Louÿs – Poésies/La forêt des Nymphes 13

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Slatkine reprints (p. 157).

POUR LA STÈLE DE LECONTE DE LISLE



Sur ma stèle, au milieu des lauriers et des piques,
Étranger, sur le lit de mon dernier sommeil,
Un ciseleur de pierre a sculpté le soleil,
Et la cigale d’or, et les paons olympiques.

J’ai chanté les héros, les morts, les lieux épiques,
De la sainte Hellas l’impassible réveil,
Et, les yeux éblouis d’un souvenir vermeil,
J’ai dit vos mers de pourpre, ô golfes des Tropiques.

Et c’est là mon tombeau. La paix du sol natal,
Les parfums, la splendeur du songe oriental
N’environneront pas ma dépouille exilée.

Mais l’austère vivant est le mort glorieux :
J’ai vêtu mes désirs d’une cuirasse ailée,
Et j’ai rendu leur âme et leurs vrais noms aux Dieux !