Mémoires de madame la comtesse de La Boutetière de Saint-Mars/Notes

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NOTES

(1). Annotées en 1876 par son petit-fils, ces pages ont été écrites, il y a juste soixante ans ; car dans une lettre du 24 mai 1816 à sa fille la baronne Du Montet, Mme de La Boutetière disait : « Pour vous complaire j’ai déjà entrepris mes mémoires, j’en suis presque à la fin. De coucher sur le papier les principaux faits de ma vie pendant plus de dix ans n’a pas été une chose difficile à faire pour moi, ma mémoire me rendant les événements comme s’ils s’étaient passés tout récemment ; mais c’est la pureté du style qui pourra y manquer. Je n’ai pas la prétention d’être une puriste dans ma langue maternelle, et en me disant, ma chère enfant, que j’écris si bien, c’était sans doute pour m’encourager au travail. Comme il ne doit paraître qu’à vos yeux et à ceux de mes descendants, j’ai consenti à vous accorder votre demande, devant obtenir de vous et des autres, quelque jour, l’indulgence pour une vieille grand-mère. »

Sous le titre de Souvenirs de ma mère, écrits par elle-- même, concernant les principaux faits de notre émigration et de notre retour en France, la baronne Du Montet a placé dans le Livre des Souvenirs de famille une version un peu arrangée et complétée. La comparaison de ce texte avec celui-ci, absolument conforme à l’original, est bien intéressante.

(2). Rorthays de Marmande.

(3). Ici l’allégation n’est exacte qu’à moitié. De tous les habitants de Ponsay, qui étaient alors le chef de la famille, avec frère, sœurs, belle-sœur, nièces et fille, il ne revint en effet que cette dernière qui épousa un brave officier vendéen, M. Ussault, et mourut peu de temps après. Mais un autre frère et le fils avaient émigré. De ces deux, le premier fut fusillé à Quiberon, le second à Suireac ; c’est le grand-père de MM. de Ponsay d’aujourd’hui.

(4). Depuis grand-vicaire de Mgr de Mercy, ancien évêque de Luçon, archevêque de Bourges.

(5). Longtemps après, Mme Du Montet écrivait : « Le bon vieux cocher Alexis, qui depuis plus de trente ans était au service de mon père, vint, fondant en larmes, appuyer sa tête blanchie et vénérable à la portière de la voiture. Il me semble le voir encore, ce souvenir est resté dans mon cœur. Le bon Alexis a été tué dans la guerre de la Vendée, ainsi que tous les chevaux de mon père qui étaient montés par de braves paysans. »

(6). Cet homme, nommé Gervais, quitta ses maîtres en 1792 et vint en Anjou, chez leurs parents, se disant envoyé pour demander de l’argent en leur nom. De là il fut à la Boutetière, où il arriva une nuit de 1793, prétendant encore être chargé de venir chercher l’argenterie et autres objets qui avaient été cachés par les fermiers Morin, seuls dépositaires du secret de la cachette. Après une vive altercation avec ces fidèles serviteurs, Gervais finit par les menacer d’aller les dénoncer au district. C’eut été leur arrêt de mort ; ils le prévinrent en l’assommant à coups de bâton et cachant aussitôt son cadavre.

(7). Mgr de La Fare, évêque de Nancy, depuis archevêque de Sens et cardinal.

(8). Les Souvenirs de cinquante ans, par le vicomte Walsh (in-8°, Paris, 1845), contiennent d’intéressants détails sur le collège des Jésuites anglais établi à Liège, et son licenciement après la prise de cette ville par l’armée républicaine (juin 1794) :
« … Notre collège déployait sur les hauteurs de la ville, que traverse la Meuse, ses vastes bâtiments de brique rose, parmi les belles touffes d’arbres de ses jardins de Saint-Joseph, et je ne sais pourquoi la fumée du charbon de terre, qui avait sali, assombri toutes les autres maisons, semblait avoir épargné la nôtre. Cette colonie d’enfants catholiques d’Angleterre, d’Écosse, d’Irlande, d’Espagne, d’Allemagne, de Brabant et de France, prospérait dans ce beau pays de Flandre. Cet établissement comptait plus de quatre cents élèves, parmi lesquels j’avais pour compagnon d’étude les Choiseul, Segonzac, Damas, Sesmaisons, Mérode, Montagnac, Monthion, Mollien, Arundell, Roncherolles, Nédonchelle, Quatrebarbes, du Prat, de Cumont, Causans, Merci-Argenteau, Vilain XIV, Zéa, Bovi, Howard, Gage, Weld, Vaughan, Bagott, French, Carol et O’Connell. Il y avait tant de paternité dans l’éducation des Jésuites, que tous les élèves devenaient chez eux vraiment comme des frères ! et quand une fois les jours d’étude et de classe étaient passés, quand une fois nous étions entrés dans le monde, notre amitié de collège ne s’en était point allée, et dans la société nous nous cherchions tous et avions un immense bonheur quand nous nous retrouvions à parler de nos jours de Liège. Aujourd’hui que beaucoup d’années me séparent de ces jours-là, mon cœur bat encore au souvenir de ce temps que je regarde comme un des plus heureux de ma vie…
« Mais les armées françaises allaient, allaient toujours… Notre supérieur, le P. Stone, rassembla tous les élèves qui lui restaient au nombre de deux cents, et les informa que le collège allait traverser les mers pour s’établir dans le nord de l’Angleterre… Il dit à cette jeunesse partante : « Pauvres jeunes colombes, voilà que vous prenez la volée pour des contrées lointaines ; pauvres jeunes colombes, que Dieu soit avec vous ! »
« Tous étaient tombés à genoux et pleuraient ; il étendit les mains sur eux et les bénit. »

(9). Partie de Trèves le 18 août, l’armée des Princes entra en France le 29. Elle vint occuper, près de Thionville, sa position à l’aile gauche du duc de Brunswick, qui s’avançait lentement, l’aile droite en avant. Elle y resta une partie de septembre, concourant à l’investissement de Thionville et aux attaques infructueuses tentées sur cette ville. Le 20, elle se remit en marche, le jour même où l’armée de Dumouriez soutenait contre les Prussiens la canonnade de Valmy. Le 27, elle arriva dans les environs de Verdun, continuant à relier les deux armées, prussienne et autrichienne. On sait les suites de Valmy ; le temps était devenu affreux, les troupes prussiennes, enfoncées dans les boues de la Champagne, manquant de vivres, furent attaquées par de violentes épidémies, et Brunswick prit le parti de la retraite. L’armée des Princes reçut enfin l’ordre de suivre le mouvement de retraite, et, le 14, elle sortait de France par Longwy. À Arlon, une partie des émigrés se retirèrent.

(10). C’est par erreur que cette anecdote est placée à Mayence. Ce fut à Ober-Wesel que les pauvres voyageurs trouvèrent cet hôte si compatissant.

(11). L’archiduchesse Marie-Anne, sœur de l’empereur François II, abbesse du chapitre des dames chanoinesses de Prague, voulut bien se charger de l’éducation des deux enfants à la Visitation. Cette généreuse princesse les a en outre comblées, pendant six années qu’elles sont restées au couvent, de tous les témoignages de bonté et de bienveillance possibles.

(12). Une lettre de l’évêque de Nancy à Charette (19 août 1795), publiée dans la Correspondance secrète de Charette, Stofflet, Puisaye, etc. (Paris, an VII, 2 vol. in-8°, tome 1er, page 30), parle en ces termes de M. de La Boutetière et de son fils :

« Vienne, 19 août 1795.

 « Vous avez, Monsieur, désiré que le marquis de Charette vous fût renvoyé. J’ai fait les démarches nécessaires, et il part avec un congé d’un an pour aller servir sous vos ordres et se former à votre école. C’est dans tous les cas être adressé le mieux possible…
 « J’ai l’espérance que M. le comte de La Boutetière, mon beau-frère, actuellement à Francfort, se réunira à M. le marquis de Charette, lui servira de mentor et vous le remettra en Vendée. Si cela est, permettez-moi de vous recommander spécialement ce beau-frère que j’aime et son fils qui l’accompagnera. Combien je désire qu’il puisse, malgré sa grande jeunesse, servir sous vos drapeaux et combattre sous vos ordres, pour son Dieu, pour son Roi, pour son Pays !
 « J’ai l’honneur d’être, etc.
« A.-L.-H. de La Fare, évêque de Nancy. »

(13). L’éducation donnée gratuitement aux petits émigrés à l’école militaire de Penn était sans doute un bienfait, mais l’utilitaire Albion entendait en profiter. À la fin des cours, on les expédiait au ministère de la guerre, où on leur donnait vingt-quatre heures pour accepter une commission d’officier dans un régiment anglais, ou être mis sans ressources sur le pavé de Londres. Louis de La Boutetière refusa le grade de lieutenant dans un régiment d’artillerie à Saint-Jean-d’Acre.

(14). De juin 1799 à mars 1800.

(15). « C’était, dit Mme Du Montet dans ses Souvenirs, une grande voiture peinte et dorée, doublée de velours cramoisi, qui avait appartenu à un évêque de Salzbourg, mort peu de mois avant notre départ. La magnificence de notre équipage était précisément la cause du bon marché de cette voiture, si archiépiscopale, que personne probablement n’en avait voulu. »