L’Encyclopédie/1re édition/NOTAIRE

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NOTAIRE, s. m. (Jurisprudence.) en latin notarius, libello, tabellarius, tabellio, amanuensis, actuarius, scriba, &c. est un officier dépositaire de la foi publique, qui garde les notes & minutes des actes que les parties passent devant lui.

Le titre de notaire étoit inconnu chez les Juifs & chez plusieurs autres peuples de l’antiquité. La plûpart des conventions n’étoient alors que verbales, & l’on en faisoit la preuve par témoins ; ou si l’on rédigeoit le contrat par écrit, il ne tiroit ordinairement son authenticité que de la signature ou sceau des parties, & de la présence d’un certain nombre de témoins qui, pour plus de sûreté, apposoient aussi leurs sceaux.

Il y avoit pourtant certains actes qui étoient reçus par un scribe ou écrivain public, ou qui étoient cachetés du sceau public.

La loi de Moïse n’avoit ordonné l’écriture que pour l’acte de divorce, lequel, suivant saint Augustin, liv. XIX. ch. xxvj. contre Faustus, devoit être écrit par un scribe ou écrivain public.

Il est parlé dans Jérémie, ch. xxxij. V. 10. d’un contrat de vente qui fut fait double, l’un qui demeura ouvert, l’autre qui fut plié, cacheté & scellé, puis remis entre les mains d’un tiers en présence de témoins ; ce double, suivant Vatable, tenoit lieu d’original, & étoit cacheté du sceau public, annulo publico. Vatable ajoute que quand il y avoit contestation en justice pour raison d’un tel acte, les juges n’avoient égard qu’à celui qui étoit cacheté ; qu’au reste on ne se servoit point de tabellions en ce tems-là, mais que les contractans écrivoient eux-mêmes le contrat & le signoient avec les témoins. Il dit pourtant ensuite que quelquefois on se servoit d’écrivains ou tabellions publics ; & c’est ainsi qu’il explique ce passage : lingua mea calamus scribæ velociter scribentis.

Les scribes chez les Juifs étoient de trois sortes : les uns, qu’on appelloit scribes de la loi, écrivoient & interprétoient l’Ecriture ; d’autres, que l’on appelloit scribes du peuple, étoient de même que chez les Grecs une certaine classe de magistrature ; d’autres enfin, dont la fonction avoit un peu plus de rapport à celle de notaires, étoient proprement les greffiers ou secrétaires du conseil, lesquels tenoient lieu de notaires en ce qu’ils recevoient & cachetoient les actes qui devoient être munis du sceau public.

Aristote, liv. VI. de ses polit. ch. viij. faisant le dénombrement des officiers nécessaires à une cité, y met celui qui reçoit les sentences & contrats dont il ne fait qu’un seul & même office ; il convient néanmoins qu’en quelques républiques ces offices sont séparés, mais il les considere toûjours comme n’ayant qu’un même pouvoir & autorité.

Les Athéniens passoient aussi quelquefois leurs contrats devant des personnes publiques que l’on appelloit comme à Rome argentarii ; c’étoient des banquiers & changeurs qui faisoient trafic d’argent, & en même tems se mêloient de négocier les affaires des particuliers.

Chez les Romains, ceux à qui ces argentiers faisoient prêter de l’argent, reconnoissoient avoir reçu la somme, quoiqu’elle ne leur eût pas encore été payée, comptée & délivrée ; ils écrivoient le nom du créancier & du débiteur sur leur livre qui s’appelloit kalendarium, lequel étoit public & faisoit foi en justice, & cette simple inscription sur ce livre étoit ce qu’ils appelloient litterarum seu nominum obligatio.

Cette façon de contracter avoit cessé d’être en usage dès le tems de Justinien, comme il est marqué au commencement du titre 22. des institutes de litter. oblig.

Ils étoient obligés de communiquer ces livres à tous ceux qui y avoient intérêt, parce que leur ministere étoit public, comme le remarque M. Cujas ; & s’ils le refusoient, on les y contraignoit actione in factum prætoriâ, qui avoit été introduite spécialement contre eux à cet effet, comme dit M. Colombet en ses paratitles ff. de edendo. M. Cujas, ad leg. XL. ad leg. aquil. lib. III. Pauli ad edict. dit que si, faute par l’argentier de représenter ses livres, quelqu’un perdoit son procès, l’argentier étoit tenu de l’indemniser du principal & des frais, mais l’argentier n’étoit tenu de montrer à chacun que l’endroit de son registre qui le concernoit, & non pas tout le registre entier.

Tout ce qui vient d’être dit avoit lieu aussi contre les héritiers quoiqu’ils ne fussent pas argentiers, sur quoi il faut voir au digeste le titre de edendo, & la novelle 136. de argentarii contractibus.

La forme requise dans ces livres étoit que le jour & le consulat, c’est-à-dire, l’année où l’affaire s’étoit faite y fut marquée.

Ceux qui avoient remis leur argent en dépôt avoient un privilege sur les biens des argentiers, mais il n’y avoit point de semblable privilege pour ceux qui avoient donné leur argent, afin qu’on le fit profiter & pour en tirer intérêt, comme il est décidé dans la loi si ventri ff. de rebus autorit. jud. possid.

Pancirol. var. quæst. lib. I. ch. xxxj. prétend que si on ajoutoit foi à leurs registres, ce n’étoit pas comme Accurse a prétendu parce qu’ils étoient choisis & nommés par le peuple, mais parce que leur fonction étoit d’elle-même toute publique, & ob publicam causam, étant d’ailleurs permis à tout le monde de l’exercer.

Everhard, de fide instrum. cap. j. n. 34. prétend au contraire qu’il y avoit deux sortes d’argentiers, les uns établis par la ville en certain lieu où chacun pouvoit sûrement porter son argent, d’autres qui faisoient commerce de leur argent pour leur compte. Il y a apparence que les premiers étoient les seuls dont ces registres fissent une foi pleine & entiere, ceux-là étant les seuls qui fussent vraiment officiers publics.

Les argentiers pouvoient exercer leur commerce par leurs enfans & même par leurs esclaves ; ceux-ci pouvoient aussi exercer en leur nom jusqu’à concurrence de leur pécule, mais les femmes n’y étoient pas reçues.

Il paroît au surplus que les argentiers ne recevoient pas indifféremment toutes sortes de contrats, mais seulement ceux qui se faisoient pour prêt de part ou autre négociation d’argent.

En effet, il y avoit chez les Romains, outre les argentiers, plusieurs autres personnes qui recevoient les contrats & autres actes publics ; savoir, des notaires, tabellions, & autres personnes.

Les fonctions des notaires & tabellions ont tant de connexité avec celles de greffier, que dans les lois romaines ces termes scribæ & tabularii sont communément joints ensemble, comme on voit au code de tabulariis, scribis & logographis ; & quoique dans l’usage le terme de scriba se prenne ordinairement pour greffier, & tabularius pour tabellion, il est néanmoins certain que dans les anciens textes le terme de scriba comprend aussi tous les praticiens en général, & particulierement les tabellions aussi-bien que les greffiers, témoin la vingt-unieme épître de Cassiodore, lib. XII. variar. écrite au scribe de Ravenne, où l’on voit qu’il étoit à-la-fois greffier & tabellion : aussi dans le vetus glossarium, tabularius sive tabellio dicitur scriba publicus ; le terme de tabularius est aussi souvent pris pour greffier.

Pour ce qui est de la qualité de notaire, elle étoit commune chez les Romains à tous ceux qui écrivoient sous autrui, soit les sentences, soit les contrats, suivant ce que dit Lampride dans la vie d’Alexandre Severe, où il rapporte qu’un notaire, notarium, qui avoit falsifié un jugement rendu dans le conseil de l’empereur, fut banni après avoir eu les nerfs des doigts coupés, afin qu’il ne pût jamais écrire.

Loyseau tient que par le terme de notaire on entendoit proprement ceux qui recevoient & faisoient le plumitif des sentences ou contrats, & que l’on distinguoit des scribes & tabellions par le titre d’exceptores ; on comprenoit même sous ce terme notaires ceux qui recevoient les contrats sous les tabellions, & en général tous ceux qui avoient l’art & l’industrie d’écrire par notes & abréviations : notas qui didicerent propriè notarii appellantur, dit saint Augustin, lib. II. de doctrinâ christ. Ces notes n’étoient point composées de mots écrits en toutes lettres, une seule lettre exprimoit tout un mot, on se servoit même de signes particuliers que Justinien dit avoir été appellés de son tems signes, dont il fut obligé de défendre l’usage à cause de diverses interprétations qu’on leur donnoit. Ces sortes de notes furent appellées notes de Tyron, du nom de celui qui en introduisit l’usage à Rome. Tyron étoit un affranchi de Ciceron auquel il a adressé plusieurs de ses épîtres, qui s’adonna à écrire en figures qui n’étoient caracteres d’aucune langue connue. Il ne fut pas le premier inventeur de cette maniere d’écrire, car elle venoit des Grecs ; mais il y ajouta plusieurs choses de son invention, & la perfectionna : c’est pourquoi on appella notes de Tyron tous les caracteres semblables. Gruter a donné des principes pour déchiffrer ces sortes d’écritures ; & M. l’abbé Carpentier a donné un alphabet tironien pour le déchiffrement d’un manuscrit du tems de Charlemagne, écrit en notes de Tyron, qui est à la bibliotheque du roi.

Cet art d’écrire en notes n’est point venu jusqu’à nous, il en est cependant resté des vestiges en la chancellerie de Rome où l’on délivre des signatures pleines d’abréviations ; c’est peut-être aussi de-là qu’est venu l’invention de l’écriture par chiffres.

On appella donc notaires à Rome ceux qui avoient l’art d’écrire par notes & abréviations ; & comme on s’adressoit à eux pour recevoir toutes sortes d’actes, c’est de-là que le nom de notaire est demeuré aux officiers publics qui exercent la même fonction.

Les notaires romains étoient aussi appellés cursores, à cause de la rapidité avec laquelle ils écrivoient.

Il étoit d’usage à Rome de faire apprendre aux jeunes gens, & principalement aux esclaves qui avoient de l’intelligence, cet art d’écrire en notes, afin qu’ils servissent de clercs aux greffiers & tabellions.

Tous les scribes publics, soit greffiers, tabellions ou notaires, étoient même au commencement des esclaves publics, c’est-à-dire appartenant au corps de chaque ville qui étoient employés à faire ces sortes d’expéditions, afin qu’elles ne coutassent rien au peuple : cela étoit si ordinaire alors, qu’en la loi derniere au code de servis reipublicæ on met en question si l’esclave d’une cité ou république ayant été affranchi, & ayant depuis continué l’exercice du notariat de cette ville, n’avoit pas dérogé à sa liberté.

Comme les esclaves chez les Romains étoient dans le domaine du maître, qui pouvoit les vendre & aliéner, M. Pasquier tient que c’est de-là qu’en France les tabellionnés sont aussi réputés domaniaux.

C’est aussi de-là, suivant Loyseau, que nos notaires se mettent encore stipulans & acceptans pour les parties ; ce qu’ils n’auroient pas pû faire dans l’origine s’ils n’eussent été esclaves publics, étant une regle de droit que personne ne peut stipuler pour autrui, de laquelle regle néanmoins étoient exceptés les esclaves, lesquels pouvoient stipuler & acquérir pour leur maître : si c’étoit un esclave commun à plusieurs, il pouvoit stipuler pour chacun d’eux ; & si c’étoit un esclave public, c’est-à-dire appartenant à une ville, il pouvoit stipuler pour chaque habitant, comme il paroît par plusieurs lois du digeste.

Mais il faut bien prendre garde que les esclaves qui, dans ces premiers tems, faisoient la fonction de notaires à Rome, ne peuvent être comparés aux notaires d’aujourd’hui : en effet, ils n’étoient point officiers en titre, ils n’étoient proprement que les clercs des tabellions, & leurs écritures n’étoient point authentiques, ce n’étoient que des écritures privées.

Bien-loin que la fonction de tabellion & de notaire eût quelque chose d’ignoble ; chez les Romains, on voit que les patrons se faisoient un devoir & un honneur de recevoir les contrats de leurs cliens.

En effet, les PP. Catrou & Rouillé dans leur grande histoire romaine, liv. I. p. 66. de l’édition de 1725, remarquent, d’après Plutarque & Denis d’Halicarnasse, que les plus riches & les plus nobles citoyens eurent le nom de patrons ; que par-là ils tinrent un rang mitoyen entre les sénateurs & la plus vile populace ; que les patrons se chargerent de soutenir & de protéger chacun certain nombre de familles du plus bas peuple, de les aider de leur crédit & de leur bien, & de les affranchir de l’oppression des grands ; que c’étoit aux patrons de dresser les contrats de leurs cliens, de démêler leurs affaires embrouillées, afin de subvenir à leur ignorance contre les ruses de la chicane.

Si le commissaire de la Mare, qui a parlé de l’origine des notaires en son traité de la police, n’eût pas été poussé de quelque jalousie contre les notaires, il n’auroit pas manqué de rapporter ce trait d’histoire qui justifie que la fonction de recevoir des contrats a toujours été regardée comme importante & honorable, & que l’on a mal-à-propos comparé les clercs des greffiers & tabellions romains avec les notaires d’aujourd’hui, qui n’ont rien de commun avec eux que le nom.

Aussi voit-on que les empereurs Arcadius & Honorius défendirent de prendre des esclaves pour remplir les fonctions de greffier & de notaire, de sorte que depuis ce tems on les élisoit dans les villes, de même que les juges ; c’est pourquoi ces fonctions de notaire étoient alors comptées entre les charges municipales.

Les notaires, greffiers & autres praticiens étoient du nombre des ministres, des magistrats ; ils faisoient néanmoins un ordre séparé de celui des ministres inférieurs, appellés appariteurs : la fonction des greffiers & des notaires étoit estimée beaucoup plus honorable, parce que les actes publics étoient confiés à leur fidélité.

Les fonctions de notaire étoient exercées gratuitement, comme des charges publiques & ordinaires, que chaque honnête citoyen exerçoit à son tour ; aussi étoient-elles regardées comme si onéreuses, que plusieurs, pour les éviter, quittoient les villes & s’en alloient à la guerre, ou bien se faisoient officiers domestiques de l’empereur, ce qu’il fallut enfin défendre par une loi expresse.

Il ne faut pas confondre les notaires des Romains avec d’autres officiers, appellés actuarii seu ab actis ; chaque gouverneur en avoit un près de lui, pour recevoir & registrer les actes de jurisdiction volontaire, tels que les émancipations, adoptions, manumissions, & singulierement les contrats & testamens qu’on vouloit insinuer, publier & registrer, qui est ce que l’on appelloit mettre apud acta.

Le pouvoir des tabellions & notaires étoit grand chez les Romains, de même que parmi nous. Justinien, dans la loi jubemus au code de sacro sancti eccl. les appelle juges cartulaires ; ils font en effet tout-à-la-fois la fonction de greffiers & de juges ; & dans quelques provinces de France, ils ont conservé l’usage de mettre qu’ils ont jugé & condamné les parties à remplir leurs conventions : Cassiodore, en sa formule des notaires, éleve même ceux-ci beaucoup au-dessus des juges, en ce que ces derniers ne font que juger les procès, au-lieu que les notaires les préviennent, & qu’il n’y a pas d’appel de leurs jugemens.

On voit dans la novelle 44. que la méthode des Romains, par rapport aux actes qu’ils passoient devant notaires, étoit que le notaire ou clerc du tabellion écrivoit d’abord l’acte en note ; cette minute ou projet de l’acte s’appelloit scheda ; l’acte n’étoit point obligatoire ni parfait jusqu’à ce qu’il eût été écrit en toute lettre, & mis au net ce que l’on appelloit in purum seu in mundum, rédiger. Cette opération qui revient assez à ce que nous appellons grosse des contrats, se faisoit par les tabellions, & s’appelloit completio contractus : c’est pourquoi, en la loi contractus ou code de fide instrum. il est dit que les parties pouvoient se retracter jusqu’à ce que le contrat fût mis au net & confirmé par la souscription des parties.

Cette souscription n’étoit pas au seing manuel de leur nom ; elle consistoit à écrire au-bas du contrat que les parties l’avoient pour agréable, & accordoient ce qui y étoit contenu ; & à l’égard de leur seing, appellé signum, ce n’étoit autre chose que l’apposition de leur sceau ou cachet particulier, dont ils usoient communément outre la souscription.

Lorsque les contractans ne savoient pas écrire, un ami étoit reçu à souscrire pour eux, ou bien le tabellion ; celui-ci ne souscrivoit pas le contrat, il falloit seulement qu’il l’écrivît tout-au-long, il n’étoit pas non plus nécessaire que les témoins souscrivissent l’acte ; il suffisoit de faire mention de leur présence, excepté dans les donations faites par l’empereur qu’ils devoient souscrire.

Ce que les parties & les témoins souscrivoient & scelloient de leurs sceaux n’étoit pas la note ou minute du notaire, c’étoit la grosse, appellée completionem. En effet, suivant la loi contractus, il eût été inutile de signer une schede, puisqu’elle n’étoit point obligatoire : d’ailleurs le tabellion délivroit sa grosse sans être tenu d’en faire registre ni de conserver ensuite la note sur laquelle il avoit expédié la grosse, ensorte que cette note n’étoit plus regardée que comme un brouillard inutile ; car ce que l’on appelloit en droit breves, brevia, brevicula, n’étoient point les notes & minutes des obligations, mais seulement des notes particulieres écrites briêvement.

Tous ces usages passerent dans les Gaules avec la domination des Romains.

Les formules de Marculphe & celles qui ont été depuis recueillies par les plus célebres auteurs contiennent divers contrats, où il est fait mention qu’un notaire a été appellé pour les écrire, mais tous ne sont conçus qu’en terme d’écriture privée, on y trouve même la formule de l’acte d’apport, par lequel le magistrat sur le requisitoire des parties ordonnoit que des écritures seroient registrées apud acta, pour les rendre authentiques & exécutoires.

Il y avoit aussi des notaires en France dès le commencement de la monarchie : le roi avoit ses notaires ou secrétaires qui expédioient les actes de sa chancellerie.

Les évêques, les abbés, les comtes étoient obligés d’avoir aussi leur notaire, comme il paroît par un capitulaire de Charlemagne de l’an 805.

Mais on passoit alors peu d’actes par écrit ; l’ignorance étoit si grande, que peu de personnes savoient écrire ; la plûpart des conventions n’étoient que verbales ; pour y donner plus de force, on les faisoit en présence de témoins.

Lorsqu’il s’agissoit d’actes importans, que l’on vouloit rédiger par écrit, on les passoit assez ordinairement en présence & sous l’autorité des comtes ou des évêques, & il est à croire que les notaires de ceux-ci étoient employés à écrire les actes ; mais ils ne les recevoient point comme officiers publics, ils prêtoient seulement leur main, soit comme secrétaires de celui en présence duquel on contractoit, soit comme personnes versées dans l’écriture, & l’acte ne tiroit sa force & son authenticité que du sceau qui y étoit apposé, & de la présence des témoins que l’on y appelloit.

Le savant P. Mabillon, dans son traité de la diplomatique, dit qu’après une exacte recherche dans les plus célebres bibliotheques, tant du royaume que des pays étrangers, il n’a trouvé aucun contrat passé devant notaires comme officiers publics avant l’année 1270.

On tient communément que ce fut saint Louis qui érigea les notaires en titre d’office, & que les premiers de cette espece furent les soixante notaires qu’il créa pour le châtelet de Paris. Voyez Notaires au Chatelet. (A)

Notaires, par rapport au contrôle des actes, l’une des qualités les plus essentielles des actes, des contrats, des obligations, étant d’avoir une date sûre, constante & authentique ; & l’un des principaux devoirs des notaires étant de la leur assurer, il ne sera pas inutile de rappeller ici les principes d’une matiere aussi intéressante, & d’une utilité si générale pour la société.

Une loi qui porte sur les opérations les plus importantes de la société, puisqu’elle intéresse toutes les conventions qui se font entre citoyens ; une loi qui n’est pas seulement une formalité embarrassante par elle même, mais que la nécessité des ressources a rendue une imposition considérable, dont les actes & contrats se trouvent chargés, est, sans contredit, l’une des matieres qui meritent le plus d’être connues, développées, approfondies par ceux qui paient, par ceux qui reçoivent, par ceux qui gouvernent. C’est le seul moyen de faire reconnoître aux redevables ce qu’ils doivent, & pourquoi ; d’apprendre à ceux qui sont chargés de la perception, quelles sont les bornes dans lesquelles ils doivent se renfermer, & de remettre sous les yeux du gouvernement le véritable esprit des lois faites ou à faire.

Le contrôle peut être envisagé, 1°. en général ; 2°. relativement aux actes sur lesquels il porte ; 3°. en lui-même comme formalité & comme imposition ; 4°. dans son administration.

Le contrôle dont il est ici question, considéré en général, peut l’être dans sa définition & dans son établissement.

Dans sa définition, c’est une formalité qui a pour objet de constater la date des conventions, d’assurer l’authenticité des actes, & de prévenir les effets de la surprise, de la négligence & de la mauvaise foi. Le droit ajouté à la formalité, n’en constitue point l’utilité ; mais il ne la détruit pas.

L’origine d’une formalité si nécessaire pour la société, remonte bien plus haut que les édits & les déclarations qui ont établi le contrôle des actes proprement dit. Il ne faut pas s’arrêter aux mots ; les idées seules méritent de nous occuper.

Le contrôle a existé dès le moment que la supercherie s’est introduite dans la société, & que les hommes ont eu respectivement intérêt de s’en garantir.

La simplicité des esprits, la pureté des cœurs, le peu d’importance des affaires, la facilité de la plûpart des conventions, la rareté de quelques autres, & plus que tout le reste, la bonne foi des premiers âges, ont d’abord rendu les conventions verbales les plus communes, & les seules nécessaires. Ces conventions ne se passoient même qu’entre les parties intéressées. Elles se fioient alors mutuellement les unes aux autres : elles convinrent ensuite d’appeller des témoins, premiere origine du contrôle.

A ces témoins, on ajouta la sureté des écrits, qui contrôlerent la preuve testimoniale, & qui furent eux-mêmes contrôlés par l’établissement d’officiers publics, qui pussent être d’autant plus surement les dépositaires des intentions de chaque partie, qu’ils y seroient des tiers desintéressés.

Mais comme les notaires mêmes, & tous ceux qui furent successivement autorisés à recevoir les conventions des parties, eurent besoin d’être surveillés, la justice de la loi fut encore obligée de venir au secours des uns, & de s’armer contre l’injustice des autres. Les papier & parchemin timbrés, les droits de sceau, les notaires en second dans certains lieux, & dans d’autres les témoins ajoutés aux notaires mêmes, ont été successivement employés pour remplir l’objet que l’on s’étoit proposé ; & ce sont, à proprement parler, autant de droits de contrôle, qui, sous différentes dénominations, ont le même objet & la même utilité que le contrôle des actes proprement dit.

Celui-ci considéré dans son établissement, a deux époques différentes, suivant la forme dans laquelle ces actes se trouvent rédigés.

Il a été établi par édit du mois de Mars 1693 pour les actes passés pardevant notaires, greffiers & autres personnes publiques autorisées à passer, à recevoir, à rédiger les actes & conventions des parties.

Par la déclaration du 14 Juillet 1705, pour les actes passés sous signature privée, on sent assez que sans ce dernier établissement, le premier seroit devenu illusoire pour un très-grand nombre de conventions.

On dit les notaires, à l’exception de ceux de la ville de Paris ; car ils ont été exemptés du droit & de la formalité du contrôle par une déclaration, & puis assujettis par autre déclaration, enfin rétablis dans leur exemption, dont on les a laissés jouir jusqu’à présent par différentes considérations pécuniaires & politiques, dont on aura ailleurs occasion de rendre compte.

On dit les greffiers, lorsqu’ils sortent des bornes de leurs fonctions ordinaires, qui sont d’écrire les jugemens émanés d’une jurisdiction involontaire & forcée, pour écrire & rédiger les conventions, les décisions libres & volontaires que leur dictent les parties ; ils auroient sans cela sans cesse abusé de la loi qui dispense du contrôle les actes judiciaires, c’est-à-dire, qui se font en justice réglée. Cet article est de la plus grande importance dans la matiere dont il est ici question. Tout acte juridique est incontestablement exempt du contrôle, tant pour le droit, que pour la formalité ; mais tout acte cesse d’être juridique, & devient extrajudiciaire, dès qu’il est émané de la volonté des parties, sans que le juge intervienne comme juge, ni le greffier comme ministre établi pour écrire les jugemens. Toutes ces distinctions sont très-essentielles, mais en même tems fort délicates & très-difficiles à saisir : on y reviendra plus d’une fois dans le cours des observations que l’on donnera sur la matiere dont il est ici question.

Quant aux actes sous seing privé qui ne sauroient être produits en justice sans être contrôlés, il faut en excepter les lettres-de-change de place en place & les billets simples à ordre ou au porteur, non entre toutes personnes, mais seulement entre marchands, négocians & gens d’affaires, encore est-il nécessaire que ce soit pour raison de leur commerce réciproque. Ces derniers mots sont extrèmement importans, parce que dans tous autres cas les négocians, marchands & gens d’affaire rentrent dans l’ordre général des citoyens, & leurs engagemens dans la classe ordinaire des conventions.

Si l’on veut, après avoir considéré le contrôle dans sa définition & dans son établissement, le regarder par rapport aux actes sur lesquels il porte, on verra que ces actes eux-mêmes peuvent être envisagés relativement ; 1°. à la matiere ; 2°. à la nature des conventions ; 3°. aux différens objets qu’ils renferment ; 4°. à la forme dans laquelle ils peuvent être rédigés ; 5°. au nombre des parties qui peuvent s’y trouver intéressées ; 6°. aux droits & à la formalité auxquels ils sont assujettis, ou dont ils sont exempts.

La matiere des actes ne sauroit être que laïque ou civile, ecclésiastique ou bénéficiale : mais comme ces derniers ont été traités plus favorablement que les autres, il est essentiel de bien connoître ce qui les caractérise, de ne pas confondre les actes que font les Ecclésiastiques avec ceux qui se font en matiere ecclésiastique, puisque c’est la chose & non l’homme, le bénéfice & non tel ou tel bénéficier, que l’on a voulu favoriser.

Relativement à la nature des conventions que les actes & contrats peuvent renfermer, il seroit impossible de les prévoir & de les énoncer toutes explicitement ; mais toutes les clauses dont un acte quelconque peut être susceptible, pourroient implicitement se trouver dans les quatre divisions de préparatoires, obligatoires, conservatoires & résolutoires, puisqu’on ne peut jamais passer un acte quel qu’il soit, que pour préparer une obligation, pour la contracter, pour la conserver ou pour l’anéantir.

Les actes purement préparatoires ou conservatoires, qui contiennent mention, énonciation, déclaration, interpellation d’une obligation faite ou à faire, mais qui ne la renferment pas, doivent passer pour actes simples, & sont connus sous cette dénomination.

Les obligatoires sont obligatoires, simples ou synallagmatiques : simples, quand ils n’obligent qu’une seule partie vis à-vis d’une seule personne ou de plusieurs : synallagmatiques, lorsque l’acte oblige plusieurs parties à la fois, & réciproquement les unes avec les autres.

Conservatoires, lorsqu’ils confirment l’obligation déja faite, & qu’ils ont pour objet la conservation d’un droit, d’une convention, d’une action.

Résolutoires, lorsqu’ils anéantissent un engagement, quel qu’il soit, par l’accomplissement des conditions, ou par le désistement de ce qui pourroit être exigé.

Considérés relativement aux différens objets qu’ils renferment, les actes peuvent être passés & convenus entre les mêmes parties pour raison du même fait, ou bien entre différentes parties pour des intérêts différens, ce qui doit nécessairement occasionner différente perception de droits, parce que le contrôle étant relatif aux actions que l’on peut intenter en vertu d’un acte, il doit y avoir autant de droits à recevoir, que l’on peut intenter d’actions.

Par rapport à la forme dans laquelle ils peuvent être rédigés, les actes ne peuvent l’être que par des personnes autorisées à les recevoir, ou sous signature privée, en observant que pour éviter des abus d’une conséquence extrèmement dangereuse, il est des actes qui ne peuvent être reçus & passés que par des officiers publics, tels que les contrats de mariage, les donations, &c. & que pour subvenir à certaines circonstances, on a autorisé dans certains cas, certaines personnes à recevoir certains actes, & tels sont, pour les testamens, les curés, les vicaires, officiers de terre ou de mer.

Quant aux parties qui peuvent se trouver dans un acte, elles sont principales, comme les futurs conjoints dans un contrat de mariage, ou intervenantes, comme un parent qui paroît dans ce contrat pour faire une donation à ceux qui se marient. Ce sont des observations très importantes à faire, parce que souvent un seul acte en renferme plusieurs, & que chacun doit un droit, comme s’ils eussent été faits séparément.

Examinés à l’égard des droits & de la formalité auxquels ils sont assujettis, ou dont on a cru devoir les exempter, les actes assujettis peuvent l’être à la formalité seulement, & tels sont en petit nombre les actes qui sont contrôlés gratis ; ou bien à la formalité & au droit tout ensemble, & telles sont toutes les autres conventions.

Les uns, par la même raison, sont exempts du droit seulement.

Les autres le sont du droit & de la formalité.

Telle est l’idée la plus simple & la plus générale que l’on puisse donner du contrôle, envisagé par rapport aux actes sur lesquels il porte.

Considéré en lui-même, c’est une formalité, c’est un droit.

Comme formalité, il donne occasion d’examiner, dans quel endroit, dans quel tems, par qui, comment, elle doit être remplie, & de rechercher les raisons de toutes ces différentes obligations.

Comme droit, on peut en considérer la nature, l’établissement, le pié sur lequel il se perçoit & la quotité.

Si l’on considere ces droits dans leur nature, ils sont droits principaux & primordiaux ou droits accessoires, tels que les quatre sols pour livre.

On a déja vu les motifs de leur établissement ; il est évident qu’ils ont eu deux objets : d’assurer l’autenticité des actes : de procurer des secours à l’état.

Quant aux titres de leur perception, ils ne peuvent être fondés que sur des édits, des ordonnances, déclarations, lettres-patentes, tarifs & arrêts, & décisions générales, qui ne sauroient être que confirmatifs de la loi primordiale, ou interprétatifs de quelques dispositions.

Considérés relativement aux différens piés sur lesquels ils sont dûs, ils se perçoivent ou suivant la nature de l’acte, ou suivant la quotité des sommes, ou suivant la qualité des parties.

Quant à la quotité du droit, c’est-à-dire, aux sommes que l’on doit payer selon les différens cas : le montant doit être relatif à la teneur des conventions, à la quotité des sommes énoncées ou calculées d’après une estimation, à la qualité des parties.

Après avoir examiné en quoi consiste le controlle, considéré en lui-même & relativement aux actes sur lesquels il porte, il est indispensable de le considérer dans son administration.

Elle est politique, économique & juridique, relativement aux vues, aux fonctions, aux obligations du ministere, des fermiers & des juges.

L’administration politique est réelle ou personnelle.

Réelle, elle porte sur les actes & sur les droits, sur la chose, en un mot, & non sur ceux qui la gouvernent, qui la perçoivent, ou qui la jugent.

Sur les actes envisagés relativement à la forme & par rapport aux droits.

A la forme pour les assujettir à des nouvelles formalités, ou pour les affranchir de formalités anciennement établies.

Aux droits pour assujettir au controlle des actes qui en étoient exempts, ou pour en dispenser ceux qui y étoient assujettis.

Administration réelle qui porte sur les droits considérés tant par rapport à leur quotité, que par rapport à la forme de la perception.

A leur quotité, pour la confirmer ou pour la changer ; pour la confirmer purement & simplement, ou bien avec quelques modifications ; pour la changer soit en la diminuant, soit en l’augmentant.

Par rapport à la forme de la perception pour y faire quelques changemens qui ne peuvent jamais être relatifs qu’à la formalité, aux tems, aux lieux, aux personnes.

Dans l’administration politique personnelle, il faut envisager ce qui tient aux actes & ce qui tient aux droits.

Aux actes considérés relativement aux obligations des parties, des notaires & tabellions, & dans certain cas des curés, des vicaires, des greffiers, & généralement de tous ceux qui ont été autorisés à recevoir, à rédiger les conventions.

Aux droits, par rapport à ceux qui les perçoivent, tels que les fermiers, régisseurs, commis ou préposés qui peuvent être considérés dans leurs établissemens, leurs priviléges & leurs prérogatives.

Leurs fonctions pour la conservation, ou pour la perception des droits.

Conservation des droits par les recherches & visites, chez les notaires, greffiers, &c.

Perception par le recouvrement de ce qui est dû.

Obligations coactives ou prohibitives ; coactives, qui ordonnent certaines choses ; prohibitives, qui en interdisent d’autres.

Emolumens fixes ou casuels ; fixes, tels que les appointemens convenus & déterminés ; casuels, tels que les remises, les gratifications, &c.

Privileges, exemptions, prérogatives, portant sur des charges publiques ou particulieres ; publiques, comme la collecte des tailles, le logement des gens de guerre.

Particulieres, telles que les tutelles, les curatelles, &c.

L’administration économique porte, comme la politique (mais à l’égard des fermiers seulement), d’un côté, sur les formalités ordonnées, & sur les précautions à prendre pour empêcher la fraude, ou pour y remédier ; de l’autre, sur tout ce qui concerne principalement la perception du droit ; & tels sont la régie, le recouvrement, la comptabilité, & généralement tout ce qui concerne le régisseur ou le fermier, & qui ne dépend que de lui.

L’administration juridique n’a rapport qu’aux juges ; mais les juges peuvent être envisagés dans leur établissement, dans leur compétence, dans leurs fonctions, leurs émolumens, leurs privileges & leurs exemptions.

Leur établissement les rend juges ordinaires, ou d’attribution.

Leur compétence porte sur la nature des affaires, ou sur le degré de jurisdiction.

Quant à la nature des affaires, la matiere peut être civile ou criminelle ; civile comme les condamnations qui ne portent que sur le paiement du droit ; criminelle, telle que les malversations des notaires ou tabellions, greffiers, commis, &c.

Le degré de jurisdiction rend les juges magistrats en premiere instance, en cause d’appel ou au souverain.

On ne feroit, quant aux obligations coactives ou prohibitives aux émolumens fixes ou casuels, aux prérogatives générales ou particulieres, que répéter ce que l’on a ci-devant dit aux mots Financiers, Fermiers, &c.

Notaires des abbés ; anciennement les abbés avoient chacun leur notaire ou chancelier, de même que les évêques & les comtes, cela leur fut ordonné par un capitulaire de Charlemagne de l’an 805. Ce notaire étoit plutôt un secrétaire qu’un officier public, cependant ces notaires ne laissoient pas de recevoir aussi les actes entre ceux qui venoient faire quelque convention devant l’abbé. Voyez le gloss. de Ducange, au mot notarii. (A)

Notaires pour les actes des martyrs, furent institués par S. Clément pape. On les appella notaires, parce qu’ils écrivoient en notes les faits des martyrs & leur constance à souffrir, pour servir d’exemple & de perpétuelle mémoire. Les évêques en constituerent aussi dans leur diocèse ; & c’est sans doute delà que les notaires apostoliques tirent leur origine. Voyez Notaire apostolique, & Notaire régionnaire, Protonotaire.

Notaire apostolique, étoit autrefois un officier public établi par le pape pour recevoir les actes concernant les matieres spirituelles & ecclésiastiques.

Il y avoit aussi autrefois des notaires ecclésiastiques, qui étoient établis par les évêques ou archevêques dans leur diocèse, pour y recevoir les actes concernant les mêmes matieres spirituelles & bénéficiales ; c’est pourquoi on les appelloit aussi notaires de cour d’église, ou notaires ecclésiastiques, & notaires de l’évêque ou épiscopaux, notaires de la cour épiscopale, notaires communs des évêques ou ordinaires.

Dans la suite n’y ayant plus dans le royaume de notaires apostoliques, & établis par le pape, on donna aux notaires des évêques le nom de notaires apostoliques, & présentement tous les notaires apostoliques sont établis de l’autorité du roi ; c’est pourquoi on les appelle notaires royaux & apostoliques.

Les premiers notaires apostoliques qui furent institués dans la chrétienté, furent ces sept notaires, surnommés regionarii ou scriniarii, que S. Clément établit à Rome pour écrire les actes des martyrs ; leur fonction ne se bornoit pourtant pas à ce seul objet ; car on voit qu’entre autres choses, ils étoient chargés d’annoncer au peuple les litanies, processions, ou rogations, le lieu où le pape alloit dire la messe ou faire quelque station ; ils rapportoient aussi au pape le nom & le nombre de ceux qui étoient baptisés.

On conçoit par-là qu’ils étendirent aussi leur fonction à recevoir tous les actes qui concernoient les matieres spirituelles & canoniques, & ensuite les bénéfices, lorsqu’il y en eut de formés.

Le nombre de ces notaires ayant été augmenté par S. Clément, ceux qui étoient du nombre des sept premiers notaires, ou du moins qui les représentoient, prirent le titre de protonotaires apostoliques, c’est-à-dire, de premiers notaires.

Mais ce ne fut pas seulement dans les terres du pape que les notaires apostoliques exercerent leurs fonctions ; ils en usoient de même en France, en Angleterre & en Espagne ; car alors on regardoit comme un droit certain, qu’un notaire ou tabellion établi par l’empereur, ou par le pape, ou par quelqu’autre auquel ce droit avoit été accordé par un privilege spécial pourroit instrumenter non-seulement dans les terres soumises à celui qui l’avoit commis ; mais aussi qu’il avoit le même pouvoir dans les autres états dont on vient de parler.

Quelques-uns de ces notaires apostoliques étoient en même tems notaires impériaux & royaux, apparemment pour rendre leur pouvoir plus étendu & moins sujet à contestation.

On voit dans les lettres de Charles V. du mois de Janvier 1364, qu’il y avoit à Auxerre un notaire apostolique, qui se qualifioit tabellion de notre saint pere le pape ; & que ce tabellion s’ingéroit de recevoir des actes pour affaires temporelles, telles que des lettres d’affranchissement.

Dans d’autres lettres du même prince, du mois d’Août 1367, il est fait mention d’un notaire apostolique qui étoit résident en Dauphiné ; ce notaire étoit un clerc du diocèse de Grenoble, lequel se qualifioit apostolicâ imperiali & domini Francorum regis autoritatibus notarius publicus. Il réunissoit, comme on voit, les trois qualités.

Les évêques établirent aussi des notaires ecclésiastiques dans leur diocèse ; ces notaires étoient quelquefois qualifiés de notaires apostoliques, & confondus avec ceux du pape ; d’autres fois on les appelloit seulement notaires ecclésiastiques, notaires de l’évêque ou épiscopaux, ou de la cour épiscopale, ou notaires jures de l’officialité, parce qu’ils prêtoient serment devant l’official.

La plûpart des évêques avoient plusieurs notaires, & le premier d’entre eux prenoit le titre de chancelier, même d’archichancelier : celui-ci dictoit aux notaires ; c’est delà que vient la dignité de chancelier, qui s’est encore conservée dans plusieurs églises cathédrales.

Les abbés avoient même leurs notaires, ainsi qu’il leur avoit été ordonné par un capitulaire de l’an 805.

Innocent III. qui siégeoit sur la fin du xij. siecle, & au commencement du xiij. défendit qu’aucun prêtre, diacre ou soudiacre, exerçât l’emploi de tabellion ; mais cela n’empêcha pas que les évêques & abbés ne prissent pour tabellions de simples clercs ; ceux des comtes même étoient aussi la plûpart des ecclésiastiques, l’ignorance étant alors si grande, que les clercs étoient presque les seuls qui sussent écrire.

Il ne faut donc pas s’étonner si les notaires ecclésiastiques s’ingéroient de recevoir toutes sortes d’actes, même concernant les affaires temporelles.

Dans la suite les notaires royaux se plaignirent de ces entreprises. Dès 1421 ceux du châtelet de Paris obtinrent le 19 Juin une sentence du prevôt de Paris, tant contre les notaires & tabellions apostoliques & impériaux, que contre ceux de l’évêque de Paris, qui défendit à tous ceux-ci de faire aucuns inventaires ni prisées des biens, & aux officiaux de donner aucune commission à cet effet.

Charles VIII. alla plus loin : il défendit, par un édit de l’an 1490, de faire, passer ou recevoir aucun contrat par notaires impériaux, apostoliques ou épiscopaux, en matiere temporelle, sur peine de n’être foi ajoutée auxdits instrumens, lesquels dorénavant seroient réputés nuls.

La facilité que chacun avoit d’obtenir en cour de Rome des commissions de notaires apostoliques, fit que le nombre de ces notaires devint excessif. La plûpart de ceux qui obtenoient ces commissions, étoient des personnes pauvres & indigentes, ou des serviteurs ou domestiques des gens d’église, lesquels commettoient divers abus dans l’exercice de cet emploi.

Dès le tems de François I. il en fut fait de grandes plaintes, même de la part des gens d’église & bénéficiers.

Ces plaintes ayant été réitérées devant Henri II. ce prince y pourvut par un édit du mois de Septembre 1547, par lequel il ordonna que les baillis, sénéchaux & juges présidiaux, de concert avec leurs conseillers, & par l’avis des gens du roi, arrêteroient & limiteroient, chacun dans leur jurisdiction, le nombre des notaires apostoliques qui seroit suffisant, & en quelles villes & lieux ils devroient faire leur résidence, qu’ils choisiroient les plus capables ; & que ceux qui seroient ainsi reservés seroient immatriculés au greffe de la jurisdiction dans laquelle ils seroient départis, pour recevoir dans l’étendue de cette jurisdiction toutes procurations à résigner bénéfices, & autres actes dépendans de leur état.

Cet édit fut registré au grand-conseil séant à Melun, & publié au châtelet.

Henri II. donna au mois de Juin 1550, un autre édit appellé communément l’édit des petites dates, par lequel il ordonna entr’autres choses que l’on n’ajouteroit point foi aux procurations pour résigner, ni aux révocations d’icelles, prises de possession, & autres actes passés par les notaires apostoliques, à moins que ces officiers n’eussent été préalablement examinés & reçus par les archevêques ou évêques, leurs vicaires ou officiaux, & prêté serment entre leurs mains, & qu’ils n’eussent fait enregistrer leurs lettres au greffes des cours des archevêques ou évêques, & des cours présidiales, & déclaré leur nom, surnom, & le lieu de leur résidence, qu’ils seroient tenus de faire dans les villes & lieux les plus notables du diocèse, selon le département & nombre qui en seroit advisé.

Que les archevêques ou évêques seroient tenus dans trois mois après la publication de cet édit, d’arrêter, par l’avis de leur clergé, le nombre de ces notaires, auxquels il ne pourroit en être subrogé aucun que par mort ou par vacation, privation ou forfaiture, sans en augmenter ; que si aucun de ces notaires étoit interdit par l’évêque, son vicaire ou official, l’interdiction seroit registrée.

Que ces notaires ne pourroient instrumenter que dans un seul diocèse, à peine de faux & de nullité des actes qu’ils auroient reçus.

Qu’il ne seroit point ajouté foi à leurs actes, à moins qu’ils n’y fissent mention de leurs qualités, & du lieu où ils auroient été immatriculés, & de celui de leur demeure.

Que dans les procurations pour résigner bénéfices, ils seroient tenus d’appeller deux témoins pour le moins, gens connus & domiciliés, non parens ni domestiques, & que ces témoins signeroient l’acte au cas que le résignant ne pût signer.

Enfin, que ces notaires seroient tenus de faire bon & loyal registre, tant des procurations pour resigner, que du tems qu’ils les auroient délivrées, combien de fois & à quelles personnes ; qu’ils seroient tenus de remettre chaque année, dans le mois de Janvier au plûtard, au greffe des archevêchés dans lesquels ils auroient instrumenté, une copie signée de leur main, & un extrait collationné de leur registre, contenant tous les actes qu’ils auroient faits pendant l’année, tant procurations que révocations, & autres choses dépendantes d’icelles ; qu’ils garderoient seulement leurs notes sur lesquelles ils auroient dressé leurs registres & extrait.

Cet édit fut registré au parlement.

Louis XIII. par un édit du mois de Novembre 1637, leur défendit, à peine de faux, de délivrer aux parties les minutes des procurations pour résigner, & des autres actes qu’ils passoient en matiere bénéficiale.

Louis XIV. fut obligé de leur réitérer les mêmes défenses, par une déclaration du mois d’Octobre 1691.

Cet abus ne laissa pas de continuer ; il y avoit d’ailleurs plusieurs inconvéniens dans la fonction de ces notaires, en ce que, suivant les anciennes ordonnances, les actes qu’ils recevoient n’emportoient point d’hypotheque, & n’étoient point exécutoires sous le scel de la jurisdiction ecclésiastique : de maniere que c’étoient des actes imparfaits.

D’un autre côté, les notaires & huissiers royaux, & ceux des seigneurs, expédioient la plûpart des actes de leur compétence, concurremment avec les notaires apostoliques ; de sorte que ces derniers ne trouvoient pas dans leur emploi de quoi subsister avec honneur.

Enfin ces notaires apostoliques n’étant pas encore officiers en titre, ils n’avoient point de successeurs obligés de conserver leurs minutes.

Pour remédier à tous ces inconvéniens, Louis XIV. par l’édit du mois de Décembre 1691, créa en titre d’office formé & héréditaire dans chaque archevêché & évêché du royaume, terres & pays de son obéissance, des offices de notaires royaux, pour être tenus par les notaires apostoliques qui seroient établis dans les villes où il seroit jugé nécessaire, & dont le nombre seroit fixé par les états qui seroient arrêtés dans le conseil, suivant les avis des archevêques & évêques chacun dans leur diocèse.

L’édit attribue à ces notaires royaux & apostoliques le pouvoir de faire seuls, & privativement à tous autres notaires & tabellions, huissiers & sergens, toutes sortes de procurations à resigner bénéfices, ministreries, commanderies, provisoreries, bourses, &c. révocations & significations d’icelles, démissions d’archevêchés, évêchés, abbayes, prieurés, & tous bénéfices & charges ecclésiastiques, & généralement tous les actes qui ont rapport aux bénéfices & fonctions ecclésiastiques, & qui sont détaillés dans cet édit.

Ils sont autorisés par ce même édit à faire, concurremment avec les autres notaires & tabellions, les titres sacerdotaux, fondations de bénéfices, monasteres, obits & autres prieres & services divins ; donations aux communautés ecclésiastiques, séculieres & régulieres, fabriques, confrairies & hôpitaux ; les baux à ferme, & sous-baux des biens d’église, les devis & marchés des constructions, nouvelles refections & réparations de bâtimens appartenans à l’église ; les quittances des ouvriers, contrats de pension viagere promise à un couvent lors de l’entrée d’une fille en religion ; les testamens des gens d’église, & l’inventaire des meubles trouvés après le décès des ecclésiastiques : & il est dit que quand le curé de la paroisse ou son vicaire auront reçu un testament, ils en déposeront la minute huit jours après le décés du testateur, dans l’étude d’un notaire royal & apostolique du diocése, pour la grosse en être par lui expédiée.

Personne ne peut, suivant cet édit, exercer la fonction de notaire apostolique, sans être revêtu de l’un des offices de notaires royaux & apostoliques créés par cet édit.

Il leur est ordonné de faire registre des actes qu’ils auront reçus, & l’édit renouvelle les défenses qui leur avoient été faites d’instrumenter qu’en un seul diocèse, à peine de faux & de nullité des actes.

L’édit ordonne encore qu’ils seront reçus après information de vie & mœurs, par les baillis & sénéchaux, ou juges royaux dans la juridiction desquels ils seront établis ; & après qu’ils auront prêté serment devant le juge royal, il leur est enjoint de présenter leurs lettres de notaires apostoliques aux archevêques & évêques, leurs vicaires généraux ou officiaux, & de faire serment entre leurs mains, sans cependant qu’il soit besoin de nouvelle information de vie & mœurs.

Les archevêques & évêques, & leurs officiers, ne peuvent néanmoins, sous prétexte de ce serment ni autrement, s’attribuer la connoissance de l’exécution des actes qui se sont passés par les notaires royaux & apostoliques, & prétendre aucune jurisdiction autre que celle qui leur appartient de droit, suivant les ordonnances.

Les charges de notaires apostoliques créées pour le diocèse de Paris en vertu de l’édit de 1691, ont été réunies aux charges des notaires au châtelet de Paris par l’édit du mois de Février 1693, registré au parlement. C’est pourquoi les notaires du châtelet reçoivent dans le diocèse de Paris les actes qui, suivant l’édit de 1691, doivent être passés devant les notaires royaux & apostoliques. L’édit de 1693 n’excepte de cette regle que les résignations des bénéfices que tous les notaires royaux du diocèse de Paris peuvent recevoir chacun dans leur district, dans les lieux situés à quatre lieues de Paris, & au-delà pour les personnes qui y sont domiciliées, comme on le pratiquoit avant l’édit de 1691.

Dans quelques autres diocèses, les offices de notaires royaux apostoliques ont été pareillement réunis aux offices de notaires royaux séculiers du même lieu ; dans d’autres diocèses ils ont été acquis seulement par les notaires de certaines villes, qui exercent seuls les fonctions de notaires apostoliques dans tout le diocèse.

Enfin, dans quelques endroits le clergé a acquis ces offices de notaires royaux apostoliques, & les fait exercer par commission.

Il y a encore des ecclésiastiques qui ont le titre de notaires apostoliques ; ce sont des missionnaires qui tiennent leurs pouvoirs immédiatement du S. siége, pour aller prêcher la foi dans les pays des infideles, tels que la Chine, la Cochinchine, Tonquin, Siam, & autres pays orientaux. Le pape leur donne aussi ordinairement le titre de notaires apostoliques ; & Louis XIV. par une déclaration du 8 Janvier 1681, registrée au parlement de Paris, a permis à ces missionnaires qui sont notaires apostoliques, de faire toutes les fonctions de notaire royal, & a ordonné que les contrats, testamens, & autres actes qui seroient par eux reçus dans ces pays, seroient de même force & vertu que s’ils étoient passés devant les notaires du royaume.

Sur les notaires apostoliques, voyez Joly, Fevret, d’Héricourt, Brodeau sur Louet, lettre N, somm. 5 ; les mémoires du clergè, & ci-après Notaire commun, épiscopal, de l’évêque, Notaire impérial. (A)

Notaires-arpenteurs-royaux furent créés par édit du mois de Mai 1702, dans toutes les jurisdictons royales. C’étoient des offices en vertu desquels le pourvu pouvoit faire la fonction de notaire avec celle d’arpenteur. Ils ont depuis été supprimés.

Notaire-audiencier. On joignoit ainsi autrefois le titre de notaire avec celui d’audiencier, pour désigner l’audiencier de la chancellerie de France, parce qu’il étoit tiré du college des notaires ou secrétaires du roi : ce qui fait qu’encore aujourd’hui il jouit des mêmes privileges que les secrétaires du roi. Voyez à la lettre G l’article Grand-Audiencier.

Il est ainsi appellé dans des lettres de Charles V. alors régent du royaume, en date du 18 Mars 1357.

Notaires authentiques. On donne quelquefois ce titre aux notaires des seigneurs, pour les distinguer des notaires royaux. Ce surnom d’authentique vient probablement de ce que les obligations qu’ils reçoivent sont passées sous le scel du seigneur, qu’on appelle simplement scel authentique, pour le distinguer du scel royal. Fevret, en son traité de l’abus, liv. IV. ch. jv. n. 16, dit que si les évêques ou leurs officiaux avoient interdit ou suspendu de leurs charges les notaires royaux ou authentiques, il y auroit abus.

Notaire des Bayle & Consuls dans le Languedoc, étoit le greffier de ces juges, de même que les greffiers des autres tribunaux étoient aussi alors qualifiés de notaires. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, où il s’en trouve nombre d’exemples.

Notaires des Capitouls de Toulouse ; ces officiers prétendoient, par privilege impérial, avoir le droit de créer des notaires qui auroient la faculté d’instrumenter par-tout, & concevroient leurs actes en cette forme : Ego talis notarius autoritate imperiali & dominorum de capitulo ; mais les officiers royaux empêcherent cette entreprise sur les droits du roi ; & Benedict, sur le chapitre raynutius in verbo uxorem decis. n. 580, dit que de son tems (il écrivoit au commencement du xvj. siecle) ces notaires de Toulouse n’usoient plus de ces termes, autoritate imperiali, mais qu’ils se qualifioient seulement notaires constitués autoritate dominorum de capitulo. Voyez Fevret en son traité de l’abus, liv. XI. ch. jv. n. 14, & ci-devant Notaire apostolique, & ci-après Notaire impérial.

Notaires de la chambre ou de la chambre apostolique, lesquels se qualifient en latin secrétaires de la chambre, sont des officiers de la chambre apostolique qui reçoivent & expédient les actes qui émanent de cette chambre, & notamment les bulles & provisions pour les bénéfices. Le banquier qui est ordinairement porteur de la procuration, a le choix de faire mettre le consens par le notaire de la chancellerie, ou par un de ceux de la chambre apostolique, qui l’expédient en la même forme, si ce n’est que les notaires de la chambre comptent l’année depuis la nativité de notre-Seigneur, au lieu que le notaire de la chancellerie compte l’année depuis l’incarnation.

Notaire de la chancellerie romaine est un officier unique, lequel reçoit les actes de consens & les procurations des résignations, révocations, & autres actes semblables. C’est lui qui fait l’extension du consens au dos de la signature, qu’il date ab anno incarnationis, c’est-à-dire de l’année après l’incarnation, qui se compte du mois de Mars, trois mois après la Nativité. Ce notaire se qualifie député de la chancellerie, & signe en ces termes au bas de l’extension du consens, est in cancellariâ N… deputatus. Voyez le traité de l’usage & pratique de la cour de Rome, par Castel, tome I. pag. 46. Voyez aussi ci-devant Notaires de la chambre.

Notaire au chastelet est un notaire royal reçu & immatriculé dans un siége qui a le titre de châtelet, comme les notaires au châtelet de Paris, ceux du châtelet d’Orléans, du châtelet de Montpellier, &c.

L’établissement des notaires au châtelet de Paris est sans doute aussi ancien que le tribunal dont ils sont membres.

Sous la premiere race de nos rois, la justice étoit rendue au châtelet par un comte ; sous la seconde race, depuis 884, par un vicomte ; & sous la troisieme race, depuis l’an 1032, elle commença d’être rendue par un prevôt.

Les capitulaires ordonnoient aux comtes d’avoir sous eux des notaires : ainsi l’on ne peut douter que les comtes de Paris & les vicomtes, qui étoient comme leurs lieutenans, avoient des notaires pour recevoir & expédier les actes de leur jurisdiction ; mais ces notaires, qui servoient de greffiers ou secrétaires aux magistrats du châtelet, n’étoient que des personnes privées : on se servoit alors rarement de leur ministere pour recevoir des conventions, l’ignorance étoit alors si grande, que peu de personnes savoient écrire. C’est pourquoi la plûpart des conventions étoient verbales ; ou si on les rédigeoit par écrit, on se contentoit d’y appeller plusieurs témoins pour les rendre plus authentiques ; & lors même qu’on appelloit un notaire pour les écrire, elles n’étoient toujours regardées que comme écritures privées, à moins qu’elles n’eussent été mises apud acta, comme nous l’avons déja observé en parlant des notaires en général.

Le pere Mabillon, dans sa diplomatique atteste qu’il n’a trouvé aucun acte passé devant notaire comme officier public, avant l’an 1270, & il y a tout lieu de présumer que les notaires de Paris furent les premiers établis en titre d’office.

Le commissaire de la Mare, en son traité de la police, liv. I. tit. XVII. dit que comme nos rois appliquoient à leur profit ce qui étoit payé au prevôt de Paris pour les expéditions des notaires, & que ce magistrat étoit obligé d’en rendre compte, S. Louis voulant débarrasser le prevôt de Paris de ce qui pouvoit avoir quelque rapport à la finance, créa 60 notaires en titre d’office, pour recevoir tous les actes volontaires de sa jurisdiction. Il avance ce fait sur la soi de Joinville, en son histoire de S. Louis, de la chronique de S. Denis ; Nicolas Gilles & Gaguin, hist. de S. Louis, & de Loyseau, en son traité des offices, liv. II. ch. jv. & liv. III. ch. j.

Il observe encore que suivant les ordonnances qui furent faites dans la suite touchant la fonction de ces officiers, pour rendre leurs actes exécutoires & authentiques sans avoir recours au magistrat, ils étoient obligés, 1°. d’être assidus dans leur fonctions ; 2°. de ne passer aucun acte que dans le châtelet, ou ils avoient une salle pour mettre leurs bureaux ; 3°. d’intituler tous leurs actes du nom du magistrat, & de ne parler d’eux qu’en tierce personne ; 4°. les deux qui avoient reçu l’acte devoient le porter ensemble au scelleur, qui avoit aussi son bureau proche leur salle, afin que sur leur témoignage cet officier y apposât, sous l’autorité du prevôt de Paris, le sceau de la jurisdiction ; 5°. enfin ils devoient sur leurs émolumens en payer au roi les trois quarts, que cet officier remettoit ensuite au receveur du domaine, pour en compter à la chambre des comptes.

Nonobstant ce qui vient d’être dit, M. Langlois, dans son traité des droits, privileges & fonctions des notaires au châtelet de Paris, n’a point voulu entreprendre de fixer l’époque de leur établissement ; il s’est contenté de dire qu’il y a tout lieu de présumer qu’ils sont environ de même date que la jurisdiction dont ils sont membres, qui est l’une des plus anciennes du royaume.

Il avoue que les titres qu’ils ont dans leurs archives, ne remontent qu’à 1300 ; mais il observe que dès l’an 1384 leur établissement étoit qualifié d’immémorial ; comme il paroît par un arrêt du parlement du 20 Juillet de ladite année, contenant que de toute ancienneté les notaires avoient été ordonnés & établis au châtelet, pour les affaires volontaires d’entre les parties.

On peut encore ajouter que Philippe-le-Bel, qui commença à regner en 1285, dit dans un mandement de l’an 1300, que depuis long-tems, dudum, il avoit reconnu les inconvéniens qui résultoient de la multitude des notaires au châtelet, ce qui fait juger que leur établissement étoit déjà fort ancien, puisque leur nombre s’étoit accru à tel point que depuis long-tems on songeoit à le réduire.

Il falloit que ce nombre fût bien excessif, puisque Philippe-le-Bel crut qu’il suffisoit d’en réserver soixante, comme il l’ordonna par douze lettres patentes ou mandemens, adressés au prévôt de Paris, des années 1300, 1301, 1302, 1303 & 1304.

M. de Lauriere dans une note sur le troisieme de ces mandemens, dit que le prévôt de Paris étoit contrevenu à l’ordonnance, & que ce fut ce qui occasionna le troisieme mandement ; on voit par là qu’ils étoient commis par le prevôt de Paris, mais on ne le laissa pas le maitre de disposer seul de ces places.

Philippe-le-Bel, par une ordonnance du mois de Mai 1313, ordonna que comme il y avoit plusieurs notaires au châtelet qui n’avoient pas les qualités & capacités réquises, qu’ils seroient ôtés par les commissaires à ce députés, lesquels y mettroient des personnes capables, & que lesdits députés suspendroient tout présentement de leur office, ceux contre lesquels il y auroit des preuves des faits dont il y avoit plainte contre eux.

Philippe de Valois ordonna au mois de Février 1327, qu’en cas de vacation de l’un de ces 60 offices, soit par mort ou autrement, qu’il y seroit pourvu de sujets capables par le chancelier, lequel appelleroit à cet effet avec lui, quatre conseillers au parlement, & le prevôt de Paris. Il est dit un peu plus loin dans la même ordonnance, que les notaires étoient mis par le prevôt de Paris : mais cela doit s’entendre relativement à ce qui précéde : présentement ils sont pourvus par le roi, de même que tous les autres notaires royaux.

Depuis 1304 leur nombre a été augmenté à différentes fois, & enfin fixé à cent-treize, par lettres patentes de Louis XIII. du mois d’Octobre 1639, registrées au parlement le 24 Novembre de la même année.

Leurs offices sont casuels, & sujets au paiement du prêt & de la paulette, en conséquence de quoi ils ont été déchargés, par arrêt du conseil du 19 Juin 1703, du droit qui leur étoit demandé pour confirmation de l’hérédité des offices, établi par édit d’Août 1701, nonobstant la réunion qui leur avoit été faite des fonctions de greffiers des conventions & des notaires apostoliques, dont les offices avoient été crées heréditaires, & quoique par édit de Novembre 1708, tous les offices des notaires royaux aient été rendus heréditaires, ceux des notaires du châtelet de Paris en ont été exceptés par un autre édit du mois de Décembre suivant.

Louis XIV. ayant par édit du mois de Mars 1673, créé pour la ville de Paris, vingt conseillers de sa majesté, greffiers des conventions, supprima ensuite le titre de ces 20 offices, & en réunit les fonctions aux cent-treize notaires du châtelet de Paris, par autre édit du mois d’Août suivant.

Le roi déclara par ce second édit, qu’il se portoit d’autant plus volontiers à ces suppression & réunion, qu’il trouvoit par ce moyen occasion de témoigner aux cent treize notaires du châtelet de Paris, l’estime particuliere qu’il faisoit de la bonne conduite qu’ils tiennent dans l’exercice de leurs offices, en leur donnant des marques d’honneur qui les distinguent des autres notaires du royaume, & pour cet effet leur attribua la qualité de conseillers du roi, à chacun d’eux & à leurs successeurs.

Ce titre leur a été confirmé en dernier lieu, par des lettres patentes du mois d’Avril 1736, registrées en parlement.

Anciennement ils ne gardoient point de minutes de leurs actes ; & les délivroient en brevet. Charles VII. leur ordonna le premier Décembre 1437, de tenir registres de leurs actes, pour être lesdits registres remis à leurs successeurs.

Cela n’eut pourtant pas alors d’exécution, puisque l’ordonnance de Louis XII. assujettissant tous notaires & tabellions à faire registre de leurs actes, en excepte les notaires du châtelet de Paris. Mais depuis ils se sont conformés à l’ordonnance de 1539, qui l’enjoint à tous notaires.

Depuis qu’ils ont commencé à retenir minute de leurs actes, ces minutes sont demeurées en leur possession ; & Henri III. ayant créé en 1575 des notaires-gardes-notes, ceux qui avoient été créés pour Paris furent unis aux notaires du châtelet.

Ils ont aussi le titre de garde-scel de sa majesté, en conséquence de divers édits des premier Décembre 1691 & Novembre 1696, qui avoient créé des offices de garde scels, & d’autres édits du mois de Février 1693 & Décembre 1697, qui ont uni ces offices aux cent-treize notaires du châtelet.

François I. ayant créé en 1542, des tabellions dans toutes les jurisdictions royales, pour grossoyer les actes des notaires, ceux du châtelet en furent exceptés par une déclaration du 6 Juillet 1543, & ils furent maintenus dans le droit de faire expédier leurs grosses par leurs clercs.

Il fut créé par Louis XIV. au mois de Mars 1673, vingt offices de conseillers du roi greffiers des arbitrages, compromis, syndicats & directions des créanciers, sous le titre de greffiers des conventions, avec la qualité & fonction de notaires-garde-notes & tabellions, & la faculté de passer toutes sortes d’autres actes ; mais le titre de ces offices fut supprimé par édit du mois d’Août suivant, & les attributions & fonctions réunies aux notaires du châtelet, ce qui leur a été confirmé par un autre édit du mois d’Avril 1736.

Enfin les notaires du châtelet réunissent aussi la fonction de notaire royal apostolique, le roi ayant par édit du mois de Février 1693, éteint le titre des offices de notaires apostoliques qui avoient été créés pour le diocese de Paris, suivant l’édit du mois de Décembre 1691.

Les notaires du châtelet de Paris jouissent de plusieurs droits & privileges.

La compatibilité de la noblesse avec leurs fonctions a été reconnue en leur faveur, par l’édit du mois d’Août 1673, & par celui du mois d’Avril 1736.

Ils sont en la sauvegarde du roi, eux, leurs biens & domestiques, ce qui leur fut confirmé par des lettres de Charles VI. de l’année 1411.

Ils sont exempts du logement des gens de guerre, tant en leurs maisons de Paris, qu’en celles de la campagne, même du logement des troupes de la maison du roi, comme aussi du logement des officiers de la cour & suite de sa majesté.

Divers édits leur ont aussi attribué l’exemption de tutelle, curatelle, guet, garde & autres charges publiques.

Ils jouissent du droit de garde gardienne, & leurs causes soit en demandant ou défendant, sont commises en premiere instance au châtelet, & par appel au parlement ; même les causes criminelles concernant leur ministere & les fonctions de leurs offices.

Les douze plus anciens en réception, successivement, ont droit de committimus aux requêtes du palais.

L’édit du mois d’Août 1713, leur a attribué à chacun un minot de franc-salé, & à ceux d’entre eux qui en vendant leurs offices obtiendroient des lettres d’honoraires, comme aussi aux veuves de ces officiers & honoraires.

Ils ont droit d’instrumenter tant en matiere civile que bénéficiale, dans tout le royaume, lorsqu’ils en sont réquis ; mais ils ne peuvent s’habituer ou faire leur résidence ailleurs qu’en la ville de Paris pour l’exercice de leurs offices.

Ils ont le droit exclusif de recevoir, tant en la ville que dans toute l’étendue du diocese de Paris, tous les actes de matiere bénéficiale, à l’exception seulement des résignations de bénéfices, qui peuvent être reçues par tous notaires royaux, chacun dans son district, dans les lieux situés à quatre lieues de Paris & au-delà, pour les personnes qui s’y trouvent domiciliées.

Eux seuls peuvent dans la ville & fauxbourgs de Paris, faire tous compromis, recevoir les sentences arbitrales, tenir registres des délibérations des syndicats & directions de créanciers, & recevoir les ordres & distributions de deniers émanés de ces directions.

Ils ont de plus le droit de recevoir & passer seuls, & à l’exclusion de tous autres, tous contrats & actes volontaires, tant entre majeurs qu’entre mineurs, en la ville, fauxbourgs & banlieue de Paris.

La confection des inventaires & récolemens, ainsi que des comptes, liquidations & partages volontaires, tant entre majeurs que mineurs, leur appartiennent à l’exclusion de tous autres officiers, dans la ville, fauxbourgs & banlieue de Paris. Ils ont été confirmés dans ce droit, par deux arrêts de reglement du parlement de Paris, des 15 Mars & 23 Août 1752, dont le dernier est contradictoire avec les commissaires.

Ce sont eux, lors des inventaires, qui reçoivent le serment, tant de ceux qui représentent les effets que de ceux qui en font la prisée.

On a tenté plusieurs fois d’assujettir leurs actes à la formalité du contrôle, comme ceux des autres notaires ; mais ils n’y ont pas été sujets long-tems, à cause du préjudice notable que cette formalité apportoit au commerce des affaires & au secret des actes les plus importans, & lorsque ce droit fut rétabli en 1722, il n’eut lieu que jusqu’en 1723, qu’il fut commué en un droit de marque sur le papier dont se servent les notaires de Paris. Voyez Papier timbré.

On a pareillement dispensé les notaires de Paris de faire insinuer eux-mêmes les actes qui y sont sujets.

Il y auroit encore bien d’autres choses à observer au sujet des notaires au châtelet de Paris, mais dont le détail nous meneroit trop loin ; ceux qui voudront s’instruire plus à fond de ce qui les concerne, peuvent consulter le traité qui a été fait sur leurs droits, privileges & fonctions, par M. Langlois notaire, où l’on trouve tous les édits, arrêts & reglemens, notamment les lettres en forme d’édit, portant confirmation de tous leurs droits & privileges du mois d’Avril 1736, registrées le 13 Août suivant.

Les notaires au châtelet d’Orléans & ceux du châtelet de Montpellier, ont comme ceux de Paris, le droit d’instrumenter dans tout le royaume, avec cette différence seulement qu’ils ne peuvent instrumenter à Paris ; au lieu que les notaires de Paris peuvent instrumenter à Orléans & à Montpellier. Voyez la Lande sur la coutume d’Orléans. (A)

Notaires communs ou épiscopaux, notarii communes ordinariorum ; on entendoit autrefois par-là les notaires épiscopaux, que l’on appelloit ainsi pour les distinguer des notaires apostoliques, qui n’étoient alors autres que ceux commis par le pape. Voyez Dumoulin en ses notes sur l’édit des petites dates ; Ragueau, en son indice, au mot notaire ; Fevret, tr. de l’abus, lib. IV. ch. iv. n. 15 & 16.

Notaires des Comtes. Anciennement chaque comte ou gouverneur d’une province ou d’une ville avoit, de même que les évêques & les abbés, son notaire, cela leur fut même ordonné par un capitulaire de l’an 805. Voyez ce qui est dit ci-devant à l’article Notaire des Abbés.

Notaires des comtes Palatins, ou simplement Notaires Palatins. Il y a dans l’Empire un titre de comte palatin qui n’a rien de commun avec celui des princes palatins du Rhin, c’est une dignité dont l’empereur décore quelquefois des gens de lettres, & selon le pouvoir que leur donnent les lettres patentes de l’Empire, ils peuvent créer des notaires, légitimer des bâtards, &c. Mais, dit un auteur qui a écrit sur les affaires d’Allemagne, comme on ne respecte pas beaucoup ces comtes, on considere encore moins leurs productions, qui sont souvent vénales aussi bien que la dignité même. Voyez le tableau de l’Empire germanique, pag. 107.

Le pape fait aussi des comtes palatins auxquels il donne pareillement un pouvoir très-étendu, & entre autres choses de créer des notaires ayant pouvoir d’instrumenter par-tout ; mais ces notaires ne sont point reconnus en France, & l’on voit dans les arrêts de Papon, titre des légitimations, que Jean Navar, chevalier & comte palatin, fut condamné par arrêt du parlement de Toulouse, prononcé le 25 Mai 1462, à faire amende honorable & demander pardon au roi pour les abus par lui commis en octroyant en France légitimation, notariat, & autre chose dont il avoit puissance du pape contre l’autorité du roi, & que le tout fut déclaré nul & abusif.

Il est parlé de ces notaires palatins dans l’édit de François Ier du mois de Novembre 1542, où ils sont distingués des notaires impériaux. (A)

Notaires de la Cour ; c’étoit le nom que l’on donnoit anciennement aux notaires & secrétaires du roi servans près du parlement ou de quelque autre cour souveraine ; on ne les appelle plus présentement que secrétaires du roi près les cours. Voyez Secrétaires du roi.

Notaire de cour d’église. On comprenoit sous ce terme tous les notaires ecclésiastiques, savoir tant les notaires apostoliques qui étoient établis en France de l’autorité du pape, que les notaires épiscopaux établis de l’autorité de l’évêque, & qui prêtoient serment en l’officialité, pour quoi on les appelloit aussi notaires jurés de l’officialité. Voyez Notaire apostolique.

Notaire de la cour épiscopale ; c’étoient ceux qui étoient institués par l’évêque dans son diocèse. Voyez ci-devant Notaire apostolique.

Notaire de cour laic ; c’est un notaire royal laïc ou un notaire de seigneur : ce titre est opposé à celui de notaire de cour d’église ou apostolique. Voyez Fevret, traité de l’abus.

Notaire du Dauphin ou du Dauphiné, appellé aussi notaire delphinal, ou notaire de l’autorité delphinale, étoit un de ceux qui étoient établis en Dauphiné de l’autorité du dauphin avant que cette province eût été cédée par Humbert II. à Philippes de Valois. Il y eut aussi depuis de ces notaires qui tenoient leurs provisions du roi ou du gouverneur du Dauphiné ; il est parlé de ces notaires de l’autorité delphinale dans plusieurs anciennes ordonnances. Voyez le recueil des Ordonnances de la troisieme race.

Quelques-uns joignoient au titre de notaire delphinal celui de notaire impérial ; d’autres y joignoient aussi les titres de notaire royal & apostolique.

Suivant un reglement qui fut fait pour l’administration de la justice en Dauphiné, & confirmé par Charles VI. le 12 Juillet 1409, les notaires delphinaux faisoient serment d’être fideles au dauphin & à ses officiers, de ne point révéler à personne les secrets de l’Empire & du Dauphiné, de donner avis au dauphin, ou à son conseil delphinal de tout ce qui intéresseroit le dauphin, & de le coucher par écrit, tout au long & sans & cetera : ils promettoient aussi de mettre au net dans douze jours, à compter de la réception, tous les testamens, codicilles, donations à cause de mort, & tous contrats & actes entre vifs, avec leurs notes & protocoles ; de donner avis à l’évêque ou à son vicaire des legs pieux dans deux mois, à compter du décès du testateur ; de ne point vexer les sujets pour leurs écritures ni pour celles des autres, & de ne point permettre qu’aucun fût opprimé directement ni indirectement ; de n’écrire aucuns actes sur du papier vieux ou usé, mais sur du parchemin blanc & neuf ; d’écrire fidellement, & de conserver de même les testamens, codicilles, donations à cause de mort, les dépositions des témoins, & autres choses qui appartenoient à leur office, de ne révéler à personne les choses secrettes avant le tems ; d’avoir soin des affaires des veuves & autres personnes misérables ; de l’entretien des ponts, chemins publics, & hôpitaux ; enfin d’exercer loyalement l’office de notaire sans agir par des vûes d’intérêt ni par aucun mouvement de haine ou d’affection particuliere.

On connoît par la forme de ce serment quelles étoient alors les fonctions de ces notaires. Voyez le recueil des Ordonnances de la troisieme race, notamment le tome IX. pag. 456.

Notaires domestiques, notarii domestici, c’étoient des secrétaires particuliers que les empereurs romains avoient pour les affaires de leur maisons, à la différence des notaires tribun, & des notaires prétoriens qui étoient pour les affaires publiques. Voyez Pancirolus, in notitiâ Imperii ; le Glossaire de Ducange, au mot notarii. Voyez ci-après Notaires prétoriens & Notaires tribuns.

Notaire ecclesiastique, signifie tout notaire établi, soit par le pape ou par l’évêque dans son diocèse, pour recevoir les actes concernant les bénéfices & matieres ecclésiastiques.

Ils étoient autrefois de deux sortes dans le royaume, savoir les notaires apostoliques, par lesquels on n’entendoit alors que ceux qui étoient commis par le pape, & les notaires communs ou épiscopaux, qui étoient commis par les évêques chacun dans leur diocèse. Voyez ci devant Notaire apostolique.

Notaire épiscopal ou commun, étoit un notaire ecclésiastique commis par un évêque ou archevêque, pour recevoir dans son diocèse les actes concernant les matieres bénéficiales & ecclésiastiques. Voyez ci-devant Notaire apostolique, Notaire commun, & Notaire ecclesiastique, & ci-après, Notaire de l’évêque.

Notaires des Évêques, anciennement ces officiers n’étoient pas des notaires publics destinés à recevoir des actes dans le sens que nous entendons aujourd’hui le terme de notaires ; c’étoient des ecclésiastiques que l’évêque choisissoit pour ses secrétaires, & qui outre la fonction de scribes, en remplissoient encore d’autres auprès de lui, comme de porter sa crosse, de porter devant lui des cierges allumés. Voyez la vie de S. Césarien d’Arles, par Messianus, & le gloss. de Ducange, au mot notarii episcoporum.

Ces notaires ou secrétaires pouvoient bien être les mêmes que les évêques établissoient dans leur diocese pour écrire les actes des martyrs, & qui par succession de tems s’adonnerent à recevoir tous les actes concernant les matieres spirituelles & ecclésiastiques, d’où sont venus les notaires apostoliques épiscopaux, c’est-à-dire institués par l’évêque. Voyez ci-devant Notaires apostoliques. (A)

Notaire des foires de Brie et de Champagne, il y avoit anciennement des notaires ou tabeilions établis pour recevoir les contrats qui se passoient entre les marchands fréquentans les foires de Brie & de Champagne. Pendant le cours de ces foires, il falloit que le nombre de ces notaires fût d’abord bien considérable, puisque Philippe V. par des lettres du mois de Juin 1317 le réduisit à 40. Philippe de Valois, dans son ordonnance du mois de Décembre 1331 touchant les foires de Champagne & de Brie, voulant que les maîtres de ces foires connussent la suffisance des notaires des foires, & que l’on ne commît à cet office que les plus capables, ordonne que quand le siege d’un notaire de ces foires vaqueroit par mort ou autrement, les maîtres des foires en leur loyauté y établiroient des personnes convenables & suffisantes, & qu’ils auroient la correction de ces notaires présens & à venir, quant à leur destitution s’ils méfaisoient, & l’institution d’iceux quand le cas écheroit sans en prendre pour ce aucun profit, & qu’ils n’établiroient sur leur serment personne qui ne fût capable, soit par priere ou affection. Il ordonna aussi qu’il y auroit dans ces foires deux tabellions pour recevoir les contrats d’italien à italien, au lieu que Charles IV. en 1327, avoit ordonné qu’il n’y en auroit qu’un. Voyez Notaire des Italiens.

Le même Philippe de Valois, au mois de Juillet 1344, ordonna que le nombre des quarante notaires ne seroit point augmenté ; que quand le lieu d’aucun d’eux vaqueroit, que les gardes des foires en auroient le don, & y mettroient personne capable par élection & par serment ; que des premiers notaires qui y seroient établis, l’on en feroit quatre bons clercs & bons notaires suffisans pour écrire en françois & en latin par tout pays ; que si les gardes y mettoient d’autres personnes, ou en recevoient en conséquence des lettres du roi, le don ou réception seroit de nulle valeur ; enfin que ces notaires obéiroient aux gardes des foires, & au chancelier & garde de scel de ces foires.

Les notaires des foires étoient obligés d’exercer leur office en personne, & ne pouvoient le vendre à moins qu’ils n’y fussent autorisés par les gardes. (A)

Notaires de France. On donnoit anciennement cette qualité aux secrétaires du roi & greffiers du conseil. Voyez ci-devant au mot Conseil du roi, l’article des greffiers du conseil.

Notaires garde-notes, sont ceux qui, par le titre de leur office, ont droit de garder les notes, minutes, registres & protocoles de leurs prédécesseurs. Anciennement, après le décès de tous les notaires même royaux, leurs veuves & héritiers gardoient les minutes, ou les donnoient à ceux qu’ils jugeoient à-propos. L’ordonnance d’Orléans enjoignit aux juges des lieux de faire inventaire des notes, registres & protocoles des notaires décédés dans leur ressort, pour être ces notes, registres & contrats remis ès mains des greffiers des lieux, afin de les grossoyer & délivrer aux parties moyennant salaire raisonnable. Cette ordonnance n’ayant point été exécutée, Henri III. par l’édit du mois de Mai 1575, créa dans chaque bailliage, sénéchaussée & siege royal, un certain nombre de notaires-garde-notes, par-devers lesquels, aussi-tôt après le décès des notaires du ressort où ils auroient été institués & établis, les veuves & héritiers seroient tenus de remettre toutes notes, minutes, protocoles & registres qui seroient en leur possession, tant de la pratique du défunt que des autres pratiques qu’ils auroient acquises de leur vivant des autres notaires. Cet édit ne fut enregistré que sous les modifications que le nombre des garde-notes seroit certain & déterminé, qu’ils ne seroient point établis dans les lieux où il y avoit des tabellions créés ; que l’émolument des veuves & héritiers des notaires décédés seroit de la moitié ; que l’autre appartiendroit au garde-note ; que le notaire vivant qui auroit résigné ne seroit point tenu de porter ses notes & protocoles aux garde-notes, & qu’il expédieroit ce qu’il auroit reçu avant sa résignation ; enfin que les garde-notes ne seroient point exempts de tutelle. Les notaires de Paris & des autres villes ayant formé des oppositions à la réception de ceux qui avoient été pourvus de ces offices de garde-notes, le roi, par arrêt & lettres patentes du 12 Décembre 1577, unit les gardes-notes créés pour Paris aux offices de notaires. Il fit la même chose pour les notaires royaux des autres villes par l’édit du mois d’Avril 1578, au moyen de quoi tous les notaires royaux sont présentement notaires-garde-notes, à l’effet de garder les notes & minutes de leurs prédécesseurs & d’en délivrer des expéditions. Voyez le recueil des offices de Joly, tome IV. liv. III. tit. 41.

Il fut aussi créé huit offices de notaires-garde-notes en la cour & suite du roi par l’édit du mois de Décembre 1637, mais ces offices ont été supprimés. (A)

Notaire-greffier. On donnoit anciennement ce titre à ceux des notaires ou secrétaires du roi qui exerçoient la fonction de greffier dans quelque cour, mais plus souvent on ne les appelloit que notaires. Voyez Greffier & Secrétaire du roi.

Notaire de l’hôtel du roi. On donnoit quelquefois ce titre aux notaires & secrétaires du roi, comme on voit dans diverses lettres, entr’autres dans celles de Charles VI. du 19 Octobre 1406, contenant un réglement sur l’état & office des clercs-notaires de son hôtel. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, tome IX. pag. 152.

Notaire impérial ou de l’autorité impériale, est un notaire commis par l’empereur. Il y avoit anciennement en France des notaires impériaux qui ne tenoient leur pouvoir que de l’empereur ; & néanmoins dans l’usage on avoit toléré qu’ils instrumentassent dans le royaume. Il y en avoit pareillement en Angleterre & en Espagne, & ces notaires prétendoient avoir droit d’instrumenter par-tout : ils se fondoient sur le principe rapporté par Balde, de tabellionibus, n. 32. que ceux qui ont merum imperium, pouvant exercer par-tout leur jurisdiction volontaire, leurs notaires pouvoient aussi par-tout recevoir des actes entre tous ceux qui veulent bien avoir recours à eux. Ces notaires impériaux prenoient le titre de notaire public & impérial, comme on voit dans le recueil des ordonnances de la troisieme race, tome V. pag. 55 ; & dans Bacquet, tome II. p. 551, édition de 1744. Le pape commettoit aussi de même en France des notaires apostoliques, & en faisoit commettre par ses comtes palatins. Il fut jugé au parlement de Paris le 18 Mai 1415, qu’une procuration passée par un notaire ou tabellion apostolique ou impérial étoit bonne en cour laïque, quand la partie étoit du pays de l’empereur. Bibliot. de Bouchel.

Il y avoit en quelques endroits des notaires qui, pour réunir en leur personne un pouvoir plus étendu, étoient tout à-la fois notaires apostoliques, impériaux & royaux, tel que celui qui reçut des lettres du mois d’Août 1367, rapportées dans le recueil des ordonnances de la troisieme race.

On fit depuis attention que l’empereur n’ayant aucun pouvoir en France, les notaires par lui commis ne pouvoient faire dans le royaume aucun acte, même de jurisdiction volontaire. C’est pourquoi Charles VIII en 1490, défendit à tous sujets laïcs de passer ou faire recevoir leurs contrats par notaires impériaux, apostoliques ou épiscopaux, en matiere temporelle ou profane, sur peine de n’être foi ajoutée auxdits instrumens, lesquels dorénavant seroient réputés nuls & de nulle force & vertu.

Dans la suite, on n’a plus souffert aucunement que les notaires-impériaux reçussent en France aucun acte. Voyez le glossaire de Ducange, au mot notarii apostolici & imperiales ; & celui de M. de Lauriere, au mot notaires aux notes, p. 151 ; & ci-devant Notaires des capitouls. (A)

Notaires-instrumentaires. M. Brillon, en son Dictionnaire des arrêts, au mot notaire, pag. 591 & 592, col. 2, appelle ainsi ceux dont les fonctions se bornent à la rédaction & expédition des contrats, pour les distinguer des notaires du roi & de ceux des cours.

Notaire des Italiens. Les anciennes ordonnances portant réglement pour les foires de Brie & de Champagne, avoient accordé qu’il y auroit un ou deux tabellions pour recevoir dans ces foires les contrats d’italien à italien, & non entr’autres personnes. Charles le Bel, en 1327, ordonna qu’il n’y auroit qu’un tabellion à cet effet : Philippe VI. en 1331, en établit deux. Ces contrats ne pouvoient être mis à exécution par mandement des foires.

Les notaires du roi ou publics de la province de Languedoc, regis vel publici, furent assujettis par l’ordonnance de Charles V. alors lieutenant du roi Jean son pere, du mois de Février 1356, au payement de l’aide accordé par les états de la province, moyennant quoi l’exaction de marcs d’argent qui se faisoit sur eux fut abolie. (A)

Notaire juré, notarius-juratus. Dans les anciennes ordonnances, on appelle ainsi ceux qui étoient en titre d’office & qui avoient prêté serment, pour les distinguer des clercs & autres personnes sans caractere qui s’ingéroient de faire aussi la fonction de notaire ; ce qui leur fut défendu par lettres patentes en forme de charte, nommée la philippine, du 20 Juillet 1384.

Notaire-laïc, est opposé au notaire qui est seulement apostolique. Voyez ci-devant Notaire-apostolique.

Notaire-mayor, en Espagne, est le chef des secrétaires du roi. Il y en a un dans chacun des royaumes qui composent la monarchie d’Espagne. Voyez l’état présent d’Espagne par l’abbé de Vayrac, tome II. p. 180.

Notaire de l’officialité. Ce terme peut avoir deux significations différentes : du tems que les notaires étoient pris pour greffiers, & que l’on confondoit les titres de greffier & de notaire, on entendoit quelquefois par notaire de l’officialité le greffier de ce tribunal ; mais depuis que le titre de notaire a été restreint à ceux qui reçoivent des contrats & autres actes pour les parties, on a entendu par notaire de l’officialité un notaire ecclésiastique, & singulierement un notaire épiscopal ou de l’évêque, qui avoit prêté serment en l’officialité. On les appelloit aussi greffiers jurés de l’officialité. (A)

Notaire de l’ordinaire, étoit la même chose que notaire de l’évêque. On disoit notaire commun de l’ordinaire pour le distinguer du notaire-apostolique établi par le pape. Voyez ci-devant Notaire-apostolique, Notaire commun, Notaire-épiscopal, Notaire de l’évêque, &c.

Notaires palatins, voyez ci-devant Notaires des comtes palatins.

Notaire du pape ou Notaire apostolique, étoit anciennement la même chose. Voyez ci-devant Notaire-apostolique.

Notaires du parlement, c’étoient les secrétaires du roi, qui étoient députés près le parlement pour y faire les expéditions nécessaires. On les appelle présentement secrétaires de la cour ou secrétaires du roi servant près la cour de parlement : l’un d’eux étoit commis pour greffier ; c’est de-là que le greffier en chef du parlement est encore obligé d’être secrétaire du roi pour pouvoir signer les arrêts. Voyez Parlement à l’article du greffier, & au mot Secrétaire du roi.

Notaires poursuivans ou poursuivans la cour, comme qui diroit suivans la cour, étoient ceux des notaires ou secrétaires du roi qui étoient distribués à la suite de la cour pour faire les expéditions de la chancellerie. Il en est parlé dans une ordonnance de Philippe le Long, du mois de Décembre 1320.

Notaires prétoriens, on appelloit ainsi chez les Romains, les premiers secrétaires du préfet du prétoire, qui parvenoient à cette place après avoir rempli celles de moindres notaires ou secrétaires, que l’on appelloit cornicularii & primiscrinii. Voyez Pancirolus, in notitiâ imperii ; le glossaire de Ducange au mot notarii.

Notaire primicier, primicerius, quasi primus incera seu tabulâ ; on donnoit ce titre au premier des notaires du sacré palais. Voyez la notice de l’Empire.

On donnoit aussi ce titre au premier des notaires de l’église romaine : lequel fut depuis appellé protonotaire. Voyez le glossaire de Ducange & ci-après Notaire régionaire & à la lettre P, Protonotaire.

Notaire public, on donnoit anciennement ce titre aux notaires royaux, pour les distinguer des notaires des seigneurs qui recevoient les actes dans leur ressort, & qui néanmoins n’étoient point encore réputés officiers publics. Philippe V dit le Long, dans une ordonnance du mois de Juin 1319, faite sur les remontrances des habitans d’Auvergne, veut & accorde qu’à l’avenir il n’y ait dans la baillie & ressort d’Auvergne, aucun notaire public établi de son autorité, notarius publicus ; ce que M. de Lauriere traduit par notaire royal.

Il y avoit aussi anciennement des notaires impériaux, qui prenoient en même-tems le titre de notaires publics. Voyez Notaire impérial.

Notaires régionaires, notarii regionarii, on donne ce nom aux sept notaires qui furent institués à Rome par le pape S. Clément pour écrire les actes des martyrs. Ils furent appellés régionaires, parce que le pape leur assigna à chacun une région ou quartier de la ville, dans lequel ils devoient recueillir soigneusement tout ce qui se passoit par rapport aux martyrs. Ces notaires étoient subordonnes aux diacres & aux sous-diacres. Ils avoient encore quelques autres fonctions dans Rome ; c’étoient eux qui annonçoient au peuple, comme font aujourd’hui les couriers, les litanies, c’est-à-dire les processions ou rogations que le pape avoit ordonnées, ou dans quelle église ils devoient célebrer la messe, ou faire quelque station ; ils rendoient compte aussi au pape des noms & du nombre de ceux qui avoient été baptisés.

Le nombre des notaires ayant été dans la suite augmenté par les papes, ceux qui étoient des sept premiers institués, furent appellés notaires régionaires ou protonotaires, c’est-à dire premiers notaires, & les autres, notaires simplement, ou notaires apostoliques. Voyez ci dessus le glossaire de Ducange au mot notarii, & Notaire apostolique & Protonotaire. (A)

Notaire à la résidence d’un tel lieu, on appelle ainsi certains notaires royaux, qui par le titre de création de leur office, doivent résider dans une ville ou bourg qui n’est pourtant pas le lieu du siege royal où ils sont reçus ; c’est pour la commodité des particuliers que ces sortes de notaires ont été établis, & afin que ceux qui veulent passer un acte devant un notaire royal ne soient point obligés de se transporter dans la principale ville où est le siege royal dans lequel sont reçus les notaires. On trouve des exemples fort anciens de ces sortes de créations, témoin l’édit du mois d’Octobre 1575, portant création d’un office de notaire royal ès ressorts de Touraine, Anjou, Maine & Vermandois, pour résider à Neufve.

Notaire du roi, étoit anciennement la même chose que secrétaire du roi. Voyez l’histoire de la chancellerie par Tessereau, tom. I. & Secrétaire du roi.

Il ne faut pas confondre les notaires du roi avec les notaires royaux ; les premiers sont des officiers de la grande chancellerie, les autres sont des officiers publics établis pour recevoir les contrats, testamens & autres actes. Voyez ce qui est dit au commencement de cet article sur les notaires en général, & ci-après Notaire royal.

Notaire royal, est celui qui tient ses provisions du roi, à la différence des notaires des seigneurs ou subalternes, qui tiennent leur commission du seigneur de la justice où ils sont reçus.

Il y a deux sortes de notaires royaux ; les uns qu’on surnomme laïcs ou séculiers, parce que leur fonction est de recevoir les actes qui se passent en matiere temporelle, les autres qu’on appelle royaux apostoliques, parce qu’ils reçoivent les actes en matiere ecclésiastique. Voyez ce qui est dit ci devant des notaires en général, & la subdivision Notaire apostolique.

Notaire royal et apostolique, est celui qui réunit la fonction de notaire royal séculier avec celle de notaire royal apostolique. Il y a néanmoins aussi quelquefois des notaires apostoliques qu’on appelle royaux, parce qu’ils ont été créés par le roi ; mais qui ne réunissent pas la fonction de notaire royal-laïc.

Notaire royal laic ou séculier, est celui qui n’est établi que pour recevoir les actes en matiere temporelle, à la différence des notaires seulement apostoliques qui ne reçoivent que les actes concernant les bénefices & matieres ecclésiastiques. Voyez Notaire apostolique.

Notaire non royal, se dit en deux sens différens, savoir en parlant d’un notaire seigneurial ou subalterne, & en parlant d’un notaire apostolique, lorsqu’il ne réunit pas en même-tems la fonction de notaire royal laïc ou séculier. Voyez Notaire apostolique & Notaire royal.

Notaire de sang ou sanguin, c’est ainsi que l’on appelloit anciennement celui des notaires du roi servant près les cours, qui y faisoit la fonction de greffier au criminel, & qui rapportoit les lettres de grace, appellées lettres de-sang. Il y avoit quatre notaires aux requêtes du palais, dont un étoit notaire-de sang ; c’est ainsi qu’il est qualifié dans une ancienne ordonnance rapportée par Miraulmont dans ses mémoires, pag. 169.

Le sciendum de la chancellerie porte que les notaires sanguins ou criminels ont leur sceau des lettres-de-sang ou criminelles qu’ils font ou qu’ils signent, même le sceau des arrêts criminels & des rémission de ban en la forme qui se fait en double queue ; que de toutes ces choses ils ne doivent rien prendre sinon qui se puisse manger & consommer en peu de tems, comme par exemple, bas de chausses, ou gants ou semblables choses légeres ; mais qu’ils ne peuvent demander autre chose, sous peine d’infraction de leur propre serment ; & s’il se savoit, de privation & suspension de leur office, dénigrement d’honneur & renommée. (A)

Notaires surnommés scriniarii, c’étoient proprement des secrétaires du cabinet, ou du trésor de l’église. Le P. Mabillon en fait mention dans sa diplomatique pag. 125. & 126. Les notaires régionaires furent aussi appellés scriniarii, parce que le pape Anthems ordonna que les actes des martyrs seroient renfermés dans des armoires ou boîtes appellées scrinia. Voyez aussi le glossaire de Ducange au mot notarii regionarii. Voyez ci-dessus Notaires régionaires.

Il est parlé dans les annales de S. Bertin, sous l’année 877, des notaires qui sont surnommés secundi scrinii, notaires du second cabinet, comme qui diroit notaires ou secrétaires de la petite chancellerie.

Notaires en second, on appelle ainsi celui de deux notaires qui signe un acte dont l’autre retient la minute, soit qu’il assiste réellement à la passation de cet acte, comme cela s’observe dans les testamens, dans les sommations respectueuses, & dans quelques autres actes de rigueur, soit qu’il le signe simplement, à la relation de son confrere, & sans avoir été présent à la passation de l’acte, ainsi que cela se pratique pour la facilité de l’expédition à l’égard des actes ordinaires : il y a eu néanmoins divers reglemens qui ont enjoint aux notaires en second d’être présens aux actes & contrats, à peine de nullité ; entr’autres un arrêt du parlement du 13 Septembre 1713, rendu en forme de réglement pour les notaires de Meaux ; mais cela n’est point observé à la rigueur, si ce n’est pour certains actes tels que ceux dont on a parlé.

Il n’a pas toujours été d’usage d’appeller un second notaire à la passation des actes, soit que l’on y suppléât par la présence de deux témoins, ou que l’on se contentât de la présence d’un seul notaire, comme cela se pratique encore en certains pays.

Quelques-uns tiennent que l’usage de faire signer deux notaires vient de ce qu’anciennement on prenoit un notaire laïc & un de cour ecclésiastique ; le premier servoit pour obliger au for extérieur, & le second pour obliger au for intérieur, & par serment & conscience. Que cet usage cessa en Bretagne lorsque Pierre Maucler se brouilla avec le clergé ; & à Paris, lorsqu’il fut défendu aux notaires ecclésiastiques de recevoir ni signer aucuns actes en matiere temporelle. Quelqu’un m’a pourtant assuré que l’on en usoit encore ainsi en Poitou dans le xv. siecle.

Quoi qu’il en soit, on trouve des actes reçus par deux notaires royaux des le commencement du xiv. siecle & même auparavant.

La nécessité d’appeller un second notaire fut établie par l’ordonnance de Louis XII. du mois de Mars 1498, art. 66, laquelle porte qu’un seul notaire ou tabellion ne pourra recevoir un contrat sans qu’il y ait deux témoins, nonobstant toutes coutumes locales contraires, lesquelles sont déclarées abusives.

Lorsque deux notaires reçoivent conjointement un acte, c’est le plus ancien qui en garde la minute, l’autre la signe comme notaire en second. (A)

Notaires du secret, ou Clercs du secret, c’étoient ceux des notaires ou secrétaires du roi qui faisoient la fonction de secrétaire d’état. Voyez au mot Clerc, l’article Clercs du secret & Secrétaire d’état. Voyez aussi les lettres historiques sur le parlement, tome II. pag. 295.

Notaires secrétaires du roi, on joignoit anciennement deux titres pour désigner les officiers que nous appellons aujourd’hui simplement Secrétaires du roi. Voyez l’histoire de la chancellerie par Tessereau, tome I. & Secrétaires du roi.

Notaire séculier ou laic, s’entend de tout notaire soit royal ou subalterne, qui n’est pas notaire apostolique. Voyez ci-devant Notaire laic.

Notaire de seigneur, ou Notaire seigneurial, est celui qui est commis par un seigneur pour instrumenter en ladite qualité dans l’étendue de sa justice, & qui a prêté serment devant le juge de ce seigneur.

On appelle aussi ces notaires, subalternes, par la raison qui en sera expliquée dans la subdivision suivante.

L’origine des notaires de seigneurs est fort incertaine ; nous croyons cependant qu’on peut la rapporter aux notaires que les comtes du tems de la premiere & de la seconde race étoient obligés d’avoir, comme il est dit dans un capitulaire de Charlemagne, de l’an 805.

Il y a apparence que les comtés ayant été inféodés au commencement de la troisieme race, les seigneurs devenus propriétaires de ces comtés, continuerent d’avoir des notaires, comme ils en avoient du tems qu’ils n’étoient encore que gouverneurs des provinces ou villes dont ils étoient comtes ; & qu’à leur imitation les autres seigneurs auxquels on inféoda ou sous-inféoda de moindres terres, s’étant pareillement attribué l’administration de la justice par une extension du gouvernement militaire qu’ils avoient eu dans ces mêmes terres, & qu’ils conserverent encore sur leurs vassaux & autres sujets ; ils s’arrogerent aussi le droit d’avoir des notaires, qui faisoient d’abord la fonction de greffiers de leurs justices, de même que les notaires royaux la faisoient dans les cours & autres tribunaux royaux, & que ces notaires de seigneurs recevoient aussi le peu d’actes de jurisdiction volontaire que l’on passoit alors ; ce qu’ils faisoient en présence du juge, & sous l’autorité de son nom & du scel autentique du seigneur.

Ce qui est de certain, c’est que long-tems avant Philippe-le-Bel, il y avoit un nombre de prélats, barons & autres seigneurs, qui étoient en possession immémoriale d’instituer des notaires dans leurs terres, tellement que Philippe-le-Bel en défendant par son ordonnance du 23 Mars 1302, à tous sénéchaux, baillifs, justiciers, & à toutes autres personnes, d’instituer en son nom des notaires publics à cause de la multitude excessive qu’il y avoit de notaires, se reservant à lui seul & à les successeurs rois, le pouvoir d’en créer ; il déclara en même tems qu’il n’entendoit pas néanmoins préjudicier par-là aux prélats, barons, & à tous ses autres sujets, qui par coutume ancienne étoient fondés à établir des notaires.

Ce même prince, par des lettres du mois de Mars 1304, accordées en faveur des barons, des nobles & habitans du pays d’Auvergne, autorisa de plus en plus les notaires subalternes, en ordonnant que ses chanceliers d’Auvergne (c’étoient des gardes des petits sceaux royaux) n’auroient aucuns notaires dans les terres & justices des barons & des autres seigneurs qui avoient haute justice, & qu’ils ne recevroient aucuns contrats dans les terres de ces seigneurs.

Philippe-le-Long fit plus ; car par une ordonnance qu’il donna au mois de Juin 1319, sur les remontrances des habitans d’Auvergne, il leur accorda que dorénavant il n’y auroit dans toute la baillie d’Auvergne & ressort d’icelle, aucun notaire public établi de son autorité, ni qui y fit les fonctions de notaire en aucune maniere ; en sorte que, suivant cette ordonnance, il ne devoit alors y avoir d’autres notaires que ceux des seigneurs, lesquels étoient même les seuls qui pussent instrumenter dans ce pays.

L’ordonnance de Philippe-le-Bel, du 23 Mars 1302, touchant la faculté qu’il avoit conservée aux seigneurs d’avoir des notaires, fut confirmée par le roi Jean, au mois d’Octobre 1351, avec la seule différence qu’en rappellant la disposition qui autorisoit les seigneurs qui seroient fondés sur une ancienne coutume ; il ajoute ces mots & approuvée.

Les seigneurs n’ont donc pas tous droit de tabellionage, mais seulement ceux qui sont fondés en titre ou possession immémoriale.

Quelques coutumes, comme Blois & Senlis, donnent au seigneur châtelain le droit de tabellionage ; celle de Touraine porte que les comtes & les barons peuvent avoir douze notaires, & les châtelains six.

François Ier, par son ordonnance donnée à Angoulême au mois de Novembre 1542, art. 4, accorde aux seigneurs, barons & châtelains des provinces réglées par le droit écrit, le pouvoir d’établir des tabellions, ainsi que faisoient déjà les barons & châtelains des pays coutumiers.

Les seigneurs qui n’ont simplement que la haute justice, n’ont pas droit de tabellionage ; à moins qu’ils ne soient fondés sur une concession expresse, ou sur une possession immémoriale, ou sur la disposition de la coutume.

Quoique les notaires de seigneurs ne soient souvent qualifiés que de tabellions, il est néanmoins certain qu’ils réunissent ordinairement la qualité de notaire à celle de tabellion.

Les notaires de seigneurs ne peuvent instrumenter que dans leur ressort.

L’ordonnance de 1539 leur défend de passer aucuns actes entre ceux qui ne sont point sujets à leur jurisdiction.

Plusieurs édits & déclarations postérieurs leur ont réitéré la même défense de passer aucuns actes, sinon entre personnes demeurantes dans leur territoire, & pour des héritages & choses qui y sont situés ; le tout à peine de faux & de nullité : le dernier réglement fait sur cette matiere, est l’édit du mois d’Octobre 1705.

Néanmoins, suivant la derniere jurisprudence, il suffit que l’acte soit passé dans le territoire de la justice du seigneur, quoiqu’aucune des parties n’y soit demeurante, & que les biens n’y soient pas situés. La question a été ainsi jugée par trois arrêts des 3 Février 1711, 18 Juin 1738, & 1er Août 1739.

L’acte reçu par un notaire de seigneur, dans son ressort, emporte hypotheque sur tous les biens des contractans, en quelque lieu qu’ils soient situés.

Il est exécutoire dans le ressort de la seigneurie, pourvu qu’il soit scellé du sceau de la jurisdiction seigneuriale ; mais pour le mettre à exécution dans l’étendue d’une autre justice, il faut la permission du juge du lieu : telle est la disposition de l’ordonnance de 1539, art. 66. Voyez le Parfait Notaire, de M. de Ferrieres, & le Recueil de Jurisprud. de M. de la Combe, au mot Notaire. (A)

Notaire subalterne, est un notaire de seigneurs ; quelques auteurs appellent ces notaires subalternes, soit parce qu’ils sont inférieurs aux notaires royaux pour l’étendue de leur pouvoir, soit parce qu’ils exercent leur ministere sous l’autorité d’un juge seigneurial ou subalterne, par lequel ils sont reçus. Voyez ci-devant Notaire de seigneur.

Notaires-Syndics. Il fut créé par déclaration du 4 Sptembre 1706, deux offices de notaires-syndics dans les villes & bourgs, où il avoit été réservé au moins huit notaires ; & un dans les villes & bourgs, où il en avoit été réservé au moins quatre. On attacha à ces offices de notaire le titre de syndic, & le droit de faire les fonctions de syndic de la communauté des notaires. Il fut encore fait par édit du mois d’Août 1707, une autre création de syndic & garde scel des notaires en chaque justice & seigneurie, dans laquelle il y avoit deux notaires royaux établis. Mais tous ces offices de notaires syndics créés en 1706 & 1707, furent réunis aux communautés des notaires, par une déclaration du 24 Avril 1708 ; & par édit du mois de Décembre 1717, le titre & les fonctions de syndic attribués aux notaires créés par l’édit de 1706, furent supprimés. (A)

Notaire-Tabellion, est celui qui réunit en sa personne les fonctions de notaire & celles de tabellion, c’est-à dire, qui a le droit de recevoir les actes & de les expédier. Autrefois ces deux fonctions étoient séparées ; mais présentement elles sont presque par-tout réunies. Voyez ce qui est dit ci-devant des notaires en général. Voyez aussi Tabellion.

Notaires-Tribuns, tribuni & notarii, c’étoient des officiers dont les empereurs romains se servoient pour porter leurs ordres : on pourroit les comparer aux secrétaires des commandemens ; il en est beaucoup parlé par Godefroy, sur la loi unique, au code Théodosien, de mandatis principum, & dans Henri de Valois, sur le liv. XVII. d’Ammian, p. 140.

Il y avoit aussi les tribuns des notaires, tribuni notarii, qui étoient proprement les premiers secrétaires du prince ; ils expedioient les édits du prince & les dépêches des finances. Voyez Zozime, lib. V. le Glossaire de Ducange, au mot Tribuni, & les auteurs auxquels il renvoie.

Notaire de l’Université ; c’est ainsi que l’on appelloit anciennement le scribe ou greffier de chaque université : on en trouve nombre d’exemples dans les anciennes ordonnances de la 3e. race. (A)