Mémoires extraits des recueils de l’Académie royale de Berlin/Réflexions sur la résolution algébrique des équations

La bibliothèque libre.


RÉFLEXIONS
SUR LA
RÉSOLUTION ALGÉBRIQUE DES ÉQUATIONS[1].


[Nouveaux Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres
de Berlin
, années 1770 et 1771[2].]


Séparateur


La théorie des équations est de toutes les parties de l’Analyse celle qu’on eût cru devoir acquérir les plus grands degrés de perfection et par son importance et par la rapidité des progrès que les premiers inventeurs y ont faits ; mais quoique les Géomètres qui sont venus depuis n’aient cessé de s’y appliquer, il s’en faut beaucoup que leurs efforts aient eu le succès qu’on pouvait désirer. On a à la vérité épuisé presque tout ce qui concerne la nature des équations, leur transformation, les conditions nécessaires pour que deux ou plusieurs racines deviennent égales, ou aient entre elles un relation donnée, et la manière de trouver ces racines, la forme des racines imaginaires, et la méthode de trouver la valeur de celles qui, quoique réelles, se présentent sous une forme imaginaire, etc. On a aussi découvert des règles générales pour reconnaitre si toutes les racines d’une équation sont réelles ou non, et pour savoir dans le premier cas combien il doit y en avoir de positives et de négatives mais on n’a jusqu’à présent aucune règle générale pour connaître le nombre des racines imaginaires dans les équations qui doivent en contenir, et moins encore pour savoir combien il doit y en avoir de réelles positives et de réelles négatives, lorsqu’on connaît d’ailleurs le nombre des réelles et des imaginaires ; on n’a pas même une règle pour pouvoir s’assurer si une équation quelconque proposée doit contenir quelques racines réelles ou non, à moins que l’équation ne soit d’un degré impair, ou que son dernier terme ne soit négatif.

Ce n’est pas qu’on ne puisse toujours trouver le nombre des racines imaginaires et des racines réelles positives, ou négatives, lorsqu’on connaît la valeur numérique des coefficients de l’équation proposée ; les méthodes que j’ai données ailleurs, tant pour cet objet que pour approcher autant que l’on veut de la valeur de chaque racine, ne laissent, ce me semble, rien à désirer ; mais il s’agit ici des équations littérales, et la question est de trouver les conditions qui doivent avoir lieu entre les différents coefficients d’une équation d’un degré donné, suivant la qualité de ses racines.

À l’égard de la résolution des équations littérales, on n’est guère plus avancé qu’on ne l’était du temps de Cardan, qui le premier a publié celle des équations du troisième et du quatrième degré. Les premiers succès des Analystes italiens dans cette matière paraissent avoir été le terme des découvertes qu’on y pouvait faire ; du moins est-il certain que toutes les tentatives qu’on a faites jusqu’à présent pour reculer les limites de cette partie de l’Algèbre n’ont encore servi qu’à trouver de nouvelles méthodes pour les équations du troisième et du quatrième degré, dont aucune ne paraît applicable, en général, aux équations d’un degré plus élevé.

Je me propose dans ce Mémoire d’examiner les différentes méthodes que l’on a trouvées jusqu’à présent pour la résolution algébrique des équations, de les réduire à des principes généraux, et de faire voir à priori pourquoi ces méthodes réussissent pour le troisième et le quatrième degré, et sont en défaut pour les degrés ultérieurs.

Cet examen aura un double avantage d’un côté il servira à répandre une plus grande lumière sur les résolutions connues du troisième et du quatrième degré ; de l’autre il sera utile a ceux qui voudront s’occuper de la résolution des degrés supérieurs, en leur fournissant différentes vues pour cet objet et en leur épargnant surtout un grand nombre de pas et de tentatives inutiles.


SECTION PREMIÈRE.
de la résolution des équations du troisième degré.

1. Comme la résolution des équations du second degré est très-facile, et n’est d’ailleurs remarquable que par son extrême simplicité, j’entrerai d’abord en matière par les équations du troisième degré, lesquelles demandent pour être résolues des artifices particuliers qui ne se présentent pas naturellement.

Soit donc l’équation générale du troisième degré

et comme on sait qu’on peut toujours faire disparaître le second terme de toute équation en augmentant ses racines du coefficient du second terme divisé par l’exposant du premier, on pourra supposer d’abord, pour plus de simplicité, ce qui réduira la proposée à la forme

C’est dans cet état que les équations du troisième degré ont été d’abord traitées par Scipio Ferreo et par Tartalea, à qui l’on doit leur résolution ; mais on ignore le chemin qui les y a conduits. La méthode la plus naturelle pour y parvenir me paraît celle que Hudde a imaginée, et qui consiste à représenter la racine par la somme de deux indéterminées qui permettent de partager l’équation en deux parties propres à faire en sorte que les deux indéterminées ne dépendent que d’une équation résoluble à la manière de celles du second degré.

Suivant cette méthode on fera donc ce qui étant substitué dans la proposée la réduira à celle-ci

qu’on peut mettre sous cette forme plus simple

Qu’on fasse maintenant ces deux équations séparées

on aura

et, substituant dans la première,

c’est-à-dire

Cette équation est à la vérité du sixième degré, mais comme elle ne renferme que deux différentes puissances de l’inconnue, dont l’une a un exposant double de celui de l’autre, il est clair qu’elle peut se résoudre comme celles du second degré. En effet, on aura d’abord

et de là

Ainsi l’on connaîtra et et de là on aura

2. Il se présente différentes remarques à faire sur cette solution. D’abord il est clair que la quantité doit avoir six valeurs, puisqu’elle dépend d’une équation du sixième degré ; de sorte que la quantité aura aussi six valeurs ; mais comme est la racine d’une équation du troisième degré, on sait qu’elle ne peut avoir que trois valeurs différentes ; donc il faudra que les six valeurs dont il s’agit se réduisent à trois, dont chacune soit double. C’est aussi de quoi on peut se convaincre par le calcul, en éliminant des deux équations

Supposons, pour plus de généralité,

on aura donc

et de là

Substituant donc ces valeurs de et on aura

Soit, pour abréger,

on aura

d’où

de sorte qu’en substituant maintenant cette valeur de dans l’équation

on aura

ce qui se réduit à

ou bien, à cause de

c’est-à-dire à

Maintenant il est clair qu’en faisant pour avoir on aura ce qui réduira l’équation précédente à

savoir

équation qui aura les mêmes racines que la proposée, mais dont chacune sera double.

De là il s’ensuit que la résolution d’une équation du troisième degré est, à proprement parler, la résolution d’une équation du sixième degré, inconvénient qui n’a pas lieu dans le second degré, dont la résolution est tout à fait propre à ce degré, mais qui devient encore plus considérable pour les équations des degrés supérieurs, comme on le verra plus bas.

3. Puis donc que parmi les six valeurs de il n’y en a que trois qui donnent des valeurs différentes de il s’agit maintenant de distingue ces valeurs. Pour cela il faut trouver l’expression particulière de chacune des six valeurs de et si l’on nomme et les trois racines cubiques de l’unité, c’est-à-dire les trois racines de l’équation il est facile de voir que les six valeurs de seront, en faisant, pour abréger,

de là les valeurs correspondantes de seront, à cause de

et par conséquent

ces valeurs seront, dis-je,

Or, sans connaître même les valeurs de et de il est facile de s’assurer que doit être égal à car puisque et sont les trois racines de l’équation on aura donc leur produit égal au dernier terme donc donc et de sorte que les trois valeurs ci-dessus deviendront

Donc, puisque on aura, en ajoutant ensemble les valeurs correspondantes de et de

où il est facile de voir que, des signes ambigus de soit qu’on prenne le supérieur ou l’inférieur, on aura toujours les trois mêmes valeurs de

De là il s’ensuit donc que l’on peut prendre indifféremment le radical en plus ou en moins, et que les trois racines de l’équation proposée résulteront immédiatement des trois valeurs du radical cubique

4. Nous avons fait voir (2) que la résolution de toute équation du troisième degré appartient essentiellement à une équation du sixième degré ; cependant si l’on voulait délivrer l’équation

des radicaux, on tomberait dans une équation du neuvième degré ; car en prenant d’abord les cubes on aurait

et prenant de nouveau les cubes, après avoir fait passer dans le premier membre le terme on aurait

c’est-à-dire, à cause de

Mais il faut remarquer que cette équation renferme, outre les trois racines de la proposée encore six autres étrangères ; en effet elle peut se décomposer en ces trois-ci

dont les deux dernières sont, comme on voit, différentes de la proposée ; ainsi l’on ne peut rien conclure de cette équation pour le degré auquel

doit se rapporter la résolution des équations du troisième degré, comme nous l’avons fait plus haut (2), d’après l’équation laquelle renferme toutes les mêmes racines que la proposée.

5. L’équation du sixième degré

s’appelle la réduite du troisième degré, parce que c’est à sa résolution que se réduit celle de la proposée

Or nous avons déjà vu plus haut comment les racines de cette dernière équation dépendent des racines de celle-là ; voyons réciproquement comment les racines de la réduite dépendent de celles de la proposée ; mais pour rendre cette recherche plus générale et plus lumineuse il sera bon de considérer une équation qui ait tous ses termes telle que

et dont les racines soient représentées généralement par On commencera donc par faire évanouir le second terme en supposant et, faisant, pour abréger,

on aura la transformée

qui a la forme requise. Faisant maintenant on aura la réduite

d’où, en nommant la racine cubique de

on aura ces trois valeurs de savoir

lesquelles donneront les trois racines

d’où, à cause de on aura, en faisant, pour abréger, ces trois valeurs de savoir

donc

Retranchant successivement la seconde et la troisième de ces équations de la première, on aura

d’où l’on tire

et retranchant de nouveau l’une de l’autre, ensuite divisant par il viendra

c’est-à-dire

Or, et étant (hypothèse) les trois racines de l’équation on aura

et différentiant

de sorte qu’en faisant successivement on aura

donc, substituant ces valeurs dans l’expression précédente de on aura

ou bien, à cause de

Telle est donc la valeur de et par conséquent aussi de de sorte qu’on aura en changeant, ce qui est permis, en et vice versâ

6. On voit d’abord par cette expression de pourquoi la réduite est nécessairement du sixième degré ; car comme cette réduite ne dépend pas immédiatement des racines de la proposée, mais seulement des coefficients où les trois racines entrent également, il est clair que dans l’expression de on doit pouvoir échanger à volonté les quantités entre elles ; par conséquent la quantité devra avoir autant de valeurs différentes que l’on en pourra former par toutes les permutations possibles dont les trois racines sont susceptibles ; or on sait par la théorie des combinaisons que le nombre des permutations, c’est-à-dire des arrangements différents de trois choses, est donc la réduite en doit être aussi du degré c’est-à-dire du sixième.

Il y a plus la même expression de montre aussi pourquoi la réduite est résoluble à la manière des équations du second degré ; car il est clair que cela vient de ce que cette équation ne renferme que les puissances et c’est-à-dire des puissances dont les exposants sont multiples de en sorte que, si est une des valeurs de il faut que et en soient aussi à cause de et or c’est ce qui a lieu dans l’expression de trouvée ci-dessus. Pour le faire voir plus aisément nous remarquerons que car, puisqu’on a et on aura aussi et de là de sorte que l’expression de pourra se mettre sous cette forme

d’où, en faisant toutes les permutations possibles des quantités , on tire les six valeurs suivantes

qui seront donc les six racines de la réduite. Maintenant si l’on multiplie la première par et ensuite par ou par on aura, à cause de

ces deux-ci

qui sont la sixième et la quatrième ; et si l’on multiplie de même la seconde par et par on aura

qui sont la troisième et la cinquième. Il en sera de même si l’on multiplie la troisième et la quatrième, ou la cinquième et la sixième par et par car on aura par là également toutes les autres.

7. Cela nous conduit à une méthode directe pour trouver la réduite d’où dépend la résolution des équations du troisième degré ; car soit

l’équation proposée dont les racines soient et supposons que les racines de la réduite soient représentées généralement par une fonction du premier degré des racines telle que

étant des coefficients indépendants des quantités en faisant toutes les permutations possibles des quantités on aura ces quantités

qui seront les six racines de la réduite. Or, pour que cette équation n’ait que des puissances dont les exposants soient multiples de il faut, comme nous l’avons vu plus haut, que, nommant une de ses racines,

et ou en soient aussi ; donc, prenant la quantité

pour il faudra que la quantité

soit égale à une des cinq autres quantités ci-dessus ; or elle ne saurait devenir égale à

ni à

qu’en faisant car dans le premier cas on aurait

,

et dans le second

mais en la comparant à la quantité

on aura

d’où l’on tire

c’est-à-dire

ce qui montre que doit être en effet une des racines de l’équation

ainsi en faisant, pour plus de simplicité, on aura

ce qui donne les mêmes formules qu’on a trouvées plus haut en faisant abstraction du dénominateur

Faisant donc, pour abréger,

on aura et pour les six racines de la transformée ; or, nommant l’inconnue de cette équation, on trouvera d’abord que le produit des trois facteurs sera et que de même le produit des trois autres sera de sorte que le produit total, c’est-à-dire la réduite elle-même, sera représentée par

qui a la forme demandée. Il ne s’agit donc plus maintenant que de trouver les valeurs de et de or, en élevant au cube la quantité et faisant attention que on trouve

et par conséquent, en changeant en on aura de même

Soit, pour plus de simplicité,

on aura donc

donc

mais comme et sont les trois racines de l’équation qui manque du second terme, on doit avoir

donc

Multipliant ensuite les valeurs de et ensemble, on aura

ou bien, à cause de

or il est facile de voir que les quantités et doivent être données par les coefficients de la proposée, et cela sans extraction de racines, ce qui suit de ce que ces quantités ne changent point, quelques permutations des quantités qu’on y fasse, de sorte qu’elles ne peuvent avoir chacune qu’une valeur unique.

8. En effet, ayant

on aura d’abord par les règles connues

et l’on trouvera de là

donc

d’où l’on trouvera

de sorte que notre réduite sera

qui revient au même que celle qu’on a trouvée plus haut (5), en faisant seulement attention que l’inconnue de celle-ci est triple de l’inconnue

de celle-là. Résolvant donc cette équation à la manière de celles du second degré, ou bien faisant, pour abréger, en sorte que l’on ait

et nommant et les racines de cette équation du second degré, on aura

donc

par conséquent, puisqu’on a supposé que et étaient deux valeurs de on aura

équations qui étant combinées avec l’équation

serviront à trouver les trois racines en effet on aura, à cause de et de

ce qui s’accorde avec ce qu’on a trouvé plus haut.

9. Il est à propos de remarquer encore, pour éclaircir davantage cette matière, que les quantités et du no 7 sont telles que l’une devient toujours l’autre en y faisant une permutation quelconque entre les trois racines de sorte que ces quantités et ne peuvent être que les racines d’une équation du second degré. En effet, nommant l’inconnue de cette équation, il est clair qu’elle aura nécessairement cette forme

donc, substituant pour et leurs valeurs trouvées ci-dessus (8), on aura

Ainsi l’on aura, par la résolution de cette équation, les valeurs de et et comme d’ailleurs la quantité est déjà donnée, puisqu’on a

on aura les valeurs de et de (7), ou bien celles de et (8), lesquelles seront donc

et moyennant ces valeurs on aura celles des racines comme on l’a vu tantôt.

Au reste cette propriété des fonctions et fait voir clairement pourquoi la quantité

ne dépend que d’une équation du second degré, de sorte que l’équation en ne peut renfermer que les puissances et

10. La résolution des équations du troisième degré que nous venons d’examiner est appelée communément la Règle de Cardan, et elle est la seule que les Analystes connaissent. Mais il y a encore une autre méthode qui est due à M. Tschirnaus, et qui, quoique moins simple que celle de Cardan, a cependant l’avantage d’être plus directe et plus générale. Cette méthode est exposée dans les Acta Eruditorum de l’année 1683, et elle consiste à faire disparaître autant de termes intermédiaires que l’on veut d’une équation quelconque ; l’Auteur la propose comme générale pour cet objet, et nous verrons qu’elle l’est en effet, mais qu’elle demande souvent la résolution d’équations d’un degré supérieur à celui de la proposée, ce qui empêche qu’elle ne réussisse au delà du quatrième degré.

M. Tschirnaus remarque que comme on peut faire évanouir un terme quelconque d’une équation dont est l’inconnue, par la supposition de

étant une nouvelle inconnue et une quantité indéterminée, de même on pourra en faire évanouir deux quelconques en supposant

ou trois en supposant

et ainsi de suite, étant tous des coefficients indéterminés dont le nombre doit être égal à celui des termes qu’on veut faire évanouir, afin que l’on ait autant d’inconnues que de conditions à remplir.

Ainsi il n’y aura qu’à éliminer l’inconnue de l’équation proposée par le moyen de la nouvelle équation qu’on a supposée, et l’on aura une équation en qui sera toujours du même degré que la proposée, et dans laquelle on pourra supposer autant de termes égaux à zéro qu’il y a d’indéterminées ,

Prenons donc l’équation du troisième degré

et supposons

pour qu’on soit en état d’éliminer dans la transformée les deux termes intermédiaires ; on aura donc

et, en substituant la valeur de

donc, substituant ces valeurs dans la proposée, on aura

(A)

d’où l’on tire

valeur qui étant substituée dans l’équation

donnera celle-ci, où je fais, pour plus de simplicité,

c’est-à-dire, en ordonnant les termes par rapport aux puissances de et remettant les valeurs de et

(B)

de sorte qu’en développant les puissances de on aura l’équation

dans laquelle

Maintenant on peut faire évanouir le second et le troisième terme en supposant et ce qui donnera ces deux équations

par lesquelles on pourra déterminer et et l’équation en sera réduite à la forme

laquelle donne sur-le-champ ces trois racines

et étant les racines de l’équation Ainsi mettant

d’abord dans l’expression de trouvée ci-dessus les valeurs de et qui résultent des équations précédentes, et ensuite pour les trois racines de l’équation on aura tout d’un coup les trois racines de l’équation proposée.

Or, comme des deux équations qui doivent donner et la première est du premier degré et la seconde du second, il est visible que la détermination de ces quantités ne dépendra que d’une équation du degré c’est-à-dire du second degré ; en effet, on aura d’abord

et, substituant cette valeur dans la seconde équation, on aura

d’où l’on tirera deux valeurs de qui pourront être employées indifféremment, parce qu’elles donneront toujours les mêmes valeurs de

Cette méthode a donc l’avantage de conduire immédiatement à une réduite du second degré, au lieu que par la méthode ordinaire on tombe dans une réduite du sixième ; mais la résolution qu’elle donne n’est pas pour cela exempte de l’inconvénient que nous avons remarqué dans la résolution de Cardan, et qui consiste en ce que cette résolution est plutôt celle d’une équation du sixième degré que d’une équation du troisième (2). En effet, puisque la quantité a trois valeurs, et que les quantités et en ont chacune deux, il est visible qu’il doit résulter six valeurs de lesquelles ne peuvent être par conséquent que les racines d’une équation du sixième degré ; il est vrai que ces six valeurs se réduiront à trois, dont chacune sera double, comme il est facile de le démontrer, et comme nous l’avons déjà fait voir à l’égard de la formule de Cardan.

11. Il y a une remarque importante à faire touchant cette méthode de M. Tschirnaus, c’est que, dès qu’on a trouvé les valeurs de de et de on ne doit pas prendre indifféremmentpour une des racines de l’équation supposée

ainsi que l’Auteur le fait : car, pour que cela fût permis, il faudrait que cette équation renfermât deux des racines de la proposée, et par conséquent que fût la somme de ces deux racines ; or, comme il n’y a pas plus de raison pour que soit la somme de deux quelconques des trois racines de la proposée que de deux autres quelconques, il s’ensuit que devrait avoir autant de valeurs différentes qu’il y a de manières de prendre les trois racines deux à deux, c’est-à-dire trois valeurs, à cause que le nombre des combinaisons de trois choses prises deux à deux est au lieu que nous avons vu que la quantité n’a que deux valeurs, puisqu’elle ne dépend que d’une équation du second degré.

L’esprit de la méthode que nous examinons consiste à faire en sorte que l’équation supposée ait une racine commune avec la proposée ; ainsi, quand on a déterminé les valeurs de et en sorte que cette condition ait lieu, il faut prendre pour la valeur de celle des racines de l’équation

qui sera commune à l’équation proposée

pour cela il n’y aura qu’à chercher le plus grand diviseur commun de ces deux équations, et ce diviseur, où sera nécessairement linéaire, donnera une valeur de qui sera aussi une des racines de la proposée ; or il est facile de comprendre que cette valeur de ne peut être que celle que nous avons trouvée en éliminant successivement les puissances plus hautes de des deux équations données.

En effet, la méthode ordinaire d’élimination, suivant laquelle on fait disparaître successivement les plus hautes puissances de l’inconnue en déduisant, des deux équations données où la même inconnue se trouve élevée à des puissances quelconques, une suite d’autres équations où le plus haut degré de l’inconnue est successivement moindre, jusqu’à ce qu’on arrive à une équation où l’inconnue ne se trouve plus, et qui est le résultat de l’élimination ; cette méthode, dis-je, revient dans le fond à la même que celle qui sert à trouver le plus grand commun diviseur des deux quantités qui forment les premiers membres des deux équations données ; les restes que l’on aura par les divisions successives qu’il faudra faire donneront, étant égalés à zéro, les mêmes équations que celles qui proviennent de l’élimination ; le dernier reste où l’inconnue ne se trouve plus devra être égal à zéro pour que les deux quantités’proposées aient un diviseur commun du premier degré, lequel sera par conséquent l’avant-dernier reste où l’inconnue ne sera que linéaire ; de sorte qu’en égalant aussi à zéro cet avant-dernier reste on aura une valeur de l’inconnue qui sera la racine commune des deux équations.

Dans l’Exemple du no 10 les équations (A) et (B) sont celles que l’on aurait en faisant égal à zéro l’avant-dernier et le dernier reste ; par conséquent la valeur de tirée de l’équation (A) est la seule qui puisse donner en même temps une racine de l’équation proposée.

12. À l’occasion de cette remarque, nous croyons devoir encore en faire une autre touchant la manière de faire en sorte que deux équations aient plus d’une racine commune ; il est évident que si l’on veut qu’elles aient deux racines communes il faudra qu’elles soient divisibles exactement par un facteur du second degré ; par conséquent, en cherchant le plus grand commun diviseur des deux quantités qui forment les premiers membres des équations proposées, dès qu’on sera parvenu à un reste où l’inconnue se trouvera au second degré, il faudra, pour que ce reste soit un diviseur commun des deux équations, que le reste suivant soit nul de lui-même ; or ce dernier reste ne renfermera que deux termes, l’un où l’inconnue ne se trouvera pas, et l’autre où elle se trouvera à la première dimension ; c’est pourquoi il faudra faire chacun de ces termes en particulier égal à zéro, ce qui donnera deux équations contenant les conditions nécessaires pour qu’il y ait dans les proposées deux racines communes. Ce serait la même chose si l’on voulait employer la voie de l’élimination alors il faudrait s’arrêter à l’équation où l’inconnue serait au premier degré, et vérifier cette équation indépendammentde l’inconnue, en égalant à zéro l’un et l’autre des deux termes dont elle serait composée ; moyennant quoi l’équation précédente du second degré renfermerait les deux racines communes aux deux équations proposées.

On voit par là comment il faudrait s’y prendre pour trouver les conditions qui donnent trois racines communes, ou davantage, à deux équations données ; mais dès qu’on aura trouvé la condition nécessaire pour que ces deux équations aient une racine commune, on pourra aisément en déduire celles qui rendront deux ou plusieurs racines communes.

Pour cela, supposons que les deux équations données qui renferment une même inconnue soient représentées, en général, par

si, au lieu de prendre je prends et que j’élimine ensuite des deux équations, j’en aurai une en que je représenterai par

or, pour que les deux équations et aient une racine commune en sorte qu’elles puissent subsister à la fois, il faut que ait une valeur égale à zéro ; donc

sera la condition nécessaire pour l’existence d’une racine commune à ces deux équations ; mais si l’on veut qu’elles aient deux racines communes, alors il faudra que ait deux valeurs égales à zéro ; par conséquent on aura les deux conditions

de même, s’il devait y avoir trois racines communes, il faudrait que eût trois valeurs égales à zéro, ce qui donnerait les trois conditions

et ainsi de suite.

Je remarque maintenant que pour changer l’équation en ou il n’y a qu’à diminuer le dernier terme de l’équation de la quantité de sorte que si l’on suppose

il n’y aura qu’à écrire à la place de or l’équation

est celle qui résulte de l’élimination de dans les deux équations et (hypothèse) ; par conséquent, en y faisant l’équation sera celle qui résultera de l’élimination de dans les équations et donc, ayantl’équation il n’yauraqu’\delta ysubstituer à la place de pour avoir immédiatementl’équation

mais on sait que si est une fonction de et qu’on veuille y substituer à la place de on aura, en employantles différentiations, la transformée

donc on aura, par la comparaison des termes,

d’où je tire cette conclusion, que si

est la condition nécessaire pour que les équations et aient une racine commune, on aura, pour les conditions de deux racines communes,

pour trois racines communes,

et ainsi de suite, étant le dernier terme de l’une des équations proposées.

13. Il est clair au reste que les racines de l’équation en y ne sont autre chose que les valeurs de qui résultent en substituant à la place de chacune des racines de l’autre équation que nous désignerons par donc, si l’on suppose que soient les valeurs de qui viendraient de ces substitutions, c’est-à-dire où l’on aurait mis à la place de on aura

d’où l’on voit que l’équation résultante de l’élimination de l’inconnue des deux équations et n’est autre chose que le produit de toutes les équations particulières

or ce produit peut toujours se trouver sans connaître les racines de l’équation comme il est facile de s’en convaincre en considérant que le produit en question demeurera toujours le même, quelque permutation qu’on y fasse entre les racines c’est-à-dire entre les quantités qui sont des fonctions semblables de ces racines ; de sorte qu’il doit être donné par une équation linéaire et sans extraction de racines. En effet, les multiplications des quantités étant faites, on trouvera toujours que les différentes fonctions de qui entreront dans le produit total seront exprimables par les seuls coefficients de l’équation dont sont les racines. On peut consulter là-dessus l’Introduction à l’Analyse des lignes courbes de M. Cramer, où l’on trouvera des règles pour calculer toutes les fonctions dont il s’agit, et avoir par conséquent la valeur du produit nous avons aussi traité ce sujet dans un Mémoire particulier, où nous avons donné des formules générales pour trouver immédiatement la valeur du même produit, sans passer par les différentes opérations que la méthode de M. Cramer exige[3] ; ainsi nous ne nous arrêterons pas davantage là-dessus. Nous nous contenterons seulement de re-

marquer que, de ce que l’équation résultante de l’élimination de par le moyen des équations et peut être représentée par

il s’ensuit que cette équation doit être telle, que les coefficients de l’équation y forment partout des produits d’autant de dimensions qu’il y a de quantités ou de racines dans l’équation c’est-à-dire autant qu’il y a d’unités dans le degré de cette dernière équation ; il en sera de même des coefficients de l’équation qui devront former partout dans la même équation résultante de l’élimination des produits d’autant de dimensions qu’il y a d’unités dans l’exposant du degré de l’autre équation

14. D’où l’on peut conclure, en général, que, suivant la méthode de M. Tschirnaus, on aura toujours une transformée en du même degré que l’équation proposée, et que dans cette transformée les quantités (y compris l’unité, coefficient de la plus haute puissance de dans l’équation supposée) formeront partout des produits du même nombre de dimensions, c’est-à-dire d’autant de dimensions qu’il y a d’unités dans le degré de la proposée.

Ainsi, supposant que l’équation proposée dont est l’inconnue soit du degré et qu’on prenne une équation subsidiaire telle que

on aura une transformée en du degré qui, étant représentée par

sera telle que le coefficient sera une fonction linéaire de , que le coefficient sera une fonction de deux dimensions des mêmes quantités, que le coefficient en sera une de trois dimensions, et ainsi de suite.

Et en général le coefficient du terme ième sera toujours une fonction rationnelle et entière de de dimensions. Ainsi, prenant autant d’indéterminées qu’il y a de termes à faire disparaître, il est clair que pour faire disparaître le second terme on n’aura qu’à résoudre une équation du premier degré à une seule inconnue ; pour faire disparaître le second terme et le troisième il faudra résoudre deux équations à deux inconnues, l’une du premier degré et l’autre du second, ce qui donnera toujours une équation finale du second, comme nous l’avons vu plus haut ; pour faire disparaître le second terme, le troisième et le quatrième, on aura à résoudre trois équations à autant d’inconnues, dont l’une sera du premier degré, la seconde du second degré et la troisième du troisième degré, en sorte que l’équation finale sera, en général, du degré

En général, pour faire disparaître à la fois les termes ième, ième, ième, …, on aura à résoudre autant d’équations qu’il y aura de ces termes, avec un même nombre d’inconnues, et ces équations seront des degrés en sorte que l’équation finale montera, en général, au degré Donc, pour chasser par cette méthode tous les termes intermédiaires de la transformée

en sorte qu’elle se réduise à la forme qui est toujours résoluble, on tombera, en général, dans une équation du degré qui sera par conséquent toujours plus haut que le degré de la proposée, excepté le seul cas où

15. Revenons maintenant à la résolution du troisième degré trouvée d’après la méthode de M. Tschirnaus, et voyons à priori, et indépendamment de la théorie de l’élimination que nous venons d’expliquer, la raison pourquoi cette méthode conduit directement à une réduite du second degré, tandis que la méthode ordinaire mène à une réduite du sixième. Pour cela je considère l’équation subsidiaire

dans laquelle y doit être déterminé par une équation du troisième degré

à deux termes telle que

dont les racines sont

et je remarque que ces trois racines devant répondre aux trois valeurs de qui sont les racines de la proposée

on aura donc, en désignant ces dernières racines par les trois équations suivantes

(C)

d’où l’on pourra tirer les valeurs de et après avoir chassé pour cet effet, il n’y a qu’à ajouter ensemble les trois équations dont il s’agit, après avoir multiplié la seconde par et la troisième par car on aura, à cause de et de comme on l’a déjà vu plus haut, on aura, dis-je,

d’où l’on tire

Cette expression de doit nous faire juger immédiatement du degré de l’équation par laquelle la quantité doit être déterminée ; en effet, il est clair que cette équation doit avoir autant de racines qu’il peut y avoir de valeurs de or les différentes valeurs de ne peuvent venir que des permutations qu’on peut faire entre les racines et ces permutations sont au nombre de six, comme nous l’avons déjà remarqué plus haut (voyez les nos 6 et suivants, où les lettres désignent les mêmes quantités qui sont nommées ici ) ainsi la quantité pourra avoir en tout six valeurs, qui seront

de sorte que, généralement parlant, l’équation en devrait être du sixième degré ; mais j’observe que des six valeurs précédentes la première, la troisième et la cinquième sont égales, ainsi que la seconde, la quatrième et la sixième. En effet, en multipliant le numérateur et le dénominateur de la première par ce qui ne la change pas, elle devient la cinquième, à cause de et de et multipliant par elle devient la troisième ; de même, en multipliant le haut et le bas de la seconde par on aura la quatrième, et en multipliant par on aura la sixième. Donc l’équation en du sixième degré aura nécessairement trois racines égales entre elles et trois autres aussi égales entre elles ; ce qui l’abaissera au second degré, puisqu’elle ne pourra être que le cube d’une équation du second degré ; et voilà pourquoi la quantité est donnée simplement par une équation du second degré, comme nous l’avons vu ci-dessus (10). À l’égard de la quantité si l’on ajoute ensemble les trois équations (C), on aura, à cause de

mais on a

donc

et de là

de sorte qu’en connaissantla valeur de on connaîtra aussitôt celle de

16. La formule

qui exprime la valeur de est donc très-remarquable en ce que, quelques permutations qu’on y fasse entre les quantités elle ne peut que demeurer la même, ou se changer en cette autre-ci

de sorte que ces deux quantités ne peuvent être que les racines d’une équation du second degré ; on pourrait trouver à priori cette équation en cherchant la somme et le produit des deux quantités dont il s’agit, et il en résulterait après le calcul achevé une équation telle que l’équation en qu’on a trouvée plus haut (10).

On peut encore remarquer que si l’on multiplie ensemble les deux dénominateurs

on aura pour produit

mais

de sorte que ce produit deviendra De plus, si l’on multiplie le numérateur

par le dénominateur

on aura pour produit la quantité

laquelle (à cause que sont les mêmes racines que nous avons nommées ailleurs ) se réduit (7) à

ou bien à

puisque de sorte que la fraction

deviendra, en multipliant le haut et le bas par celle-ci

et de même l’autre fraction

deviendra, en multipliant le haut et le bas par

Mais dans le numéro cité on avait

donc

par conséquent les deux fractions dont il s’agit seront

ou bien (8)

et étant les racines de l’équation

qui est la réduite que donne la méthode de Cardan.

Ce qui fait voir clairement la liaison et l’analogie de cette méthode avec celle de Tschirnaus.

17. L’expression de trouvée (10) d’après la méthode de Tschirnaus peut se mettre évidemment sous cette forme

et étant des indéterminées et la racine d’une équation du troisième degré à deux termes telle que

Ainsi il n’y aurait qu’à éliminer par le moyen de ces deux équations, dont la première donne

ce qui étant substitué dans la seconde, il vient

équation du troisième degré qu’on pourra comparer avec la proposée ; et cette comparaison servira à déterminer les quantité dont une restera arbitraire et pourra être prise à volonté.

Cette méthode de résoudre les équations du troisième degré a déjà été employée par M. Bezout dans un excellent Mémoire qu’il a donné sur cette matière dans le volume des Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, pour l’année 1762, et dans lequel l’Auteur a fait un usage utile et heureux de ces substitutions pour résoudre une classe très-étendue d’équations de tous les degrés. Nous nous contenterons de remarquer ici que si l’on voulait savoir d’avance ce que l’on peut se promettre des substitutions dont il s’agit pour la résolution des équations du troisième degré, il n’y aurait qu’à chercher à priori le degré et la forme de l’équation qui donnera l’un des coefficient ou etc. ; pour cela on considérera que, puisque on aura ces trois valeurs de savoir lesquelles étant substituées dans l’expression de

donneront les trois valeurs de savoir

Ainsi prenant l’équation

ou bien

on en déduira ces trois-ci

qui étant d’abord ajoutées ensemble donnent, à cause de et

de plus, multipliant la seconde par et la troisième par et les ajoutant ensuite toutes trois ensemble, on aura

Celle-ci donne

et, cette valeur étant substituée dans la première, on aura en divisant par

d’où l’on tire

Il est d’abord facile de voir par cette expression que la quantité ne peut avoir que deux valeurs différentes, et que par conséquent elle ne pourra être donnée que par une équation du second degré ; car la fraction

ne peut que demeurer la même, ou se changer dans la fraction

en faisant telle permutation que l’on voudra entre les trois racines C’est ce qu’on comprendra encore plus aisément en multipliant le haut et le bas de la première fraction par

et le haut et le bas de la seconde par

car alors elles deviendront (16)

c’est-à-dire (7)

ou bien

de sorte que les deux valeurs de seront

et étant les racines de l’équation en donnée ci-dessus.

18. Reprenons l’expression de

et comme est un radical donné par l’équation faisons évanouir ce radical du dénominateur en multipliant le haut et le bas de la fraction par ce qui la changera en celle-ci

c’est-à-dire, en substituant à la place de

quantité qu’on peut réduire à cette forme plus simple

de sorte que l’on aura, en général,

étant des coefficients indéterminés et la racine d’une équation du troisième degré à deux termes telle que

Cette expression de est la même que MM. Euler et Bezout ont adoptée pour exprimer les racines des équations du troisième degré, et que ces Auteurs croient pouvoir étendre, en général, aux équations de tous les degrés. Voyez les Nouveaux Commentaires de Pétersbourg, tome IX, et les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris, pour l’année 1765.

Pour résoudre donc les équations du troisième degré d’après cette méthode, il n’y a qu’à éliminer y parle moyen des deux équations

ce qui donnera nécessairement une équation en du troisième degré, comme on peut s’en assurer par la théorie de l’élimination que nous avons donnée plus haut ; cette équation étant ensuite comparée terme à terme avec la proposée donnera trois équations par lesquelles on pourra déterminer trois des quatre indéterminées la quatrième pouvant être prise à volonté. M. Bezout fait d’abord, pour plus de simplicité, mais M. Euler conserve dans le calcul toutes les indéterminées, et il prend ensuite égale à l’unité celle qui lui paraît devoir donner un résultat plus simple ; c’est toute la différence qui se trouve entre les procédés de ces deux Auteurs.

19. Pour apprécier cette méthode à priori, nous allons chercher d’après nos principes la forme et le degré des équations finales qui serviront à la détermination des coefficients et comme l’équation donne les trois racines il est clair qu’on aura sur-le-champ les trois équations

qui étant ajoutées ensemble donneront d’abord

ensuite, multipliant la seconde par la troisième par et les ajoutant toutes trois, on aura

enfin, multipliant la seconde par la troisième par et les ajoutant de même, on aura

Si l’on fait on aura

Or ces expressions sont les mêmes que celles que nous avons trouvées plus haut pour les racines de la réduite du troisième degré d’après la règle de Cardan ; de sorte qu’on peut conclure d’abord que les quantités et seront données par une même équation du sixième degré résoluble à la manière de celles du second, et qui sera (5)

c’est aussi ce que M. Bezout a trouvé d’après son calcul.

Mais si, au lieu de supposer avec M. Bezout on fait avec M. Euler on aura

la première étant élevée au cube donnera

ou bien, en adoptant les dénominationsdu no 8,

d’où l’on voit d’abord que la quantité sera donnée par une simple équation du second degré, dont les racines seront et Ayant trouvé il n’y aura qu’à multiplier la première équation par la seconde pour avoir

ce qui se réduit (16) à

d’où

20. Telles sont les principales méthodes qu’on a trouvées jusqu’à présent pour résoudre les équations du troisième degré. Par l’analyse que nous venons d’en faire il est visible que ces méthodes reviennent toutes au même pour le fond, puisqu’elles consistent à trouver des réduites dont les racines soient représentéesen général par ou par ou bien, ce qui est la même chose, par des quantités proportionnelles à celles-ci. Dans le cas où la racine de la réduite est cette réduite est du sixième degré, résoluble à la manière du second parce qu’elle ne renferme que la troisième et la sixième puissance de l’inconnue. Nous en avons donné la raison dans le no 6. Dans l’autre cas, où la racine de la réduite est cette réduite ne peut être que du second degré, ce qui suit nécessairement du cas précédent, et que nous avons aussi démontré d’une manière directe (9).

21. Avant de terminer cette Section nous dirons un mot de la résolution de l’équation

dont nous avons supposé les racines et et ; et nous ferons en même temps quelques remarques sur la résolution générale de l’équation

lesquelles pourront nous être utiles dans la suite.

Il est d’abord clair que l’unité est une des racines de l’équation de sorte que pour trouver les deux autres il n’y aura qu’a diviser d’abord cette équation par ce qui donnera celle-ci

d’où l’on tire

Ainsi l’on aura et

et il est facile de se convaincre que est en effet égal à comme nous l’avons déjà trouvé à priori ; car faisant le carré de on a

En général, soit l’équation à deux termes

on remarquera d’abord que si est un nombre composé, en sorte que la résolution de cette équation se réduira toujours à celle de deux équations semblables, l’une du degré et l’autre du degré Car, faisant on aura et par conséquent

Supposons donc qu’on ait résolu cette équation du degré et que soit une des racines, on aura ensuite

ou bien, faisant

et cette nouvelle équation étant résolue, on aura la valeur de et par conséquent celle de

De là on voit que la difficulté de résoudre l’équation lorsque est un nombre composé, se réduit à résoudre autant de pareilles équations que a de facteurs simples, et dont les degrés soient ces mêmes facteurs de

Ainsi toute la difficulté consiste à résoudre l’équation lorsque est un nombre premier.

Considérons, en général, le cas où est impair, en sorte que l’équation à résoudre soit

puisque l’unité est toujours une des valeurs de on pourra diviser par et le quotient sera

Or cette équation qui est du degré peut toujours s’abaisser au degré car, en la divisant par et mettant ensemble les termes qui sont également éloignés de celui du milieu, on aura

Qu’on fasse et élevant au carré, au cube, etc., on trouvera

donc

et, en général,

en ne continuant la série que tant que l’on aura des puissances positives de

Faisant donc ces substitutions dans l’équation ci-dessus, on aura une transformée en où toutes les puissances de seront positives et où la plus haute sera de sorte que l’équation ne sera plus que du degré ième.

Donc, si l’on peut résoudre cette dernière équation, on aura valeurs de dont chacune donnera ensuite deux valeurs de par la résolution de l’équation quadratique

moyennant quoi on aura valeurs de auxquelles joignant la première racine on aura toutes les racines de l’équation

Ainsi l’on pourra avoir par l’extraction de la seule racine carrée les racines des équations

par conséquent on pourra résoudre de même toute équation

lorsque ne contiendra d’autres facteurs simples que et c’est-à dire lorsque sera de la forme En admettant la résolution des équations du troisième degré, on pourra résoudre encore l’équation

et par conséquent toute équation

lorsque sera de la forme

Mais on ne saurait aller plus loin, puisque, le nombre premier qui suit étant il faudrait pouvoir résoudre l’équation

ce qui demanderaitla résolution d’une équation du cinquième degré.

Cependant on peut toujours exprimer les racines de toute équation quel que soit par la division de la circonférence du cercle en parties, comme on le verra ci-après.

22. La méthode que nous avons employée pour abaisser l’équation

au degré peut s’appliquer, en général, à toute équation d’un degré pair, et où les coefficients des termes équidistants de celui du milieu sont les mêmes ; car prenant l’équation

et la divisant par elle pourra se mettre sous la forme

de sorte qu’on y pourra faire usage des substitutions

au moyen desquelles la transformée en ne sera que du degré ième.

Si l’on avait l’équation du degré impair

on la disposerait d’abord ainsi

où l’on voit que chaque terme est divisible par et, la division faite, on aura

équation qui, étant ordonnée par rapport aux puissances de se trouvera dans le cas de l’équation ci-dessus et pourra par conséquent s’abaisser par la même méthode au degré

M. de Moivre est, je crois, le premier qui ait remarqué cette propriété des équations dont nous parlons, et il a donné dans ses Miscellanea analytica la formule générale de la transformée dont le degré n’est que la moitié de celui de la proposée. Nous donnerons plus bas la raison à priori pourquoi ces sortes d’équations sont susceptibles d’une pareille réduction.

23. Reprenons la formule trouvée dans le no 21, savoir

et remarquons que, par les théorèmes connus de la multisection angulaire, la quantité

représente, dans un cercle dont le rayon est égal à la corde du complément à d’un arc uple de celui dont la corde du complément serait de sorte qu’en nommant ce dernier arc on aura

les cordes des compléments étant, comme on sait, égales aux doubles des cosinus de la moitié des angles.

Ainsi faisant on aura, en général, par conséquent les deux équations

subsisteront à la fois, quel que soit le nombre en sorte que la première sera nécessairement un diviseur de la seconde ; c’est le fondement du fameux théorème de M. Cotes.

Maintenant, si l’on résout ces deux équations à la manière des équations quadratiques, on aura ces deux-ci

où il est facile de prouver que les signes ambigus doivent être les mêmes dans l’une et l’autre ; car supposant très-petit, on aura, aux infiniment petits du second ordre près,

de sorte que les deux équations deviendront

or, en élevant la première à la puissance et négligeant le carré et les puissances plus hautes de on aurait

valeur qui devant être la même que celle qui est donnée par la seconde équation, on en conclura l’identité des signes ambigus ou dans les deux équations. Faisant donc abstraction de l’ambiguïté des signes, il est clair que

sera la résolution de l’équation

Donc, si l’on suppose et ce qui donne ou ou, en général, égal à étant un nombre entier quelconque, on aura l’équation

dont la résolution sera, à cause de

Cette expression est générale pour chacune des racines de l’équation proposée et on les aura toutes en faisant successivement jusqu’à inclusivement ; il serait inutile de faire puisqu’il en résulterait de nouveau les mêmes valeurs que lorsque

24. Nous remarquerons d’abord sur cette solution que toutes les racines de l’équation doivent être différentes entre elles, puisque dans la circonférence il n’y a pas deux arcs différents qui aient un même sinus et un même cosinus à la fois. De plus il est facile de voir que toutes les racines seront imaginaires, à l’exception de la dernière qui répond à et qui sera toujours égale à et de celle qui répondra à lorsque sera pair, laquelle sera égale à car pour que la partie imaginaire de l’expression de disparaisse, il faut que l’on aits

ce qui n’arrive que lorsque l’arc est égal à ou à de sorte qu’on aura ou ou et par conséquent ou ou dans le premier cas la partie réelle deviendra et dans le second elle deviendra

Maintenant, si l’on fait

on aura par les formules ci-dessus

de sorte que les différentes racines de seront toutes exprimées par les puissances de la quantité et qu’ainsi ces racines seront dont la dernière sera toujours égale à ce qui est évident par l’équation même laquelle doit donner et dont celle qui sera représentée par lorsque est pair, sera égale à comme on l’a vu plus haut.

Il est bon d’observer ici que si est un nombre premier, on pourra toujours représenter toutes les racines de par les puissances successives d’une quelconque de ces mêmes racines, la dernière seule exceptée ; car soit, par exemple, les racines seront si l’on prend à la place de la racine suivante on aura les trois racines mais, à cause de il est clair que et que de sorte que ces racines seront les mêmes qu’auparavant de même, si les racines seront et si l’on prend la racine au lieu de la racine on aura celles-ci lesquelles, à cause de deviennent que si l’on prend à la place de la racine on trouvera de même, en rabattant des exposants de qui surpassent le nombre autant de fois que l’on peut, on trouvera, dis-je, les racines enfin, prenant pour la racine on trouvera celles-ci de sorte qu’on aura toujours les mêmes racines, mais dans un ordre différent.

En général, soit une quelconque des racines étant plus petit que et étant un nombre premier ; prenant cette racine à la place de on aura celles-ci or, si l’on retranche des exposants lorsqu’ils surpassent le plus grand multiple de qu’ils contiennent, et qu’on dénote les restes par on aura les racines et je dis que les nombres dont aucun n’est plus grand que seront nécessairement tous différents entre eux ; car si deux quelconques comme et étaient égaux, comme ces nombres ne sont que les restes des nombres après en avoir retranché les plus grands multiples de il est clair qu’il faudrait que la différence de ces derniers fût divisible par ce qui ne se peut tant que est premier et Donc, puisque les nombres dont le nombre est sont tous différents entre eux et tous moindres que il est clair qu’ils ne peuvent être autre chose que les nombres par conséquent les racines seront les mêmes que les racines Il est facile de voir que la démonstration précédente n’en subsistera pas moins lorsque ne sera pas premier, pourvu que l’on prenne premier à mais si n’est pas premier à et que leur plus grande mesure soit on verra aisément que tous les nombres seront mesurés par de sorte que ces nombres ne pourront être que des multiples de moindres que

De là il est aisé de conclure, en général, que l’on peut représenter toutes les racines, de l’équation par les puissances 1re, 2e, 3e, …, ième d’une quelconque de ces racines comme pourvu que soit premier mais que si n’est pas premier à en sorte que leur plus grande mesure soit on n’aura de cette manière que les seules racines donc chacune se trouvera répétée autant de fois qu’il y a d’unités dans et il est facile de voir par les formules ci-dessus que ces dernières racines seront aussi celles de l’équation en supposant

Or, comme les racines de l’équation sont représentées par

et que il est clair qu’on pourra les représenter aussi, si l’on veut, par

puisqu’on aura

De plus, à cause que l’équation manque du second terme, il est clair qu’on aura toujours, en général,

et de même

Et lorsque est un nombre composé comme on aura en particulier

et de même

c’est-à-dire que les sommes des puissances tant positives que négatives de dont les exposants sont divisibles par ou par seront égales à zéro par conséquent aussi la somme des puissances dont les exposants ne seront point divisibles par sera nulle, comme aussi la somme de celles dont les exposants ne seront point divisibles par Ces différentes remarques pourront nous être utiles dans la suite.

25. Maintenant voici les valeurs de pour les équations depuis jusqu’à

Si l’on voulait avoir la valeur de our l’équation

il faudrait, comme on l’a dit plus haut, résoudre une équation du troisième degré. En effet, en faisant dans les formules du no 21, on trouvera cette transformée en

qui, étant du troisième degré, aura toujours une racine réelle ; et cette racine étant substituée dans l’équation

on en tirera ou

Quant aux équations

et on en pourra aussi exprimer la racine par de simples radicaux carrés ; mais l’équation

exigerait la résolution de l’équation du cinquième degré

laquelle étant supposée, on aura pour la même expression en que ci-dessus.


SECTION SECONDE.
de la résolution des équations du quatrième degré.

26. On sait que Louis Ferrari, contemporain et même disciple de Cardan, est le premier qui ait trouvé une règle générale pour la résolution des équations du quatrième degré. Sa méthode consiste à partager l’équation proposée en deux membres, et à ajouter à l’un et à l’autre une même quantité telle, qu’on puisse extraire séparément la racine carrée des deux membres de l’équation, en sorte qu’elle soit par là abaissée au second degré. Cette méthode, qu’on peut regarder comme la plus ingénieuse de toutes celles qui ont été inventées depuis pour le même objet, a été adoptée par tous les Analystes qui ont précédé Descartes ; mais cet illustre Géomètre a cru devoir lui en substituer une autre moins simple à la vérité et moins directe, mais à quelques égards plus conforme à la nature des équations : c’est celle que la plupart des Auteurs suivent aujourd’hui. Nous commencerons donc par examiner ces deux méthodes l’une après l’autre ; ensuite nous viendrons aux méthodes connues pour la résolution de ces sortes d’équations, parmi lesquelles on doit surtout distinguer celles de M. Tschirnaus et de MM. Euler et Bezout.

Je suppose d’abord avec Ferrari que l’équation du quatrième degré qu’il s’agit de résoudre soit privée de son second terme, ce qu’on sait d’ailleurs être toujours possible, en sorte que cette équation soit représentée ainsi

Qu’on fasse passer dans le second membre tous les termes excepté le premier, et qu’ensuite on ajoute à l’un et l’autre membre la quantité étant une indéterminée, on aura

équation où le premier membre est évidemment le carré de de sorte qu’il ne s’agira plus que de rendre aussi carré le second ; or pour cela il faut, comme on sait, que le carré de la moitié du coefficient du second terme soit égal au produit des coefficients des deux autres, ce qui donne cette condition

laquelle produit l’équation cubique

Supposant donc la résolution de cette équation en sorte qu’on connaisse une valeur de , le second membre de la proposée deviendra

donc, tirant la racine carrée des deux membres, on aura

équation où l’inconnue ne monte qu’au second degré, et qui n’a par conséquent plus de difficulté. Faisons, pour plus de simplicité,

on aura

d’où l’on tire sur-le-champ

ou bien, en remettant la valeur de

et cette expression donnera à la fois les quatre racines de la proposée en prenant successivement les deux radicaux carrés en plus et en moins.

27. Nous remarquerons d’abord que cette méthode ne demande pas absolument l’évanouissementdu second terme dans l’équation proposée, et qu’elle peut tout aussi bien s’appliquer aux équations complètes telles que

en supposant que le premier membre ne soit pas simplement le carré

de mais celui de en effet, en faisant passer comme ci-devant les trois derniers termes dans le second membre et ajoutant de part et d’autre la quantité

on aura l’équation

On fera donc, pour rendre aussi le second membre carré,

d’où l’on tire l’équation cubique

La valeur de étant déterminée par cette équation, que nous appellerons dorénavant la réduite, si l’on fait, pour plus de simplicité,

on aura

et, tirant la racine carrée des deux membres,

ou bien

d’où enfin

et, remettant la valeur de

expression qui donnera pareillement les quatre racines de la proposée, en prenant successivement chacun des deux radicaux carrés qui y entrent en plus et en moins.

28. Puisque la réduite en est du troisième degré, elle aura nécessairement trois racines, dont chacune pourra être également substituée dans l’expression de de sorte qu’à cause de l’ambiguïté des deux signes radicaux que cette expression contient, il en résultera douze valeurs de d’où il est aisé de conclure que la résolution précédente est essentiellement celle d’une équation du douzième degré.

Pour trouver cette équation, il faudra éliminer de l’expression de et en faire disparaître ensuite tous les radicaux, ou bien on pourra remonter d’abord à l’équation rationnelle

et il n’y aura plus qu’à en éliminer après y avoir substitué pour sa valeur

Supposons pour plus de généralité que la valeur de au lieu d’être simplement soit

il est évident que le coefficient ne peut aucunement changer le degré auquel doit monter l’équation en après l’élimination de on aura de

cette manière l’équation

ou bien, à cause de

en vertu de l’équation en

c’est-à-dire

Soit, pour abréger,

et, faisant l’équation précédente deviendra celle-ci

d’où il ne s’agira plus que d’éliminer par le moyen de l’équation

Nommons les trois racines de cette dernière équation, et l’équation en résultant de l’élimination de l’inconnue pourra être représentée (13) par le produit des trois quantités

ce produit étant égalé à zéro. Faisons, pour abréger,

et, supposant

on trouvera, pour le produit dont il s’agit,

Mais faisant encore, pour abréger,

en sorte que l’équation en soit représentée par

on aura, comme on sait, par la nature des équations,

et de là

Donc l’équation cherchée, résultant de l’élimination de dans ces deux-ci

sera

Si l’on remet maintenant dans cette équation les valeurs de et de on aura une équation en qui montera au douzième degré, puisque contient toutes les puissances de jusqu’à la quatrième inclusivement, que contient simplement et que les autres quantités ne renferment point

Ainsi la résolution de cette équation du douzième degré sera comme ci-dessus

en supposant

et il n’y aura point ici de racines superflues, puisque les trois valeurs de , combinées avec les signes ambigus des deux radicaux, donneront précisément les douze racines de l’équation dont il s’agit.

Faisons à présent pour avoir le cas du no 27 ; donc et par conséquent

ainsi l’équation dont il s’agit se réduira à c’est-à-dire à celle-ci

qui n’est autre chose, comme on voit, que l’équation proposée élevée au cube, de sorte qu’elle doit avoir les mêmes racines que cette dernière, mais chacune triple.

On voit par là bien clairement la raison pourquoi l’expression trouvée pour la racine d’une équation du quatrième degré renferme réellement douze racines, qui se réduisent cependant à quatre, puisque chacune d’elles en a deux autres qui lui sont égales. De plus la démonstration précédente fait voir que les racines égales ne viennent que de l’élimination de , et nullement de l’ambiguïté des radicaux, puisque c’est l’élimination de qui fait monter dans l’équation résultante la quantité au cube ; d’où l’on peut conclure d’abord que, quelque valeur de que l’on emploie dans l’expression de on aura toujours les mêmes quatre racines.

29. Mais, pour éclaircir encore davantage cette matière, on remarquera que, dès que la réduite en y a lieu, ce qui peut arriver de trois manières différentes à cause qu’elle a trois racines, on peut donner à la proposée la forme

comme on l’a fait au no 27 ; par où l’on voit qu’elle n’est autre chose que le produit de ces deux-ci

c’est-à-dire

de sorte que leur résolution donnera toujours les mêmes quatre racines de la proposée, quelle que soit la racine qu’on substituera à

Nommons maintenant les quatre racines de la proposée ; et il faudra que deux de ces racines soient renfermées dans l’une des deux équations précédentes, et que les deux autres le soient dans l’autre ; de sorte qu’on aura, par la nature des équations,

d’où l’on tire

Cette valeur de nous fait voir d’abord, pourquoi la réduite en y est du troisième degré. En effet il est visible que la quantité doit avoir autant de valeurs différentes qu’on en pourra former par toutes les permutations possibles des racines dans l’expression on ne peut avoir de cette manière que les trois quantités suivantes

de sorte que l’équation dont y sera la racine, devra donner chacune de ces trois quantités et, par conséquent, devra être du troisième degré.

30. On peut donc déduire de cette remarque une manière directe de parvenir à la réduite du quatrième degré, et par son moyen à la résolution générale de ce degré. Car, puisque la combinaison des quatre racines est telle qu’elle n’admet que trois variations, savoir

il s’ensuit d’abord que si l’on fait

on aura une équation en du troisième degré, dont les racines seront

qui sera par conséquent de cette forme

où l’on aura, par la nature des équations,

c’est-à-dire

Or il est facile de voir que ces valeurs de doivent être données par les coefficients de la proposée, et cela sans aucune extraction de racines, puisqu’elles demeurent les mêmes, quelque permutation qu’on fasse entre les racines de cette équation ; d’où il suit que chacune d’elles ne peut avoir qu’une seule et même valeur. En effet, ayant

on aura d’abord

ensuite, pour trouver on observera que

et de même

et ainsi des autres, de sorte qu’on aura

c’est-à-dire

Enfin, pour avoir on remarquera que

en sorte que la partie deviendra et, pour avoir l’autre partie, on fera le carré de et l’on en déduira

de sorte que l’on aura

Moyennant quoi notre réduite sera

qui est la même que celle en du no 27, en supposant

31. Voyons maintenant comment, en connaissant une des valeurs de on pourra trouver les quatre racines Puisque

il est clair que les deux quantités et seront les racines de cette équation du second degré

de sorte qu’en nommant et ces deux racines on connaîtra les deux produits

de plus on a

et comme

on aura

donc, puisque

il est clair que et seront les racines de cette équation du second degré

et que et seront celles de l’équation

On voit par là qu’il suffit de connaître une des racines de la réduite en pour avoir les quatre racines de la proposée, et que chacune des racines de cette réduite donnera toujours les mêmes quatre racines car si, au lieu de prendre on eût pris ou il n’y eût eu d’autre changement dans nos formules sinon que eût été changé en ou en et vice versâ.

32. On pourrait résoudre encore l’équation du quatrième degré d’une manière plus simple à l’aide de la réduite dont la racine serait (29)

en faisant, pour plus de simplicité, Pour savoir d’abord de quel degré et de quelle forme doit être cette équation, il n’y a qu’à faire dans la quantité toutes les permutations possibles entre les lettres et il en résultera les six suivantes

qui seront donc les racines de la réduite en de sorte que cette réduite sera nécessairement du sixième degré ; mais, comme les six quantités précédentes sont deux à deux égales et de signes contraires, il s’ensuit que la réduite ne pourra contenir que des puissances paires de l’inconnue en sorte qu’elle sera résoluble à la manière des équations du troisième degré.

Donc, si l’on fait on aura une réduite en du troisième degré et dont les trois racines seront

Ainsi l’on pourra trouver cette équation en cherchant la valeur de ses coefficients, comme nous l’avons fait plus haut à l’égard de la réduite en (30) ; mais, sans entreprendre un nouveau calcul pour cet objet, il suffira de remarquer que le carré de est

mais on a

donc, puisque

on aura

c’est-à-dire

de sorte que, pour avoir la réduite cherchée en il n’y aura qu’à substituer, dans celle en du no 30, à la place de et l’on aura celle-ci

Maintenant, si l’on suppose que et soient les trois racines de cette équation, on aura (hypothèse)

d’où, en tirant la racine carrée, on aura

combinant ces trois équations avec l’équation

on en tirera les valeurs de chacune des quatre racines on aura donc

De cette manière on aura donc les quatre racines de la proposée, sans être obligé de résoudre aucune autre équation que la réduite en Mais il se présente ici une difficulté, c’est que, comme chaque radical peut être pris également en plus et en moins, les expressions précédentes renfermeront encore ces quatre quantités-ci

qui ne sont pas les valeurs des racines mais celles de leurs compléments à la somme

Pour résoudre cette difficulté, je remarque qu’il n’est pas nécessaire de savoir précisément quel signe on doit donner à la valeur de hacun des radicaux dont il s’agit, mais qu’il suffit de savoir si ces valeurs doivent être prises, l’une positive et les deux autres positives ou négatives, ou bien l’une négative et les deux autres positives ou négatives ; car il est facile de voir que les expressions des racines trouvées ci-dessus, donneront toujours les mêmes quatre racines en changeant à la fois les signes de deux quelconques des radicaux et conservant celui du troisième. De sorte que tout se réduit à connaître le signe que doit avoir le produit des trois valeurs de Or, par l’équation en on aura

d’où l’on tire
[4].

Donc, si l’on dénote par les valeurs des radicaux prises positivement, en sorte que l’on ait

il faudra, lorsque est une quantité positive, prendre, ou

ou

ou

les signes ambigus devant être les mêmes pour les quantités ou ou et l’on aura dans ce cas pour les quatre racines de la proposée les valeurs suivantes

Au contraire, si est une quantité négative, il faudra alors prendre, ou

ou

ou

ce qui donnera, pour les quatre racines cherchées, ces valeurs

33. La méthode de Ferrari, que nous venons d’examiner, nous a conduits à décomposer l’équation du quatrième degré

en ces deux-ci du second degré (29)

de la résolution desquelles on peut tirer les quatre racines de la proposée, comme on l’a vu plus haut ; on pourrait aussi obtenir cette décomposition d’une manière plus simple et plus directe, en supposant d’abord que l’équation proposée soit le produit de deux équations du second degré telles que

et déterminant ensuite les coefficient par la comparaison des termes homologues ; c’est ce qu’a fait Descartes, et ce qui a donné naissance à la méthode des indéterminéesdont il est regardé comme l’auteur. Multipliant donc les deux équations précédentes l’une par l’autre, on aura celle-ci

laquelle étant comparée terme à terme avec la proposée

donnera les quatre équations

lesquelles serviront à déterminer les quatre inconnue

34. Supposons d’abord, avec Descartes, que le second terme de la proposée soit évanoui, c’est-à-dire que l’on ait on aura donc et par conséquent de sorte que dans ce cas la proposée ne pourra venir que de la multiplication de deux équations telles que

et l’on aura alors pour la détermination des trois coefficients les équations

les deux premières donnent

et, ces valeurs étant substituées dans la dernière, on aura

ou bien, en multipliant par et ordonnant les termes par rapport à

équation du sixième degré, mais qui est résoluble à la manière de celles du troisième, à cause qu’elle ne renferme que des puissances paires de l’inconnue.

Telle est la méthode de Descartes pour les équations du quatrième degré. Il est vrai que cet Auteur suppose d’abord que les équations composantes soient représentées par

ainsi qu’il résulte de la substitution des valeurs de et de trouvées ci-dessus mais il est naturel de croire qu’il n’a trouvé ces formules que par une analyse semblable à celle que nous venons de donner, comme on peut le voir dans le Commentaire de Schooten et dans la Lettre de Hudde sur la réduction des équations.

35. Il est visible que la Solution précédente revient au même que celle des nos et suivants, et que les inconnues et expriment la même quantité dans les deux Solutions lorsque Ainsi les principales remarques qu’on a faites sur la Solution de Ferrari pourront s’appliquer aussi à celle de Descartes, sans qu’il soit nécessaire d’entrer là-dessus dans un nouveau détail ; mais il est bon, de plus, d’examiner en particulier le principe de cette dernière Solution et de chercher à priori les conséquences qui peuvent en résulter.

Ce principe consiste, comme nous venons de le voir, à supposer que l’équation proposée soit divisible par une équation du second degré telle que

c’est-à-dire qu’elle ait deux racines communes avec cette dernière. Ainsi l’on pourra trouver les conditions nécessaires pour cela par la méthode du no  12. En effet, en divisant le quinôme

par le trinôme

on trouvera le quotient

et le reste

de sorte que, pour que la division puisse se faire exactement, il faudra que le reste soit nul indépendamment de ce qui donnera ces deux équations

au moyen desquelles on pourra déterminer et La première de ces équations donnera d’abord

et, cette valeur étant substituée dans la seconde, on aura

ou bien

qui, étant ordonnée par rapport à sera en changeant les signes

la même que celle qu’on tirerait des quatre équations de condition du no 33.

Cette équation est, comme on voit, du sixième degré, ayant tous ses termes ; mais en faisant tous les termes qui renferment des puissances impaires de l’inconnue s’évanouissent, de sorte que l’équation devient résoluble à la manière de celles du troisième degré ; c’est le cas que nous avons déjà considéré dans le no  34. Mais il n’est pas même nécessaire de supposer pour anéantir tous les termes où l’inconnue se trouve élevée à des puissances impaires ; il suffit pour cela de faire disparaître le second terme en supposant, suivant la méthode connue,

et l’on verra que tous les autres termes s’évanouiront en même temps, de sorte qu’on aura une équation en qui ne renfermera que des puissances de laquelle sera

équation qui est la même que la réduite en du no  32, en y faisant de sorte que, comme on a supposé dans le même numéro et on aura d’où l’on voit que la quantité dans les formules précédentes sera la même que la quantité des nos 27 et suivants, et cela sans supposer ce qui sert à montrer d’autant mieux la liaison des solutions que nous venons d’examiner.

36. Voyons maintenant la raison pourquoi la méthode de Descartes conduit à une réduite du sixième degré telle que, en y faisant évanouir le second terme, tous ceux qui renferment des puissances impaires de l’inconnue s’évanouissent aussi, comme nous venons de le trouver ; pour cela on considérera que, puisque l’équation du second degré doit être un diviseur exact de la proposée dont les racines sont il faut nécessairement que la même équation renferme deux quelconques de ces quatre racines. Ainsi l’on aura

ou

ou

ou

ou

ou enfin

d’où l’on voit que l’équation en doit être du sixième degré aussi bien que l’équation en c’est-à-dire du degré dont l’exposant sera égal au nombre des combinaisons de quatre choses prises deux à deux, nombre qu’on sait être On pourrait donc par ce moyen trouver directement tant l’équation en que celle en en cherchant la valeur de hacun de leurs coefficients, comme nous l’avons déjà pratiqué dans plusieurs occasions. Pour cela on représenterait d’abord l’équation en par la forme générale

et comme les racines de cette équation doivent être

on aurait

et ainsi de suite.

Maintenant, si l’on voulait faire évanouir le second terme de cette équation en il faudrait, suivant la règle connue, augmenter toutes les racines de c’est-à-dire mettre, à la place de ce qui donnerait une transformée en

puisque

de sorte que les racines de cette transformée seraient

c’est-à-dire

où l’on voit que chaque racine a sa compagne négative ; en sorte que, si l’on en prend les carrés et qu’on regarde comme l’inconnue, elle ne pourra avoir que trois valeurs différentes, savoir

d’où il s’ensuit que l’équation en étant ordonnée par rapport à montera au troisième degré, c’est-à-dire qu’elle sera du sixième, ayant toutes les puissances de l’inconnue paires, comme nous l’avons trouvé plus haut par une autre voie c’est à cette circonstance heureuse qu’on doit la résolution des équations du quatrième degré. On voit aussi par là la raison pourquoi, dans le numéro précédent, l’équation en est la même que celle en car il est clair (32) que les valeurs de sont les mêmes que celles que nous venons de trouver pour

37. On peut encore remarquer que, puisque l’on a

et que les valeurs de sont

on aura les mêmes valeurs pour la quantité d’où il s’ensuit que l’équation en doit être telle, qu’elle demeure, la même en y substituant à la place de donc, si l’on fait ce qui donne il faudra que la transformée en soit telle, qu’elle demeure la même en y changent en par conséquent elle ne devra renfermer que des puissances paires de

Or, si l’on substitue cette valeur de dans l’expression de du no 35, on a

et les deux facteurs

dans lesquels a été décomposée l’équation

deviendront

équations qui sont les mêmes que celles du no 29 en faisant et en substituant dans ces dernières à la place de sa valeur en laquelle est (28)

Les méthodes que nous venons d’analyser renferment, si je ne me trompe, toutes les méthodes connues pour la résolution des équations du quatrième degré ; il en faut seulement excepter celles de MM. Tschirnaus, Euler et Bezout, lesquelles méritent un examen particulier ; c’est l’objet qu’il nous reste à remplir dans cette Section.

38. Et d’abord il est clair que pour pouvoir résoudre l’équation du quatrième degré, suivant la méthode de M. Tschirnaus, il n’est pas nécessaire de faire disparaître tous les termes intermédiaires, comme dans celles du troisième, mais qu’il suffit d’y faire disparaître le second et le quatrième terme où l’inconnue se trouve élevée à des puissances impaires car alors on aura une équation résoluble à la manière de celles du second degré. Pour cela on prendra donc, comme on a fait pour le troisième degré (10), l’équation subsidiaire

qui contient deux indéterminées et et éliminant par son moyen l’inconnue de l’équation proposée

on aura (14) une transformée en du quatrième degré, dans laquelle le coefficient de sera une fonction de et de la première dimension, celui de une fonction de et de la seconde dimension, celui de

une fonction de et de la troisième dimension, etc. De sorte que, pour faire disparaître à la fois le second et le quatrième terme, il faudra déterminer les quantités et en sorte qu’elles satisfassent à deux équations, l’une du premier degré et l’autre du troisième, ce qui donnera une réduite en a ou en du troisième degré ; d’où l’on peut conclure que la méthode de Tschirnaus doit aussi réussir pour le quatrième degré c’est ce qu’on va voir maintenant par le calcul.

39. Comme nous avons jusqu’ici fait usage des lettres pour représenter les quatre racines de l’équation proposée, pour éviter toute confusion nous prendrons d’autres lettres pour les coefficients de l’équation subsidiaire, et nous représenterons cette équation ainsi

Or, puisqu’il faut, par la nature de la méthode dont il s’agit (11), que cette équation ait une racine commune avec la proposée, il n’y aura qu’à faire en sorte qu’elles aient un diviseur commun où se trouve à la première dimension. On divisera donc d’abord le quinôme

par le trinôme

et faisant pour un moment on trouvera, comme ci-dessus (35), le reste

lequel, ne contenant que la première dimension de devra par conséquent être le diviseur commun des deux polynômes ; ainsi il faudra que ce reste divise exactement le diviseur précédent c’est-à-dire que la valeur de tirée de l’équation

satisfasse aussi à l’équation

On aura donc

et substituant cette valeur dans on aura

où il ne s’agira plus que de remettre à la place de et de développer les termes en les ordonnant par rapport à

Soient, pour abréger,

et l’équation précédente deviendra

laquelle étant d’abord ordonnée par rapport à devient

et en remettant les valeurs de

Faisons maintenant

pour avoir l’équation

et remettant maintenant à la place de on aura, après avoir ordonné les termes par rapport à cette transformée

dans laquelle on est maître de faire évanouir deux termes à volonté en déterminant convenablement les quantités et

Faisons donc évanouir, comme nous nous le sommes proposé, le second et le quatrième terme ; on aura pour cet effet les équations

dont la première donne

ce qui étant substitué dans la seconde, on aura, en ôtant les fractions,

équation qui, en remettant pour leurs valeurs en montera au troisième degré, et deviendra, après avoir ordonné les termes,

Ayant donc déterminé par cette équation, l’équation en deviendra, à cause de

ou bien, en mettant à la place de sa valeur

laquelle est, comme on voit, résoluble à la manière de celles du second degré. Ainsi l’on connaîtra et après quoi on aura sur-le-champ

et les quatre valeurs de tirées de l’équation précédente donneront toujours les quatre mêmes racines de la proposée, quelle que soit la racine qu’on emploie ; ce qu’on pourrait démontrer, s’il en était besoin, d’une manière analogue à celle du no 28.

40. Si l’on voulait savoir à priori pourquoi la réduite en que nous venons de trouver ci-dessus est nécessairement du troisième degré, il faudrait chercher quelle fonction des racines doit être la valeur de Pour cela on reprendra l’équation subsidiaire

et l’on y substituera successivement à la place de et à la place de les quatre racines de l’équation en ci-dessus ; mais il n’est pas nécessaire de connaître la valeur de ces dernières racines, il suffit de considérer que, comme l’équation ne contient aucune puissance impaire de , ses racines doivent être deux à deux égales et de signes contraires ; en sorte qu’on pourra les représenter par Faisant donc ces substitutions dans l’équation on aura ces quatre-ci

d’où, chassant d’abord et on tire

et chassant ensuite on aura

Or, pour avoir toutes les valeurs de il n’y aura qu’à faire entre les quatre racines toutes les permutations possibles, et l’on n’obtiendra que ces trois valeurs différentes

qui seront les racines de la réduite en laquelle ne pourra être par conséquent que du troisième degré. On pourrait même remonter de là à l’équation en comme nous l’avons déjà pratiqué plusieurs fois ; et l’on trouverait la même équation qu’on a vue ci-dessus.

Au reste, pour pouvoir mieux comparer la réduite en dont nous parlons, avec celles que nous avons trouvées plus haut d’après les solutions de Ferrari et de Descartes, on remarquera que

or

et

mais on trouve par le calcul

donc on aura

par conséquent

Or nous avons trouvé (32) que la réduite en a pour racines les différentes valeurs de donc on aura, en général,

d’où l’on voit que la réduite en n’est autre chose qu’une transformation de la réduite en du numéro cité.

41. Après avoir vu comment la méthode de Tschirnaus peut s’appliquer aux équations du quatrième degré en faisant évanouir deux termes de la proposée, il ne sera pas inutile de voir encore ce qui en résulterait si l’on voulait faire évanouir à la fois tous les termes intermédiaires, comme on a fait pour le troisième degré.

On aurait donc trois termes à faire disparaître, savoir le second, le troisième et le quatrième, ce qui exigerait une équation subsidiaire qui contînt trois indéterminées, et qui fût de cette forme

On éliminerait donc par le moyen de cette équation et de la proposée

et l’on aurait une transformée en du quatrième degré, telle que

dans laquelle il faudrait supposer pour avoir l’équation à deux termes

Or, de ce que nous avons démontré, en général, dans le no 14, il s’ensuit que sera une fonction d’une dimension des trois indéterminées que sera une fonction de deux dimensions, et une fonction de

trois dimensions des mêmes quantités ; de sorte que l’on aura, pour la détermination des inconnue ces trois équations

dont la première sera du premier degré, la seconde du second, et la troisième du troisième degré ; d’où il est facile de voir qu’on aura par l’élimination une équation finale e n ou ou qui sera du degré c’est-à-dire du sixième. Il paraît donc par là que la méthode dont il s’agit ne saurait réussir, puisqu’elle conduit à une réduite d’un degré supérieur à la proposée ; mais il pourrait se faire que cette réduite du sixième degré pût s’abaisser à un degré inférieur ; c’est ce qu’il est bon d’examiner à priori avant d’entreprendre le calcul que nous venons d’indiquer.

42. Pour cet effet il faut chercher quelle fonction des racines devra être l’indéterminée par exemple, pour que la transformée y se réduise à la forme

Or cette équation en donne ces quatre racines (25)

ainsi, en faisant pour plus de simplicité il n’y aura qu’à mettre successivement dans l’équation subsidiaire

à la place de et à la place de et l’on aura ces quatre-ci

d’où l’on pourra tirer les valeurs de et

Si l’on ajoute ensemble les deux premières et les deux dernières, on aura ces deux-ci

qui, étant retranchées l’une de l’autre, donnent

où il n’y a plus que deux inconnues et

Qu’on retranche maintenantles deux premièresl’une de l’autre, comme aussi les deux dernières, on aura ces deux-ci

dont la seconde étant multipliée par et ensuite ajoutée à la première, on aura

équation qui, étant combinée avec celle qu’on a trouvée ci-dessus, servira à déterminer et

Chassant on aura une équation en qui donnera

d’où l’on pourra déduire facilement toutes les différentes valeurs dont la quantité est susceptible, en faisant toutes les permutations possibles entre les quatre racines De cette manière, si l’on fait, pour abréger,

on trouvera les six valeurs suivantes

qui seront donc les racines de l’équation en d’où l’on voit que cette équation montera en effet au sixième degré, comme nous l’avons déjà conclu par une autre voie.

43. Il s’agit maintenant de voir si cette équation du sixième degré peut s’abaisser à un degré inférieur ; or c’est ce qui doit avoir lieu en effet, comme je vais le prouver, d’après la forme que je viens de trouver pour les six racines de l’équation en question. Car supposons que les deux racines

soient représentées par l’équation du second degré

on aura donc par la nature des équations

c’est-à-dire

Or je dis que les quantités et ne peuvent dépendre que d’équations du troisième degré telles que

les coefficients étant des fonctions rationnelles des coefficients de la proposée. De sorte que, nommant les trois racines de la première équation, et les racines correspondantes de la seconde, on aura ces trois équations en

dans lesquelles pourra se décomposer l’équation du sixième degré en dont nous venons de parler.

Pour démontrer cette proposition, il n’y a qu’à chercher de combien de valeurs différentes sont susceptibles les quantités et c’est-à-dire les fonctions

des racines de la proposée, en supposant que l’on fasse entre ces racines toutes les permutations possibles ; car il est clair que les valeurs qui en résulteront seront les racines des équations en et en Pour cela je remarque d’abord que le nombre total des permutations des quatre quantités doit être, suivant les règles-connues, de sorte que, généralement parlant, les équations en et en devraient monter au vingt-quatrième degré. Mais il arrive ici que parmi les permutations dont il s’agit il y en a plusieurs qui redonnent les mêmes valeurs de et et qui, par conséquent, doivent être rejetées.

En effet :

1o Lorsqu’on échange en il est visible que les quantités et demeurent les mêmes, et que les quantités et changent simplement de signes, de sorte que les quantités et doivent demeurer les mêmes ; d’où il est facile de conclure que parmi les vingt-quatre valeurs de et de répondant aux vingt-quatre permutations des lettres il doit y en avoir douze égales à douze autres, ce qui réduit déjà le nombre des valeurs utiles de et à la moitié.

2o Lorsqu’on échange en les quantités et demeurent les mêmes, et les quantités et changent simplement de signe, ce qui ne produit aucun changement dans les valeurs de et donc, comme ces permutations sont indépendantes des précédentes, il s’ensuit, par une raison semblable, que les douze valeurs de et se réduiront à six.

3o Enfin, si l’on échange en et en à la fois, on verra aisément que les quantités et se changeront l’une dans l’autre en changeant de signe, et qu’il en sera de même des quantités et mais il est clair que ces changements ne feront point varier les quantités et Ainsi, comme ces nouvelles permutations sont aussi indépendantes des précédentes, on en conclura que les six valeurs de et se réduiront à trois, en sorte que, parmi les vingt-quatre valeurs de et il ne s’en trouvera effectivement que trois différentes entre elles, dont chacune sera répétée huit fois.

Il y a encore, à la vérité, un échange qui ne produit aucune variation dans les quantités et c’est celui de en et en à la fois ; maisil ne doit pas entrer en ligne de compte, parce qu’il est déjà renfermé dans les précédents.

De là on peut conclure que les équations en et du vingt-quatrième degré ne pourront renfermer que trois racines différentes, dont chacune en aura sept autres d’égales, de sorte que ces équations ne seront autre chose que des équations du troisième degré élevées à la huitième puissance.

44. Nous venons donc de voir à priori que les valeurs différentes de ne peuvent être qu’au nombre de trois, ainsi que celles de or il est facile de trouver que ces valeurs seront, pour la quantité

et pour la quantité

de sorte qu’on aura (43)

Effectivement, si l’on met ces valeurs dans les coefficients des équations en et en lesquels doivent être, comme on sait, exprimés ainsi

on aura des fonctions de qui demeureront les mêmes, quelque permutation qu’on fasse entre les quantités et qui pourront par conséquent s’exprimer par des fonctions rationnelles des coefficients de la proposée dont les quantités sont les racines. De sorte qu’on pourra par ce moyen trouver directement les valeurs des coefficients dont il s’agit, comme nous l’avons déjà pratiqué plusieurs fois dans le cours de ces recherches.

Au reste, dès qu’on connaîtra les trois racines de l’équation en on pourra par leur moyen trouver les racines correspondantes de l’équation en sans être obligé de résoudre aucune équation. Car si l’on prend ces trois expressions

et qu’on y mette à la place de et leurs valeurs ci-dessus en on verra aisément que les fonctions résultant de seront telles, qu’elles ne changeront point de forme, quelque permutation qu’on y fasse entre les quantités de sorte qu’elles seront toujours exprimables par des fonctions rationnelles des coefficients de l’équation proposée. Ainsi l’on pourra trouver les valeurs des expressions dont il s’agit, moyennant quoi on aura trois équations par lesquelles on déterminera aisément les trois inconnues (Voyez la Section quatrième.)

45. Nous étant donc assurés à priori que la réduite du sixième degré, à laquelle doit conduire la méthode en question, pourra toujours s’abaisser au troisième, voyons maintenant le procédé du calcul que cette méthode exige. On reprendra donc l’équation subsidiaire (40)

et l’on cherchera par la méthode ordinaire (11) les conditions nécessaires pour que cette équation ait une racine commune avec la proposée

On divisera donc d’abord le polynôme

par le polynôme

en faisant pour plus de simplicité et, abstraction faite du quotient, on aura ce reste

en supposant

On divisera maintenant le quatrinôme par le trinôme

et l’on aura ce nouveau reste

qui, ne renfermant que la première puissance de devra par conséquent être le diviseur commun cherché. Faisant donc ce diviseur égal à zéro, on en tirera

valeur qui, étant substituée dans l’équation

donnera les conditions cherchées.

Faisons maintenant

et, à cause de on aura

donc, substituant ces valeurs dans l’expression de et supposant de plus

on aura

et l’équation de condition sera

laquelle, étant développée et ordonnée par rapport aux puissances de , se trouvera, après les réductions, de la forme

comme nous l’avons déjà montré plus haut.

Dans cette équation en les coefficients seront des fonctions rationnelles et entières des trois indéterminées et les dimensions de ces indéterminées ne passeront pas le premier degré dans le coefficient le second degré dans le coefficient et ainsi de suite, conformément à ce qu’on a déjà prouvé à priori. Ainsi, pour réduire l’équation précédente à deux termes, on fera

équations d’où l’on tirera d’abord les valeurs de et en et ensuite une équation finale en qui sera du sixième degré, mais qui sera réductible au troisième, comme on l’a démontré ci-dessus ; car, en divisant cette équation par une équation du second degré telle que

on trouvera, pour que la division puisse se faire exactement, deux équations de condition entre et à l’aide desquelles on pourra d’abord déterminer en et ensuite on aura une équation finale en qui ne sera que du troisième degré. Résolvant donc cette équation du troisième degré, on connaîtra et de là après quoi on aura par la résolution de l’équation ci-dessus du second degré, et de là et par des équations linéaires. Ainsi l’on connaîtra la valeur de tous les coefficients

Or l’équation en étant réduite à celle-ci

par l’évanouissement des termes intermédiaires, donnera les quatre valeurs de

et lesquelles, étant substituées successivement dans l’expression de ci-

dessus, donneront les quatre racines de la proposée. Au reste, comme ce calcul conduit à des formules assez compliquées, nous nous contentons de l’indiquer, et nous allons plutôt chercher des moyens de le simplifier.

46. Puisque la racine est de la forme

la quantité devant être déterminée par l’équation deux termes

il est facile de voir qu’on peut réduire l’expression de à cette forme plus simple

étant des coefficients dépendants de Car si l’on multiplie d’abord le haut et le bas de la fraction

par le dénominateur de la nouvelle fraction deviendra

et, en mettant à la place de

donc, multipliant encore tant le numérateur que le dénominateur par le nouveau dénominateur sera

ou bien, à cause de

où il n’y aura plus de Ainsi l’on pourra faire évanouir du dénominateur de l’expression de en le multipliant, aussi bien que le numérateur, par

or par ce moyen le numérateur deviendra un polynôme où montera au sixième degré ; donc, en y substituant à la place de à la place de et à celle de il ne s’y trouvera plus que les puissances et en sorte que l’expression de sera de la forme

Maintenant, comme la substitution des valeurs de tirées de l’équation doit donner les quatre racines de la proposée

on pourra regarder cette équation comme résultant de l’élimination de dans ces deux-ci

et la comparaison des termes homologues donnera quatre équations par lesquelles on pourra déterminer quatre quelconques des cinq coefficients et le cinquième pouvant toujours être pris à volonté.

C’est la méthode que MM. Euler et Bezout ont proposée pour la résolution des équations du quatrième degré dans les Mémoires cités ci-dessus (18).

M. Euler fait et il trouve par l’élimination des trois autres indéterminées une réduite en du troisième degré. M. Bezout, au contraire, fait d’abord et il trouve une réduite en du sixième degré résoluble à la manière des équations du troisième, parce qu’elle ne contient aucune puissance impaire de l’inconnue. M. Bezout fait voir en même temps que, si au lieu de chercher on cherchait ou on tomberait dans une réduite du vingt-quatrième degré, avec des exposants multiples de et par conséquent résoluble à la manière des équations du sixième degré. Il fait voir de plus que si l’on cherche une réduite dont soit la racine, elle ne sera que du troisième degré ; et par là il démontre que la réduite en ou en ne renfermera que les difficultés du troisième degré, puisqu’elle pourra, à l’aide de l’équation en se décomposer en trois équations du huitième degré avec des exposants multiples de lesquelles seront par conséquent résolubles à la manière de celles du second.

Nous nous contentons d’indiquer ici ces résultats, puisque le lecteur peut aisément les trouver de lui-même s’il n’est pas à portée de consulter les Mémoires cités ; mais nous allons chercher à priori la raison de ces résultats, comme nous l’avons pratiqué jusqu’ici.

47. Nommons les quatre valeurs de c’est-à-dire les racines de la proposée, et les quatre valeurs de tirées de l’équation étant on aura, par la substitution successive de ces valeurs dans l’équation

ces quatre-ci

Si l’on ajoute d’abord ensemble ces quatre équations on aura

d’où

Ensuite, si l’on fait deux sommes à part des deux premières et des deux dernières, on aura

d’où l’on tire

Donc, faisant avec M. Euler on aura

Et il est facile de conclure de cette expression de que l’équation en sera effectivement du troisième degré, comme M. Euler l’a trouvé, car elle ne sera autre chose que la réduite en trouvée plus haut (32), dans laquelle on mettrait à la place de puisqu’on a fait

désignant dans ce numéro-là les quantités que nous dénotons maintenant par c’est-à-dire les quatre racines de la proposée.

Mais si M. Euler, au lieu de supposer avait supposé sa réduite en n’aurait plus été du troisième degré, mais elle serait montée au sixième.

Car, si des quatre équations ci-dessus on prend la différence des deux premières et la différence des deux dernières, on a ces deux-ci

d’où l’on tire

De sorte qu’en faisant et prenant les quatrièmes puissances on aura

quantité qui doit dépendre d’une équation du sixième degré, comme on le verra dans un moment.

48. Si l’on fait avec M. Bezout on aura par les formules précédentes

d’où l’on peut conclure d’abord que la réduite en sera du sixième degré avec tous les exposants pairs, ainsi que cet Auteur l’a trouvé ; car il est évident que la valeur de dans l’hypothèse de M. Euler, est la même que celle de dans l’hypothèse présente, de sorte qu’en mettant à la place de dans la réduite de M. Euler on aura la réduite de M. Bezout en laquelle sera par conséquent du sixième degré, résoluble à la manière des équations du troisième. Au reste, cette réduite en sera la même que celle en du no 29, en y substituant à la place de

Voyons maintenant quelle devra être la forme des réduites en et en en faisant toujours avec M. Bezout On aura dans cette hypothèse, par les formules du numéro précédent,

d’où l’on tirera toutes les valeurs de et de en faisant toutes les permutations possibles entre les quatre racines et l’on pourra juger, par le nombre et la forme de ces valeurs, du degré et de la nature des équations par lesquelles les quantités et doivent être déterminées. Donc

1o L’équation en sera la même que l’équation en puisque la valeur de résulte de celle de en échangeant entre elles les deux racines de sorte que les valeurs de et de seront les racines d’une même équation ;

2o Cette équation sera en général du degré c’est-à-dire du vingt-quatrième, puisqu’il y a autant de permutations possibles entre les quatre quantités

3o Cette équation du vingt-quatrième degré aura tous les exposants multiples de car il est facile de voir que, étant une de ses racines, et en seront aussi. En effet, prenant comme plus haut

il est visible que la quantité deviendra en échangeant en et en qu’elle deviendra en échangeant en et en et qu’enfin elle deviendra en échangeant en et en Donc il faudra que l’équation en demeure la même en y prenant négatif et en y mettant à la place de ce qui exige qu’elle ne contienne aucune puissance impaire de ni aucune puissance pairement impaire. D’où il s’ensuit qu’en faisant on aura une réduite en du sixième degré. Et l’on remarquera que cette réduite en sera la même que celle en dans l’hypothèse de (numéro précédent) ; car il est visible que la valeur de est la même que celle de ci-dessus.

On pourrait démontrer ici, par une méthode semblable à celle dont nous avons fait usage dans le no 32, que cette équation en pourra se décomposer en trois équations du second degré au moyen d’une réduite du troisième ; mais on peut le prouver d’une manière plus simple que voici.

Je fais le produit des quantités et j’ai

or

et il est clair que la quantité est la même que la quantité du no 30 que nous avons vu dépendre d’une équation du troisième degré ; d’où il s’ensuit que l’équation en sera aussi du troisième degré. Et comme

on aura cette équation en en substituant, dans l’équation en du numéro cité, à la place de

Supposons maintenant que soient les racines de cette équation en on aura (numéro cité)

or, si l’on multiplie ensemble les deux équations

du no 48, on a

donc

et, prenant les carrés,

mais on a déjà donc

et, à cause de

donc

équation du huitième degré, résoluble à la manière de celles du deuxième, ce qui s’accorde avec le résultat de M. Bezout.

Au reste, il est à propos de remarquer, touchant la réduite en qu’en représentant (25) par les quatre racines de l’équation on aura

ou bien, ce qui revient au même, en échangeant en en et en

expression analogue à celle qu’on a trouvée pour la réduite du troisième degré (nos 6 et 19), ce qui sert à faire voir l’analogie entre la résolution du quatrième degré déduite de cette dernière méthode et celle de la résolution des équations du troisième degré.

49. Si l’on reprend les équations du no 46,

et qu’on y suppose on aura ces deux-ci

dont la première, étant délivrée de l’irrationnalité, devient

laquelle, à cause de se réduira à cette forme

De cette manière on aura donc les deux équations

qui, par l’élimination de donneront une équation du quatrième degré comparable à la proposée

de sorte que, par la comparaison des termes analogues, on pourra déterminer quatre des cinq coefficient et le cinquième demeurant à volonté.

Cette méthode revient à la même que celle que M. Bezout a donnée à la fin de son Mémoire de 1762 sur les équations, et qu’il a redonnée dans le Mémoire de 1765, page 548, comme un exemple d’une méthode générale qui s’étend à toutes les équations dont le degré est marqué par un nombre composé. Dans le premier de ces endroits l’Auteur suppose d’abord et il trouve une équation finale en du troisième degré. Dans le second il fait et il parvient à une équation finale en du sixième degré avec des exposants pairs, et par conséquent résoluble à la manière des équations du troisième degré.

Pour voir la raison de ces résultats, il n’y a qu’à remarquer que, puisque on aura ces deux équations

dont le produit doit donner l’équation proposée ; de sorte qu’il faudra que l’une de ces équations renferme deux des racines de la proposée, et que l’autre en renferme les deux autres. Ainsi l’on aura, par la nature des équations,

donc

Si l’on fait d’abord et qu’on substitue la valeur de tirée de la première équation dans la seconde, on aura

et de là on peut conclure que l’équation en ne sera que du troisième

degrés car, quelque permutation qu’on fasse entre les quatre racines on n’aura jamais que ces trois valeurs différentes de

d’après lesquelles valeurs on pourrait, si l’on voulait, trouver directement l’équation même en

Si l’on fait on aura

en sorte que la quantité sera la même que la quantité du no 29, et qu’on y pourra appliquer les conséquences trouvées au no 32. Si, dans cette hypothèse de on cherchait au lieu de on aurait

et l’équation en serait aussi du sixième degré avec tous ses exposants pairs, ses racines étant

Au reste, cette équation en pourrait se dériver aisément de l’équation en du no 30 ; car puisque

(il faut se souvenir que désignent ici les mêmes quantités

que dans le numéro cité, c’est-à-dire les racines de la proposée), on aura

donc

Ainsi, si dans l’équation en on substitue cette valeur, et qu’on fasse ensuite disparaître l’irrationnalité, on aura une équation en du sixième degré, dont tous les exposants seront multiples de

50. Nous terminerons ici notre analyse des méthodes qui concernent la résolution des équations du quatrième degré. Non-seulement nous avons rapproché ces méthodes les unes des autres, et montré leur liaison et leur dépendance mutuelle ; nous avons encore, ce qui était le point principal, donné la raison à priori pourquoi elles conduisent, les unes à des réduites du troisième degré, les autres à des réduites du sixième, mais qui peuvent s’abaisser au troisième ; et l’on a dû voir que cela vient en général de ce que les racines de ces réduites sont des fonctions des quantités telles, qu’en faisant toutes les permutations possibles entre ces quatre quantités, elles ne peuvent recevoir que trois valeurs différentes comme la fonction ou six valeurs, mais deux à deux égales et de signes contraires, comme la fonction ou bien six valeurs telles, qu’en les partageant en trois couples et prenant la somme ou le produit des valeurs de chaque couple, ces trois sommes ou ces trois produits soient toujours les mêmes, quelque permutation qu’on fasse entre les quantités comme la fonction trouvée au no 42. C’est uniquement de l’existence de telles fonctions que dépend la résolution générale des équations du quatrième degré[5].




SECTION TROISIÈME.
de la résolution des équations du cinquième degré et des degrés ultérieurs.

Le Problème de la résolution des équations des degrés supérieurs au quatrième est un de ceux dont on n’a pas encore pu venir à bout, quoique d’ailleurs rien n’en démontre l’impossibilité. Je ne connais jusqu’à présent que deux méthodes qui paraissent donner quelque espérance de succès. Ce sont, l’une celle de M. Tschirnaus, publiée dans les Actes de Leipsic de 1683, et l’autre celle que MM. Euler et Bezout ont proposée presque en même temps, le premier dans les Nouveaux Commentaires de Pétersbourg, tome IX, et le second dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris pour l’année 1765. Ces méthodes ont l’avantage de donner la résolution des équations du troisième et du quatrième degré d’une manière générale et uniforme, comme on l’a vu dans les Sections précédentes, avantage qui leur est particulier, et qui peut par conséquentêtre un préjugé pour leur succès dans les degrés plus élevés ; mais les calculs qu’elles demandent dans les équations du cinquième degré et des degrés ultérieurs sont si longs et si compliqués, que le plus intrépide calculateur peut en être rebuté. En effet, pour appliquer, par exemple, la méthode de M. Tschirnaus au cinquième degré, il faudra résoudre quatre équations qui renferment quatre inconnues, et dont la première est du premier degré, la seconde du second, et ainsi de suite ; de sorte que l’équation finale résultante de l’élimination de trois de ces inconnues doit monter, en général, au degré dont l’exposant sera c’est-à-dire au vingt-quatrième degré. Or, indépendammentdu travail immense qui sera nécessaire pour parvenir à cette équation, il est clair que quand on l’aura trouvée on n’en sera guère plus avancé, à moins qu’on ne puisse la réduire à un degré moindre que le cinquième, réduction qui, si elle est possible, ne pourra être que le fruit d’un nouveau travail plus considérable que le premier.

Suivant la méthode de M. Euler, on parviendra aussi nécessairement à une réduite du vingt-quatrième degré ; car quoique cette méthode paraisse promettre une réduite du quatrième degré seulement, par la raison qu’elle ne donne pour le troisième degré qu’une réduite du second, et pour le quatrième degré qu’une réduite du troisième ; cependant M. Bezout remarque avec raison que c’est une simplification accidentelle qui, dans le quatrième degré, rabaisse la réduite de M. Euler au troisième degré, laquelle doit être, en général, du degré c’est-à-dire du sixième, et que cette simplification n’a lieu que parce que l’exposant est un nombre composé. Nous en avons donné la raison à priori dans la Section précédente, et nous y avons aussi fait voir que M. Euler serait nécessairement tombé dans une réduite du sixième degré s’il avait cherché à déterminer par l’élimination une des deux autres inconnues qui entrent dans ses formules. Ainsi l’on n’a d’avance aucun fondement d’attendre, pour le cinquième degré, une réduite d’un degré moindre que le vingt-quatrième, par la méthode de M. Euler ; et si cette équation est susceptible de quelque réduction, ce ne sera qu’à l’aide d’un grand nombre de tentatives et de calculs très-laborieux qu’on pourra s’en assurer.

Ces inconvénients doivent avoir lieu de même dans la méthode de M. Bezout, qui ne diffère point de celle de M. Euler, si ce n’est qu’elle donne des réduites plus élevées en apparence, les exposants y étant tous des multiples de l’exposant du degré de l’équation proposée. Ainsi, dans le cinquième degré, on a, d’après la méthode de M. Bezout, une réduite du cent vingtième degré avec des exposants multiples de de sorte qu’elle équivaut à une équation du vingt-quatrième degré.

Ce savant Auteur pense à la vérité que cette réduite du cent vingtième degré, regardée comme une équation du vingt-quatrième degré, ne doit renfermer que les difficultés des degrés inférieurs au cinquième, et ses raisons sont : 1o que l’expression des racines des équations du cinquième degré ne peut renfermer d’autres radicaux que ceux de ce degré et des degrés inférieurs ; 2o que par conséquent les racines de la réduite de ce degré ne doivent renfermer que les mêmes espèces de radicaux, c’est-à-dire des radicaux cinquièmes, quatrièmes, etc. ; 3o que comme les racines de la réduite du cent vingtième degré doivent être les racines cinquièmes de celles d’une équation du vingt-quatrièmedegré, les radicaux cinquièmes seront mis en évidence par là, en sorte que les racines de cette équation du vingt-quatrièmedegré ne pourront plus renfermer que des radicaux inférieurs, et qu’ainsi sa résolution ne devra dépendre que des degrés inférieurs au cinquième. Mais cette conclusion, si j’ose le dire, me paraît un peu forcée, car j’avoue que je ne vois pas bien clairement ce qui pourrait empêcher que l’expression des racines de l’équation du vingt-quatrième degré dont il s’agit ne contint encore des radicaux cinquièmes du moins il n’est pas démontré que cela ne puisse absolument avoir lieu ; ainsi il pourrait bien arriver que cette équation du vingt-quatrième degré renfermât encore toutes les difficultés de l’équation proposée du cinquième degré ; auquel cas, après avoir trouvé cette équation par des calculs très-pénibles, on n’en serait que plus éloigné de la résolution de l’équation proposée.

Il résulte de ces réflexions qu’il est très-douteux que les méthodes dont nous venons de parler puissent donner la résolution complète des équations du cinquième degré, et à plus forte raison celle des degrés supérieurs et cette incertitude, jointe à la longueur des calculs que ces méthodes exigent, doit rebuter d’avance tous ceux qui pourraient être tentés d’en faire usage pour résoudre un des Problèmes les plus célèbres et les plus importants de l’Algèbre. Aussi voyons-nous que les Auteurs mêmes de ces méthodes se sont contentés d’en faire l’application au troisième et au quatrième degré, et que personne n’a encore entrepris de pousser leur travail plus loin.

Il serait donc fort à souhaiter que l’on pût juger à priori du succès que l’on peut se promettre dans l’application de ces méthodes aux degrés supérieurs au quatrième ; nous allons tâcher d’en donner les moyens par une analyse semblable à celle dont nous nous sommes servis jusqu’ici à l’égard des méthodes connues pour la résolution des équations du troisième et du quatrième degré.

51. Considérons en général l’équation du \muième degré

(a)

Suivant la méthode de M. Tschirnaus on prendra une équation subsidiaire, telle que

(b)

qui contient indéterminée avec une nouvelle inconnue on éliminera par le moyen de ces deux équations l’inconnue et l’on aura une transformée en qui sera du même degré que la proposée, et qui aura cette forme

(c)

où les coefficients seront des fonctions rationnelles et entières des coefficients indéterminés, et où l’on aura, en particulier, égal à une fonction de la première dimension, égal à une fonction de la seconde dimension, et ainsi de suite (14).

Or, ayant indéterminées, on pourra par leur moyen faire évanouir, dans la transformée en termes à volonté, ou bien établir entre ces termes telles relations qu’on voudra, dépendantes de équations, et par là rendre l’équation en résoluble, ou au moins réductible à une équation de degré inférieur. La résolution de cette équation en donnera sur-le-champ celle de l’équation proposée en car nous avons démontré (11) que l’équation en renferme les conditions nécessaires pour que les deux équations d’où l’on a éliminé aient une racine commune ; de sorte que la valeur de ne pourra être que la racine commune aux deux équations et qu’on trouvera en cherchant leur plus grand commun diviseur et l’égalant à zéro.

On fera pour cela l’opération ordinaire, qu’on continuera jusqu’à ce qu’on parvienne à un reste où ne soit plus que linéaire ce reste sera le diviseur cherché ; ou bien, ce qui revient au même, on éliminera successivement des deux équations précédentes les puissances de jusqu’à ce qu’on arrive à une équation qui ne renferme que la première puissance de et il est aisé de prouver que cette équation sera de la forme

d’où l’on aura

(d)

étant égal à si est pair, et égal à si est impair.

De cette manière on aura donc exprimé par une fonction rationnelle de de sorte que si l’on connaît toutes les valeurs de on aura par leur substitution successive les valeurs correspondantes de qui seront les racines de la proposée.

52. Cette méthode est, comme on voit, très-simple et très-générale ; mais la difficulté est de pouvoir déterminer les indéterminées en sorte que la transformée en soit résoluble.

La supposition la plus naturelle et en même temps la plus générale qu’on puisse faire pour cet objet, c’est d’égaler à zéro les coefficients de tous les termes intermédiaires ; en sorte que l’équation en se réduise à cette forme

dont on peut toujours avoir immédiatement une ou deux racines suivant que est impair, ou pair, et dont les autres racines ne dépendent plus que d’une équation du degré ou (21), outre qu’on peut aussi les déterminer toutes directement par la division de la circonférence du cercle (23).

Il faudra donc prendre dans ce cas pour avoir autant d’indéterminées que d’équations à remplir, et l’on tombera, en général, dans une équation finale du degré comme on l’a prouvé dans le no 14.

Si l’exposant est un nombre composé, en sorte que l’on ait il est clair qu’on pourra, en faisant et faisant disparaître tous les termes de l’équation en dont l’exposant ne sera pas divisible par réduire cette équation en une équation en du degré inférieur On aura donc, dans ce cas, termes à faire disparaître ; par conséquent il faudra prendre pour avoir autant d’indéterminées, et de ce qu’on a démontré dans le no 14 il est facile de conclure que l’équation finale qu’on aura dans ce cas sera, en général, du degré marqué par le nombre

c’est-à-dire du degré

ou bien de celui-ci

Tels seront donc les degrés auxquels pourront monter les réduites qu’il faudra résoudre lorsqu’on voudra faire usage de la méthode de M. Tschirnaus ; mais il peut se faire que ces réduites soient telles qu’elles puissent s’abaisser à des degrés moindres c’est ce qu’il serait comme impossible de reconnaître à posteriori, c’est-à-dire par la forme même de ces réduites, mais on pourra s’en assurer à priori par la considération de leurs racines, regardées comme des fonctions de celles de l’équation proposée, et de l’équation transformée en ainsi qu’on va le voir.

53. Désignons, en général, par les racines de l’équation proposée

et par les racines de la transformée

substituant successivement ces racines dans l’équation subsidiaire

on aura équations particulières par lesquelles on pourra déterminer les coefficients indéterminés et comme chacune des racines peut répondre également à chacune des racines

il s’ensuit que les inconnues seront susceptibles de différentes valeurs, qu’on trouvera toutes en faisant toutes les combinaisons possibles des racines avec les racines C’est par le nombre et la forme de ces différentes valeurs d’une même inconnue qu’on pourra juger du degré et de la nature de l’équation par laquelle elle doit être déterminée.

54. Supposons d’abord que tous les termes intermédiaires de la transformée en y doivent disparaître, en sorte qu’elle se réduise à la forme

pour cela il faudra faire dans l’équation subsidiaire pour avoir indéterminées (52), et comme l’équation donne [en supposant pour plus de simplicité

et désignant par les racines de l’équation (24)], les racines on aura, en prenant ces racines pour et les substituant, ainsi que les racines dans l’équation subsidiaire, on aura, dis-je, ces équations

par lesquelles on pourra déterminer tant la quantité que les quantités

Comme ces inconnues ne sont qu’au premier degré dans les équations précédentes, il est clair que le système de toutes ces équations ne donnera qu’une seule valeur déterminée pour chacune de ces inconnues. Or, supposons que l’on ait trouvé, par la méthode ordinaire d’élimination, la valeur de l’inconnue (on fera les mêmes raisonnementspour chacune des autres indéterminées ), il est visible que cette valeur sera exprimée par une fonction des racines et de la racine Donc, si l’on y fait toutes les permutations possibles entre les racines on aura toutes les valeurs particulières de qui devront être les racines de l’équation en

Comme le nombre des permutations qui peuvent avoir lieu entre choses est exprimé en général par il s’ensuit qu’on aura, généralement parlant, valeurs particulières de mais, si parmi ces valeurs il s’en trouve d’égales entre elles, il est clair qu’on pourra les réduire à un plus petit nombre en faisant abstraction des valeurs égales, et nous allons faire voir qu’il n’y aura en effet que valeurs différentes de

55. Pour cela il n’est pas nécessaire de chercher l’expression de par le moyen des équations il suffit d’examiner les variations dont le système de ces équations est susceptible par les permutations des racines entre elles. Pour connaître ces variations, on commencera par supposer que la racine demeure à sa place, c’est-à-dire que la première équation reste la même, et l’on échangera successivement entre elles, dans les autres équations, les racines ce qui donnera variations ; ensuite on fera prendre à la place de et vice versâ, ou, ce qui revient au même, on mettra dans la première équation à la place de et dans la seconde à la place de et l’on fera ensuite les mêmes échanges entre les racines ce qui donnera nouvelles variations ; on mettra encore à la place de et vice versâ, ou bien on substituera à la place de dans la première équation, et à la place de dans la troisième, et l’on fera ensuite les mêmes échanges entre les racines ce qui donnera aussi variations, et ainsi de suite. Par ce moyen on aura fois variations, ce qui fait le nombre total de toutes les variations possibles du système des équations

Maintenant je remarque que dès qu’on aura trouvé les 1.2.3\ldots(\mu-1) variations qui ont lieu tant que demeure à sa place, on pourra en déduire sur-le-champ toutes les autres en ne faisant que substituer successivement dans toutes les équations à la place de les quantités c’est de quoi il est facile de se convaincre avec un peu d’attention en observant que

Or il est visible que ces substitutions de à la place de ne peuvent produire aucun changement dans la valeur de car, dès qu’on élimine il est indifférent quelle valeur on donne à cette quantité, et les résultats de l’élimination sont nécessairement indépendants de la valeur de .

Donc il n’y aura proprement que les variations, qui résultent des permutations entre les racines qui pourront donner des valeurs différentes pour de sorte que l’équation en ne devra être que du degré ce qui s’accorde avec ce que l’on a dit plus haut (52).

Mais voyons encore si cette équation ne sera pas susceptible de quelque réduction. Pour cela il faut distinguer le cas où l’exposant de la proposée est un nombre premier, et celui où cet exposant est un nombre composé.

56. Supposons que soit un nombre quelconque premier, et faisant abstraction, dans le système des équations de la première équation, à cause qu’on peut regarder la quantité comme fixe, voyons quelles sont les variations dont ce système est susceptible en vertu des permutations entre les autres racines

Pour cela on suivra une méthode semblable à celle du numéro précédent. On regardera d’abord la quantité comme fixe et on cherchera les variations résultantes des permutations entre les autres racines on mettra ensuite à la place de et réciproquement, ce qui revient au même que de mettre à la place de dans la seconde équation, et à la place de dans la troisième, et l’on cherchera de nouveau les variations provenantes des permutations des autres racines on mettra à la place de et vice versâ, ou, ce qui revient au même, on substituera à la place de dans la seconde équation, et à la place de dans la quatrième, et l’on cherchera comme auparavant les variations provenantes des permutations entre les racines et ainsi de suite. Ce procédé donnera fois variations, ce qui fera le nombre total des variations cherchées.

Or je dis que dès qu’on aura trouvé les variations, qui ont lieu tant que demeure à sa place, et qu’on change celles des autres racines on pourra en déduire immédiatement toutes les variations résultantes des permutations entre les racines en substituant successivement à la place de dans toutes les équations car par ce moyen le terme de la seconde équation se changera successivement en et les termes des autres équations ne feront que s’échanger entre eux (à cause que est un nombre premier, comme on peut s’en convaincre par ce qui a été démontré dans le no 24), échanges qui équivalent évidemment à ceux des racines entre elles.

D’où je conclus que quand on aura trouvé par le moyen des équations l’expression de en et et qu’on voudra connaître les valeurs de qui résultent des permutations des racines entre elles, et qui doivent être les racines de l’équation en du degré (numéro précédent), il suffira de chercher les valeurs de provenantes des seules permutations entre les racines et d’y échanger ensuite successivement en ou bien, ce qui revient au même, on échangera d’abord dans l’expression de la racine en et ensuite on fera dans chacune de ces valeurs de les permutations qui ont lieu entre les racines on aura par là les racines de l’équation en

57. Imaginons maintenant que les valeurs de qui viennent de la substitution successive de à la place de soient les racines de l’équation du ième degré


et comme sont les racines de l’équation (hypothèse), il est clair que, seront les racines de l’équation savoir

Donc, si dans l’expression de tirée des équations on met, en général, à la place de et qu’ensuite on élimine par le moyen de l’équation on aura nécessairement l’équation d’où l’on voit que cette équation ne contiendra plus, de sorte que les coefficients ne seront que des fonctions de

Or, ayant trouvé l’équation il n’y aura plus qu’à faire dans les expressions des coefficients toutes les permutations possibles entre les racines et l’on aura par là équations en dont chacune sera du ième degré, et qui renfermeront par conséquent les racines de l’équation générale en

De là il est facile de conclure que chacun des coefficients ne pourra dépendre que d’une équation du degré En effet, comme ces coefficients sont des fonctions des racines il est clair que chacun d’eux, par exemple devra être déterminé par une équation qui ait autant de racines que ce coefficient aura de différentes valeurs en faisant toutes les permutations possibles entre les racines mais on a démontré plus haut (55) que les permutations de la racine en chacune des autres ne changent point les valeurs de par conséquent elles ne changeront pas non plus celles de qui sont des fonctions des racines de de plus on a vu (56) qu’on peut suppléer aux permutations de la racine en échangeant la racine en de sorte que comme les valeurs de sont indépendantes de elles ne recevront aucun changement par les permutations de Ainsi il n’y aura que les permutations des racines entre elles, qui donneront des valeurs différentes de ainsi que de d’où il s’ensuit que le nombre de ces valeurs différentes sera simplement par conséquent chacun des coefficients sera donné par une équation d’un degré marqué par ce même nombre.

58. Donc la réduite en qu’on trouvera par la méthode de M. Tschirnaus, et que nous avons vu devoir être, en général, du degré sera toujours décomposable, lorsque est un nombre premier, en équations du degré telles que l’équation ci-dessus, et cela par le moyen d’une équation du degré car, quoique les coefficients dépendent chacun d’une équation de ce dernier degré, cependant il suffira d’avoir l’équation en ou en etc., parce que les autres coefficients pourront toujours s’exprimer par des fonctions rationnelles de celui-là.

En effet, si l’on regarde l’équation du degré comme un diviseur de la réduite en du degré on trouvera pour cela conditions par lesquelles on pourra déterminer, en général, les coefficients en sans aucune extraction de racines, et ces valeurs étant ensuite substituées dans l’une des équations de condition, on aura l’équation même en laquelle ne devra pas passer le degré Je dis qu’on peut déterminer, en général, les valeurs de en sans extraction de racines ; cela est vrai tant qu’on ne donne à aucune valeur particulière ; mais lorsqu’on voudra substituer à la place de les racines de l’équation en pour avoir les valeurs correspondantes de s’il arrive que la racine substituée soit double, ou triple, ou, etc., les expressions rationnelles de se trouveront en défaut, et ces quantités dépendront alors de la résolution d’une équation du second, ou du troisième, ou, etc., degré, comme nous le démontrerons plus bas (102).

On pourrait au reste trouver directement l’équation en par le moyen de ses racines regardées comme des fonctions de on a vu différents exemples de cette méthode dans les Sections précédentes. Et, supposant cette équation en connue, on pourra, par son moyen, déterminer directement les valeurs de par la méthode qu’on trouvera dans la Section quatrième (100).

Maintenant il est visible que l’équation en sera toujours d’un degré plus haut que la proposée, excepté le seul cas de car, faisant on a

faisant on a

faisant on a

et ainsi de suite ; donc, à moins que cette équation ne puisse encore s’abaisser à un degré moindre que la solution de M. Tschirnaus ne sera d’aucun usage ; or c’est ce qui me paraît presque impossible, en général.</math> Il est vrai que, quoique le degré de l’équation dont nous parlons soit plus élevé que le degré de la proposée, cette équation ne renfermera pas cependant des difficultés supérieures à celles des équations du degré car, puisque ses racines sont des fonctions connues des racines il est clair qu’elles ne seront pas indépendantes les unes des autres, mais qu’il y aura entre elles des relations exprimées par un nombre d’équations égal à la différence des exposants et de sorte que, supposant que l’on connaisse un nombre de ces racines, on connaîtra aussi par leur moyen toutes les autres.

D’où il s’ensuit que l’équation en ne pourra renfermer dans le fond que les difficultés du degr mais, par la même raison, il paraît aussi qu’elle devra toujours renfermer toutes les difficultés de ce degré, de sorte qu’on se trouvera ramené aux mêmes difficultés auxquelles la résolution générale de l’équation proposée est sujette.

59. Supposons présentement que l’exposant de la proposée soit un nombre composé dans ce cas il faudra apporter quelque modification au raisonnement du no 56, car, si dans les termes de la progression géométrique, on substituait indifféremment à la place de les puissances on ne retrouverait pas toujours les mêmes termes comme lorsque est un nombre premier ; nous en avons donné la raison dans le no 24, et nous y avons démontré aussi qu’il n’y a que les puissances de dont l’exposant est un nombre premier à qui, étant substituées à la place de dans les termes, puissent redonner les mêmes termes, de sorte qu’il faudra restreindre à ces seules puissances de les résultats du no 56.

Donc, si l’on désigne, en général, par tous les nombres moindres que et premiers à dont nous supposerons que le nombre soit on pourra, par les substitutions de à la place de dans l’expression de suppléer aux permutations de la racine dans les racines par conséquent, si l’on suppose que les valeurs de qui viennent de la substitution à la place de soient les racines de l’équation

cette équation sera un diviseur de la réduite en et les coefficients seront donnés chacun par une équation du degré de sorte que dans ce cas la réduite en trouvée par la méthode de M. Tschirnaus, et qui est du degré sera résoluble en équations, chacune du degré et cela moyennant une équation du degré

Pour trouver l’équation à priori, il n’y aura qu’à mettre à la place de dans l’expression de et ensuite éliminer par le moyen de l’équation dont les racines seraient or voici comment on pourra avoir cette équation.

60. Considérons, en général, l’équation

dont les racines sont et supposons que le nombre soit résolu dans les facteurs premiers dont chacun soit contenu

une ou plusieurs fois dans le nombre il est facile de voir que les puissances de qu’il faudra exclure, pour avoir uniquement les puissances dont les exposants sont premiers à il est facile de voir, dis-je, que ces puissances seront celles dont les exposants seront des multiples des nombres de plus il est clair, par ce qu’on a démontré dans le no 24, que ces mêmes puissances de seront les racines des équations

donc, si l’on fait pour plus de simplicité

et qu’on divise l’équation successivement par celles-ci

on aura les équations suivantes

dont la première aura pour racines toutes les puissances de jusqu’à à l’exception de celles dont les exposants seront des multiples de la seconde, toutes les puissances de à l’exception de celles dont les exposants seront des multiples de la troisième, etc. ; d’où l’on peut conclure que, si l’on cherche le plus grand commun diviseur de toutes ces équations, on aura l’équation cherchée, dont les racines seront les puissances et qui sera par conséquent de la forme

Ainsi, par exemple, si on aura et l’on aura cette seule équation

dont les racines seront et

Si on aura donc ce qui donnera ces deux équations

dont le plus grand commun diviseur est

équation dont les racines seront par conséquent et

Si on aura donc et l’on aura cette seule équation

dont les racines seront et ainsi de suite.

Quant à l’exposant on peut le déterminer à priori d’après les facteurs du nombre car on aura toujours

comme on peut le démontrer aisément en cherchant combien, parmi les nombres moindres que il y en aura de premiers à (Voyez les Nouveaux Commentaires de Pétersbourg, tome VIII.)

61. Ayant donc trouvé ainsi l’équation , on s’en servira pour éliminer de l’expression de et il en résultera l’équation , dont tous les coefficients seront des fonctions des racines sans telles qu’elles ne seront susceptibles que de variations, par toutes les permutations possibles des racines entre elles ; de sorte que chacune de ces fonctions sera donnée simplement par une équation du degré

comme on l’a déjà dit plus haut.

Il se peut au reste que ces équations en ou en etc., soient encore susceptibles de quelques réductions ; c’est ce qui dépendra de la forme des fonctions de par lesquelles les quantités seront exprimées ; mais nous n’entrerons pas dans cette recherche, d’autant que dans le cas où l’exposant est un nombre composé on peut simplifier la Solution de M. Tschirnaus en ne faisant évanouir que quelques-uns des termes intermédiaires de la transformée (52).

62. Nous allons donc chercher à priori les résultats qu’on doit avoir dans ce cas, et nous supposerons, comme dans le numéro cité, que, étant égal à tous les termes de la transformée en dont les exposants ne seront pas divisibles par disparaissent, en sorte que, faisant l’équation devienne

laquelle aura par conséquent racines que nous dénoterons par et comme l’équation donne

ou bien, en dénotant par les racines de

on aura, en substituant successivement à la place de les racines et faisant pour plus de simplicité

on aura, dis-je, ces valeurs de

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

qui seront celles des racines

Substituant donc successivement ces valeurs à la place de dans l’équation subsidiaire du no 51, et mettant en même temps à la place de (53), on aura les équations suivantes

Or, comme on doit supposer dans ce cas (52)

pour que le nombre des indéterminées soit aussi il est clair que, si dans les équations qu’on vient de trouver on élimine d’abord les quantités il restera équations, qui serviront à déterminer les inconnues

Imaginons maintenant qu’on ait trouvé, par les règles ordinaires de l’élimination, l’expression de (on appliquera les mêmes raisonnements aux autres indéterminées ) ; on cherchera toutes les valeurs différentes de qui peuvent venir des permutations des racines entre elles, et l’on aura les racines de l’équation en laquelle sera par conséquent d’un degré égal au nombre de ces différentes valeurs.

Or les racines étant au nombre de seront susceptibles en général de permutations ; mais il faudra défalquer de ce nombre les permutations qui ne produiront aucun changement dans l’expression de

Pour cela je remarque d’abord que si l’on suppose qu’on échange respectivement les racines en ou en ou, etc., il en résultera dans les équations précédentes les mêmes changements que si l’on échangeait en ou en ou, etc. ; de sorte que les permutations des quantités entre elles seront équivalentes aux permutations des racines entre elles, ces permutations étant combinées avec les permutations correspondanteset simultanées des racines entre elles, avec celles des racines entre elles, etc.

Or, comme dans la détermination des coefficients on doit faire disparaître les quantités par l’élimination, il sera indifférent que ces quantités soient mises les unes à la place des autres d’une manière quelconque ; par conséquent il ne résultera de leurs permutations quelconques aucun changement dans les valeurs de donc, puisque ces quantités étant au nombre de sont susceptibles de permutations, voilà autant de permutations entre les racines qui ne produiront aucun changement dans les valeurs de d’où il s’ensuit que, dans le nombre total des valeurs particulières de chaque valeur se trouvera répétée fois ; par conséquent il ne pourra y avoir qu’un nombre de valeurs différentes de exprimé par

63. Maintenant si l’on considère les permutations des racines entre elles, et qu’on considère en même temps les premières équations du no 62, lesquelles renferment ces racines, on y pourra appliquer des raisonnements analogues à ceux du no 55, et l’on en conclura que les échanges de la racine en les autres racines ne produiront aucun changement dans les valeurs de puisque ces échanges donneront les mêmes résultats que l’on aurait en substituant successivement à la place de

Donc le nombre des valeurs différentes de ne pourra être plus grand que

On tirera des conclusions semblables de la considération des racines comme aussi des racines et ainsi des autres ; et comme les combinaisons de ces racines entre elles sont totalement indépendantes, il s’ensuit qu’il faudra diviser le nombre autant de fois par qu’il y a de ces systèmes de racines chacun, c’est-à-dire fois, nombre des quantités

Donc le nbmbre des valeurs différentes de ne pourra être que

par conséquent l’équation en ne devra monter qu’au degré marqué par ce même nombre.

C’est aussi ce qui s’accorde avec ce que l’on a trouvé à la fin du no  52 ; en effet, il est clair que le nombre

se réduit d’abord à celui-ci

et ensuite, à cause de à celui-ci

64. La réduite en sera donc, généralement parlant, du degré

mais cette équation pourra toujours s’abaisser à un degré inférieur par des considérations semblables à celles des nos 57 et 59. En effet, si est

un nombre premier, il est facile de prouver par des raisonnements analogues à celui du no 56, que l’on pourra suppléer aux permutations des racines en en en, etc., en substituant successivement dans l’expression de les puissances à la place de de sorte que si l’on met au lieu de dans l’expression de et qu’ensuite on élimine par le moyen de l’équation

ou bien

on aura une équation en telle que

laquelle sera un diviseur de la réduite en et les coefficients seront déterminés chacun par une équation du degré

ce qui donnera autant de diviseurs de la même réduite, dont chacun sera du degré

Si n’est pas un nombre premier, alors il faudra chercher, comme dans le no 60, l’équation dont les racines seront les puissances de qui auront pour exposant des nombres premiers à en y comprenant l’unité, et, désignant cette équation par

on éliminera, par son moyen, de l’expression de on aura une équation en telle que

où chaque coefficient ne dépendra que d’une équation du degré

de sorte que l’on aura par là autant de valeurs de et par consé-

quent autant d’équations en du degré lesquelles seront les diviseurs de la réduite en

Soit, par exemple,

1o On pourra faire et la réduite en sera du degré et, à cause de elle ne pourra plus s’abaisser par la méthode précédente.

2o On pourra faire on aura pour le degré de la réduite en et comme on pourra résoudre cette réduite en vingt équations du second degré chacune, moyennant une équation du vingtième degré.

65. Revenons maintenant aux formules du no 51 ; et il est clair que l’équation proposée pourra être regardée à son tour comme le résultat de l’élimination de faite par le moyen des équations et Ainsi, si l’on regarde les coefficients de l’équation en comme donnés et les coefficients de l’expression de en comme indéterminés, on pourra, par la comparaison des termes de l’équation résultante de l’élimination de avec ceux de la proposée, déterminer ces derniers coefficients, pourvu que leur nombre ne soit pas moindre que ce qui ne sera point à craindre tant qu’on prendra ou et si l’équation en est prise telle qu’elle soit résoluble, ce qui peut avoir lieu d’une infinité de manières différentes, on aura la résolution complète de la proposée ; mais la difficulté consistera dans la détermination des coefficients indéterminés

On facilitera cependant beaucoup cette détermination ainsi que l’élimination de si l’on change l’expression de donnée par l’équation en une autre où l’inconnue ne se trouve qu’au numérateur ; c’est ce qui est toujours possible en multipliant le haut et le bas de la fraction

par un polynôme convenable en qu’on pourra trouver de la manière suivante.

On supposera

et comme est déterminé par l’équation

on éliminera par le moyen de cette équation, ce qui donnera une équation en du degré qu’on pourra représenter ainsi

où les coefficients seront par conséquent des fonctions connues des et

Ainsi l’on aura

d’où l’on voit que la quantité deviendra égale à et par conséquent indépendante de étant multipliée par le polynôme

De sorte que si l’on remet dans ce polynôme, à la place de sa valeur en on aura le polynôme cherché, dans lequel on pourra, si l’on veut, n’admettre que des puissances de moindres que parce qu’au moyen de l’équation

on pourra toujours faire rentrer les puissances de supérieures à dans la classe des inférieures.

De cette manière on pourra donc ramener l’équation à la forme

de sorte qu’on pourra toujours regarder l’équation proposée

comme la résultante de l’élimination de faite par le moyen de l’équation

et de l’équation . On supposera donc les coefficients dont le nombre est indéterminés, et l’équation provenante de l’élimination de étant comparée terme à terme avec la proposée donnera conditions qui serviront à déterminer les quantités

Si l’on réduit l’équation en à deux termes tels que

la méthode précédente reviendra à celle de MM. Euler et Bezout, dont nous avons déjà fait mention plusieurs fois dans le cours de ce Mémoire.

Le détail où nous venons d’entrer sert à rapprocher cette méthode de celle de M. Tschirnaus, et à montrer leur analogie et dépendance mutuelle.

66. Comme tout se réduit à déterminer les inconnues dont le nombre est par la comparaison des termes de la proposée avec ceux de la résultante de l’élimination de nous remarquerons d’abord à l’égard de cette dernière, qu’elle sera nécessairement exprimée par une fonction rationnelle et entière des quantités et où ces quantités rempliront partout le même nombre de dimensions comme on peut aisément le conclure de la théorie d’élimination donnée dans le no 13 ; d’où il s’ensuit qu’en ordonnant cette équation par rapport à les coefficients de tous ces termes se trouveront être des fonctions rationnelles, entières et homogènes des quantités et dont les dimensions seront pour les puissances

Ainsi le premier terme n’aura d’autre coefficient que l’unité, le second terme aura pour coefficient une quantité de la forme

étant des coefficients numériques, le troisième terme aura

pour coefficient une quantité de la forme

et ainsi des autres.

Égalant donc le coefficient du second terme à celui du troisième terme à et ainsi de suite, on aura équations entre les inconnues dont la première sera du premier degré seulement, la seconde, du second degré, la troisième, du troisième, et ainsi des autres ; de sorte qu’en éliminant ces inconnues à l’exception d’une seule quelconque, on aura, en général, pour la détermination de celle-ci une équation finale du degré marqué par ce qui est contraire au sentiment de M. Euler, mais ce qui s’accorde avec ce que M. Bezout a trouvé par induction.

67. Pour confirmer davantage cette conclusion sur le degré des équations en ou ou et pour voir en même temps dans quel cas ces équations sont susceptibles de simplification, nous allons chercher à priori l’expression des quantités en racines de la proposée.

Faisons, comme dans le no 54, et désignant par les racines de l’équation

on aura pour les racines de l’équation

donc, substituant successivement ces racines dans l’équation du no 65 à la place de et mettant en même temps les racines à la place de on aura les équations suivantes

par lesquelles on pourra déterminer les racines inconnues

Cette détermination n’a aucune difficulté ; car puisque sont les racines de l’équation laquelle manque de tous ses termes intermédiaires, on aura, comme on sait,

c’est-à-dire que la somme de toutes les racines élevées chacune à une même puissance quelconque sera toujours nulle lorsque l’exposant de la puissance ne sera pas divisible par et à l’égard des puissances dont l’exposant sera multiple de il est visible, par l’équation même qu’on aura et ainsi des autres racines.

Donc, si l’on ajoute ensemble les équations du numéro précédent, après les avoir multipliées respectivement par les racines correspondantes élevées successivement aux puissances ième, ième, ième, …, jusqu’à la première inclusivement, on aura sur-le-champ

On voit d’abord que la quantité doit être donnée par une équation linéaire, puisqu’elle conserve la même valeur, quelque permutation qu’on fasse entre les racines en effet, à cause de

on aura

Quant aux autres quantités chacune d’elles dépendra, en général, d’une équation d’un degré égal au nombre de toutes les permutations possibles entre les racines nombre qui est, comme on sait, marqué par car à chacune de ces permutations il répondra une valeur différente des quantités mais ces valeurs peuvent avoir entre elles des relations telles, que l’équation dont elles seront les racines puisse s’abaisser à un degré inférieur ; c’est ce que nous allons examiner.

68. Pour cela nous remarquerons d’abord que, comme la quantité demeure indéterminée, on pourra lui donner telle valeur qu’on voudra ; la supposition la plus simple est de faire, avec M. Bezout, et par conséquent

nous adopterons donc cette hypothèse et nous supposerons en même temps

ce qui donnera ces formules plus simples

Considérons l’expression de la quantité et comme les racines de l’équation que nous avons désignées par peuvent s’exprimer (24) par on aura de sorte que l’on aura

et pour avoir les valeurs des autres quantités il n’y aura qu’à mettre, dans cette expression de à la place de ses puissances D’où, et de ce qui a été démontré plus haut (56), on peut d’abord conclure que, lorsque l’exposant de l’équation proposée’est un nombre premier, les quantités seront les racines d’une même équa-

tion ; mais il n’en sera pas ainsi lorsque sera un nombre composé ; c’est pourquoi il faudra, dans la suite, distinguer les deux cas, où est un nombre premier et où il n’est pas premier.

69. Supposons, en général,

et voyons quelle doit être la nature de l’équation en Pour cela on cherchera toutes les valeurs particulières de qui résultent des permutations dont les racines sont susceptibles ; et dans cette recherche on suivra une méthode analogue à celle du no 55 ; ainsi l’on regardera d’abord la quantité comme fixe, et l’on fera varier la position des autres quantités, lesquelles étant susceptibles de permutations donneront autant de valeurs particulières de que nous dénoterons par maintenant on fera varier, dans l’expression de chacune de ces valeurs, la position de la quantité en la mettant successivement à la place de ce qui donnera les valeurs cherchées qui devront être les racines de l’équation en

Or on verra aisément que pour avoir toutes ces valeurs il n’y aura qu’à multiplier successivement chacune des valeurs par de sorte que les racines de l’équation en seront exprimées ainsi

d’où il est facile de conclure que l’équation en ne renfermera que des puissances de dont les exposants seront multiples de

De là il s’ensuit donc qu’en faisant en sorte que l’on ait

on aura une équation en du degré dont les racines

seront les valeurs de qui viennent des permutations des racines en faisant abstraction de la racine

Cette conclusion a lieu quel que soit le nombre Examinons maintenant à part les deux cas où est un nombre premier ou non.

70. Supposons d’abord que l’exposant soit un nombre premier, et nous remarquerons que pour trouver toutes les valeurs de il suffira de chercher celles qui viennent des permutations des racines entre elles, et dont le nombre est par conséquent et de substituer successivement, dans l’expression de chacune de ces valeurs, à la place de c’est de quoi on peut se convaincre par un raisonnement analogue à celui du no 56.

D’où il s’ensuit (57) que, si l’on suppose que les valeurs de qui répondent aux substitutions de à la place de dans l’expression précédente de soient les racines de cette équation du ième degré

les coefficients seront donnés chacun par une équation du degré de sorte que l’équation en du degré sera décomposable en équations du ième degré chacune, au moyen d’une équation du degré car, ayant trouvé l’un des coefficients par la résolution d’une équation de ce degré, il sera aisé d’avoir tous les autres.

71. Puisque les racines de l’équation

sont les valeurs de c’est-à-dire de

que l’on aurait en supposant que devint successivement il s’ensuit de ce qui a été dit dans le no 68 que les racines de cette équa-

tion exprimeront justement les valeurs des quantités élevées à la puissance

Donc, si l’on dénote ces racines par on aura

Maintenant, pour trouver avec facilité l’équation dont il s’agit, on élèvera le polynôme

à la puissance et, faisant attention que on aura pour une expression de cette forme

seront des fonctions des racines sans on changera en et ensuite on éliminera par le moyen de l’équation du no 57 ; mais, si l’on ne veut pas employer la voie ordinaire de l’élimination, on s’y prendra de la manière suivante.

72. Puisque (68), on aura

étant avec les racines de l’équation

Connaissant donc ainsi les racines de l’équation en on pourra déterminer par leur moyen les valeurs des coefficients car on aura, comme on sait,

On facilitera beaucoup cette détermination si l’on cherche la somme des puissances premières, secondes, troisièmes, etc., jusqu’aux ième, des racines et pour cela il sera utile de faire entrer dans le calcul la quantité

en sorte que les quantités répondent aux racines de l’équation

Or, si l’on élève successivement le polynôme

aux puissances seconde, troisième, etc., et qu’on dénote par les termes de ces puissances qui ne seront point affectés de après avoir substitué partout à la place de à la place de et ainsi de suite ; il est facile de voir, par les propriétés des quantités (67), que les sommes des puissances premières, secondes, troisièmes, etc., des quantités se réduiront à

Or

donc, si l’on retranche respectivement des quantités les puissances première, seconde, troisième, etc., de les restes

seront les sommes des racines de leurs carrés, de leurs cubes, etc., de sorte qu’on aura, par les formules connues,

73. Maintenant, si l’on fait dans les expressions des quantités toutes les permutations possibles entre les racines on ne trouvera pour chacune de ces quantités que valeurs différentes, lesquelles viendront uniquement des permutations entre les racines ainsi l’on aura autant d’équations en telles que

lesquelles étant multipliées ensemble donneront une équation en du degré et dont tous les coefficient seront déterminables par des fonctions rationnelles des coefficients de l’équation proposée.

Cette équation en étant ainsi trouvée, si on la divise par une équation du degré telle que la précédente, on aura équations de condition entre les quantités par lesquelles on pourra déterminer, par exemple, les valeurs de en et l’on parviendra ensuite à une équation finale en qui ne pourra monter qu’au degré

En effet, puisque la quantité n’est susceptible que de valeurs différentes, si l’on appelle ces valeurs en supposant, pour abréger,

on aura une équation en telle que

dont les racines seront en sorte qu’on pourra, si l’on veut, déterminer à priori les valeurs des coefficients d’après celles des racines

De cette manière on aura donc l’équation en directement et sans recourir à l’équation en du degré et l’on pourra trouver aussi, indépendamment de cette dernière équation, les valeurs des autres coefficients en comme nous le démontrerons plus bas dans la Section quatrième.

Concluons de tout ce qui précède que la méthode de MM. Euler et Bezout conduit nécessairement à une réduite du degré laquelle, quand l’exposant de la proposée est un nombre premier, doit être décomposable en facteurs du ième degré chacun.

Ce résultat s’accorde, comme on voit, avec celui que l’on aurait par la méthode de M. Tschirnaus ; ainsi l’on y pourra appliquer des remarques semblables à celles que nous avons faites dans le no 58.

74. Pour éclaircir la théorie précédente par un exemple, prenons l’équation du cinquième degré

dont les racines soient désignées par

On supposera donc

et l’on regardera l’équation proposée comme le résultat de celle-ci et de l’équation à deux termes

ou bien, en faisant, comme dans le no 68,

MM. Euler et Bezout ont donné dans leurs Mémoires sur ce sujet l’équation finale, qui doit résulter de l’élimination de dans le cas de et de et dont la comparaison avec la proposée fournit les quatre équations nécessaires pour la détermination des coefficients mais ces savants Auteurs n’ont point donné le résultat qui doit provenir de ces quatre équations par l’élimination de trois quelconques des quatre inconnues qu’elles renferment, et cela à cause du travail immense que cette élimination demande. La méthode précédente fournit les moyens de trouver ce résultat à priori, et nous allons en donner un essai.

On aura d’abord (67)

et ensuite (71)

étant les quatre racines de l’équation

laquelle sera un diviseur de l’équation du vingt-quatrième degré qu’on doit trouver pour la valeur de

Maintenant, pour avoir la valeur des coefficients il faudra élever le polynôme

à la cinquième puissances, ce qui donnera, à cause de cet autre polynôme

Et l’on aura d’abord

Or, en considérant l’expression de on voit que les termes

peuvent s’exprimer immédiatement par les coefficients de l’équation proposée ; et il est facile de trouver que la valeur de ces termes sera

Donc, si l’on fait pour plus de simplicité

on aura

et l’on trouvera que la quantité ne sera susceptible que des six valeurs suivantes, que nous désignerons par

En effet, si l’on fait dans ces formules telles permutations que l’on voudra entre les racines on verra toujours renaître les mêmes f’ormules ; d’où il s’ensuit que les six quantités seront nécessairement les racines d’une équation du sixième degré, telle que

dont les coefficients pourront par conséquent se déterminer par les règles connues.

On aura, par exemple,

c’est-à-dire

Or on a dans l’équation proposée

donc les cinq premiers membres de la valeur de deviendront

Pour trouver la valeur des cinq derniers membres de la quantité il faudra commencer par chercher celle de la quantité

que nous désignerons, pour abréger, par or, si l’on carre la valeur de on aura

d’où

maintenant il est facile de trouver que la valeur des cinq derniers membres de sera exprimée par

de sorte qu’en rassemblant toutes ces quantités on aura enfin

On pourra trouver d’une manière semblable la valeur de chacun des autres coefficients de l’équation et l’on en abrégera beaucoup le calcul si l’on fait usage des règles données par M. Cramer à la fin de son Introduction à l’Analyse des lignes courbes, pour calculer la somme des produits des racines d’une équation quelconque, prises deux à deux, ou trois à trois, ou, etc., et élevées chacune à une puissance quelconque donnée ; mais nous n’entrerons point ici dans ce détail qui, outre qu’il exigerait des calculs très-longs, ne saurait d’ailleurs jeter aucune lumière sur la résolution des équations du cinquième degré ; car comme la réduite en est du sixième degré, elle ne sera pas résoluble à moins qu’elle ne puisse s’abaisser à un degré inférieur au cinquième ; or c’est ce qui ne me paraît guère possible d’après la forme des racines de cette équation.

75. Nous avons supposé depuis le no 70 jusqu’ici, que l’exposant de l’équation proposée était un nombre premier ; voyons maintenant ce qui doit arriver lorsque sera un nombre composé.

Dans ce cas il est facile de prouver par des raisonnements analogues à ceux du no 59 que les conclusions du numéro cité et des numéros suivants n’auront lieu que tant qu’on ne substituera à la place de que les puissances dont les exposants sont des nombres premiers à d’où il s’ensuit :

1o Qu’en désignant par le nombre des exposants dont il s’agit, l’équation en qui est généralement du degré sera décomposable en équations, chacune du degré et telle que

les coefficients étant donnés chacun par une équation du degré

2o Que les racines de cette équation en étant désignées par les quantités exprimeront les valeurs de ceux des coefficients dont le rang, à commencer par sera marqué par les nombres premiers à de sorte que tous ces coefficients seront donnés par une même équation.

3o Que pour appliquer la méthode du no 71 à la recherche des coefficients il ne faudra pas se servir de l’équation du no 57 pour éliminer mais de l’équation qu’on trouvera par la méthode du no 60, et dont les racines seront que, par conséquent, si l’on veut faire usage de la méthode du no 72 pour trouver les coefficients dont il s’agit, il faudra d’abord chercher d’après l’équation les sommes des racines de leurs carrés, de leurs cubes, etc., qu’on dénotera par ensuite ayant élevé successivement le polynôme

aux puissances deuxième, troisième, etc., et représentant ces puissances par

on aura les quantités

pour les sommes des racines élevées aux puissances première, deuxième, troisième, etc., d’où il s’ensuit qu’on aura enfin par

les formules connues

76. Pour trouver maintenant les valeurs des autres coefficients qui, dans la série occupent des places marquées par des nombres commensurables à supposons, en général, et que l’on cherche ceux des coefficients dont il s’agit dont l’exposant du rang sera multiple de il est facile de voir par ce qui a été dit dans le no 68, que si l’on exprime, pour plus de simplicité, ces coefficients par

et qu’on fasse on aura

et, pour avoir les autres quantités il n’y aura qu’à changer successivement en

Soit, à l’imitation de ce qui a été fait dans le no 69,

et cherchons de même quelle doit être la nature de l’équation en

Pour cet effet on remarquera d’abord que, puisque on aura

et de là

En général, puisque sont les racines de l’équation

les puissances seront les racines de l’équation (24).

Faisant donc rentrer les puissances de plus hautes que dans la classe des inférieures, l’expression de deviendra de cette forme

en supposant

77. En considérant maintenant l’équation en dans toute sa généralité, il est clair qu’elle devrait être du degré puisqu’il y a autant de permutations possibles entre les racines et dont chacune doit donner une valeur particulière de mais si parmi ces valeurs il y en a d’égales, on pourra en faire abstraction et abaisser par là l’équation en à un moindre degré ; or c’est précisément ce qui a lieu dans le cas présent.

En effet, il est visible que la quantité demeurera toujours la même, quelque permutation qu’on fasse entre les racines donc, puisque choses admettent permutations, il s’ensuit d’abord que les valeurs de seront telles que chacune se trouvera répétée fois ; en sorte que parmi ces valeurs il ne pourra y en avoir que de différentes entre elles.

Considérons ensuite la quantité on prouvera de la même manière que chacune de ces dernières valeurs devra aussi se trouver répétée fois, ce qui réduira le nombre des valeurs différentes de à

En continuant le même raisonnement à l’égard des autres quantités on en conclura enfin que le nombre des valeurs différentes de ne sera que de sorte que l’équation en ne montera qu’au degré

78. Cela posé, si l’on compare maintenant l’expression précédente de avec celle du no  69, on verra aisément qu’elle est susceptible de remarques semblables, relativementaux permutations des quantités entre elles ; d’où l’on conclura :

1o Qu’en supposant égal à un nombre premier, l’équation en ne renfermera que des puissances de dont les exposants soient multiples de de sorte qu’en faisant on aura une équation en du degré

2o Que cette équation sera toujours décomposable en équations de la forme

où les coefficients ne dépendront que d’une équation du degré

3o Que, si l’on désigne par les racines de l’équation précédente, les quantités

seront les valeurs de ceux des coefficients qui occupent dans cette série les places ième, ième, ième, … jusqu’à la ième inclusivement, ou, ce qui revient au même (à cause que le nombre de tous les coefficients est ), des coefficients qui occupent les mêmes places dans la série

4o Que, pour trouver les valeurs des coefficients on pourra se servir pareillement des méthodes des nos 71 et 72, en ayant seulement attention de mettre partout l’exposant à la place de l’exposant

5o Que, si n’est pas un nombre premier, il faudra apporter aux conclusions précédentes des modifications relatives à la nature du nombre et qu’on trouvera aisément par des considérations semblables à celles qui ont fait l’objet du no 75.

79. On voit donc, d’après ce qui précède, que, lorsque l’exposant de l’équation proposée est un nombre composé, les coefficients ne peuvent pas être les racines d’une même équation, comme cela a lieu dans le cas où l’exposant est un nombre premier, mais que ces coefficients dépendent alors d’équations différentes suivant que leurs places dans la série sont marquées par des nombres dont les plus grandes mesures avec le nombre sont différentes.

Cependant il ne sera pas nécessaire de chercher et de résoudre toutes ces différentes équations ; car les coefficients dont il s’agit dépendent mutuellement les uns des autres, en sorte que dès que l’on aura trouvé la valeur d’un de ces coefficients on pourra en déduire aisément celles de tous les autres. En effet, si l’on suppose que l’on élimine de l’équation du no 65 par le moyen de l’équation et qu’on compare ensuite l’équation résultante terme à terme avec la proposée, on aura autant d’équations qu’il y a de coefficients indéterminés par lesquelles on pourra déterminer chacun de ces coefficients or, à l’exception du premier coefficient qui se trouvera donné par une équation où il n’y aura point d’autres inconnues, tous les autres coefficients inconnus se trouveront mêlés entre eux, de manière que par la méthode ordinaire d’élimination on pourra déterminer la valeur de chacune de ces inconnues par une autre quelconque d’entre elles ; sur quoi on fera des remarques semblables à celles du no 58.

80. M. Bezout, dans le dessein de simplifier et de faciliter l’usage de sa méthode lorsque l’exposant de l’équation proposée est un nombre composé, a donné une seconde méthode qui paraît en quelque manière plus générale que la première, mais qui revient cependant à la même dans le fond, comme nous l’allons faire voir.

Suivant cette méthode, si l’exposant de l’équation proposée est représenté par le produit des deux nombre et on prendra deux équations de cette forme

Et éliminant on aura une équation finale en du degré yts qu’on comparera terme à terme avec la proposée ; ce qui donnera équations particulières entre les coefficients dont le nombre est aussi de sorte qu’on pourra par là déterminer chacun de ces coefficients.

Or, comme l’équation donne valeurs de on aura, par la substitution successive de ces valeurs, autant d’équations en chacune du degré d’où l’on tirera valeurs de qui seront les racines de l’équation proposée.

Il est clair, par la théorie de l’élimination exposée dans le no 13, que l’équation résultante de l’élimination de dans les deux équations ci-dessus ne sera autre chose que le produit de toutes les équations que l’on aurait en y mettant à la place de les racines de l’équation d’où l’on voit que l’esprit de cette méthode consiste à décomposer l’équation proposée du degré en équations, chacune du ième degré, et cela moyennant une équation du degré de la forme

Toute la difficulté consiste dans la détermination des coefficients inconnus c’est pourquoi il est bon de rechercher à priori quelle doit être la nature des équations par lesquelles ces quantités doivent se déterminer.

81. Supposons donc que l’équation proposée du degré et dont les racines sont soit le produit de équations telles que

il faudra que chacune de ces équationsrenferme /math> racines de la proposée ; de sorte qu’en partageant la totalité des racines en systèmes de /math> racines chacun, et tels par exemple que

on aura par la nature des équations égal à la somme, égal à la somme des produits deux à deux, égal à la somme des produits trois à trois, etc., des racines de même on aura égal à la somme, égal à la somme des produits deux à deux, égal à la somme des produits trois à trois, etc., des racines et ainsi de suite.

Or, si l’on désigne par les racines de l’équation on aura (numéro précédent)

et de même

et ainsi de suite.

Donc, puisque par la nature de l’équation qui manque de tous les termes intermédiaires on a

on pourra déterminer les valeurs des quantités par une méthode semblable à celle du no 67 ; et il viendra

ensuite

et ainsi de suite.

82. Examinons les valeurs des quantités et il est d’abord clair que la valeur de sera égale à la somme de toutes les racines de sorte que l’on aura et par conséquent

Ensuite, si l’on met à la place de en sorte que les racines de l’équation soient représentées par (24), on aura

et pour avoir les valeurs des quantités il n’y aura qu’à changer successivement, dans cette expression, la racine en

Or l’expression précédente de est la même que celle de la quantité ou du no 76 ; par conséquent celles de seront aussi les mêmes que celles des quantités du même numéro ; d’où il est facile de conclure que les coefficients de l’équation du no  80, étant multipliés par seront respectivementégaux à ceux des coefficients de l’équation du no  65, qui occuperont dans la série les places marquées par les nombres chacun de ces coefficients étant multiplié par

Ainsi l’on pourra appliquer sur-le-champ aux coefficients de la formule ci-dessus les mêmes conclusions des nos 76 et suivants.

83. Quant aux autres coefficients de la même formule on pourra, si l’on veut, les faire dépendre des précédents, ou simplement d’un quelconque d’entre eux, par des considérations semblables à celles du no  79 ; on peut aussi déterminer à priori, d’après les formules du no  81, le degré et la forme de l’équation d’où chacun de ces coefficients doit dépendre immédiatement.

Pour cet effet il suffira de remarquer que les quantités sont analogues aux quantités correspondantes en ce que ces quantités sont des fonctions des mêmes racines, lesquelles ont la propriété de demeurer les mêmes, quelques permutations qu’on fasse entre ces racines ; il en est de même des quantités d’où il s’ensuit que l’on pourra appliquer aux coefficients des raisonnements et des conclusions semblables à celles qui ont lieu pour les coefficients

Mais à l’égard des coefficients il faudra les considérer à part, et après avoir prouvé par des raisonnements analogues à ceux du no  77 que chacune de ces quantités ne pourra avoir que valeurs différentes, on remarquera que ces quantités ne souffrant aucun changement par les permutations des quantités ou ou, etc., entre elles, il faudra encore diviser le nombre par pour avoir celui des valeurs différentes de chacun des coefficients d’où il s’ensuit que chacun de ces mêmes coefficients devra être déterminé par une équation particulière du degré

84. Supposons que l’équation proposée soit d’un degré pair, et prenons en sorte que l’on ait dans ce cas l’équation deviendra

laquelle donne les deux racines

et il faudra, suivant la méthode précédente, que l’équation proposée

soit formée du produit de ces deux-ci

Ainsi l’on aura

Et l’on trouvera que l’équation en sera du degré

avec tous les exposants pairs.

Donc, si l’on suppose que l’équation proposée ait un diviseur du degré et tel que

on trouvera pour une équation du degré

ce qui s’accorde avec ce que l’on sait d’ailleurs, puisque ce nombre exprime celui des combinaisons de choses prises à

Et comme en faisant

on doit avoir une équation en qui n’ait que des puissances paires, il s’ensuit que l’équation en sera telle que, si l’on y fait disparaître le second terme, tous les termes alternatifs disparaîtront en même temps, comme nous l’avons vu par rapport aux équations du quatrième degré (35).

85. Si l’équation proposée est du sixième degré, en sorte que et qu’on fasse on aura une équation en du degré

M. Bezout pense que cette équation pourra se décomposer en deux équations, au moyen d’une équation du second degré c’est de quoi je doute fort ; en effet, les racines de l’équation en seront représentées par ces dix quantités, lesquelles renferment toutes les valeurs de qui peuvent résulter des permutations entre les six racines

Or, si l’on suppose que les deux facteurs de l’équation dont il s’agit soient représentés par

il faudra que soit égale à la somme de cinq des dix quantités précédentes, et que soit égale à la somme des cinq autres ; et pour que les coefficients et ne soient affectés que de radicaux du second degré, il faudra que ces deux coefficients soient les racines d’une équation du second degré telle que

et étant des fonctions rationnelles des coefficients de l’équation proposée ; on aura donc

de sorte que tant la somme que le produit des deux quantités et devront être des fonctions rationnelles de et par conséquent des fonctions des racines telles, qu’elles ne changent point de valeur, quelque permutation qu’on fasse entre ces racines ; or cette condition a bien lieu à l’égard de la somme qui est égale à la somme de toutes les dix quantités ci-dessus ; mais il n’en est pas de même à l’égard du produit car on peut s’assurer facilement que, de quelque manière qu’on partage la somme des dix racines précédentes en deux sommes partielles de cinq racines chacune, le produit de ces deux sommes partielles n’aura jamais la propriété de demeurer invariable dans toutes les permutations qu’on pourra faire des racines entre elles.

On pourrait dire qu’il ne serait peut-être pas nécessaire que les deux quantités et fussent les racines d’une même équation du second degré, et que l’une de ces quantités pourrait dépendre d’une équation et l’autre d’une autre ; mais pour détruire cette exception il suffit de considérer que, supposant déterminée par une équation du second degré telle que

les deux racines de cette équation seront nécessairementégales chacune à la somme de cinq quelconques des dix quantités précédentes ; et il faudra que ces deux sommes ajoutées ensemble produisent une quantité qui ait la propriété de demeurer la même, quelque permutation qu’on fasse entre les racines ce qui ne saurait avoir lieu à moins que les deux sommes dont nous parlons ne renferment toutes les dix quantités en question ; par conséquent, l’une étant la somme de cinq de ces quantités, l’autre devra être nécessairement celle des cinq autres.


SECTION QUATRIÈME.
conclusion des réflexions précédentes, avec quelques remarques générales sur la transformation des équations, et sur leur réduction ou abaissementa un moindre degré.

86. On a dû voir par l’analyse que nous venons de donner des principales méthodes connues pour la résolution des équations, que ces méthodes se réduisent toutes à un même principe général, savoir à trouver des fonctions des racines de l’équation proposée, lesquelles soient telles : 1o que l’équation ou les équations par lesquelles elles seront données, c’est-à-dire dont elles seront les racines (équations qu’on nomme communément les réduites), se trouvent d’un degré moindre que celui de la proposée, ou soient au moins décomposables en d’autres équations d’un degré moindre que celui-là ; 2o que l’on puisse en déduire aisément les valeurs des racines cherchées.

L’art de résoudre les équations consiste donc à découvrir des fonctions des racines, qui aient les propriétés que nous venons d’énoncer ; mais est-il toujours possible de trouver de telles fonctions, pour les équations d’un degré quelconque, c’est-à-dire pour tel nombre de racines qu’on voudra ? C’est sur quoi il paraît très-difficile de pouvoir prononcer en général.

À l’égard des équations qui ne passent pas le quatrième degré, les fonctions les plus simples qui donnent leur résolution peuvent être représentées par la formule générale

étant les racines de l’équation proposée, qu’on suppose être du degré et étant une racine quelconque autre que l’unité de l’équation

c’est-à-dire une racine quelconque de l’équation

comme il résulte de tout ce qu’on a exposé dans les deux premières Sections, touchant la résolution des équations du troisième et du quatrième degré.

Quant à celle des équations du second degré dont nous avons jusqu’à présent fait abstraction, il est visible qu’elle se rapporte aussi au même principe ; car en faisant on aura la fonction et l’équation donnant cette fonction deviendra c’est-à-dire la différence des deux racines ; or l’art de résoudre les équations du second degré consiste uniquement à faire évanouir le second terme pour avoir une réduite qui, ne contenant que le carré de l’inconnue, soit résoluble par la simple extraction de la racine carrée ; et comme l’évanouissement du second terme dans une équation quelconque exige qu’on diminue les racines du coefficient de ce terme pris avec un signe contraire, et divisé par l’exposant du degré de l’équation, c’est-à-dire de la somme de toutes les racines divisée par le nombre de ces racines, il s’ensuit que la réduite du second degré aura pour racines les différences entre les racines de la proposée, divisées par ou bien ces différences mêmes, en supposant qu’on augmente les racines de la réduite dans la raison de à ce qui ne change rien à la nature de cette équation.

Il semble donc qu’on pourrait conclure de là par induction que toute équation, de quelque degré qu’elle soit, sera aussi résoluble à l’aide d’une réduite dont les racines soient représentées par la même formule

Mais, d’après ce que nous avons démontré dans la Section précédente à l’occasion des méthodes de MM. Euler et Bezout, lesquelles conduisent directement à de pareilles réduites, on a, ce semble, lieu de se convaincre d’avance que cette conclusion se trouvera en défau’t dès le cinquième degré ; d’où il s’ensuit que, si la résolution algébrique des équations des degrés supérieurs au quatrième n’est pas impossible, elle doit dépendre de quelques fonctions des racines, différentes de la précédente.

87. Comme jusqu’ici nous n’avons fait que chercher ces sortes de fonctions à posteriori et d’après les méthodes connues pour la résolution des équations, il est nécessaire de faire voir maintenant comment il faudrait s’y prendre pour les trouver à priori et sans supposer d’autres principes que ceux qui suivent immédiatement de la nature même des équations c’est l’objet que je me propose principalement dans cette Section.

Je donnerai d’abord des règles directes et générales pour déterminer le degré et la nature de l’équation d’où une fonction quelconque proposée des racines d’une équation de degré donné devra dépendre ; quoique cette matière ait déjà été traitée par d’habiles Géomètres, je crois qu’elle peut l’être encore d’une manière plus directe et plus générale, surtout dans le point de vue où nous l’envisageons ici, relativement à la résolution générale des équations.

Je ferai voir ensuite quelles sont les conditions nécessaires pour que l’équation dont il s’agit puisse admettre la résolution en supposant uniquement celle des équations des degrés inférieurs à celui de l’équation proposée ; et je donnerai à cette occasion les vrais principes et, pour ainsi dire, la métaphysique de la résolution des équations du troisième et du quatrième degré.

Je traiterai enfin en peu de mots de la réduction des équations qui peuvent se décomposer en d’autres plus simples à cause de quelque relation particulière qu’il y a entre leurs racines, et je montrerai par quelques exemples comment on peut découvrir ces relations, et abaisser par là les équations proposées à des degrés moindres.

88. Nous ne considérerons ici que des fonctions rationnelles, et nous désignerons ces fonctions en général par la caractéristique

Ainsi signifiera une fonction quelconque rationnelle de signifiera une fonction quelconque rationnelle de et une fonction quelconque rationnelle de et ainsi des autres.

Si dans une fonction donnée on a en sorte qu’il en résulte une simple fonction de au lieu de dénoter cette fonction par nous la désignerons pour plus de simplicité par pareillement, si dans la fonction donnée on fait on dénotera la fonction résultante de et par et, si l’on fait en même temps on aura une simple fonction de qu’on désignera par et ainsi des autres.

De plus, lorsqu’on voudra représenter une fonction de et par exemple, telle qu’elle demeure la même en échangeant en c’est-à-dire une fonction telle, que l’on ait nous la désignerons simplement par De même on désignera par toute fonction de et telle, qu’elle ne change point en échangeant les quantités entre elles d’une manière quelconque. Ainsi dénotera une fonction rationnelle de telle, qu’elle demeure la même en échangeant en sans toucher à la quantité et ainsi de suite.

Mais si l’on avait une fonction de et telle, qu’elle demeurât la même en échangeant à la fois en et en on la dénoterait par et si cette fonction demeurait aussi la même en échangeant simplement en ou en on la désignerait alors par

Enfin, si l’on a plusieurs fonctions des mêmes quantités, on appellera fonctions semblables celles qui varient en même temps ou demeurent les mêmes lorsqu’on y fait les mêmes permutations entre les quantités dont elles sont composées, de manière qu’elles puissent être désignées d’une manière analogue. Ainsi prenant les caractéristiques et pour désigner des fonctions différentes, les fonctions et seront semblables, ainsi que les fonctions et ainsi des autres.

89. Nous supposerons, comme dans la Section précédente, que l’équation proposée soit représentée généralement par

et que ses racines, qui doivent être au nombre de soient désignées par

Ainsi l’on aura, par la nature des équations,

Et il est clair que ces fonctions de par lesquelles sont exprimées les quantités seront nécessairement toutes de la forme et que par conséquent ces fonctions seront toutes semblables, ce qui est une propriété fondamentale des équations.

90. Cela posé, pour commencer par les cas les plus simples, supposons que l’équation proposée ne soit que du second degré, et qu’on demande l’équation par laquelle devra être déterminée la fonction

Je fais en sorte que soit l’inconnue de l’équation cherchée, et comme et sont déterminées l’une et l’autre par la même équation

je mets, pour plus de généralité, à la place de et à la place de

j’aurai ainsi l’équation

d’où il s’agira de chasser et par le moyen des deux équations

Soit

on chassera d’abord de l’équation par le moyen de l’équation ce qui donnera une équation que je désignerai par et dans laquelle sera une fonction rationnelle des quantités et On chassera ensuite de cette dernière équation par le moyen de l’autre équation et l’on aura l’équation finale sera une fonction rationnelle de et

Je remarque maintenant que puisque les racines de l’équation

sont et si l’on désigne par et les valeurs de qui viennent de la substitution de ces racines à la place de on aura (par ce qui a été démontré dans le no 13 de la Section I)

Et de même, à cause que et sont aussi les racines de l’équation si l’on désigne par et les valeurs de qui résulteront de la substitution de et à la place de on aura

Or on a

donc

et de là

donc on aura

Or, si l’on considère la fonction et qu’on fasse qu’on élimine ensuite de l’équation par le moyen de l’équation on aura l’équation sera une fonction rationnelle de et de Et désignant par et les valeurs de qui résultent de la substitution de à la place de on aura

Mais on a

donc

Faisons

et l’on aura et par conséquent de sorte que, comme et sont des fonctions rationnelles de et il est clair que sera aussi une fonction rationnelle de

Ainsi l’équation pourra se décomposer en ces deux-ci et et comme la première est celle qui donne la valeur de il s’ensuit que la détermination de la fonction proposée dépendra uniquement de l’autre équation

Donc, pour trouver cette équation qui résout le Problème, il n’y aura qu’à éliminer des équations

les inconnues ety par le moyen des équations

et désignant par et les équations résultantes on aura sur-le-champ

91. On voit par l’expression de que l’équation qui doit servir à déterminer la valeur de la fonction est du second degré, et que ses deux racines sont et En effet, comme les racines et sont déterminées de la même manière par l’équation il est clair que les deux fonctions et qui ne diffèrent entre elles que par l’échange mutuel des racines devront être aussi déterminées par une même équation.

Si la fonction était de la forme en sorte que l’on eût (88)

alors on aurait

par conséquent l’équation deviendra simplement

d’où l’on voit que la fonction dont il s’agit sera déterminée dans ce cas par une équation linéaire ; par conséquent elle sera donnée par une expression rationnelle en et

92. Qu’on demande maintenant l’équation par laquelle devra être déterminée la fonction en supposant que soient les racines de l’équation du troisième degré

Prenant, comme ci-dessus, pour l’inconnue de cette équation, et mettant à la place de j’aurai l’équation

d’où il s’agira d’éliminer successivement par le moyen des trois

équations

Soit

qu’on élimine d’abord de l’équation la quantité par le moyen de l’équation en on aura une seconde équation que je désignerai par et où sera une fonction rationnelle de et des coefficients Qu’on élimine ensuite de l’équation par le moyen de l’équation en on aura une troisième équation, que je désignerai par et où sera une fonction rationnelle de et des coefficients Qu’on élimine enfin de cette équation la quantité par le moyen de l’équation en on aura une équation finale, qu’on pourra désigner par et où sera une fonction rationnelle de

Or, puisque les racines de l’équation en sont si l’on désigne par les valeurs, de qui résultent des substitutions de ces racines à la place de on aura, par le no 13,

De même, puisque les racines de l’équation en sont aussi si l’on dénote par les valeurs de qui résultent des substitutions de ces racines à la place de , on aura par la même raison

Enfin, comme l’équation en a aussi les mêmes racines dénotant par les valeurs de qui résultent de leurs substitutions à la place de on aura

Mais il est clair qu’on aura

Donc

De là on aura

Donc

Donc

Donc enfin, si l’on multiplie ces trois quantités ensemble, et qu’on fasse,

pour abréger,

on aura

Maintenantje remarque que, si l’on suppose

et qu’on élimine par le moyen de l’équation en

on trouvera, comme dans le numéro précédent, l’équation finale de sorte que sera nécessairement une fonction rationnelle de et des coefficients

On trouvera, par les mêmes principes, que si l’on fait

et qu’on élimine successivement et par le moyen des deux équations en et en savoir

on aura, pour équation finale, où la quantité sera par conséquent une fonction rationnelle de et comme en est une aussi, il s’ensuit que sera de même une fonction rationnelle de et de

Pareillement, si l’on fait

et qu’on élimine et par les mêmes équations, on trouvera cette équation finale dans laquelle la quantité sera donc une fonction rationnelle de de sorte que la quantité en sera une aussi.

Enfin, si l’on fait

et qu’on élimine de même et on trouvera pour équation finale de sorte que la quantité sera une fonction rationnelle de et par conséquent la quantité en sera aussi une.

Donc, puisque les quantités sont chacune des fonctions rationnelles de et des coefficients il s’ensuit que l’équation

pourra se décomposer en celles-ci

de sorte que la quantité sera aussi une fonction rationnelle de

Or il est facile de voir que les équations

sont toutes étrangères à la question proposée, c’est-à-dire à la détermination de la fonction car ces équations, comme il paraît par les expressions des quantités ont pour racines des fonctions de d’une forme différente de la proposée ; ainsi il ne restera que l’équation qui renfermera par conséquent toutes les racines utiles à la solution du Problème.

93. Pour trouver donc cette équation il n’y aura qu’à éliminer des cinq équations

les inconnues par le moyen des équations

et, désignant les équations finales résultantes par

on aura

par conséquent

Cette méthode au reste serait extrêmement longue et pénible dans la pratique, et elle le deviendrait de plus en plus, à mesure que l’équation proposée serait d’un degré plus haut ; aussi ne l’ai-je donnée ici que parce qu’elle sert à faire connaître, d’une manière directe et indépendante de toute considération étrangère, la nature de l’équation cherchée

94. En effet il est visible, par l’expression de donnée ci-dessus (92), que la réduite sera du sixième degré, ayant pour racines les fonctions

lesquelles sont toutes semblables, et dérivent l’une de l’autre par de

simples permutations entre les quantités il est clair en effet que, comme ces quantités sont toutes déterminées de la même manière par l’équation

dont elles sont les racines, l’équation qui donnera la valeur d’une fonction quelconque des mêmes quantités devra donner également les autres fonctions qui viendront de toutes les permutations possibles entre elles. Cette proposition paraît même assez évidente par elle-même pour n’avoir pas besoin de démonstration ; mais on ne voit pas aussi évidemment, ce me semble, que l’équation dont il s’agit ne devra contenir d’autres racines que les différentes fonctions qui viendront des permutations entre les racines de la proposée ; c’est-à-dire qu’en supposant cette équation formée du produit des facteurs simples

chacun des coefficients pourra toujours s’exprimer par une fonction rationnelle des coefficients de l’équation proposée ; or c’est sur quoi notre démonstration ne laisse aucun doute, puisque l’on a vu que la quantité qui est égale à ce produit, est toujours nécessairement une fonction rationnelle de

95. Si l’équation proposée était d’un degré plus haut, en sorte qu’elle eùt quatre ou un plus grand nombre de racines on pourrait trouver de même l’équation qui servirait à déterminer la fonction et l’on verrait que la quantité serait le produit d’autant de facteurs simples tels que

qu’il y a de permutations possibles entre les racines de sorte que, si l’équation proposée est du degré le nombre des fac-

teurs simples de la quantité et par conséquent le nombre des racines de l’équation sera marqué par puisque ce nombre est celui de toutes les permutations dont choses sont susceptibles ; et les racines de cette équation seront les différentes fonctions dans lesquelles la fonction proposée pourra se changer par les permutations des racines entre elles.

96. Or, pour trouver toutes ces différentes fonctions par ordre et sans en omettre aucune, on échangera d’abord, dans la fonction proposée, en et vice versâ ; on aura ainsi deux fonctions ; ensuite on échangera successivement dans ces deux-ci en en et l’on aura six fonctions puis dans ces six on échangera successivement en en en et l’on aura vingt-quatre fonctions, et ainsi de suite, jusqu’à ce que l’on ait épuisé toutes les racines

D’où l’on voit clairement que le nombre des fonctions différentes doit croître suivant les produits des nombres naturels

Ayant toutes ces fonctions on aura donc les racines de l’équation de sorte que, si on la représente par

on aura et le coefficient sera égal à la somme de toutes les fonctions trouvées, le coefficient égal à la somme de tous les produits de ces fonctions multipliées deux à deux, le coefficient égal à la somme de tous les produits des mêmes fonctions multipliées trois à trois, et ainsi de suite.

Et comme nous avons démontré ci-dessus que l’expression de doit être nécessairement une fonction rationnelle de et des coefficients de l’équation proposée, il s’ensuit que les quantités seront nécessairement des fonctions rationnelles de qu’on pourra trouver directement, comme nous l’avons pratiqué dans les Sections précédentes. Voyez là-dessus, outre l’Ouvrage de M. Cramer que nous avons déjà cité, encore celui de M. Waring, qui a pour titre Meditationes algebraïcœ, Ouvrage rempli d’excellentes recherches sur les équations.

97. Quoique l’équation doive être, en général, du degré qui est égal au nombre des permutations dont les racines sont susceptibles, cependant s’il arrive que la fonction soit telle, qu’elle ne reçoive aucun changement par quelqu’une ou quelques-unes de ces permutations, alors l’équation dont il s’agit s’abaissera nécessairement à un degré moindre.

Car supposons, par exemple, que la fonction soit telle, qu’elle conserve la même valeur en échangeant en en et en en sorte que l’on ait

il est clair que l’équation aura déjà deux racines égales ; mais je vais prouver que dans cette hypothèse toutes les autres racines seront aussi égales deux à deux. En effet, considérons une racine quelconque de la même équation, laquelle soit représentée par la fonction

comme celle-ci dérive de la fonction

en échangeant en en en en il s’ensuit qu’elle devra garder aussi la même valeur en y changeant en en et en de sorte qu’on aura aussi

Donc, dans ce cas, la quantité sera égale à un carré, et par conséquent l’équation se réduira à celle-ci dont la dimension sera

On démontrera de la même manière que, si la fonction

est de sa propre nature telle, qu’elle conserve la même valeur en faisant deux, ou trois, ou un plus grand nombre de permutations différentes entre les racines les racines de l’équation seront égales trois à trois, ou quatre à quatre, ou, etc. ; en sorte que la quantité sera égale à un cube ou à un carré-carré ou, etc., et que par conséquent l’équation se réduira à celle-ci dont le degré sera égal às ou égal à ou, etc.

98. Donc, si la fonction proposée est de la forme

qui a la propriété de demeurer la même en échangeant en (88), toutes les racines de l’équation seront égales deux à deux ; de sorte que cette équation s’abaissera au degré

De même la fonction

devant demeurer la même, quelque permutation qu’on y fasse entre les trois racines il s’ensuit que l’équation aura toutes ses racines égales à de sorte qu’elle s’abaissera au degré

Et la fonction

qui doit demeurer la même, quelque permutation qu’on fasse entre les deux racines ainsi qu’entre les deux donnera une équation où les racines seront toutes égales à de sorte qu’elle s’abaissera au degré

En général, la fonction

donnera une équation où la quantité sera une puissance qui

aura pour exposant le nombre de manière que cette équation s’abaissera au degré

On voit par là que toute fonction de la forme

qui aura la propriété de demeurer la même, quelque permutation qu’on fasse entre les racines de l’équation proposée, devra dépendre seulement d’une équation du degré c’est-à-dire du premier degré ; de sorte qu’elle devra être déterminable algébriquement et rationnellement par les coefficients de la proposée ; théorème que nous avons déjà supposé dans les Sections précédentes comme évident par soi-même, mais dont la démonstration rigoureuse dépend des principes établis ci-dessus.

On peut aussi conclure de ce qui précède que, si l’on a une fonction quelconque qui ne contienne qu’un nombre des racines en sorte qu’elle soit représentée par

elle conduira simplement à une équation du degré car il est clair qu’on peut regarder la fonction proposée comme étant de la forme

en supposant, ce qui est permis, que les racines y soient multipliées par des coefficients égaux à zéro ou élevées à des exposants égaux à zéro.

Donc la fonction

conduira à une équation du degré et ainsi des autres.

Et la fonction

conduira à une équation du degré

Ainsi, si l’on voulait abaisser, en général, l’équation proposée du degré à une équation d’un degré inférieur telle que

laquelle eût toutes ses racines communes avec la proposée, c’est-à-dire dont les racines fussent on tomberait nécessairement dans une équation du degré

pour la détermination de chaque coefficient car ces coefficients seraient nécessairement des fonctions de la forme

comme on l’a fait remarquer dans le no 89. C’est aussi une proposition connue depuis longtemps, mais qu’on n’avait pas encore, ce me semble, démontrée en toute rigueur.

Or, comme en prenant moindre que le nombre

ne peut jamais être plus petit que il s’ensuit que l’on ne peut rien se promettre de ces sortes de réductions pour la résolution générale des équations.

99. De tout ce que nous venons de démontrer il s’ensuit donc, en général il que toutes les fonctions semblables des racines d’une même équation sont nécessairement données par des équations du même degré ; 2o que ce degré sera toujours égal au nombre ( étant le degré de l’équation donnée), ou à un sous-multiple de ce nombre ; 3o que pour trouver directement l’équation la plus simple par laquelle devra être déterminée une fonction quelconque donnée de il n’y aura qu’à chercher toutes les différentes valeurs que cette fonction peut recevoir par les permutations des quantites entre elles, et, prenant ces valeurs pour les racines de l’équation cherchée, on déterminera par leur moyen les coefficients de cette équation suivant les méthodes connues et employées déjà plusieurs fois dans ce Mémoire.

100. Or, dès qu’on aura trouvé, soit par la résolution de l’équation ou autrement, la valeur d’une fonction donnée des racines je dis qu’on pourra trouver aussi la valeur d’une autre fonction quelconque des mêmes racines, et cela, généralement parlant, par le moyen d’une équation simplement linéaire, à l’exception de quelques cas particuliers qui exigent une équation du second degré, ou du troisième, etc. Ce Problème me paraît un des plus importants de la théorie des équations, et la Solution générale que nous allons en donner servira à jeter un nouveau jour sur cette partie de l’Algèbre.

Nous commencerons par supposer, pour plus de simplicité, que les deux fonctions proposées, dont les valeurs sont l’une connue et l’autre inconnue, soient semblables, suivant la définition que nous avons donnée de ce terme dans le no 88, et nous désignerons, en général, par la première de ces deux fonctions et par la seconde ; nous désignerons de plus par les différentes valeurs de qui proviennent de toutes les permutations possibles entre les racines et pareillement par les différentes valeurs de la fonction provenantes des mêmes permutations ; car, les deux fonctions et étant supposées semblables, il s’ensuit que le nombre des valeurs différentes dont elles seront susceptibles par toutes les permutations possibles entre sera le même pour l’une et pour l’autre, et que ces valeurs seront dues aux mêmes permutations dans les deux fonctions.

Ainsi les quantités seront les racines de l’équation en qui sera par conséquent du degré et les quantités seront pareillement les racines de l’équation en laquelle sera du même degré. On pourra donc trouver ces équations en et en par les méthodes exposées plus haut ; mais nous n’aurons besoin que d’avoir l’équation en que nous représenterons, en général, par

ou plus simplement par en supposant

où les coeflïcients seront des fonctions connues des coefficients de l’équation proposée en dont les racines sont

Cela posé, qu’on considère en général la fonction il est visible que les différentes valeurs de cette fonction résultantes de toutes les permutations possibles entre les racines seront de sorte qu’en prenant la somme de toutes ces valeurs on aura la fonction

laquelle aura la propriété de demeurer invariable, quelque permutation qu’on y fasse entre les racines et par conséquent pourra s’exprimer algébriquement et rationnellement par les coefficients (98).

Qu’on cherche donc les valeurs de cette fonction pour les exposants et qu’on les dénote par les quantités on aura les équations suivantes

où les termes seront des quantités connues en

Il s’agit maintenant de tirer de ces équations, par la voie de l’élimination, les valeurs des inconnues or, si l’on suivait pour cela la méthode ordinaire, on tomberait dans des expressions fort compliquées et qui auraient d’ailleurs l’inconvénient de renfermer à la fois toutes les quantités il faudra donc employer une autres méthode, et voici celle qui m’a paru la plus propre.

Je prends un nombre de quantités indéterminées que je désigne par et je multiplie respectivement par ces quantités toutes les équations précédentes, excepté la première ; après quoi je les ajoute ensemble, ce qui me donne cette équation unique

Supposons, en général,

et désignons par les valeurs particulières de que l’on aura en faisant successivement il est clair que l’équation précédente se réduira à cette forme très-simple

Maintenant, pour trouver la valeur d’une quelconque des inconnues comme de il est clair qu’il n’y aura qu’à faire évanouir les coefficients de toutes les autres inconnues, à l’exception de celle-ci, et l’on aura sur-le-champ

Et les équations

à l’exception de serviront à déterminer les indéterminées

En effet, pour que toutes ces équations particulières aient lieu à la fois ; il est visible qu’il faudra que l’équation générale ait pour racines les quantités à l’exception seulement de donc, si l’on multiplie le polynôme dont le terme tout connu est l’unité, par le facteur on aura le polynôme qui étant égalé à zéro aura pour racines toutes les quantités mais ces racines sont déjà celles de l’équation donc, puisque le terme tout connu, tant du polynôme que du polynôme est égal à l’unité, il s’ensuit qu’on aura l’équation

ou bien

d’où, à cause que cette équation doit être identique, on tire

et de là

Maintenant, pour trouver la valeur de la quantité on remarquera que l’on a, en général,

de sorte qu’il n’y aura qu’à faire dans cette expression mais, comme cette supposition fait évanouir en même temps le numérateur parce que est une des racines de l’équation et le dénominateur il faudra, suivant la règle connue, prendre à la place de ces quantités leurs différences ; ainsi l’on aura, en faisant varier la fraction ainsi, la valeur de sera égale à ce que devient la quantité lorsqu’on y met à la place de ce qu’on peut désigner ainsi

ou bien, en substituant la valeur de et changeant, après la différentiation, en

Il n’y aura donc plus qu’à substituer cette valeur de ainsi que celles de trouvées ci-dessus, dans l’expression générale de donnée plus haut, et l’on aura la valeur de la fonction exprimée uniquement par celle de la fonction correspondante donnée et par les coefficients de l’équation proposée.

Toute la difficulté se réduit donc à trouver tant les coefficients de l’équation en

que les quantités c’est à quoi l’on peut parvenir par différentes méthodes, comme on l’a vu plus haut ; l’essentiel consiste à remarquer que toutes ces quantités seront toujours exprimables algébriquement par les seuls coefficients de l’équation proposée ; ce que nous avons démontré à priori avec toute la rigueur possible.

Ces quantités étant donc trouvées, si l’on fait, pour plus de simplicité,

on aura, pour la valeur d’une quelconque,

en prenant pour la fonction correspondante à la fonction

101. Il est évident que cette solution servira toujours, quelle que soit la valeur donnée de pourvu qu’elle ne rende pas nul le dénominateur

or, comme la valeur de doit déjà être une racine de l’équation il s’ensuit que le cas de n’aura lieu que lorsque cette valeur sera une racine multiple de la même équation

Pour trouver ce qui doit arriver dans ce cas-là, supposons que soit la valeur donnée, de laquelle répond à la valeur cherchée de et que dans la suite des valeurs il s’en trouve une autre comme qui soit égale à en sorte que la valeur donnée soit une racine double de l’équation considérant d’abord les valeurs et comme inégales, on aura

et, comme

on aura, en différentiant et faisant successivement

où l’on voit que dans le cas de ces deux quantités seront nulles.

Supposons pour un moment que étant une quantité infiniment petite, on aura, en négligeant les infiniment petits du second ordre,

Donc faisant, pour abréger,

on aura

mais

donc on aura

et de là

Mais, puisque

il est facile de voir qu’on aura, lorsque

par conséquent

Donc

Ainsi, dans ce cas la formule ne donnera pas la valeur de chacune des inconnues qui répondent aux racines égales mais seulement celle de leur somme et l’on voit, tant par l’expression précédente que par l’analyse d’où elle résulte, que la valeur de la moitié de cette somme résultera de l’expression générale de du numéro précédent, en prenant, la place du numérateur et du dénominateur, leurs différentielles divisées par

On trouvera de la même manière que, lorsque la valeur donnée de sera une racine triple de l’équation en sorte que l’on ait, par exemple, alors on ne pourra pas avoir en particulier chacune des fonctions correspondantes mais seulement leur somme et l’expression générale de donnera le tiers de cette somme en prenant, à la place du numérateur et du dénominateur de cette expression leurs différentielles secondes divisées par et ainsi de suite.

102. En général, si en substituant la valeur connue de dans le dénominateur de l’expression générale de du no 101, on trouve que ce dénominateur devient nul, alors on le différentiera autant de fois de suite qu’il sera nécessaire pour qu’il ne devienne plus zéro par la même substitution, en traitant toujours les différences premières comme constantes on différentiera ensuite un pareil nombre de fois le numérateur, et la nouvelle fraction qu’on aura de cette manière exprimera la somme d’autant de valeurs particulières de qu’il y aura d’unités dans le nombre des différentiations augmenté de l’unité, cette somme étant divisée par le nombre des valeurs de et ces valeurs seront celles qui répondent aux valeurs égales de dont le nombre, comme on sait, est toujours égal à celui des différentielles successivesde qui s’évanouissent en même temps, augmenté de l’unité.

On connaîtra donc ainsi la somme de ces différentes valeurs de or, on pourra trouver de même la somme de leurs carrés, de leurs cubes, etc., car il n’y aura pour cela qu’à faire un nouveau calcul en prenant, à la place de la fonction son carré et ensuite le cube etc. ; de là on tirera, par les formules connues, les valeurs des produits deux à deux, trois à trois, etc., des valeurs de de sorte qu’on connaitra tous les coefficients de l’équation dont ces valeurs seront les racines ; et il faudra ensuite résoudre cette équation pour avoir chacune des valeurs cherchées en particulier.

D’où il s’ensuit que lorsque, parmi les valeurs de la fonction il s’en trouve deux ou plusieurs qui sont égales entre elles, celles des valeurs qui répondent aux valeurs égales de ne pourront pas être données simplement par une fonction rationnelle de et des coefficients de l’équation proposée ; mais elles le seront par une équation d’un degré égal au nombre de ces valeurs égales, et dont tous les coefficients seront eux-mêmes exprimés rationnellement en et en

C’est ce qui est d’ailleurs bien naturel et conforme aux principes de l’Analyse. Car, puisqu’il y a différentes valeurs de qui répondent à une même valeur de il est clair que chacune de ces valeurs de dépendra de la même manière de la valeur correspondante de et qu’ainsi ces valeurs ne pourront être que les racines d’une même équation, dont les coefficients seront donnés en par des expressions rationnelles.

Supposons, par exemple, qu’ayant une équation d’un degré quelconque telle que

on veuille en trouver une autre d’un degré moindre telle que

qui ait toutes ses racines communes avec celle-là, c’est-à-dire qui en soit un diviseur ; on sait que les coefficients seront tous des fonctions semblables des racines de la proposée, et qui seront susceptibles d’un nombre

de variations, en sorte que chacun de ces coefficients sera nécessairement donné en par une équation d’un degré égal à ce même nombre (nos 89 et 98). Or, dès qu’on connaîtra la valeur d’un quelconque de ces coefficients, on pourra, à l’aide du Problème que nous venons de résoudre, trouver la valeur de hacun des autres coefficient ; et il s’ensuit de notre solution que si la valeur du coefficient supposé connu est une racine simple de l’équation d’où dépend la détermination de ce coefficient, tous les autres pourront être exprimés rationnellement, par celui-là ; mais si la valeur du coefficient connu est une racine double, ou triple, ou, etc., de la même équation, alors chacun des autres coefficients ne pourra être donné par celui-là que par le moyen d’une équation du second, ou du troisième, ou, etc., degré.

Pour confirmer à posteriori ce que nous venons de trouver à priori, prenons l’équation du quatrième degré

et supposons, comme dans le no 35 (Section II), qu’elle soit divisible par celle-ci du second degré

on parviendra, ainsi qu’on l’a déjà vu, aux deux équations de conditions

dont la première donne d’abord

ainsi, ayant exprimé rationnellement en il suffira de trouver la valeur de pour avoir celle de sans aucune extraction de racines. Cependant, s’il arrive que la valeur de soit égale à et qu’on ait en même temps cette valeur de donnera et il faudra alors, pour connaître la valeur de avoir recours à l’autre équation où monte au second degré, et qui est

de sorte qu’en mettant à la place de on aura celle-ci

par la résolution de laquelle il faudra donc déterminer Or je dis que le cas dont il s’agit est celui où la valeur de sera une racine double de l’équation en

Pour le prouver nous remarquerons que cette équation en doit venir de la substitution de la valeur de tirée de la première équation, dans la seconde ; ainsi faisant, pour abréger,

en sorte que on aura, pour l’équation en celle-ci

,
laquelle étant développée montera au sixième degré et se trouvera la même que celle du numéro cité 35 ; or il est visible que, lorsque une des racines de cette équation sera égale a parce qu’en faisant on aura en même temps et et comme ces deux conditions détruisent, non-seulementtous les termes de l’équation dont il s’agit, mais aussi ceux de sa différentielle qui sera

il s’ensuit que la racine sera une racine double de la même équation.

103. Nous avons supposé jusqu’ici que les deux fonctions et étaient semblables ; considérons maintenant le Problème dans toute sa généralité en supposantque ces fonctions soient d’une forme quelconque.

Qu’on fasse successivement dans l’une et l’autre fonction toutes les permutations possibles entre les racines dont elles sont composées, en n’ayant cependant aucun égard à celles de ces permutations qui redonneraient à la fois les mêmes valeurs de et de et il en résultera un égal nombre de valeurs correspondantes de et de que l’on désignera, comme dans le no 100, par et par Dans le cas où les deux fonctions et sont semblables, les valeurs seront toutes exprimées d’une manière différente, et seront les racines de l’équation la plus simple qui servira à déterminer la fonction en et il en sera de même des valeurs ce qui n’empêche cependant pas que quelques-unes des valeurs de ou de ne puissent être égales entre elles, comme dans le cas que nous avons examiné dans le no 102 ; il s’agit ici uniquement de la forme de ces valeurs et non de leur quantité absolue. Au contraire, lorsque les fonctions et ne seront pas semblables, il arrivera nécessairement que parmi les valeurs ou il y en aura qui seront les mêmes, en sorte que le nombre des valeurs différentes de ou de sera moindre que et il est facile de conclure de ce que nous avons démontré dans le no 97 que ce nombre ne pourra être qu’un sous-multiple de Or il y a ici deux cas à considérer, suivant que le nombre des valeurs différentes de la fonction donnée sera égal à ou à un sous-multiple de

1o Supposons que les valeurs de la fonction soient toutes différentes, c’est-à-dire représentées d’une manière différente ; en ce cas il est clair que l’équation aura nécessairement pour racines toutes ces différentes valeurs, en sorte qu’elle sera essentiellement du degré quelles que soient d’ailleurs les valeurs de la fonction cherchée ainsi la solution du no 100 s’appliquera également à ce cas.

2o Supposons que parmi les valeurs il n’y en ait qu’un nombre de différentes, étant un facteur de en sorte que en ce cas, si est l’équation dont ces différentes valeurs sont les racines, il s’ensuit de ce qu’on a démontré dans le no 97 que l’équation qui aura toutes les valeurs pour racines sera en sorte que chacune de ses racines en aura autres qui lui seront égales. On pourra donc encore appliquer à ce cas la solution générale du no 100, pourvu qu’on prenne pour l’équation en c’est-à-dire qu’on fasse

mais, à cause que chaque racine de cette équation est une racine égale, il faudra modiffér la solution par les règles données dans le no 102 pour le cas des racines égales ; et au lieu de trouver la valeur de chaque répondante à chaque on ne trouvera plus que la valeur de la somme de toutes les qui répondront aux valeurs égales de or, comme chacune des valeurs différentes de se trouve répétée fois dans la série et que d’ailleurs à chacune des valeurs de cette série il répond une valeur de la série en sorte que les mêmes valeurs de et de ne se trouvent pas deux fois dans les mêmes séries à des places correspondantes, il s’ensuit qu’à chaque valeur différente de il répondra valeurs différentes et qu’ainsi en connaissant une valeur de on ne pourra connaître que la somme des valeurs différentes de qui y répondent.

De là et du no 103 on conclura donc que, dans ce cas, chaque valeur de ne pourra être donnée en qu’au moyen d’une équation du degré laquelle renfermera à la fois toutes les valeurs de répondantes à une même valeur de

Au reste on peut simplifier beaucoup la solution du cas dont il s’agit en le ramenant à celui des fonctions semblables ; car il est visible que si à la valeur par exemple, répondent les valeurs toute fonction de la forme sera telle, qu’elle n’admettra plus que valeurs différentes comme la fonction et qu’ainsi ces deux fonctions seront des fonctions semblables des racines Par conséquent, en prenant à la place de la fonction une fonction quelconque de la forme on trouvera directement la valeur de cette fonction en par la solution du no 100, en employant simplement l’équation qui n’aura pour racines que les différentes valeurs de Ainsi l’on pourra connaître par ce moyen tous les coefficients de l’équation dont les valeurs seront les racines, puisque chacun de ces coefficients est nécessairement une fonction de la même forme (89).

104. Donc

1o Si l’on a deux fonctions quelconques et des racines de l’équation

et que ces fonctions soient telles, que toutes les permutations entre les racines qui feront varier la fonction fassent varier aussi en même temps la fonction on pourra, généralement parlant, avoir la valeur de en et en par une expression rationnelle, de manière que connaissant une valeur de on connaîtra aussi immédiatement la valeur correspondante de nous disons généralement parlant, car s’il arrive que la valeur connue de soit une racine double, ou triple, etc. de l’équation en alors la valeur correspondante de dépendra d’une équation carrée, ou cubique, etc., dont tous les coefficients seront des fonctions rationnelles de et de

2o Si les fonctions et sont telles, que la fonction conserve la même valeur par des permutations qui font varier la fonction alors on ne pourra trouver la valeur de en et en qu’au moyen d’une équation du second degré, si à une même valeur de répondent deux valeurs différentes de ou du troisième degré, si à une même valeur de répondent trois valeurs différentes de , et ainsi de suite. Les coefficients de ces équations en seront, généralement parlant, des fonctions rationnelles de et de en sorte qu’étant donnée une valeur de on aura par la simple résolution d’une équation du second ou du troisième degré, etc. ; mais s’il arrive que la valeur connue de soit une racine double ou triple, etc., de l’équation en alors les coefficients des équations dont il s’agit dépendront encore eux-mêmes d’une équation du second ou du troisième degré, etc.

De là on peut déduire les conditions nécessaires pour pouvoir déterminer les valeurs mêmes des racines au moyen de celles d’une fonction quelconque de ces racines ; car il n’y aura pour cela qu’à prendre la simple racine à la place de la fonction et appliquer à ce cas les conclusions précédentes.

105. Voyons maintenant l’application qu’on peut faire des principes établis jusqu’ici, à la résolution générale des équations ; nous commencerons par examiner le cas où il n’y a que trois racines c’est-à-dire où l’équation proposée est du troisième degré.

Dans ce cas, si l’on considère la fonction générale on trouvera qu’elle doit dépendre d’une équation du degré dont les six racines seront

Maintenant, pour pouvoir abaisser cette équation à un degré moindre que celui de la proposée, il est clair qu’il n’y a d’autre moyen que de faire en sorte que ses racines soient égales, trois à trois ; auquel cas elle

se réduira au second degré. Pour cela on supposera que la fonction proposée soit telle, que l’on ait

indépendamment de toute relation entre les racines c’est-à-dire que cette fonction demeure la même en y changeant en en et en et l’on aura par la même raison

et ensuite

d’où l’on voit que ces trois fonctions

seront nécessairement égales, et qu’il n’y aura que ces trois-ci qui puissent l’être en vertu de la condition supposée ; par conséquent les trois autres fonctions

seront aussi égales ; de sorte que (98) l’équation dont il s’agit s’abaissera au degré

Or, pour trouver, en général, la forme de la fonction proposée, qu’on prenne une autre fonction quelconque représentée par qu’on désigne, pour abréger, par les trois fonctions

qui répondent aux trois premières fonctions égales ci-dessus, et par les trois fonctions

qui répondent aux trois autres fonctions égales ; il est clair qu’on pourra exprimer toute fonction de par une fonction quelconque de ou de puisque la caractéristique dénote une fonction indéterminée quelconque. Ainsi l’on pourra représenter, en général, la

fonction par celle-ci or il faut, par les conditions du Problème, que cette fonction demeure la même en échangeant en en et en donc, puisque par ces échanges les trois quantités ne font que se changer l’une dans l’autre, il s’ensuit que la fonction doit être telle qu’elle demeure la même, quelque permutation qu’on y fasse entre les trois quantités et par conséquent qu’elle soit de la forme

Toute fonction donc de la forme

aura les propriétés requises, et ne dépendra par conséquent que d’une équation du second degré. En effet, il est facile de voir que, quelques permutations qu’on fasse entre les trois racines les trois quantités ne peuvent que s’échanger entre elles, ou dans les trois quantités analogues d’où il s’ensuit que la fonction

ne peut que demeurer la même ou se changer dans la fonction

et qu’ainsi ces deux fonctions ne peuvent qu’être les racines d’une même équation du second degré.

Regardons maintenant ces fonctions comme connues, et la difficulté se réduira à trouver par leur moyen les valeurs de chacune des quantités et Or, comme les fonctions dont il s’agit sont de nature à demeurer les mêmes, quelque échange qu’on fasse entre les quantités ainsi qu’entre les quantités il s’ensuit de ce qui a été démontré ci-dessus, que les trois quantités seront les racines d’une équation du troisième degré, et les trois quantités les racines d’une autre équation du troisième degré. Qu’on représente ces équations par celles-ci

et, comme les coefficients sont des fonctions de la forme et les coefficients des fonctions analogues de la forme il résulte de ce qui précède que les coefficients correspondants et seront les racines d’une même équation du second degré, dont les coefficients seront donnés en et il en sera de même des coefficients et sur quoi il est bon de remarquer que dès qu’on aura trouvé les valeurs de et on pourra, par leur moyen, trouver immédiatement celles de et par la méthode du no 100.

Puis donc que les équations en et sont l’une et l’autre du troisième degré, il faut tâcher de les ramener à une forme qui en permette la résolution car, d’un côté, on ne saurait les résoudre, en général, au moins on est censé ne savoir pas les résoudre, puisque la résolution des équations de ce degré est précisément ce qui fait l’objet de cette recherche ; de l’autre, on ne peut pas employer la méthode du no 99 pour abaisser ces équations à un degré inférieur, à cause que l’exposant est un nombre premier qui n’a point de diviseur.

Or, comme la résolution des équations à deux termes est toujours possible, il conviendra de réduire les équations dont il s’agit à cet état ; ainsi nous supposerons que l’équation en devienne

ou, plus généralement, de la forme

et, pour trouver les conditions nécessaires pour cela, il n’y aura qu’à remarquer qu’en prenant pour dénoter les racines cubiques de l’unité, on aura

d’où l’on tire, à cause de

Ainsi, il faudra que la fonction de qu’on a désignée par la caractéristique soit telle qu’on ait, indépendamment de toute relation entre les racines

Et alors on aura aussi en échangeant en

c’est-à-dire

moyennant quoi l’équation en se réduira aussi à la forme

Or, en comparant l’équation

avec l’équation

on a

et par conséquent, à cause de

(puisqu’on est maître de substituer, à la place de une quelconque de ses racines),

on trouvera de même

De sorte que ces deux quantités

seront les racines d’un’e équation du second degré, qu’on pourra par conséquent regarder comme la réduite générale du troisième degré.

Par la résolution de cette équation on connaîtra donc les valeurs des deux fonctions et et l’on aura celles des quatre autres fonctions dérivées de celles-ci, par le moyen des équations de condition ci-dessus. Or, ces fonctions étant connues, on pourra en déduire les valeurs de chacune des trois racines (104).

106. Voilà donc le principe de la résolution des équations du troisième degré présenté de la manière la plus directe et la plus générale ; il est facile d’en faire des applications particulières et d’en déduire les différentes théories que nous avons données dans la Section I.

La forme la plus simple qu’on puisse donner à la fonction

est celle-ci

étant des constantes ; ainsi l’équation de condition sera

d’où l’on tire ces équations

La seconde donne

et ces valeurs satisfont aussi en même temps à la première et à la troisième, à cause de quant à la quatrième, elle donnera

ainsi la fonction proposée sera de la forme

qui, en faisant est précisément la même à laquelle nous avons été conduits à posteriori dans la Section citée (5).

107. Supposons maintenant qu’il y ait quatre racines, ce qui est le cas des équations du quatrième degré ; et, considérant la fonction générale on trouvera qu’elle devra dépendre d’une équation du degré dont les vingt-quatre racines seront (96)

Il faudra donc tâcher d’abaisser cette équation a un degré moindre que le quatrième, c’est-à-dire au second ou au troisième degré, et il conviendra de choisir ce dernier, comme étant le plus haut qu’on puisse admettre dans cette recherche. Pour cela, il faudra donc faire en sorte que les vingt-quatreracines que nous venons de trouver soient égales huit à huit, et l’on y parviendra en comparant ces racines les unes avec les autres de toutes les manières possibles, jusqu’à ce qu’on trouve une combinaison qui donne justement huit racines égales, car alors les seize autres seront aussi égales huit à huit (97).

Supposons d’abord

en sorte que la fonction proposée soit de la forme et toutes les racines deviendront égales deux à deux, de manière que l’équa-

tion ne montera plus qu’au douzième degré (98). Supposons ensuite qu’on ait aussi

c’est-à-dire que la forme de la fonction soit l’équation se réduira par là au sixième degré. Enfin, si l’on suppose encore qu’on ait

c’est-à-dire que la fonction proposée soit telle, qu’elle ne change point lorsqu’on y échange à la fois et en et elle se trouvera réduite à l’état demandé, puisqu’elle n’admettra plus que ces trois variations

de sorte qu’elle ne pourra dépendre que d’une équation du troisième degré, dont ces trois fonctions seront les racines.

Pour trouver la forme générale de la fonction dont il s’agit, je prends, comme dans le no 105, une autre fonction quelconque, désignée par et je la réduis d’abord à la forme pour qu’elle demeure la même en changeant en ou en supposant maintenant, pour plus de simplicité,

il est clair que toute fonction de la forme pourra s’exprimer par une fonction de et de sorte qu’on pourra représenter, en général, la fonction cherchée par mais il faut, par l’hypothèse, que cette fonction demeure aussi la même en y changeant à la fois et en et donc, puisque par ces permutations les deux quantités et se changent l’une dans l’autre, il faudra que la fonction soit de la forme

Ainsi l’expression générale de la fonction cherchée sera

en effet, si l’on fait

et ensuite

il est facile de voir qu’en faisant telle permutation qu’on voudra entre les quatre racines il n’en résultera jamais que ces trois fonctions différentes

de sorte qu’elles seront nécessairement racines d’une même équation du troisième degré.

On pourra donc par la résolution d’une équation du troisième degré déterminer la valeur de toute fonction telle que Ainsi, si l’on suppose que les quantités et soient les racines de cette équation du second degré

chacun des coefficients et sera donné par une équation du troisième degré, puisqu’il sera de la forme de sorte que par là on connaîtra les deux quantités et Or si l’on suppose, ce qui est permis, que la fonction ne renferme que les deux racines et en sorte qu’elle soit simplement de la forme on aura

donc, si l’on prend et pour les racines de l’équation

et pour celles de l’équation

les valeurs des coefficients ne dépendront que d’équations du

troisième et du second degré ; et ces valeurs étant connues on aura celles des quatre racines cherchées par la résolution des deux équations précédentes du second degré.

Tel est le principe général auquel se rapportent la plupart des méthodes pour la résolution des équations du quatrième degré, comme on peut le voir par l’analyse que nous en avons donnée dans la Section II.

En effet, si l’on fait

il en résultera la solution du no 32, et faisant

il en résultera celle du no 31 et ainsi des autres.

108. On peut encore dériver la résolution des équations du quatrième degré d’un autre principe, en faisant une combinaison différente des vingt-quatre fonctions du no 106. Car, si l’on suppose d’abord

c’est-à-dire que la fonction demeure la même en y changeant à la fois en en en et en on trouvera ensuite

et de là

et enfin

de sorte que les fonctions

seront égales, et qu’il n’y aura que ces quatre qui le seront ; d’où il s’ensuit que les quatre fonctions dont il s’agit seront égales quatre à quatre, ce qui conduira d’abord à une équation du sixième degré.

Maintenant, si l’on suppose encore cette égalité

c’est-à-dire que la même fonction reste aussi invariable en y changeant à la fois en et en et vice versâ, il en résultera encore quatre autres fonctions égales aux précédentes, savoir

moyennant quoi les vingt-quatre fonctions du numéro cité se trouveront égales huit à huit, et ne dépendront plus que d’une équation du troisième degré.

Or, en prenant une autre fonction quelconque des racines qu’on désignera par la caractéristique et désignant par les huit fonctions suivantes

qui répondent, comme on voit, aux huit fonctions égales ci-dessus, on pourra représenter toute fonction, qui doit demeurer la même soit en changeant en en en et en soit en changeant en et en par celle-ci

car il est facile de voir que par ces échanges les quantités ne feront que s’échanger les unes dans les autres.

Cette fonction aura donc la propriété de ne conduire qu’à une équation du troisième degré ; en effet, si l’on désigne par ces huit fonctions-ci

et par ces huit autres-ci

on verra aisément que, quelques permutations que l’on fasse entre les quatre racines on n’aura jamais que ces trois fonctions différentes

qui seront par conséquent racines d’une équation du troisième degré.

Ainsi, la résolution générale de ce degré étant supposée, on pourra déterminer toutes les fonctions de la forme des précédentes ; mais, comme les quantités entrent de la même manière dans ces sortes de fonctions, il est clair que leur détermination dépendra encore de trois équations, chacune du huitième degré.

Il faudra donc tâcher de nouveau de rabaisser ces équations au-dessous du quatrième degré ; c’est ce qu’on obtiendra en supposant que la fonction représentée par la caractéristique soit telle, qu’elle demeure la même en y changeant en en en et en car alors les quatre quantités deviendront égales, et les quatre autres aussi égales ; et il en sera de même des quantités correspondantes et

De cette manière les trois fonctions précédentes pourront s’exprimer simplement par les formules

et les quantités seront les racines de trois équations du second degré telles que

où les coefficients seront racines d’une équation du troisième degré, ainsi que les trois autres coefficients .

Il ne reste donc qu’a trouver la forme que doit avoir la fonction pour que les conditions prescrites aient lieu. Pour y parvenir de la manière la plus générale, on prendra une autre fonction quelconque de qu’on désignera par la caractéristique on formera, comme ci-dessus, les vingt-quatre fonctions qui répondent aux vingt-quatre permutations qu’on peut faire entre les racines  ; et l’on désignera ces fonctions par les quantités c’est-à-dire qu’on changera dans les formules ci-dessus la caractéristique en et les petites lettres dans les grandes lettres Ensuite, en prenant de nouveau la caractéristique pour désigner une fonction quelconque, il est facile de voir qu’on aura, en général,

De là il est aisé de conclure que la détermination des fonctions dépendra maintenant d’une équation du quatrième degré, ainsi que celle des fonctions et il en sera de même des autres fonctions et qui dépendront aussi quatre à quatre d’équations du quatrième degré.

Soit donc

l’équation dont les racines seraient il est clair qu’on pourra la résoudre de deux manières :

1o En faisant disparaître ses puissances impaires pour la réduire à la forme

qui est résoluble a la manière de celles du second degré ; or pour cela il faudra que les racines soient deux à deux égales et de signes différents, c’est-à-dire que l’on ait

Ainsi il faudra, dans ce cas, que la fonction soit telle, que l’on ait

et

c’est-à-dire qu’elle ait la propriété de devenir négative en y changeant en en en et en auquel cas on aura aussi

d’où l’on voit qu’on aura en même temps

c’est-à-dire

ce qui rendra l’équation en de cette forme

Et il est facile de voir que les autres équations dont les racines seront les quantités ou ou, etc., se trouveront aussi par là réduites à la même forme, puisque ces racines ont entre elles la même relation qu’ont les racines laquelle consiste en ce que l’une dérive de l’autre par les échanges de en en en et en

Les fonctions

et d’autres semblables, auront la propriété dont il s’agit.

2o On peut aussi rendre résoluble l’équation générale

en la réduisant à deux seuls termes

auquel cas les quatre racines seront exprimées ainsi

en prenant pour les quatre racines quatrièmes de l’unité ; de sorte que la condition pour ce cas sera, à cause de

c’est-à-dire qu’il faudra que la fonction soit telle, qu’on ait

Et alors toutes les équations du quatrième degré d’où dépendent les autres quantités se trouveront aussi réduites au même état, par la raison énoncée ci-dessus.

Il est facile de trouver que la fonction

aura la propriété requise ; d’où l’on peut conclure que l’analyse précédente contient le fondement de la méthode du no 47.

109. Voilà, si je ne me trompe, les vrais principes de la résolution des équations et l’analyse la plus propre à y conduire ; tout se réduit, comme on voit, à une espèce de calcul des combinaisons, par lequel on trouve à priori les résultats auxquels on doit s’attendre. Il serait à propos d’en faire l’application aux équations du cinquième degré et des degrés supérieurs, dont la résolution est jusqu’à présent inconnue ; mais cette application demande un trop grand nombre de recherches et de combinaisons, dont le succès est encore d’ailleurs fort douteux, pour que nous puissions quant à présent nous livrer à ce travail ; nous espérons cependant pouvoir y revenir dans un autre temps, et nous nous contenterons ici d’avoir posé les fondements d’une théorie qui nous paraît nouvelle et générale.

110. Avant de terminer cette Section, nous croyons devoir encore traiter en peu de mots de la réduction ou abaissement des équations à un moindre degré, qui a lieu lorsqu’il y a entre quelques-unes des racines de l’équation proposée quelque relation donnée. Car, quand toutes les racines d’une équation ont entre elles les mêmes rapports, l’équation est alors nécessairement et essentiellementd’un degré égal au nombre des racines, et il est impossible, généralement parlant, qu’elle puisse s’abaisser à un moindre degré. C’est ainsi, par exemple, que le Problème de la trisection de l’angle, considéré en général, est nécessairement du troisième degré, puisqu’il y a trois différentes manières d’y satisfaire, lesquelles conduisent toutes à une même équation, où les trois solutions sont également renfermées. Cependant il y a, comme on sait, des cas particuliers où l’on réussit à rabaisser ce Problème au second degré, parce qu’il y a alors un rapport particulier entre deux des racines de l’équation.

Il en est de même de tous les Problèmes et de toutes les équations. S’il y a une relation particulière entre quelques-unes des racines d’une équation quelconque, on est assuré qu’elle peut s’abaisser à un moindre degré et si l’on connaît à priori cette relation, ou par la forme même de l’équation, ou par la nature du Problème qui y a conduit, on pourra toujours trouver la réduction dont elle est susceptible.

M. Hudde est, je crois, le premier qui ait traité cette matière dans la Lettre De reductione equationum qui est imprimée à la suite de la Géométrie de Descartes. Il y fait voir comment une équation peut être abaissée à un moindre degré lorsqu’il y a entre quelques-unes de ses racines une relation telle, que leur somme, ou la somme des produits deux à deux, ou des produits trois à trois, ou, etc., est nulle ou égale à une quantité donnée ; comme aussi lorsqu’elle renferme des racines égales ou des diviseurs commensurables quelconques. D’autres Géomètres se sont ensuite exercés sur cette matière et ont perfectionné et étendu plus loin les règles et les méthodes de M. Hudde (voyez surtout l’excellent Ouvrage de M. Waring cité ci-dessus) ; mais on peut encore envisager ce sujet d’une manière plus générale d’après les principes établis dans les nos 100 et suivants,

111. Si, dans l’équation du degré

dont les racines sont on suppose qu’il y ait une relation connue entre quelques-unesde ces racines, comme entre celles-ci étant plus petit que il est d’abord clair que cette relation pourra toujours s’exprimer par une équation dont le premier membre sera une fonction algébrique de de sorte qu’on connaîtra par ce moyen la valeur d’une fonction telle que

Or :

1o Si l’équation dont nous parlons est telle, qu’elle n’ait lieu qu’entre les racines et même d’une seule manière, en sorte qu’elle cesse d’être vraie si l’on fait une permutation quelconque entre ces racines, alors on pourra, généralement parlant, déterminer la valeur de chacune des racines en particulier sans la résolution d’aucune équation, de sorte que dans ce cas ces racines seront nécessairement toutes commensurables (104).

2o Si l’équation qui renferme la relation donnée entre les racines n’a lieu à la vérité qu’entre ces racines, mais qu’elle subsiste cependant en y changeant, par exemple, en alors on verra par le numéro cité que les deux racines dépendront nécessairement d’une équation du second degré, telle que

dont les coefficients et seront commensurables.

3o De même, si l’équation en question est telle, qu’elle soit vraie aussi lorsqu’on y change en et en les trois racines dépendront alors d’une équation du troisième degré, telle que

où les coefficients seront commensurables, et ainsi de suite.

4o Si l’équation qui n’a lieu que d’une seule manière entre les racines comme dans le premier cas, a lieu aussi en même temps entre les racines alors, comme la fonction demeure la même en y changeant en en il est clair que les racines dépendront d’une équation du second degré, comme

et seront commensurables ; et il en sera de même des racines des racines et ainsi des autres.

De même, si l’équation a lieu également entre les racines entre les racines et entre les racines alors les racines dépendront d’une équation du troisième degré, telle que

seront commensurables ; et il en sera de même des racines des racines et ainsi de suite.

5o Mais si l’équation qui, comme dans le deuxième cas, a lieu de deux manières différentes entre les racines avait lieu de même entre les racines alors on aurait pareillement pour les racines l’équation du second degré

et de même pour les racines l’équation du second degré

où les coefficients analogues seraient racines d’une autre équation du second degré, telle que

et étant commensurables ; et il en serait de même des coeffieients et

Et, si la même équation avait lieu aussi parmi les racines alors on aurait pour les racines l’équation

pour les racines l’équation

et pour les racines l’équation

où les coefficients seraient eux-mêmes racines de l’équation

étant commensurables ; et il en serait de même des coefficients

Et ainsi de suite.

6o On fera le même raisonnement sur le troisième cas, où l’on suppose que la même équation ait lieu entre les racines en y changeant en en car, si cette équation subsiste également entre les racines alors les racines dépendront de l’équation du troisième degré

et les racines de l’équation analogue

où les coefficients et seront donnés par l’équation du second degré

et étant rationnels ; et il en sera ainsi des coefficients et

Par la même raison, si l’équation dont il s’agit subsistait aussi entre les racines on aurait de plus pour les trois racines l’équation

et les coefficients seraient dans ce cas les racines de l’équation du troisième degré

étant rationnels ; il en serait de même des coefficients et

On voit assez par là les conséquences analogues que l’on peut tires pour les autres cas ; on doit seulement se souvenir que ces conclusions peuvent souffrir quelques exceptions dans les cas particuliers des racines égales (104).

112. Pour éclaircir ce que nous venons de dire par quelques exemples, considérons d’abord les équations qu’on appelle réciproques, et qui sont telles, que les coefficients des termes équidistants des extrêmes sont égaux, de cette manière

il est visible, par la forme de cette équation, qu’elle demeure la même

en y mettant à la place de d’où il s’ensuit que si en est une racine, I en sera une aussi, de sorte qu’on aura c’est-à-dire par la même raison on aura

On a donc, dans ce cas, une équation entre les racines qui subsiste aussi en changeant en et qui a lieu de même entre les racines entre Donc, ces racines seront renfermées deux à deux dans les équations suivantes, dont le nombre sera ou

les coefficients étant racines d’une même équation du degré ou suivant que sera pair ou impair, comme nous l’avons déjà démontré par une méthode particulière (22). Voyez aussi sur ce sujet, outre les Miscellanea analytica de M. Moivre, le tome Ier des Commentaires de Bologne, et le tome VI des anciens Commentaires de Pétersbourg.

Au reste on peut, par les principes établis ci-dessus, rendre raison pourquoi la substitution de que nous avons employée dans le numéro cité doit conduire à une réduite du degré lorsque est pair. Car il est clair que les valeurs de c’est-à-dire les racines de l’équation en seront

mais on a donc ces racines seront

et par conséquent égales deux à deux ; de sorte que l’équation en qui devrait être naturellement du degré s’abaissera d’elle-même au degré

On pourrait aussi employer une autre substitution qui abaisserait de même l’équation, mais en faisant disparaître toutes les puissances impaires de l’inconnue ; c’est celle-ci laquelle donne car alors les racines de la transformée en seraient

c’est-à-dire (à cause de )

et par conséquent égales deux à deux, et de signes contraires.

113. Dans l’exemple précédent, c’est par la forme même de l’équation qu’on a reconnu la relation qu’il doit y avoir entre ses racines, et qui la rend susceptible de réduction ; mais on peut aussi déduire cette connaissance de la nature même du Problème qu’on a à résoudre ; c’est ce qu’il est bon de faire voir par quelques exemples.

Soit proposé de trouver quatre quantités en proportion continue, dont la somme soit donnée ainsi que celle de leurs carrés.

Nommant ces quantités inconnues on aura par les conditions du Problème ces quatre équations

et étant des quantités connues.

Pour éliminer plus facilement les trois inconnues et avoir une équation finale en je fais et j’aurai, par les deux premières équations, valeurs qui, étant substituées dans les deux dernières, donnent celles-ci

d’où il ne s’agira plus que d’éliminer

Pour faciliter cette élimination je multiplie la première par et la seconde par j’ai ainsi

et, divisant cette dernière par l’autre, j’aurai

de sorte qu’on aura maintenant ces deux-ci

d’où il est facile de tirer

Si l’on substitue maintenant la valeur de que donne la première de ces équations, dans la seconde, on aura une équation finale en qui, étant développée, montera au cinquième degré, mais si l’on substitue la même valeur de dans l’équation primitive

on en aura une en qui ne montera qu’au quatrième, et qui sera l’équation la plus simple qu’on puisse avoir pour la détermination de l’inconnue

Je vais prouver maintenant, sans connaître même la forme de cette équation, qu’elle doit être décomposable en deux équations du second degré, moyennant une autre équation du second degré aussi.

Pour cela, je remarque que si, au lieu de chercher l’inconnue on eût cherché l’inconnue on serait tombé dans une équation semblable ; car, faisant on aurait et de sorte que les équations en et seraient

c’est-à-dire entièrement semblables aux équations en et D’où je conclus d’abord que la valeur de l’inconnue sera nécessairement aussi une des racines de l’équation en trouvée ci-dessus.

Or, on a et, divisant la valeur de trouvée ci-dessus, par celle de on a

par conséquent,

Ainsi, si l’on dénote par les quatre racines de l’équation en dont il s’agit, ces racines seront telles, qu’on aura

c’est-à-dire

or, il n’y a pas plus de raison pour que cette équation subsiste entre les deux racines qu’entre les deux autres par conséquent on aura aussi

Voilà donc deux équations semblables qui ont lieu entre les racines et et qui sont de plus telles, qu’elles ne changent point en changeant en et en donc, par le no 111, on pourra sûrement décomposer l’équation en question du quatrième degré en deux autres du second degré, telles que

où les coefficient et seront racines d’une équation du second degré ainsi que les coefficients et

Et comme ces deux équations doivent renfermer, l’une les deux racines et l’autre les deux autres racines on aura

donc on aura

d’où

De sorte que les deux facteurs de l’équation proposée seront

Pour le faire voir et trouver en même teinps l’équation dont les racines seront et il faut chercher d’abord l’équation du Problème en Or faisant, pour abréger,

on aura et cette valeur, étant substituée dans l’équation

donnera, en ordonnant les termes par rapport à celle-ci

Maintenant, à cause de

les deux facteurs de cette équation seront

qui, étant multipliés l’un par l’autre, donnent

La comparaison des trois premiers termes de cette équation avec ceux de la précédente donne d’abord

et par conséquent

Et l’on trouvera que ces valeurs de et de satisferont aussi à la comparaison des autres termes.

Ainsi, les quantités et seront les racines de cette équation

J’avoue qu’on peut résoudre le Problème précédent d’une manière plus simple, comme Newton l’a fait dans son Arithmétique universelle, où, à l’aide d’un certain choix entre les inconnues, il parvient d’abord à deux équations du second degré ; mais, d’un côté, il me semble que la solution que je viens de donner est en quelque façon plus directe et plus lumineuse, puisqu’elle fait voir la raison pourquoi l’équation du quatrième degré, à laquelle on est naturellement conduit, doit être résoluble au moyen de deux du second ; et, de l’autre, la règle que Newton établit pour le choix des inconnues n’a point été démontrée par cet Auteur et ne peut l’être, si je ne me trompe, que par les principes généraux que nous avons établis ci-dessus. Mais ce n’est pas ici le lieu de nous étendre sur ce sujet.

114. On pourrait aussi, par la méthode précédente, résoudre avec la même facilité le Problème où l’on demanderait un nombre quelconque de quantités en proportion continue, dont la somme et celle de leurs carrés seraient données.

Car, nommant le premier terme de la progression, et le second, on aura d’abord ces deux équations

qui se changent en ces deux-ci

d’où l’on tire, comme plus haut,

La valeur de qu’on peut mettre, comme ci-devant, sous la forme

étant substituée dans la première équation, donnera celle-ci

laquelle sera, comme on voit, du degré

On prouvera maintenant, par un raisonnement semblable à celui qu’on a fait plus haut, que le premier terme et le dernier de la progression continue devront être également racines de l’équation précédente mais en divisant la valeur de par celle de on a

donc

De là, en nommant les racines de l’équation précédente, on aura cette condition, entre les deux racines

et comme il n’y a pas plus de raison pour qu’une telle relation ait lieu entre les racines qu’entre les racines ou ou, etc., on aura de même

le nombre des équations étant ou suivant que sera pair ou impair.

D’où, et de ce qu’on a démontré dans le no 111, il s’ensuit que l’équation du ième degré doit être décomposable en ou équations du second degré, telles que

dans lesquelles les coefficients seront racines d’une même équation du degré ou ainsi que les coefficients

Et comme, à cause de

on a

on aura

de sorte que les ou facteurs de l’équation dont il s’agit seront

Dans le cas où est un nombre pair, le produit de toutes ces équations devra donner l’équation du degré trouvée ci-devant ; mais, dans le cas où est un nombre impair, il faudra y ajouter encore un facteur simple, tel que

La multiplication faite, il n’y aura plus qu’à comparer les premiers termes de l’équation résultante avec ceux de l’équation dont nous venons de parler, et cette comparaison donnera les valeurs des quantités

qui seront les coefficients de l’équation en et quant au coefficient dans le cas où est impair, il se trouvera donné par une équation linéaire.

De là il s’ensuit que le Problème proposé peut toujours se réduire à la résolution d’une équation du degré ou

Au reste si, au lieu de déterminer l’inconnue on voulait déterminer l’inconnue on parviendrait à une équation du genre des réciproques ; car les deux équations

donnant

on aura, en chassant

ou bien, en divisant par

d’où, en multipliant en croix et faisant, pour plus de simplicité, on aura

c’est-à-dire

équation réductible au degré ou par les méthodes connues.

Ce qu’il y aura de plus simple pour cela ce sera d’employer la substitution de laquelle changera l’équation

en celle-ci

où toutes les puissances impaires de disparaîtront d’elles-mêmes.

115. Ajoutons encore un Exemple tiré de la Géométrie. Proposons-nous ce Problème très-connu, où il s’agit de mener par le point du carré une ligne droite telle, que la partie de cette ligne, qui sera comprise entre les deux côtés opposés du carré, prolongés en soit d’une grandeur donnée.

carré avec prolongement de 2 côtés
carré avec prolongement de 2 côtés

Nommant le côté du carré et la longueur donnée de la ligne prenons, pour déterminer la position de cette ligne, l’inconnue on aura donc et les deux triangles semblables donneront sur-le-champ

d’où l’on tire l’équation

laquelle, étant dégagée du radical et ordonnée par rapport à deviendra

qui est, comme on voit, du quatrième degré.

Voyons maintenant si, par la nature même du Problème, on ne pourra pas trouver quelque relation entre les racines de cette équation, qui la rende décomposable en des équations d’un degré moindre.

Pour y parvenir je remarque qu’on peut en effet mener par le point quatre lignes qui remplissent la condition du Problème ; ce sont les lignes et de sorte que les racines de l’équation précédente seront les lignes dont les deux dernières sont, comme on voit, négatives.

Dénotons donc ces lignes par et, à cause des triangles semblables on aura

mais, puisque doit être égal à que il est facile de voir qu’on aura aussi donc on aura cette proportion

c’est-à-dire

On pourrait d’abord conclure, par le principe de la raison suffisante, qu’une pareille relation doit aussi avoir lieu entre les deux autres racines mais, si l’on voulait s’en convaincre à posteriori, il n’y aurait qu’à considérer qu’à cause de on aura nécessairement aussi et qu’ensuite, à cause des triangles semblables on aura c’est-à-dire

et par conséquent

Puis donc qu’on a deux équations semblables, l’une entre l’autre en et que ces équations subsistent également en changeant en en il s’ensuit des principes établis plus haut que l’équation du quatrième degré, trouvée ci-dessus, sera nécessairement décomposable en deux équations du second degré, telles que

et seront racines d’une équation du second degré, ainsi que et  ; mais, puisque et on aura par conséquent les deux facteurs de l’équation dont il s’agit seront

Qu’on en fasse donc le produit, on aura

donc

par conséquent

Oe sorte que l’équation qui aura pour racines les quantités et sera

Au reste, il est clair que si, dans l’équation en du quatrième degré, on fait on aura une équation en du genre des réciproques, et dans laquelle on pourra, par conséquent, faire disparaître toutes les puissances impaires de l’inconnue en faisant de sorte que la substitution propre pour cet effet sera de faire d’abord

Si l’on tire la valeur de de cette équation, on a

mais on a

donc on aura

supposant que soit le point du milieu de la ligne De là on voit

qu’on serait parvenu d’abord à une équation du quatrième degré sans puissances impaires de l’inconnue, si l’on eût pris pour inconnue la ligne C’est ce qu’a fait Newton dans la solution qu’il a donnée de ce
triangle rectangle & carré inscrit
triangle rectangle & carré inscrit

Problème dans son Arithmétique universelle ; mais on doit avouer, ce me semble, qu’un tel choix de l’inconnue est assez peu naturel, et que ce n’est, pour ainsi dire, qu’après coup qu’on peut le faire ; du moins il me paraît que le principe d’où Newton le fait dépendre n’a pas toute l’évidence qu’on est en droit d’exiger dans ces sortes de matières.


Séparateur

  1. Ce Mémoire a été lu à l’Académie dans le courant de l’année 1771.
  2. Les deux premières Sections de ce Mémoire ont été insérées dans le volume de 1770, les suivantes dans le volume de 1771.(Note de l’Éditeur.)
  3. Œuvres de Lagrange, t. III, p. 141.
  4. Cette formule a été obtenue en extrayant la racine carrée des deux membres de la précédente, et celle-ci indique seulement que le produit des radicaux est égal à Lagrange remplace le signe ambigu par mais c’est le signe qu’il fallait prendre ; en effet, les radicaux représentent les valeurs des quantités

    qui ont pour produit la fonction symétrique

    dont la valeur est On a donc

    quels que soient les coefficients réels ou imaginaires. Cette relation détermine complètement dans tous les cas l’un des radicaux quand les valeurs des deux autres ont été fixées. (Note de l’Éditeur.)

  5. La longueur déjà trop grande de ce Mémoire nous oblige d’en réserver la suite pour le volume de 1771, auquel il appartient naturellement. On y trouvera une Analyse générale des méthodes de MM. Tschirnaus, Euler et Bezout, faite par des principes analogues à ceux que nous avons suivis jusqu’ici, et d’après laquelle on sera en état de connaitre à priori les résultats qu’on doit attendre de l’application de ces méthodes aux équations qui passent le quatrième degré. Oa y trouvera aussi des remarques générales sur la résolution et la réduction des équations, lesquelles serviront à jeter un nouveau jour sur cette partie de l’Algèbre.