Livre pour l’enseignement de ses filles du Chevalier de La Tour Landry/Chapitre 42

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Chappitre XLIIe
De la quinte folie de Eve


La quinte folie fut de touchier, quant elle habita au fruit, dont il vaulsist mieux que elle n’eust eu nulles mains. Car moult est perilleux le touchier après le regard, quand les deux vices se consentent de mauvaise volenté. Et pour ce dist le saige en la sapience que l’en se doit garder de touchier à delit dont le cuer soit blescié ne l’âme ; car fol atouchement eschauffe le cuer et enflambe le corps. Et, quant raison est aveuglée qui doit le cueur et la fenestre gouverner, l’en chiet en pechié et en fol deliz ; et encore dit le saige, qui se veult seurement gouverner et nettement garder, doit deux fois ou trois avant ses mains regarder que à nul fol fait atouchier, c’est à dire, avant que le faire et entreprendre, deux foyz ou trois y penser. Car le touchier et le bayser esmeuvent le sanc et la char telement que ils font entroblier la crainte de Dieu et honneur de cest monde. Ainsi moult de mal se esmeut et avient par fols baisiers et atouchemens, tout ainsi comme il avint à Eve qui atoucha au fruit de vye.