendante des deux fonctions inconnues et et d’un paramètre arbitraire

En supposant que la variable indépendante n’entre pas dans les seconds membres des équations (1), je ne diminue pas la généralité, car un système d’ordre où la variable indépendante entre explicitement, peut toujours être remplacé par un système d’ordre où cette variable indépendante n’entre pas.

Soient, en effet, par exemple,

il est manifeste que ces deux équations peuvent être remplacées par les trois suivantes

Je me propose de démontrer qu’il existe trois séries convergentes développées suivant les puissances de de de qui satisfont aux équations (1), quand on les y substitue à la place de de et de et qui se réduisent respectivement à à et à pour

Ainsi, au lieu de développer seulement, comme le faisait Cauchy, par rapport à la variable indépendante je développe en outre par rapport au paramètre et par rapport aux valeurs initiales Mais je dois auparavant démontrer deux nouveaux lemmes.

24.Soient

(1)

deux équations différentielles, où et sont des séries ordonnées, suivant les puissances des fonctions inconnues et de la variable et d’un paramètre arbitraire

Il est aisé de vérifier qu’il existe deux séries

(2)

ordonnées selon les puissances de et de s’annulant avec et qui, substituées dans les équations (1) à la place de et de d’après les règles ordinaires du calcul, satisfont formellement à ces équations.

En cherchant à déterminer les coefficients de ces séries et par la méthode des coefficients indéterminés, on trouve qu’un coefficient quelconque de (ou de ) est un polynôme entier à coefficients positifs par rapport aux divers coefficients de et de

Considérons donc d’autres équations de même forme que (1)

(1 bis)

et qui soient telles que

si les séries
(2 bis)

sont ordonnées suivant les puissances de et de s’annulent avec et satisfont formellement aux équations (1 bis) quand on les substitue à la place de et de il est permis de conclure que

25.Reprenons les équations (1) du numéro précédent ; supposons que et soient développables suivant les puissances de et pour toutes les valeurs de comprises entre 0 et ) [nous conviendrons de ne considérer que les valeurs de comprises entre ces deux limites]. Je ne suppose pas d’ailleurs que et soient développables suivant les puissances de

Il existera alors des séries

qui seront ordonnées suivant les puissances de (le coefficient d’une puissance quelconque de étant une fonction de qui peut ne pas être développable suivant les puissances de ) qui s’annuleront et qui satisferont formellement aux équations (1).

Comment peut-on déterminer les coefficients des deux séries et  ?

Soient le coefficient de dans et celui de dans

On trouve alors, pour déterminer et les équations suivantes

et étant développées suivant les puissances de

et dépendant, d’autre part, de et de

D’ailleurs, dans et doivent être remplacés par et 0.

Soient maintenant des équations

(1 bis)

telles que

mais non

Soient

les séries ordonnées suivant les puissances de et s’annulant avec qui satisfont formellement aux équations (1 bis).

Il viendra

À l’origine des temps, on aura

et d’ailleurs
(2)
d’où
(3)

et pour les petites valeurs positives de sont donc positifs et plus grands en valeur absolue que et

J’écris donc

(4)

Les inégalités (4) ne pourraient cesser d’être satisfaites sans que les inégalités (3) cessassent les premières de l’être. Mais il ne pourra en être ainsi ; car les inégalités (4), jointes aux inégalités (2), entraînent les inégalités (3) comme conséquences. Donc les inégalités (4) subsisteront toutes les fois que

Je suppose qu’on ait démontré de même que

(5)

et je me propose de démontrer que

En effet, on conclut des inégalités (5) que

Nous devons donc conclure que les inégalités

entraînent les suivantes :

Un raisonnement tout semblable à celui qui précède montrerait ensuite que l’on a

Ces inégalités peuvent d’ailleurs s’écrire

mais non

26.Reprenons les équations (1) du no 23.

(1)

Ces équations sont satisfaites formellement par certaines séries

(3)

développées suivant les puissances croissantes de et se réduisant respectivement à et pour

Pour démontrer la convergence de ces séries, comparons-les aux séries obtenues en partant d’équations différentes.

On peut toujours trouver trois nombres réels positifs et tels qu’en posant

(1)
on ait

Envisageons les équations

(2 bis)
qui peuvent aussi s’écrire
(3 bis)

On peut satisfaire à ces équations par des séries analogues aux séries (3), ordonnées comme elles suivant les puissances de et et se réduisant comme elles à pour

Les principes du no 24 montrent que les séries (3) convergeront toutes les fois que les séries (3 bis) convergeront elles-mêmes.

Or les équations (2 bis) s’intègrent aisément, et l’on trouve que les équations (3 bis), qui en sont les intégrales, peuvent s’écrire

où nous avons posé, pour abréger,

Ces séries, développées suivant les puissances de convergent pourvu que

soient assez petits.

Il en sera donc de même des séries (3). C.Q.F.D.

Extension du théorème de Cauchy.

27.Les considérations développées au no 26 montrent la possibilité de développer les solutions d’une équation différentielle, suivant les puissances d’un paramètre arbitraire mais seulement pour les valeurs de la variable indépendante dont le module est assez petit. Nous allons chercher maintenant à nous affranchir de cette restriction.

Considérons les équations suivantes

(1)

Je suppose donc de nouveau que la variable entre explicitement dans les équations.

Soient

celle des solutions des équations (1) qui est telle que les valeurs initiales de et de pour soient nulles.

Je suppose que, pour toutes les valeurs de comprises entre 0 et les deux fonctions et puissent se développer suivant les puissances de

(les coefficients des développements étant des fonctions d’ailleurs quelconques de ).

Cette condition peut s’énoncer d’une autre manière : lorsque pour un certain système de valeurs de et l’une des fonctions et cesse d’être holomorphe, on dit que ce système de valeurs correspond à un point singulier des équations (1). Par conséquent, nous pouvons énoncer la condition qui précède en disant, dans un langage assez incorrect, mais commode, que la solution particulière

ne va passer par aucun point singulier.

Je dis que, si cette condition est remplie, pourront, pour toutes les valeurs de comprises entre 0 et être développées suivant des puissances de (je dis de et non pas de et de ), pourvu que soit assez petit.

J’observe d’abord que l’on peut, sans restreindre la généralité, supposer que les fonctions et s’annulent identiquement quand on y fait

ou, ce qui revient au même, que l’on a identiquement

Si, en effet, cela n’était pas, on changerait de variables en posant

et l’on serait ramené au cas que nous venons d’énoncer ; car les équations transformées admettraient comme solution, pour

Faisons donc cette hypothèse ; les fonctions et seront développables suivant les puissances de et mais je ne les suppose pas développées suivant les puissances de

Nous pourrons trouver des séries (3) développées suivant les puissances de et qui, substituées à la place de et de satisferont formellement aux équations (1). De plus, ces séries s’annuleront pour

Pour démontrer la convergence de ces séries, formons des équations analogues aux équations (2 bis) du no 26.

Les fonctions et sont développables suivant les puissances de et pourvu que

Quand variera de 0 à les rayons de convergence de ces développements varieront également ; mais on pourra leur assigner une limite inférieure. On pourra donc, d’après le no 20, trouver deux nombres positifs et tels que, pour toutes les valeurs de comprises entre 0 et on ait

en posant

Formons alors les équations

(2 bis)

Nous pouvons satisfaire à ces équations par des séries (3 bis) de même forme que les séries (3), et qui satisfont formellement à ces équations.

D’après le no 25, les séries (3) convergeront pourvu que les séries (3 bis) convergent.

Or, si nous posons

nos équations donnent

et
ou

d’où, puisque pour

On vérifiera sans peine que et, par conséquent, et peuvent se développer suivant les puissances de et que le développement converge pour toutes les valeurs de pourvu que soit suffisamment petit ; on peut en conclure que les séries (3 bis) et les séries (3) convergent. C.Q.F.D.

Applications au Problème des trois Corps.

28.Les résultats du numéro précédent subsistent évidemment quand, au lieu d’un seul paramètre arbitraire on en a plusieurs. Voici l’usage que nous allons faire de ce résultat : nous n’avons, dans le no 27, envisagé que la solution particulière pour laquelle les valeurs initiales de et de sont nulles.

Supposons que nous considérions la solution particulière pour laquelle ces valeurs initiales sont et et que nous nous proposions de développer cette solution suivant les puissances de et

Mais nous pouvons encore aller plus loin : reprenons les équations (1) du numéro précédent, et envisageons la solution particulière telle que

pour cherchons ensuite à développer les valeurs de et de pour suivant les puissances de et

Posons ensuite

les équations (1) deviendront

Nous pourrons y regarder et comme les variables et comme quatre paramètres arbitraires.

La solution particulière que nous envisageons est telle que, pour on a

et, par conséquent,

Nous avons, d’ailleurs, à calculer les valeurs de et de pour c’est-à-dire pour

Nous retombons donc sur le cas étudié au numéro précédent, et nous voyons que et sont développables suivant les puissances de et pourvu que les modules de ces quantités soient assez petits. Il y a à cela une seule condition, c’est que la solution particulière, pour laquelle les valeurs initiales de et de sont nulles, et dans laquelle on suppose de plus ne passe par aucun point singulier.

Appliquons cela aux équations du no 13

et où ne dépend pas des

sera une fonction des et des qui ne cessera d’être holomorphe qu’en certains points singuliers. Il pourra se faire que, si l’on donne aux les valeurs suivantes

la fonction reste holomorphe pour toutes les valeurs des

Imaginons alors que l’on se propose le problème suivant :

Envisageant la solution particulière, telle que, pour on ait

et considérant en particulier les valeurs des variables pour

développer ces valeurs suivant les puissances de de des et des

Ce développement sera possible ; en effet, si l’on fait à la fois

la solution particulière envisagée se réduit à

( est la valeur de pour ), et, d’après ce que nous venons de supposer, cette solution ne passe par aucun point singulier.

Voyons ce qui arrive dans le cas particulier du Problème des trois Corps. La fonction ne peut cesser d’être holomorphe que si deux des trois corps viennent à se choquer. La solution particulière que nous considérons représente, dans le cas de l’ensemble de deux ellipses képlériennes décrites par les deux petites masses sous l’attraction d’une masse égale à 1 placée à l’origine. Pour qu’un choc puisse se produire, il faudrait que ces deux ellipses se coupassent ; or c’est ce qui n’arrive jamais dans les applications astronomiques.

Nous arrivons donc à cette conclusion :

Dans le Problème des trois Corps, nous définirons la situation du système par les douze variables définies au no 11.

On se donne les valeurs de ces variables pour et l’on demande quelles seront les valeurs de ces mêmes variables à l’époque

Nous venons de voir que ces valeurs sont développables suivant les puissances des masses, des des et de

Il n’y a qu’un cas d’exception, qui est le suivant : supposons que, pour les valeurs initiales des variables soient et et que, les masses étant supposées nulles, le mouvement se continue ensuite d’après les lois de Képler, si, dans ces conditions, un choc se produisait avant l’époque ce que nous venons de dire ne serait plus vrai.

On pourrait calculer de la sorte une limite inférieure du temps pendant lequel il est permis de développer les coordonnées des planètes suivant les puissances des masses ; mais la limite ainsi obtenue serait beaucoup trop éloignée de la limite précise pour que ce calcul présentât de l’intérêt.

Emploi des séries trigonométriques.

29.Les séries de puissances ne sont pas les seules qui puissent servir à l’intégration des équations différentielles ; on se sert également des séries trigonométriques. Je veux en dire ici quelques mots avant d’aborder les équations aux dérivées partielles.

On sait qu’une fonction de périodique et de période 2π peut se développer en une série de la forme suivante

J’ai montré dans le Bulletin astronomique (novembre 1886) que, si la fonction est finie et continue, ainsi que ses premières dérivées, et si sa ième dérivée est finie, mais peut devenir discontinue en un nombre limité de points, on peut trouver un nombre positif tel que l’on ait, quelque grand que soit

Si est une fonction analytique, elle sera finie et continue ainsi que toutes ses dérivées. On pourra donc trouver un nombre tel que

Il résulte de là que la série

converge et, par conséquent, que la série (1) est absolument et uniformément convergente.

Cela posé, considérons un système d’équations différentielles linéaires

(2)

Les coefficients sont des fonctions de périodiques et de période 2π.

Les équations (2) ne changent donc pas quand on change en Cela posé, soient

(3)

solutions, linéairement indépendantes, des équations (2).

Les équations ne changent pas quand on change en et les solutions deviendront

Elles devront donc être des combinaisons linéaires des solutions (3), de sorte qu’on aura

(4)

les étant des coefficients constants.

On aura d’ailleurs de même (avec les mêmes coefficients)

Cela posé, formons l’équation en

(5)

Soit l’une des racines de cette équation. D’après la théorie des substitutions linéaires, il existera toujours coefficients constants

tels que si l’on pose

et de même
on ait
et de même

Posons

il viendra

Cette équation exprime que

est une fonction périodique que nous pourrons développer en une série trigonométrique

Si les fonctions périodiques sont analytiques, il en sera de même des solutions des équations différentielles (2) et de La série sera donc absolument et uniformément convergente.

De même

sera une fonction périodique que l’on pourra représenter par une série trigonométrique

Nous avons donc une solution particulière des équations (2) qui s’écrit

(6)

À chaque racine de l’équation (5) correspond une solution de la forme (6).

Si l’équation (5) a toutes ses racines distinctes, nous aurons solutions de cette forme linéairement indépendantes, et la solution générale s’écrira

(7)

Les sont des constantes d’intégration, les sont des constantes et les sont des séries trigonométriques absolument et uniformément convergentes.

Voyons maintenant ce qui arrive quand l’équation (5) a une racine double, par exemple quand Reprenons la formule (7), faisons-y

et faisons-y tendre vers Il vient
ou, en posant
il viendra

Il est clair que la différence

s’annulera pour Nous pourrons donc poser

Il vient ainsi

et à la limite (pour ),

On verrait que la limite pour est encore une série trigonométrique absolument et uniformément convergente.

Ainsi l’effet de la présence d’une racine double dans l’équation (5) a été d’introduire dans la solution des termes de la forme suivante

étant une série trigonométrique.

On verrait sans peine qu’une racine triple introduirait des termes de la forme

et ainsi de suite.

Je n’insiste pas sur tous ces points de détail. Ces résultats sont bien connus par les travaux de MM. Floquet, Callandreau, Bruns, Slieltjes, et, si j’ai donné ici la démonstration in extenso pour le cas général, c’est que son extrême simplicité me permettait de le faire en quelques mots.

Fonctions implicites.

30.Si l’on a quantités entre lesquelles ont lieu relations

(7)

si les sont développables suivant les puissances des et des et s’annulent avec ces variables ;

Si enfin le déterminant fonctionnel des par rapport aux n’est pas nul quand les et les s’annulent à la fois ;

On pourra tirer des équations (7) les inconnues sous la forme des séries développées suivant les puissances de

Considérons, en effet, comme la seule variable indépendante, comme des paramètres arbitraires : nous pourrons remplacer les équations (7) par les équations différentielles

Nous sommes ainsi ramenés au cas dont nous venons de nous occuper.

En particulier, si est une fonction développable suivant les puissances de et des si pour

on a
et si est défini par l’égalité

sera développable suivant les puissances des

31.Ce résultat peut s’énoncer d’une autre manière ; considérons en effet une équation algébrique quelconque

Si, pour une certaine valeur de s’annule sans que sa dérivée s’annule, on dit que est une racine simple de l’équation ; c’est au contraire une racine multiple d’ordre si s’annule, ainsi que ses premières dérivées.

De même, si l’on a un système quelconque d’équations algébriques, trois par exemple, à savoir

on dit que

est une solution simple de ce système si pour ces valeurs s’annulent sans que leur jacobien ou déterminant fonctionnel s’annule.

On peut conserver la même dénomination quand et au lieu d’être des polynômes entiers en sont des fonctions holomorphes en

Le résultat du numéro précédent peut alors s’énoncer comme il suit : si l’on a équations (où les inconnues sont )

dont les premiers membres sont holomorphes, si, pour

le système de valeurs

est une solution simple des équations, les peuvent se développer suivant les puissances croissantes des Si donc on donne aux des valeurs suffisamment petites, nos équations admettront encore une solution réelle.

Points singuliers algébriques.

32.Considérons une équation

(1)
et supposons que, pour

s’annule ainsi que ses premières dérivées par rapport à Alors, pour la valeur 0 de est une solution d’ordre de l’équation.

On démontre qu’il existe développements convergents de suivant les puissances positives et fractionnaires de s’annulant avec et satisfaisant à l’équation (voir les travaux classiques de M. Puiseux sur les équations algébriques).

Mais ces développements convergents se répartissent en groupes de la manière suivante.

Soit

(2)

un de ces développements, et soit une racine ième de l’unité.

Le développement

satisfera également à l’équation (1). On pourra donc déduire du développement (2) autres développements qui formeront avec lui un groupe ; je dirai que ce groupe est d’ordre

La somme des ordres de tous les groupes est manifestement égale à

Supposons qu’il y ait groupes d’ordre la somme de leurs ordres sera et l’on aura

Les coefficients des développements appartenant à des groupes d’ordre seront donnés par des équations algébriques d’ordre

Si est impair, ces équations auront au moins une racine réelle et un des développements au moins aura ses coefficients réels ; comme de plus est impair, si est impair, la valeur correspondante de sera encore réelle.

Mais, si est impair, l’une au moins des quantités est impaire ; l’une au moins des valeurs de doit donc être réelle.

Si donc est impair, l’équation (1) admettra encore au moins une solution réelle pour les petites valeurs de

J’ajouterai que les nombres de solutions réelles pour les petites valeurs négatives de sont tous deux de même parité que j’entends parler des solutions réelles qui s’annulent avec

Élimination.

33.Considérons maintenant une équation

(1)

et imaginons que, quand et les s’annulent, s’annule ainsi que ses premières dérivées par rapport à sans que la dérivée ième s’annule.

Au début de ma Thèse inaugurale sur les fonctions définies par les équations aux dérivées partielles (Paris, Gauthier-Villars, 1879), j’ai démontré qu’une pareille équation peut être transformée en une autre de la forme suivante

est un polynôme de degré en où le coefficient de est égal à 1, et où les autres coefficients sont holomorphes par rapport aux

Si l’on suppose cette équation se réduit à

fonction holomorphe des

et l’on retombe sur le théorème du no 30.

J’ai démontré également dans cette même Thèse (lemme IV, p. 14) que :

Si sont fonctions holomorphes en si ces fonctions s’annulent quand on annule tous les et tous les si les équations

restent distinctes quand on annule tous les si enfin on définit les en fonction des par les équations

(2)

les fonctions ainsi définies sont algébroïdes ; ce qui veut dire, dans le langage de la Thèse citée, que les équations (2) peuvent être remplacées par autres équations

de même forme, mais dont les premiers membres sont des polynômes entiers par rapport aux

Cela posé, soient deux équations simultanées

(3)

définissant et en fonction de je suppose que les premiers membres soient holomorphes en et et s’annulent avec ces trois variables.

De deux choses l’une, ou bien, quand on annulera les deux équations resteront distinctes ; on pourra alors, d’après ce que nous venons de voir, remplacer ces deux équations par deux autres équivalentes

dont les premiers membres seront des polynômes entiers en et on peut alors, entre ces deux équations devenues algébriques, par rapport aux deux inconnues et éliminer par exemple, et arriver à une équation unique

ou bien, quand on annulera les deux équations (3) cesseront d’être distinctes.

Mais alors deux cas pourront se présenter.

Ou bien on pourra trouver un nombre tel que les équations (3) restent distinctes quand on fera

Alors, si nous posons les équations restent distinctes pour et l’on retombe sur le cas précédent ; on peut éliminer entre les deux équations (3) et les réduire à une équation unique entre et ou, ce qui revient au même, entre et

Ou bien on ne pourra pas trouver un pareil nombre mais cela ne peut arriver que si les équations (3) ne sont pas distinctes ; sauf ce cas exceptionnel, l’élimination sera donc toujours possible.

Plus généralement, soient

(4)

équations dont les premiers membres soient holomorphes et qui définissent les en fonctions de si ces équations sont distinctes, on pourra toujours éliminer entre ces équations et les ramener à une équation unique de même forme

(5)

Je suppose que les équations (4) soient encore distinctes pour et, par conséquent, que ne soit pas divisible par

Je suppose que s’annulent avec les et avec de sorte que

(6)

est une solution du système (4) pour et que est une solution de l’équation (5).

Si est une solution d’ordre de l’équation (5), je dirai également que la solution (6) est une solution d’ordre du système (4).

Si la solution est d’ordre impair, nous pourrons affirmer que l’équation (5) et, par conséquent, le système (4) admettent encore des solutions réelles pour les petites valeurs de

Théorème sur les maxima.

34.Soit une fonction quelconque holomorphe par rapport aux on sait qu’on trouvera tous les maxima de cette fonction en résolvant le système

(1)

mais on sait également que toutes les solutions de ce système ne correspondent pas à des maxima.

Je dis qu’une condition nécessaire, mais non suffisante bien entendu, pour qu’une solution puisse correspondre à un maximum de c’est que cette solution soit d’ordre impair.

La chose est évidente si l’on n’a qu’une seule variable et une seule équation

On sait, en effet, qu’il ne peut y avoir de maximum si la première dérivée de qui ne s’annule pas n’est pas d’ordre pair.

Étendons le même résultat au cas général et, pour fixer les idées, considérons le cas de deux variables seulement et Regardons et comme les coordonnées d’un point dans un plan ; nous pouvons toujours supposer que l’on ait pris pour origine le point qui correspond au maximum, de façon que ce maximum ait lieu pour

On pourra alors décrire autour de l’origine une courbe fermée très petite, et telle qu’en tous ces points on ait

Mais il y a plus : nous pouvons supposer que cette courbe ait pour équation

étant une constante très petite, et qu’à l’intérieur de cette courbe fermée on ait

par conséquent, quand on franchira la courbe en allant de l’extérieur à l’intérieur, ira en augmentant.

Ce qu’il s’agit d’établir, c’est que

est une solution d’ordre impair du système
mais cela revient à dire ce qui suit : soit

une fonction de et de qui se réduise à pour

Le système

(1)
a, pour une solution multiple qui est

mais on peut toujours choisir la fonction [qui ne nous est donnée que pour et qui reste arbitraire pour les autres valeurs de ], de telle façon que, pour les valeurs de différentes de zéro, ce même système n’ait plus que des solutions simples. Eh bien, ce qu’il s’agit d’établir, c’est que, si est assez petit, il y a, dans l’intérieur de la courbe un nombre impair de ces solutions simples.

Dans mon Mémoire Sur les courbes définies par les équations différentielles [IVe Partie, Chap. XVIII (Journal de Liouville, 4e série, t. II, p. 177)], j’ai eu l’occasion d’étudier la distribution de points singuliers d’un système d’équations différentielles et de définir pour cela l’indice kroneckérien d’une courbe fermée ou d’une surface fermée par rapport à ce système d’équations différentielles.

Le système que nous aurons à considérer ici est le suivant

(2)
et, plus généralement,

Les points singuliers du système (2) seront les solutions du système (1).

Nous aurons à calculer l’indice kroneckérien de la courbe fermée par rapport au système (2). On peut vérifier qu’il est égal à 1 pour et l’on en conclura qu’il sera encore égal à 1 pour les petites valeurs de puisqu’il ne peut varier que si une des solutions du système (1) vient à franchir cette courbe

Le nombre des points singuliers positifs du système (2), situés à l’intérieur de est donc égal au nombre des points singuliers négatifs plus un.

Le nombre total des points singuliers, c’est-à-dire le nombre total des solutions du système (1) supposées simples, situées à l’intérieur de est donc impair. C.Q.F.D.

Ce raisonnement s’applique sans changement au cas où il y a plus de deux variables.

Nouvelles définitions.

35.Je ne parlerai pas pour le moment, afin de pas trop allonger ces préliminaires, de l’application des méthodes de Cauchy aux équations aux dérivées partielles, bien que je me réserve de revenir plus tard sur cette question.

Je terminerai ce Chapitre en donnant une nouvelle extension à la notation du no 20.

Soient deux séries ordonnées suivant les puissances croissantes de et de de telle façon que les coefficients soient des fonctions périodiques de développées suivant le sinus ou le cosinus des multiples de ou, ce qui revient au même, suivant les puissances positives et négatives de

Considérons donc le développement de et de suivant les puissances de et si chaque coefficient de est réel, positif et plus grand en valeur absolue que le coefficient correspondant de nous écrirons

Si la série est convergente pour

la série convergera pour

quantité réelle quelconque.

J’ajoute qu’il suffit que la série converge quand pour qu’elle converge quel que soit

Si la série converge et si elle représente une fonction analytique, il résulte de ce que nous avons vu au numéro précédent que la convergence est absolue et uniforme.

On peut donc trouver une constante réelle et positive et une fonction de périodiques et de période qui soient telles :

1o Que le développement de suivant les puissances positives et négatives de ait tous ses coefficients réels et positifs ;

2o Que l’on ait

On aura donc a fortiori, quel que soit

étant la valeur de pour

En effet, soit

il viendra

Cette série devra converger, par hypothèse, pour toutes les valeurs réelles de et pour les valeurs de et qui sont intérieures au cercle de convergence. Supposons, par exemple, que la convergence ait lieu pour

Les termes de la série devront être limités en valeur absolue, de sorte qu’on pourra écrire, en appelant une constante positive,

Si nous posons

il viendra
Séparateur