SUR LA SOLUTION DES PROBLÈMES INDÉTERMINÉS DU SECOND DEGRÉ[1].
(Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Berlin, t. XXIII, 1769.)
Lorsque l’équation finale à laquelle conduit la solution d’une question renferme plus d’une inconnue, le Problème est indéterminé ; et envisagé généralement, il est susceptible d’une infinité de solutions. Mais si la nature de la question exige que les quantités cherchées soient rationnelles, ou même qu’elles soient exprimées par des nombres entiers, alors le nombre des solutions peut être très-limité ; et la difficulté se réduit à trouver, parmi toutes les solutions possibles, celles qui peuvent satisfaire à la condition prescrite. Quand l’équation finale n’est que du premier degré, toutes les solutions sont rationnelles par la nature même de cette équation ; et si l’on veut de plus que les inconnues soient des nombres entiers, on peut les déterminer facilement par la méthode des fractions continues (voyez plus bas le no 8). Il n’en est pas de même des équations qui passent le premier degré, et qui conduisent naturellement à des expressions irrationnelles. On n’a point de méthode directe et générale pour trouver les nombres commensurables qui peuvent satisfaire à ces équations lors même qu’elles ne sont qu’au second degré ; et il faut avouer que cette branche de l’Analyse, quoique peut-être une des plus importantes, est néanmoins une de celles que les Géomètres paraissent avoir le plus négligées, ou du moins dans lesquelles ils ont fait jusqu’à présent le moins de progrès.
Diophante et ses commentateurs ont à la vérité résolu un grand nombre de Problèmes indéterminés du second, du troisième et même du quatrième degré ; mais la plupart de leurs solutions n’étant que particulières, il n’est pas étonnant qu’il se trouve encore des cas d’ailleurs fort simples, et en même temps fort étendus, pour lesquels les méthodes de Diophante soient absolument insuffisantes.
S’il s’agissait, par exemple, de résoudre l’équation en supposant et des nombres entiers non carrés, c’est-à-dire de trouver une valeur rationnelle de telle que devînt un carré, on verrait aisément que tous les artifices connus de l’Analyse de Diophante seraient en défaut pour ce cas ; or, c’est précisément à ce cas que se réduit la solution générale des Problèmes indéterminés du second degré à deux inconnues, comme on le verra ci-après. Personne que je sache ne s’est occupé de ce Problème, si l’on en excepte M. Euler qui en a fait l’objet de deux excellents Mémoires qui se trouvent parmi ceux de l’Académie de Pétersbourg (t. VI des anciens Commentaires et t. IX des nouveaux) ; mais il s’en faut encore beaucoup que la matière soit épuisée. Car : 1o M. Euler n’a considéré, dans l’équation que le cas où est un nombre positif, et où et doivent être des nombres entiers ; 2o dans ce cas même, M. Euler suppose qu’on connaisse déjà une solution de l’équation et il donne le moyen d’en déduire une infinité d’autres. Ce n’est pas que ce grand Géomètre n’ait tâché de donner aussi quelques règles pour connaître a priori si l’équation proposée est résoluble ou non ; mais, outre que ces règles ne sont fondées que sur des principes précaires et tirés seulement de l’induction, elles ne sont d’ailleurs d’aucune utilité pour la recherche de la première solution, qui doit être supposée connue (voyez le premier Mémoire du t. IX des nouveaux Commentaires de Pétersbourg, et surtout la conclusion de ce Mémoire, p. 38) ; 3o les formules que M. Euler donne pour trouver une infinité de solutions, dès qu’on en connaît une seule, ne renferment pas toujours et ne sauraient renfermer toutes les solutions possibles, à moins que ne soit un nombre premier (voyez plus bas le no 45).
Les recherches que j’ai faites depuis quelque temps sur cette matière m’ont conduit à des méthodes directes, générales et nouvelles, pour résoudre les équations de la forme et en général toutes les équations du second degré à deux inconnues, soit que les inconnues puissent être des nombres quelconques entiers ou fractionnaires, soit qu’elles doivent être des nombres entiers. Ce sont ces méthodes qui font l’objet de ce Mémoire ; je les crois d’autant plus dignes de l’attention des Mathématiciens qu’elles laissent encore un vaste champ à leurs recherches.
§ I. — De la manière de ramener toute équation du second degré à deux inconnues à cette forme et des cas dans lesquels les équations de cette forme peuvent se résoudre par les méthodes connues.
1. Soit
l’équation générale proposée dans laquelle et soient des nombres donnés entiers, positifs ou négatifs (il est évident que si les coefficients n’étaient pas des nombres entiers, on pourrait toujours les rendre tels en faisant évanouir tous les dénominateurs par la multiplication), et où et soient les deux inconnues qu’il s’agit de déterminer, en sorte qu’elles soient exprimées par des nombres rationnels. Qu’on tire de cette équation la valeur de l’une des deux inconnues, comme et l’on aura
d’où l’on voit que la question se réduit à déterminer en sorte que la
quantité soit un carré. Soient, pour abréger,
et il faudra que soit un carré ; soit donc
on aura par la résolution de cette équation
de sorte qu’il ne s’agira plus que de rendre carré. Soit encore
et toute la difficulté se réduira à satisfaire à cette équation
étant des nombres entiers donnés, et et devant être des nombres rationnels.
2. Puisque nous avons supposé
on aura
d’où
(les signes ambigus de et de pouvant être pris à volonté), par où l’on déterminera et dès que l’on connaîtra et
On voit aussi par là que, si et doivent être des nombres entiers, il faut que et soient entiers aussi ; mais il faudra de plus que soit divisible par et que soit divisible par Si l’on voulait seulement que et fussent des nombres rationnels, il suffirait que et fussent aussi rationnels.
3. Si l’un des nombres ou était carré, l’équation serait susceptible des méthodes de Diophante.
Car : 1o soit on supposera et l’équation deviendra, en ôtant ce qui se détruit,
d’où l’on tire
de sorte qu’on pourra prendre pour un nombre quelconque. Cependant, si l’on voulait que et fussent des nombres entiers, il ne faudrait prendre pour que des nombres entiers tels, que fût divisible par mais, comme la recherche des nombres qui auraient cette propriété pourrait être longue et pénible, on considérera que l’équation donne
d’où l’on voit d’abord que et doivent être des facteurs du nombre donné de sorte qu’il n’y aura qu’à résoudre ce nombre en deux facteurs de toutes les manières possibles, et prendre ensuite l’un des facteurs pour et l’autre pour on aura par ce moyen deux équations à l’aide desquelles on déterminera et et l’on choisira entre toutes les valeurs de et que chaque couple de facteurs aura fournies, celles qui seront des nombres entiers. De cette manière on sera assuré d’avoir toujours les solutions possibles en entiers de l’équation proposée.
2o Supposons que l’on ait on fera et l’on aura, en substituant et effaçant ce qui se détruit,
ou bien, en divisant par et tirant ensuite la valeur de
où l’on pourra prendre pour tout ce que l’on voudra. Si et devaient être entiers, il faudrait que fût entier et tel que fût divisible par ainsi, on pourrait supposer d’abord ce qui donnerait et mais, pour avoir une solution générale, on considérera l’équation laquelle donne
et nous apprend que et doivent être des facteurs de Soit et étant deux facteurs quelconques de on pourra déterminer et en supposant
d’où l’on tire
ainsi, l’équation ne sera résoluble en nombres entiers, au moins par cette méthode, que lorsque sera divisible par je dis par cette méthode, car il est évident que la supposition de et n’est que particulière, et qu’on pourrait faire aussi, en supposant
ce qui donnerait
équation qui rentre, comme on voit, dans le cas général du no 1.
Ce sont là les seules méthodes qu’on ait eues jusqu’à présent pour résoudre les équations de la forme de méthodes qui ne sont absolument applicables qu’aux cas où et sont des nombres carrés ; dans tous les autres cas, on en était réduit au simple tâtonnement, moyen non-seulement long et pénible, mais presque impraticable, à moins que les quantités cherchées ne soient renfermées dans de certaines limites ; or, c’est ce qui n’a lieu que dans le cas où, étant positif, est négatif ; car, puisque doit être entier et positif, il est clair que devra être moindre que et que par conséquent devra nécessairement être moindre que de sorte qu’il n’y aura dans ce cas qu’à substituer successivement, au lieu de tous les nombres positifs moindres que (il serait inutile de substituer des nombres négatifs, le carré étant le même, soit que soit positif ou négatif), et choisir ceux qui rendront égal à un carré ; il n’en est pas de même lorsque est positif, parce qu’alors peut augmenter à l’infini ; et en général, soit que soit positif ou négatif, le nombre des substitutions à essayer sera toujours nécessairement indéfini, dès qu’on voudra admettre des nombres rompus ; ce qui prouve d’autant plus la nécessité d’avoir pour cet objet des méthodes directes et analytiques telles que celles que nous allons donner.
§ II. — Résolution de l’équation lorsque et peuvent être des nombres quelconques entiers ou fractionnaires.
4. Supposons en général que et soient des fractions quelconques, lesquelles, étant réduites au même dénominateur et aux moindres termes possibles, soient représentées par et en sorte que l’on ait et l’équation
deviendra
de sorte que la question sera réduite à trouver des nombres entiers qui, étant substitués pour et satisfassent à cette équation.
Nous pouvons supposer de plus que l’équation soit telle, que ni ni ne contiennent aucun facteur carré. Car, si l’on avait l’équation deviendrait
ou bien, en faisant
laquelle est de la même forme que la précédente.
En général, au lieu de faire simplement et on fera dans ce cas et et les facteurs carrés et disparaîtront par la division. Ainsi, il suffira de résoudre l’équation
dans l’hypothèse que ni ni ne contiennent aucun facteur carré.
Nous supposerons encore que ne soit pas égal à ni que l’on ait à la fois et car, outre que ces cas n’ont point de difficulté, nous nous réservons d’en donner la solution plus bas (19).
Enfin, nous supposerons que soit toujours plus grand que En effet, il est clair :
1o Que, si était moindre que il n’y aurait qu’à transposer les termes et et échanger en et en
2o Si était égal à alors, comme est supposé ne contenir aucun facteur carré, il faudrait nécessairement que fût divisible par de sorte qu’en faisant on aurait, après avoir divisé par
laquelle rentre dans l’équation générale en faisant or, si le signe inférieur a lieu, on aura déjà le cas du no 19 ; et si c’est le signe supérieur qui ait lieu, alors on aura aussi le cas du no 19 si de sorte que nous supposerons ici et par conséquent
De cette manière, la résolution de l’équation proposée se réduira toujours à celle d’une équation de la forme
où devront être des nombres entiers, et où et seront des nombres entiers donnés non carrés, ni contenant des facteurs carrés, et dont l’un sera plus grand que l’autre
5. Je dis maintenant que les nombres et doivent être premiers entre eux : car, s’ils avaient un commun diviseur il faudrait que fût aussi divisible par mais, comme les fractions et sont supposées réduites à leurs moindres termes, il est clair que et n’auront aucun diviseur commun, et qu’ainsi ne sera point divisible par d’ailleurs, il est clair que si et avaient un diviseur commun, on en pourrait toujours faire abstraction, parce que ce diviseur s’en irait de lui-même par la division ; donc, il faudra que soit divisible par ce qui ne se peut à cause que est supposé ne contenir aucun facteur carré.
6. Cela posé, je remarque d’abord que, pour que l’équation
puisse subsister, il faut que soit un diviseur d’un nombre de cette forme étant un nombre entier, c’est-à-dire que soit le résidu de la division d’un carré quelconque par Car, si l’on multiplie l’équation dont il s’agit par
on aura
or,
se réduit à cette forme
comme il est facile de s’en assurer par le développement de ces deux expressions ; donc, si l’on prend pour et des nombres entiers tels, que soit ou ce qui est toujours possible à cause que et sont premiers entre eux (numéro précédent), et qu’on fasse
on aura
par conséquent, sera un diviseur de
7. Pour trouver les nombres et qui peuvent satisfaire à la condition on réduira la fraction en une fraction continue, d’où l’on déduira, comme on sait, une suite de fractions convergentes vers et alternativement plus grandes ou plus petites que cette même fraction (voyez plus bas le no 29), et l’on prendra pour le numérateur de la fraction qui précédera immédiatement la fraction et pour le dénominateur de la même fraction ; si la fraction est plus petite que la fraction on aura
et si on aura
8. Cette méthode est utile pour résoudre en général toutes les équations du premier degré à deux inconnues, lorsque ces inconnues doivent être des nombres entiers. Car, soit l’équation
dans laquelle et soient des nombres entiers premiers entre eux ; je dis premiers entre eux, car il est évident que si et avaient un diviseur commun il faudrait que fût aussi divisible par pour que les nombres et pussent être des nombres entiers ; donc, divisant toute l’équation par on aurait une nouvelle équation de la forme
dans laquelle et seraient nécessairement premiers entre eux.
Qu’on cherche, comme ci-dessus, la fraction telle que
et l’on aura, en multipliant par
donc, retranchant cette équation de la proposée ou l’y ajoutant, on aura celle-ci
d’où l’on tire
Or, et étant premiers entre eux, la fraction sera déjà réduite à ses moindres termes, de sorte que comme et doivent être des nombres entiers, il faudra qu’on ait
étant un nombre quelconque entier ; d’où l’on tirera
Ce sont les expressions générales de tous les nombres entiers et qui
peuvent satisfaire à l’équation
Ainsi, pour satisfaire en général à l’équation
qui est celle du numéro précédent, on prendra et l’on aura
les signes ambigus étant à volonté aussi bien que le nombre
9. La réduction que nous avons faite (6) de la quantité
à
doit être bien remarquée, parce que nous en ferons un fréquent usage dans la suite de ce Mémoire ; il résulte de là que le produit de deux nombres quelconques de la forme est encore de la même forme, et que par conséquent le produit d’autant de nombres qu’on voudra de la forme sera aussi de la même forme. En effet, on a
où l’on observera, à l’égard des signes ambigus, de les prendre les mêmes dans les deux quantités et et
On aura de même
en faisant
et en général, si l’on fait
on aura
ou bien
10. Nous avons démontré plus haut (6) que l’équation
ne peut avoir lieu à moins que ne soit un diviseur d’un nombre de cette forme or, je dis que l’on peut toujours supposer que le nombre soit moindre que la moitié du nombre En effet, soit un nombre tel que soit divisible par il est clair qu’en faisant étant un nombre quelconque entier, sera aussi divisible par d’autre part il est facile de voir qu’on peut toujours déterminer le nombre et le signe ambigu de en sorte que soit donc, s’il existe un nombre quelconque tel que soit divisible par il doit exister aussi un nombre qui ait la même propriété.
On doit conclure de là que, pour que l’équation
soit résoluble, il faut nécessairement que soit un diviseur d’un nombre tel que étant un nombre moindre que
On essayera donc successivement pour tous les nombres naturels depuis jusqu’à et si l’on n’en trouve aucun qui satisfasse à la condition dont il s’agit, ce sera une marque sûre que l’équation proposée n’admet aucune solution rationnelle.
Nous donnerons plus bas (voyez le § IV) des moyens directs pour pouvoir reconnaître si un nombre donné peut être un diviseur d’un nombre de la forme étant aussi donné ; il nous suffit ici qu’on puisse toujours s’en assurer par un tâtonnement fort simple.
Au reste, il faut remarquer, pour éviter toute équivoque, que quand nous disons que doit être nous entendons que et soient pris positivement, quoiqu’ils puissent être d’ailleurs positifs ou négatifs ; de sorte qu’on ne doit avoir égard, dans cette comparaison des nombres et qu’à leur valeur absolue.
11. Reprenons maintenant l’équation
(A)
et supposons qu’on ait trouvé un nombre entier (abstraction faite des signes de et ), tel que soit divisible par dénotons par le quotient de la division de par on aura l’équation
Qu’on fasse étant un nombre quelconque entier, et qu’on prenne le nombre et le signe de en sorte que l’on ait (abstraction faite des signes de et ), ce qui est évidemment toujours possible, comme nous l’avons déjà observé plus haut ; il est clair que, puisque est déjà divisible par le sera aussi, de sorte qu’en dénotant le quotient de cette division par on aura cette équation analogue à la précédente
Faisant de même et prenant et le signe de en sorte que l’on ait (les nombres et étant considérés comme positifs), on aura divisible par de sorte qu’en dénotant le quotient de cette division par on aura cette troisième équation
et ainsi de suite.
12. De cette manière on pourra trouver une suite d’équations telles que
dans lesquelles on ait (en considérant les nombres comme positifs)
Or, je dis que les nombres formeront nécessairement une suite décroissante, jusqu’à ce que l’on arrive à un terme comme l’indice dénotant le quantième du terme lequel soit ou abstraction faite des signes de et de Pour prouver cette proposition, il est à propos de distinguer les deux cas de positif et de négatif.
13. Supposons d’abord que soit un nombre positif ; dans ce cas il est clair que pourra être positif ou négatif.
1o Soit positif et soit il est clair que sera aussi positif ; or, puisque on aura aussi et à plus forte raison
donc et par conséquent ( et étant positifs)
De même, puisque est positif, si on aura aussi positif, et l’on prouvera pareillement que et ainsi de suite, jusqu’à ce que l’on arrive à une équation telle que
dans laquelle ne soit pas or, puisque il est clair que les nombres iront nécessairement en diminuant, ainsi que les nombres de sorte qu’on parviendra nécessairement à l’équation
où ou mais, à cause que est supposé non carré, et différent de l’unité (4), on ne saurait avoir de sorte qu’il faudra que l’on ait Ainsi sera nécessairement un nombre moindre que ou tout au plus égal à si donc, puisque doit être un diviseur de il est clair que sera aussi nécessairement moindre que ou tout au plus égal à
2o Soit négatif et égal à étant un nombre positif, et soit aussi il est clair que devra être négatif ; or, en prenant positif, on aura (par hypothèse), donc et faisant ( étant positif), on aura aussi et par conséquent
De même, en supposant on aura négatif, et faisant ( étant positif), on aura et et ainsi de suite. Ainsi l’on prouvera, comme ci-dessus, que les nombres iront en diminuant ainsi que les nombres jusqu’à ce que l’on arrive à un nombre comme qui soit moindre que ou tout au plus égal à
14. Soit, en second lieu, égal à un nombre négatif comme étant positif, il est clair d’abord que dans ce cas tous les nombres seront positifs, parce que l’on aura par les équations (A) et (a)
or, si l’équation donnera à cause de et de donc
De même, si l’équation donnera, à cause de et par conséquent
et ainsi de suite ; d’où l’on voit que les nombres décroîtront continuellement jusqu’à ce que l’on arrive à un terme égal à ou moindre que b.
Si il est clair qu’on parviendra nécessairement à un terme car, puisque les nombres ne peuvent jamais devenir nuls, à cause des équations ne pourra pas être par conséquent il sera nécessairement égal à
15. Au reste, quoiqu’on puisse toujours pousser la suite jusqu’à un terme égal ou moindre que cependant, si l’on en trouve un qui, étant encore plus grand que soit en même temps carré ou multiple d’un carré, mais tel, qu’étant divisé par le plus grand carré qui le mesure il laisse un quotient égal ou moindre que alors on pourra s’arrêter à ce terme.
En général, nous supposerons que la suite soit poussée jusqu’à un terme de cette forme étant un nombre quelconque, et un nombre qui ne soit ni carré ni multiple d’un carré et qui soit en même temps égal ou moindre que abstraction faite des signes de et de
Ainsi, si il faudra nécessairement que l’on ait
16. Cela posé, si l’on multiplie ensemble toutes les équations (a) du no 12, jusqu’à l’équation
on aura (9) une équation dont le premier membre sera et dont le second membre sera de cette forme de sorte qu’à cause de on aura l’équation
laquelle étant encore multipliée par l’équation (A) deviendra de cette forme
ou bien, en faisant de la forme
c’est-à-dire
(B)
D’où l’on voit que si l’équation (A) est résoluble, il faut aussi que celle-ci le soit.
Réciproquement, si l’équation (B) est résoluble, on pourra résoudre aussi l’équation (A). En effet, en mettant l’équation (B) sous cette forme
et la multipliant successivement par chacune des équations (a), à commencer par l’équation
qui est la dernière, on aura, à cause de une équation de cette forme
c’est-à-dire, en faisant de la forme
qui est l’équation (A) même.
Donc la résolution de l’équation (A) se réduira à celle de l’équation (B), dans laquelle est et ou de sorte que cette dernière est plus simple que la première.
Or, si l’équation (B) sera déjà dans le cas que nous résoudrons plus bas (19) ; ainsi nous supposerons que si est positif, il soit encore plus grand que l’unité.
Nous appellerons dans la suite les équations (A), (B) et les autres équations analogues à celles-ci équations principales, et les équations (a), ainsi que les autres équations semblables qu’on pourra trouver, équations secondaires ; ainsi nous nommerons l’équation (A) la première des équations principales, l’équation (B) la deuxième des équations principales, et ainsi des autres ; nous nommerons de même les équations (a) la première suite d’équations secondaires, et ainsi du reste.
17. Or, l’équation
étant semblable à l’équation
on pourra la traiter de la même manière ; en effet, si il faudra que soit aussi divisible par de sorte qu’en faisant on aura l’équation
c’est-à-dire
Ainsi cette équation sera déjà dans le cas du no 19 si le signe inférieur a lieu ; et quand le signe supérieur aura lieu, alors, à cause de par hypothèse, elle rentrera dans la forme générale
étant Donc, puisque est ou égal à ou moindre que on aura toujours à résoudre une équation de cette forme
dans laquelle ni ni ne contiendront aucun facteur carré, et où sera On commencera donc par chercher de nouveau un nombre
(en regardant et comme positifs) et tel, que soit divisible par et si l’on n’en trouve aucun qui satisfasse à cette condition, ce sera une marque certaine que l’équation
ne sera point résoluble rationnellement, et par conséquent que la proposée ne le sera pas non plus ; je supposerai donc qu’on ait trouvé un tel nombre en sorte qu’en nommant le quotient de la division de par on ait on pourra former cette seconde suite d’équations secondaires
dans lesquelles les nombres formeront une suite décroissante qu’on continuera jusqu’à ce que l’on parvienne à un terme de cette forme étant égal à ou moindre que (abstraction faite des signes de et ), ce qui arrivera nécessairement, comme nous l’avons prouvé plus haut ; et par le moyen de ces équations on parviendra, en opérant comme dans le no 16, à une nouvelle équation de la forme
(C)
dont la résolution dépendra de celle de l’équation
et vice versâ ; de sorte que, cette équation étant résolue, on pourra, en remontant, résoudre la proposée.
18. En suivant toujours le même procédé, on trouvera cette suite d’équations principales
dans lesquelles les nombres formeront une série décroissante jusqu’à ce qu’on parvienne à un terme égal à l’unité prise positivement ou négativement ; car, comme ces nombres ne sont ni carrés ni multiples de carrés par l’hypothèse, il est impossible qu’on parvienne à un terme égal à zéro avant d’être parvenu à un terme égal à l’unité ; en effet, si on aura donc donc, puisque les termes deviennent toujours plus petits, il est évident qu’on arrivera nécessairement à un terme égal à ou à
Soit, par exemple, alors la dernière équation sera
c’est-à-dire de la forme
Mais, si alors on pourra continuer encore les mêmes opérations, et l’on parviendra nécessairement à une nouvelle équation principale telle que
dans laquelle, à cause de on aura nécessairement (15) ; de sorte que la dernière des équations principales sera, dans ce cas, de la forme
laquelle rentre dans la formule précédente en faisant
Or, nous avons démontré que si l’équation
est résoluble, les équations suivantes
doivent l’être aussi, et réciproquement que si l’une de celles-ci peut se résoudre, toutes les précédentes pourront se résoudre aussi (16) ; donc, la résolution de l’équation
se réduira toujours par ce moyen à celle d’une équation de la forme
étant un nombre donné.
19. Or, l’équation
est facile à résoudre par la méthode même du no 3 ; mais, pour avoir pour et des expressions sans fractions, on fera et l’on aura donc de sorte qu’il faudra que soit divisible par Soit la plus grande mesure commune de et en sorte que et et étant premiers entre eux, et l’on aura donc et par conséquent et étant deux facteurs quelconques de or, soit la plus grande commune mesure de et et comme doit être égal à un carré, il est clair que et ne pourront être que de cette forme et et étant des nombres quelconques entiers ; ainsi l’on aura
donc
mais, comme il est inutile d’avoir dans les expressions de et un multiplicateur commun, parce qu’il est visible que, dans l’équation
on peut toujours multiplier à volonté et par un nombre quelconque, on fera pour plus de simplicité ou bien pour faire disparaître le dénominateur de et de et l’on aura en général
et étant des nombres quelconques entiers, et et deux facteurs
quelconques de en sorte que Ainsi, si a plusieurs facteurs parmi lesquels il faudra toujours compter l’unité, on aura autant de différentes expressions de et qu’il y aura de manières de partager le nombre en deux facteurs.
exemples.
20. Appliquons maintenant notre méthode à quelques Exemples.
Exemple I. — Soit proposé de résoudre l’équation
En mettant au lieu de et au lieu de elle deviendra
(A)
de sorte qu’on aura et car, comme ces deux nombres ne renferment aucun facteur carré, il n’y aura aucune réduction à y faire.
Il faudra donc chercher un nombre entier moindre que et tel, que soit divisible par mais pour cela, au lieu d’essayer successivement pour tous les nombres naturels moindres que il sera beaucoup plus commode de chercher un multiple de qui soit de la forme c’est-à-dire qui, étant augmenté de devienne un carré.
En général, on remarquera que dans l’équation
à laquelle il s’agit de satisfaire, doit être lorsque est positif, et lorsque est négatif (13 et 14), de sorte qu’il n’y aura qu’à essayer successivement pour tous les nombres naturels moindres que pris positivement ou négativement suivant que sera positif ou négatif (numéros cités), et s’il ne s’en trouve aucun dont le produit par étant augmenté de devienne un carré, ce sera une marque certaine que le Problème n’admet point de solution rationnelle.
On en usera de même à l’égard des autres équations de condition
dans lesquelles il faudra aussi que
Dans l’exemple proposé on trouve d’abord de sorte qu’on aura et comme est déjà la première suite d’équations secondaires se réduira à cette seule équation (12)
Ainsi l’on fera.(15) de sorte que la seconde équation principale sera
(B)
Il faudra donc satisfaire à l’équation
étant et l’on trouvera de sorte que, comme est déjà la seconde suite d’équations secondaires, que nous avons désignée par (b) au no 17, se réduira à cette équation unique
On fera donc et la troisième équation principale sera
(C)
laquelle est déjà, comme on voit, dans le cas du no 19.
Comparant donc cette dernière équation à l’équation
on aura donc et par conséquent
ainsi, il n’y aura plus qu’à remonter de l’équation (C) à l’équation (B), et de celle-ci à l’équation proposée (A) par la méthode du no 16.
Pour cela, on changera d’abord l’équation (C) en celle-ci
et on la multipliera par l’équation (b) [s’il y avait plus d’une de ces équations secondaires (b), il faudrait multiplier l’équation dont il s’agit successivement par chacune de ces équations] ; on aura, par les formules du no 9, l’équation
laquelle, étant comparée à l’équation (B), donnera
les signes ambigus étant à volonté.
On changera de même l’équation (B) en
et on la multipliera ensuite par l’équation (a), ce qui donnera
et, comparant cette équation avec l’équation (A), on aura enfin
de sorte qu’il n’y aura plus qu’a substituer successivement les valeurs de et ensuite celles de
Les valeurs de et étant ainsi trouvées, on aura et et l’équation proposée
sera résolue.
Exemple II. — Qu’on propose maintenant l’équation suivante
Puisque le nombre est divisible par le carré 9, je supposerai (4)
et ce qui donnera l’équation
(A)
Or, en suivant le même procédé que dans l’Exemple précédent, et marquant les équations analogues par les mêmes lettres, on trouvera les équations suivantes
dont la dernière est, comme on le voit, dans le cas du no 19. On aura donc et donc et par conséquent,
Ensuite on mettra la même équation (C) sous la forme des équations en transposant les termes et en sorte que l’on ait et l’on multipliera successivement cette équation par les deux équations Pour cela, on fera d’abord le produit de ces deux-ci, qui sera exprimé par ou bien simplement c’est-à-dire, en divisant par donc, multipliant l’équation précédente par celle-ci, et comparant le produit à l’équation (B), on aura
On transposera de même le premier et le dernier terme de l’équation (B) pour la réduire à la forme de l’équation et on la multipliera ensuite par cette dernière équation, ce qui donnera une équation semblable à l’équation (A), de sorte qu’on aura enfin
Ainsi l’équation proposée sera résolue.
Exemple III. — Si l’équation proposée était
dans laquelle et ne renferment aucun facteur carré, on ferait pour avoir
et il faudrait d’abord satisfaire à l’équation
mais, en essayant pour tous les nombres naturels jusqu’à c’est-à-dire jusqu’à on n’en trouve aucun qui, étant multiplié par et augmenté de devienne un carré ; d’où il s’ensuit que l’équation proposée n’admet aucune solution rationnelle.
Exemple IV. — Soit encore proposée l’équation
comme est un nombre premier, on fera d’abord pour avoir l’équation
(A)
Ayant donc ici il faudra d’abord trouver un nombre et tel que soit divisible par ou bien un nombre et tel que soit égal à un carré, comme nous l’avons dit dans l’Exemple I.
Après quelques essais, je trouve et et à l’aide de ces valeurs je forme cette première suite d’équations secondaires (12)
Donc, puisque est on fera (15), et j’aurai cette seconde
équation principale
(B)
laquelle est déjà, comme on voit, dans le cas du no 19.
J’aurai donc et donc, puisque on aura ou ou ou enfin de sorte qu’on aura
Ayant ainsi et on mettra l’équation (B) sous cette forme
et on la multipliera successivement par chacune des équations Pour faire cette multiplication plus aisément, on multipliera d’abord la deuxième et la troisième de ces équations ensemble, et faisant, pour abréger, on aura
ensuite on multipliera cette équation par la première des équations et faisant encore on aura
équation qui, étant multipliée maintenant par l’équation
donnera celle-ci
laquelle, étant comparée à l’équation (A), donnera enfin
Exemple V. — Si l’on avait l’équation
on ferait toujours et ce qui donnerait celle-ci
(A)
et en opérant comme ci-dessus, on trouverait d’abord les équations
mais, comme il faudrait ensuite satisfaire à l’équation
en prenant pour un nombre c’est-à-dire en faisant ou et que ni l’une ni l’autre de ces deux valeurs étant multipliée par et augmentée de ne donne un carré, on en conclura que l’équation proposée n’est susceptible d’aucune solution rationnelle ; ainsi, quoique le nombre puisse être un diviseur d’une infinité de nombres de la forme cependant il est impossible que le quotient de cette division soit jamais un carré.
21. Ces Exemples peuvent suffire pour faire connaître l’esprit et l’usage de notre méthode. Nous allons voir maintenant comment il faudra s’y prendre lorsqu’il s’agira d’avoir des solutions en nombres entiers ; car quoique les solutions que fournit la méthode précédente soient générales et renferment par conséquent tous les nombres soit entiers, soit fractionnaires, qui peuvent satisfaire à l’équation cependant, comme les valeurs générales de et de se présentent toujours sous une forme fractionnaire, il serait souvent difficile et presque impossible de les réduire à des nombres entiers. De sorte que, pour ne rien laisser à désirer sur cette matière, il est nécessaire de donner aussi une méthode particulière pour résoudre l’équation lorsque et doivent être des nombres entiers.
§ III. — Résolution de l’équation lorsque et doivent être des nombres entiers.
22. Je remarque d’abord que si le nombre n’a aucun facteur carré, les nombres et doivent être nécessairement premiers entre eux ; car, si ces nombres avaient un commun diviseur il est clair que puisque et seraient divisibles par il faudrait aussi que le fût. On voit par là que les nombres et ne sauraient avoir d’autres diviseurs communs que ceux dont les carrés sont aussi des diviseurs de
Ainsi, si ne contient qu’un seul facteur carré, comme si étant un nombre premier et un nombre qui ne contient aucun facteur carré, les nombres et pourront être premiers entre eux ou bien pourront avoir le nombre pour commun diviseur ; et dans ce dernier cas, faisant l’équation deviendra
et étant premiers entre eux. Si et étant des nombres premiers, alors et pourront être premiers entre eux ou bien pourront être divisibles tous les deux par ou par ou par