Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette/Tome 3/4

La bibliothèque libre.

ANECDOTES

RELATIVES

À MARIE LECKZINSKA.


Marie Leckzinska, femme de Louis XV, parlait souvent de la position plus que médiocre où elle se trouvait à l’époque où la politique du cabinet de Versailles fit rompre le mariage du roi avec la jeune infante, et monter au rang de reine de France une princesse polonaise, fille d’un souverain détrôné. Avant qu’un événement aussi peu espéré eût changé la destinée de cette vertueuse princesse, il avait été question de la marier au duc d’Estrées, et quand la duchesse de ce nom vint lui faire sa cour à Versailles, elle dit aux personnes qui l’environnaient : « Je pourrais cependant être à la place de cette dame, et faire la révérence à la reine de France[1]. » Elle racontait que le roi, son père, lui avait appris son élévation d’une manière qui aurait pu lui faire une trop grande impression ; qu’il avait eu soin, pour ne pas troubler sa tranquillité, de lui laisser ignorer totalement les premières négociations entamées pour son mariage, et que tout étant définitivement arrêté et l’ambassadeur arrivé, son père s’était rendu chez elle, avait avancé un fauteuil, l’y avait fait placer, et lui avait dit : « Permettez, Madame, que je jouisse d’un bonheur qui répare et surpasse tous mes revers : je veux être le premier à rendre mes hommages à la reine de France. »

Marie Leckzinska n’était pas jolie ; mais elle avait de la finesse dans l’esprit et dans les traits, et ses manières simples étaient relevées par les grâces des dames polonaises. Elle aimait le roi ; ses premières infidélités lui furent très-pénibles à supporter. Cependant la mort de madame de Châteauroux, qu’elle avait connue fort jeune, et qui avait même été l’objet de ses bontés, lui fit une pénible impression. Cette bonne reine se ressentait des premières années d’une éducation superstitieuse : elle avait peur des revenans. La première nuit qu’elle passa après avoir appris cette mort presque subite, elle ne pouvait s’endormir, et faisait veiller une de ses femmes qui cherchait à calmer son insomnie par des histoires que dans ce cas elle se faisait conter, comme les enfans en demandent à leurs bonnes. Cette nuit, rien ne pouvait ramener son sommeil : sa femme de chambre la croyait endormie, s’éloignait de son lit sur la pointe des pieds ; le moindre bruit du parquet réveillait la reine qui criait : « Où allez-vous ? Restez, contez encore. » Quoiqu’il fût plus de deux heures après minuit, cette femme, qui se nommait Boirot, et qui était fort naïve, lui disait : « Mais qu’a donc Votre Majesté cette nuit ? y a-t-il de la fièvre ? faut-il faire éveiller son médecin ? — Oh ! non, non, ma bonne Boirot, je ne suis pas malade ; mais cette pauvre madame de Châteauroux, si elle revenait !........ — Eh Jésus ! Madame, lui répondit cette femme qui avait perdu toute patience, si madame de Châteauroux revient, bien sûrement ce n’est pas Votre Majesté qu’elle viendra chercher. » La reine partit d’un éclat de rire à cette naïveté, son agitation cessa, et bientôt elle fut endormie[2].


La nomination de madame Le Normand d’Étioles, marquise de Pompadour, à la place de dame du palais de la reine, offensa la dignité autant que la sensibilité de cette princesse. Cependant les hommages respectueux de la marquise, l’intérêt qu’avaient des grands qui briguaient ses faveurs de la faire traiter avec indulgence par la reine, le respect de Marie Leckzinska pour les volontés du roi, tout concourut à ce que la marquise fût assez bien vue par cette princesse. Le frère de madame de Pompadour reçut du roi des lettres de haute-naissance, et fut nommé surintendant des bâtimens et jardins. Souvent il faisait offrir à la reine, par la marquise sa sœur, les fleurs, les ananas, les primeurs les plus rares, venant des jardins de Trianon et de Choisy. Un jour que la marquise était entrée chez la reine, portant une grande corbeille de fleurs qu’elle tenait avec ses deux beaux bras sans gants, par signe de respect, la reine admira tout haut la beauté de la marquise, et par des éloges détaillés qui auraient convenu autant à une production des arts qu’à un être animé, elle semblait vouloir justifier le goût du roi. Le teint, les yeux, les beaux bras de la favorite, tout avait été le sujet d’éloges faits avec le ton de supériorité qui les rend plus offensans que flatteurs, lorsque la reine pria la marquise de chanter dans l’attitude où elle était, désirant entendre cette voix et ce talent dont toute la cour du roi avait été charmée au spectacle des petits appartemens, et réunir à la fois le plaisir des oreilles à ceux des yeux. La marquise, tenant toujours son énorme corbeille, sentait parfaitement ce que cette invitation avait de désobligeant, et cherchait à s’excuser sur l’invitation de chanter. La reine finit par le lui ordonner ; alors elle fit entendre sa belle voix, en choisissant le monologue d’Armide : Enfin il est en ma puissance. Toutes les dames présentes à cette scène, eurent à composer leur visage en remarquant l’altération de celui de la reine[3].


La reine recevait avec beaucoup de grâces et de dignité ; mais il arrive très-souvent aux grands de répéter les mêmes questions, la stérilité des idées étant bien pardonnable dans des réceptions publiques où on a si peu de choses à dire. Une ambassadrice fit sentir à cette princesse qu’elle ne se prêtait pas à ses distractions sur ce qui la concernait. Cette dame était grosse, et, malgré son état, elle se présentait assidûment chez la reine qui, toutes les fois qu’elle la voyait, lui demandait si elle était grosse, et, après la réponse affirmative, s’informait du nombre de mois où en était sa grossesse. Fatiguée de la récidive de ces questions, et désobligée de l’oubli total qui avait toujours suivi cette fausse marque d’intérêt, l’ambassadrice répondit à la question, êtes-vous grosse ? non, Madame. Dans l’instant, cette réponse rappela à la mémoire de la reine celles qui lui avaient été faites précédemment. « Comment, Madame, lui dit-elle, il me semble que vous m’avez répondu plusieurs fois que vous étiez grosse, seriez-vous accouchée ? — Non, Madame ; mais, en répétant toujours la même chose à Votre Majesté, j’ai craint de l’ennuyer. » Cette ambassadrice fut, depuis ce jour, reçue très-froidement à la cour de Marie Leckzinska, et, si elle avait eu plus d’influence, l’ambassadeur eût bien pu se ressentir de l’indiscrétion de sa femme. La reine était gracieuse et modeste ; mais plus, dans l’intérieur de son ame, elle remerciait Dieu de l’avoir placée sur le premier trône de l’Europe, moins elle voulait qu’on se rappelât son élévation. Ce sentiment la portait à faire observer toutes les formes de respect, comme la haute idée du rang dans lequel les princes sont nés, et qui les conduit trop souvent à dédaigner les formes d’étiquette et à rechercher les habitudes les plus simples. Le contraste, sur ce point, était frappant entre Marie Leckzinska et Marie-Antoinette : on l’a justement et généralement pensé. Cette reine infortunée porta trop loin son insouciance pour ce qui tenait aux formes sévères de l’étiquette[4]. Un jour que la maréchale de Mouchy la fatiguait de questions sur l’étendue qu’elle voulait accorder aux dames pour ôter ou garder leur manteau, pour avoir les barbes de leurs coiffures retroussées ou pendantes, la reine lui répondit en ma présence : « Madame, arrangez tout cela comme vous l’entendrez ; mais ne croyez pas qu’une reine, née archiduchesse d’Autriche, y apporte l’intérêt et l’attention qu’y donnait une princesse polonaise, devenue reine de France. »

La princesse polonaise, à la vérité, ne pardonnait pas le moindre écart sur le profond respect dû à sa personne et à tout ce qui dépendait d’elle. La duchesse de ***, dame de son palais, d’un caractère impérieux et acariâtre, s’attirait de ces petits dégoûts que les serviteurs des princes ne manquent jamais de donner aux personnes hautaines et désobligeantes, quand ils peuvent les appuyer sur leurs devoirs ou sur de simples usages. L’étiquette, on pourrait dire les seules convenances de respect, interdisaient de rien poser à soi sur les siéges de la chambre de la reine. On traversait à Versailles cette chambre pour se rendre au salon de jeu. La duchesse de *** posa son manteau sur un des plians rangés devant la balustrade du lit ; l’huissier de la chambre, chargé de surveiller tout ce qui se passait dans cette pièce pendant la durée du jeu, vit ce manteau, le prit et le porta dans l’antichambre des valets de pied. La reine avait un gros chat favori qui ne cessait de parcourir les appartemens. Ce manteau de satin, doublé de fourrure, se trouve à sa convenance, il s’y établit. Malheureusement les traces de son séjour se firent remarquer de la manière la plus désagréable sur le satin blanc de la pelisse, quelque soin que l’on eût pris pour les faire disparaître avant de la lui donner. La duchesse s’en aperçut, prit le manteau à sa main et rentra furieuse dans la chambre de la reine qui était encore environnée de presque toute sa cour : « Voyez, Madame, lui dit-elle, l’impertinence de vos gens qui ont jeté ma pelisse sur une banquette de l’antichambre où le chat de Votre Majesté vient de l’arranger comme la voilà. » La reine, mécontente de ses plaintes et d’une semblable familiarité, lui dit de l’air le plus froid : « Sachez, Madame, que vous avez des gens, et que je n’en ai pas ; j’ai des officiers de ma chambre, qui ont acheté l’honneur de me servir : ce sont des hommes bien élevés et instruits ; ils savent quelle est la dignité qui doit accompagner une de mes dames du palais ; ils n’ignorent pas que, choisie parmi les plus grandes dames du royaume, vous devriez être accompagnée d’un écuyer, ou au moins d’un valet de chambre qui le remplacerait et recevrait de vous votre pelisse, et, qu’en observant ces formes convenables à votre rang, vous ne seriez point exposée à voir vos effets jetés sur des banquettes d’antichambre. »


J’ai lu, dans plusieurs ouvrages écrits sur la vie de la reine Marie Leckzinska, qu’elle possédait de grands talens. Il est prouvé, par sa conduite religieuse, noble et résignée, par la grâce et la justesse de son esprit, que son auguste père avait pris les plus tendres soins pour développer en elle toutes les excellentes qualités dont le ciel l’avait douée. Les vertus et les lumières des grands sont toujours démontrées par leur conduite ; quant à leurs talens, cette partie reste dans l’apanage des flatteurs, de manière à n’avoir jamais de preuves authentiques sur leur réalité, et, quand on a vécu près d’eux, il est très-pardonnable de mettre leurs talens en doute. S’ils dessinent ou peignent, un habile artiste est toujours là qui dirige le crayon par le conseil, quand il ne le fait pas de sa propre main, qui prépare la palette, amalgame les couleurs d’où dépend le coloris. Si une princesse entreprend quelque broderie nuancée, de la nature de celles qui peuvent prendre leur place parmi les productions des arts, une habile brodeuse défait et recommence ce qui a été manqué, passe des soies sur les teintes négligées. Si la princesse est musicienne, il n’y a pas d’oreilles qui jugent si elle a chanté faux, ou au moins il n’existe personne capable de le dire : ce sont de légers inconvéniens que ce manque de perfection dans les talens des grands. S’en occuper, quoique médiocrement, est un mérite qui suffit en eux, puisque leur seul goût et la protection qu’ils leur accordent, les font éclore de toutes parts. La reine aimait l’art de la peinture, et croyait savoir dessiner et peindre, elle avait un maître de dessin qui passait toutes ses journées dans son cabinet. Elle entreprit de peindre quatre grands tableaux chinois, dont elle voulait orner un salon intérieur, enrichi de porcelaines rares et de très-beaux marbres de laque. Ce peintre était chargé de faire le paysage et le fond des tableaux ; il traçait au crayon les personnages ; les figures et les bras étaient aussi confiés par la reine à son propre pinceau ; elle ne s’était réservé que les draperies et les petits accessoires. La reine, tous les matins, sur le trait indiqué, venait placer un peu de couleur rouge, bleue ou verte, que le maître préparait sur la palette, et dont il garnissait à chaque fois son pinceau, en répétant sans cesse : « Plus haut, plus bas, Madame, à droite, à gauche. » Après une heure de travail, la messe à entendre, quelques autres devoirs de piété ou de famille appelaient Sa Majesté ; et le peintre, mettant des ombres aux vêtemens peints par elle, enlevant les couches de peinture où elle en avait trop placé, terminait les petites figures. L’entreprise finie, le salon intérieur fut décoré de l’ouvrage de la reine, et l’entière confiance de cette vertueuse princesse, que cet ouvrage était celui de ses mains, fut telle, que, léguant ce cabinet à madame la comtesse de Noailles, sa dame d’honneur, les tableaux et tous les meubles dont il était décoré, elle ajouta à l’article de ce legs : « Les tableaux de mon cabinet étant mon propre ouvrage, j’espère que madame la comtesse de Noailles les conservera par amour pour moi. » Madame de Noailles, depuis maréchale de Mouchy, fit construire un pavillon de plus à son hôtel du faubourg Saint-Germain, pour y placer dignement le legs de la reine, et fit graver en lettres d’or sur la porte d’entrée : L’innocent mensonge de cette bonne princesse[5].


La reine avait choisi pour amis particuliers le duc, la duchesse et le bon cardinal de Luynes. Elle les appelait ses honnêtes gens[6] ; elle faisait souvent à la duchesse l’honneur de passer la soirée et de souper chez elle ; le président Hénault faisait le charme de cette pieuse et vertueuse société. Ce magistrat unissait aux qualités imposantes de son état, le savoir d’un homme de lettres et l’aménité du courtisan[7]. La reine surprit un jour la duchesse écrivant au président qui venait de publier son Abrégé chronologique de l’histoire de France ; elle prit la plume de madame de Luynes, et écrivit au bas de la lettre cette apostille : « Je pense que M. Hénault, qui parle très-peu pour dire beaucoup, ne doit guère aimer le langage des femmes qui parlent beaucoup pour dire très-peu. » Et au lieu de signer, elle ajouta : Devinez qui ? Le président répondit à cette apostille anonyme par ces vers ingénieux :


 Ces mots, tracés par une main divine,
Ne peuvent me causer que trouble et qu’embarras.
 C’est trop oser si mon cœur les devine,
 C’est être ingrat, s’il ne devine pas.


Un soir la reine, étant passée dans le cabinet du duc de Luynes, prit successivement quelques livres pour en lire les titres ; une traduction de l’Art de plaire d’Ovide, étant tombée sous sa main, elle replaça le livre avec vivacité, en s’écriant : « Ah, fi ! — Quoi ! Madame, lui dit le président, c’est Votre Majesté qui traite ainsi l’art de plaire ? — Non, Monsieur Hénault, reprit la reine ; j’estimerais l’art de plaire, j’éloigne de moi l’art de séduire. »

Madame de Civrac, fille du duc d’Aumont, dame d’honneur de Mesdames, était de cette société intime de la reine. Ses vertus et son amabilité l’y faisaient estimer autant qu’elle y était chérie ; une mort prématurée l’enleva à sa famille et à ses amis. Le président Hénault lui rendait de respectueux hommages, ou plutôt il aimait à être l’organe de tous ceux dont une société aussi distinguée s’empressait d’environner ses qualités, ses vertus et ses souffrances. Quelque temps avant la mort de madame de Civrac, on lui ordonna des eaux minérales ; elle partit de Versailles, déjà très-affaiblie par l’état de sa santé. Le désir de la distraire pendant la durée d’un voyage qui l’éloignait de tout ce qui lui était cher, inspira au président le plan d’une fête qui lui fut donnée dans tous les lieux où elle devait se reposer : ses amis partaient avant elle pour la devancer de quelques postes et préparer leurs déguisemens. En relayant à Bernis, l’intéressante voyageuse trouva un groupe de seigneurs costumés en anciens chevaliers français, accompagnés des meilleurs musiciens de la chapelle du roi. Ils chantèrent à madame de Civrac des couplets composés par le président ; le premier commençait par ces vers :


Quoi ! vous partez sans que rien vous arrête !
Vous allez plaire en de nouveaux climats !
Pourquoi voler de conquête en conquête ?
Nos cœurs soumis ne suffisent-ils pas ?


À Nemours, les mêmes personnes, en habits de villageois et de villageoises, lui donnèrent une scène champêtre dans laquelle on l’invitait à venir simplement jouir des douceurs de la campagne. Ailleurs, ils parurent en bourgeois et en bourgeoises, avec le bailli et le tabellion, et ces travestissemens, toujours variés et animés par l’esprit aimable du président, suivirent madame de Civrac jusqu’aux eaux où elle se rendait. J’ai lu dans ma jeunesse cette ingénieuse et touchante fête ; j’ignore si le manuscrit en a été conservé par les héritiers de M. le président Hénault. La candeur et la religieuse simplicité du bon cardinal contrastaient avec l’esprit galant et aimable du président, et, sans manquer à ce qui était dû au vénérable prélat, on s’amusait quelquefois de ses simplicités. Il y en eut cependant une dont le résultat heureux justifia le bon cardinal d’une chose tout-à-fait déplacée. Ne voulant pas oublier des homélies qu’il avait composées dans sa jeunesse, et tenant à ses productions autant que l’archevêque de Tolède lorsqu’il disgracia Gil-Blas, le cardinal se levait à cinq heures du matin ; tous les dimanches, pendant le séjour de la cour à Fontainebleau (cette ville était dans son diocèse), il allait officier à la paroisse, il montait en chaire, et récitait une de ses homélies : toutes avaient été composées pour ramener les gens du grand monde aux modestes pratiques qui conviennent aux vrais chrétiens. Plusieurs centaines de paysannes, assises sur leurs sabots, environnées des paniers qui avaient servi à apporter leurs légumes ou leurs fruits au marché, écoutaient Son Éminence sans comprendre un seul mot de ce qu’il leur disait. Quelques personnes attachées à la cour, voulant assister à la messe avant de partir pour Paris, entendirent Son Éminence crier avec une émotion tout-à-fait pastorale : « Mes chers frères, pourquoi le luxe vous accompagne-t-il jusqu’au pied du sanctuaire ? Pourquoi ces coussins de velours et ces sacs couverts de galons et de franges précèdent-ils votre entrée dans le temple du Seigneur ? Quittez, quittez ces habitudes somptueuses que vous ne devez considérer que comme une gêne tenant à votre rang, et dont la présence de votre divin sauveur doit vous dégager. » Les personnes, qui avaient entendu les homélies, en parlèrent dans les sociétés de la cour ; chacun voulut se donner le plaisir de les entendre : les dames du plus haut rang se firent éveiller à la pointe du jour pour entendre la messe du cardinal, et Son Éminence se trouva promptement avoir attiré un auditoire fait pour profiter de ses homélies.


Marie Leckzinska ne put voir sans prévention la princesse de Saxe, qui épousa le dauphin en secondes noces ; mais les égards, les respects, les soins de la dauphine, lui firent oublier qu’elle était fille du prince qui portait la couronne de son père. Cependant quelques preuves des profonds ressentimens ne peuvent échapper aux yeux des gens qui environnent sans cesse les grands ; et, si la reine ne voyait plus dans la princesse de Saxe qu’une épouse chérie par son fils, et la mère du prince destiné à la succession du trône, elle n’avait point oublié qu’Auguste portait la couronne de Stanislas. Un jour, un officier de sa chambre s’étant chargé de lui demander une audience particulière pour le ministre de Saxe, et la reine n’étant point disposée à l’accorder, cet homme insista en se permettant d’ajouter qu’il n’avait osé demander cette faveur à la reine, que parce que ce ministre était un ambassadeur de famille. « Dites anti-famille, reprit la reine avec vivacité, et faites-le entrer. »


La reine aimait beaucoup madame la princesse de Tallard, gouvernante des enfans de France. Cette dame ayant atteint un âge avancé, vint prendre congé de Sa Majesté et lui faire part de la résolution qu’elle avait prise de quitter le monde et de mettre enfin un intervalle entre la vie et la mort. La reine lui témoigna tous ses regrets, essaya de la détourner de ce projet, et toute attendrie par l’idée du sacrifice auquel la princesse se déterminait, lui demanda où elle comptait se retirer : « Dans les entresols de mon hôtel, Madame, lui répondit madame de Tallard[8]. »


Le comte de Tessé, père du dernier comte de ce nom, qui n’a point laissé d’enfans, était premier écuyer de la reine Marie Leckzinska. Elle estimait ses vertus, mais s’amusait quelquefois de la simplicité de son esprit. Un jour qu’il avait été question des hauts faits militaires qui honoraient la noblesse française, la reine dit au comte : « Et vous, M. de Tessé, toute votre maison s’est aussi bien distinguée dans la carrière des armes. — Ah ! Madame, nous avons tous été tués au service de nos maîtres ! — Que je suis heureuse, reprit la reine, que vous soyez resté pour me le dire. » Ce bon M. de Tessé avait marié son fils à l’aimable, à la spirituelle fille du duc d’Ayen, depuis maréchal de Noailles ; il aimait éperdument sa belle-fille, et n’en parlait jamais qu’avec attendrissement. La reine, qui cherchait à l’obliger, l’entretenait souvent de la jeune comtesse, et lui demanda un jour quelle qualité il remarquait essentiellement en elle. « Sa bonté, Madame, sa bonté, répondit-il les yeux pleins de larmes : elle est douce..... douce comme une bonne berline. — Voilà bien, dit la reine, une comparaison de premier écuyer. »


En 1730, la reine Marie Leckzinska, se rendant à la messe, trouva le vieux maréchal de Villars appuyé sur une béquille de bois qui ne valait pas trente sous : elle l’en plaisanta, et le maréchal lui dit qu’il s’en servait depuis une blessure qui l’avait forcé de faire cette emplette à l’armée. La reine, en souriant, lui dit qu’elle trouvait sa béquille si indigne de lui, qu’elle espérait bien en obtenir le sacrifice. Rentrée chez elle, Sa Majesté fit partir M. Campan pour Paris, avec l’ordre d’acheter, chez le fameux Germain, la plus belle canne à béquille en or émaillé qu’il pût trouver, et lui ordonna de se rendre de suite à l’hôtel du maréchal de Villars, et de lui porter ce présent de sa part. Il se fit annoncer et remplit sa commission ; le maréchal, en le reconduisant, le pria d’exprimer toute sa reconnaissance à la reine, et lui dit qu’il n’avait rien à offrir à un officier qui avait l’honneur d’appartenir à Sa Majesté, mais qu’il le priait d’accepter son vieux bâton ; qu’un jour peut-être ses petits-fils seraient bien aises de posséder la canne avec laquelle il commandait à Marchiennes et à Denain. On retrouve dans cette anecdote le caractère connu du maréchal de Villars, mais il ne se trompa pas sur le prix que l’on mettrait à son bâton. Il a été conservé depuis ce temps avec vénération par la famille de M. Campan. Au 10 août 1792, une maison que j’occupais sur le Carrousel, à l’entrée de la cour des Tuileries fut entièrement pillée et en grande partie brûlée ; la canne du maréchal de Villars fut jetée sur le Carrousel, à raison de son peu de valeur, et ramassée par mon domestique. Si l’ancien maître de cette canne eût vécu à cette époque, nous n’aurions pas vu une si déplorable journée.


Le père de la reine était mort consumé auprès de sa cheminée. Comme presque tous les vieillards, il répugnait à des soins qui dénotent l’affaiblissement des facultés, et avait ordonné à un valet de chambre, qui voulait rester près de lui, de se retirer dans la pièce voisine : une étincelle mit le feu à une douillette de taffetas ouatée de coton, que la reine sa fille lui avait envoyée. Ce pauvre prince, qui espérait encore sortir de l’état affreux où l’avait mis ce terrible accident, voulut en faire part lui-même à la reine, et, mêlant la gaieté douce de son caractère au courage de son ame, il lui manda : « Ce qui me console, ma fille, c’est que je brûle pour vous. » Cette lettre ne quitta pas Marie Leckzinska jusqu’à sa dernière heure, et ses femmes la surprirent souvent baisant un papier qu’elles ont jugé être ce dernier adieu de Stanislas[9].

  1. Dans les Mémoires estimés sur le règne de Marie Leckzinska, on dit qu’elle fut au moment d’épouser le duc de Bourbon. J’ignore si ce fait peut être contestable ; mais je puis affirmer qu’elle a souvent entretenu madame Campan, ma belle-mère, du projet de son mariage avec le duc d’Estrées.
    (Note de madame Campan.)
  2. On sera curieux sans doute de savoir comment Jeanne Poisson, fille d’un commis dans l’administration des vivres, parvint à remplacer, dirai-je dans l’emploi ou dans le rang de favorite, la duchesse de Châteauroux, issue de l’illustre maison de Nesle. Soulavie donne à ce sujet des détails que rien n’empêche de croire exacts. Nous les donnons aussi parce qu’on peut aimer à connaître toutes les routes qui mènent à la grandeur.

    « Madame d’Étioles accompagnait le roi (Louis XV) dans toutes ses parties de chasse, non pas comme appartenant à sa suite, mais comme spectatrice. Comme une déesse descendue du ciel, elle paraissait dans la forêt de Senart, à côté du château d’Étioles, tantôt vêtue d’une robe d’azur, dans un phaëton couleur de rose ; et tantôt vêtue de couleur de rose, et dans un phaëton d’azur. Sa beauté était éclatante ; aussi la duchesse de Châteauroux, qui redoutait déjà l’inconstance de Louis XV, en prit-elle ombrage. Elle fit suivre madame Le Normand d’Étioles par d’habiles jeunes gens qui lui rendaient compte de ses démarches. On a dit que madame d’Étioles, confondue dans la foule, ayant osé venir étaler ses charmes au grand couvert, madame de Châteauroux, qui se la fit montrer, parce qu’elle ne pouvait en être connue, se plaça entre le roi et madame d’Étioles, comme un écran ; chercha des pieds la rencontre des siens, et les écrasa du poids de son corps, pour lui apprendre, par ce châtiment anonyme, à oser se montrer au roi. Mais madame d’Étioles était si patiente, que rien ne fut capable de la distraire de ses projets*. »

    [* M. d’Étioles était moins patient que sa femme. Il vit son élévation avec des mouvemens d’humeur qui donnaient lieu très-souvent à de singulières scènes. Celle qu’on trouvera rapportée dans les éclaircissemens, lettre (I), n’est pas une des moins piquantes.

    (Note de l’édit.)]

    Puisque j’ai commencé à parler de la rivalité qui existait entre ces dames, il faut citer encore un trait qui désola madame de Pompadour, même après son triomphe et la mort de madame de Châteauroux.

    « Dagé était en ce moment le coiffeur recherché des princesses du sang et des premières dames de la cour, madame de Châteauroux l’ayant mis à la mode. Il était bien venu des femmes, parce qu’il avait mis son art au plus haut point de perfection. Les princesses du sang et les dames titrées avaient mis de côté leur valet de chambre, et voulaient être coiffées par ce perruquier qui devint l’enfant gâté des femmes de la cour. Dagé était bien fait de sa personne, facétieux de caractère et gascon. Se prévalant de la protection de madame la dauphine, belle-fille de Louis XV, il faisait l’important vis-à-vis du parti opposé. Madame de Pompadour, quoique fort embarrassée de son rôle, voulut se mettre au ton qui régnait dans ce temps-là, demanda Dagé, et fut obligée de négocier. Victorieuse de la résistance du coiffeur : Comment vous êtes-vous donné, lui dit-elle le premier jour qu’elle l’employa, une aussi grande vogue et la réputation dont vous jouissez ? — Cela est-il surprenant, Madame, lui répondit le facétieux Dagé, je coiffais l’autre. La toilette de madame de Pompadour était ce jour-là très-brillante et très-nombreuse. L’embarras des assistans fut douloureux et complet. Madame la dauphine, les dames de France répétèrent que Dagé coiffait l’autre, et ce mot ne contribua pas peu à former à la cour des divisions qui éclatèrent peu de temps après entre la famille royale et la favorite. Les princes et les princesses appelèrent madame d’Étioles madame celle-ci, et madame de Châteauroux madame l’autre ; Louis XV en fut désolé. » (Mémoires historiques et anecdotes de la cour de France, par Soulavie, T. I.)

    Le lecteur verra, lettre (J), par un passage piquant des Mémoires de madame du Hausset sur madame de Pompadour, qu’on faisait, pour lui enlever le cœur de Louis XV, au moins autant de tentatives qu’elle en avait faites elle-même pour s’en rendre maîtresse.

    (Note de l’édit.)
  3. Madame de Pompadour possédait plusieurs talens ; elle maniait également bien le crayon et le burin. On a d’elle plusieurs gravures sur cuivre et sur pierres fines. Elle composa, et l’on ajoute qu’elle exécuta même une suite de sujets destinés à consacrer les événemens les plus célèbres du règne de Louis XV. C’était à cette époque une rare faveur que de recevoir la collection des gravures de madame de Pompadour. Si quelques écrivains contestent encore ses succès comme artiste en ce genre, tout le monde est d’accord sur ses talens en musique. Sa voix était belle, sonore, étendue ; elle se plaisait à la faire briller dans des concerts où les meilleurs artistes et les plus grands seigneurs faisaient leur partie. Voyez, à ce sujet, des détails curieux sous la lettre (K).
    (Note de l’édit.)
  4. On reproche si souvent à Marie-Antoinette d’avoir dérogé à la sévérité des anciens usages, qu’il faut bien répondre encore une fois à cette accusation par des faits. Jamais prince ne fut plus rigide observateur des lois de l’étiquette que Louis XIV ; et, dans ses dernières années, la pruderie de madame de Maintenon tendait à renforcer encore ce penchant au lieu de l’affaiblir. Eh bien ! que ceux qui ne pourraient pardonner à Marie-Antoinette de légères infractions au cérémonial comparent sa conduite à celle de la duchesse de Bourgogne.

    « Cette princesse, dit madame la duchesse d’Orléans dans ses Mémoires, était souvent toute seule dans son château, sans ses gens ; prenant une des jeunes dames sous le bras, elle courait sans ses écuyers et sans ses dames d’honneur et d’atours. À Marly et à Versailles, elle allait à pied, sans corset ; entrait à l’église et s’asseyait auprès des femmes de chambre. Chez madame de Maintenon, on n’observait point de rang, et tout le monde s’y asseyait pêle-mêle ; elle faisait cela à dessein pour qu’on ne remarquât pas son propre rang. À Marly, la dauphine courait la nuit avec tous les jeunes gens dans le jardin jusqu’à trois ou quatre heures du matin. Le roi n’a rien su de ces courses nocturnes. »

    Ceci est-il assez clair, assez positif ? D’où vient donc le blâme qui s’élève avec tant d’injustice contre Marie-Antoinette, tandis qu’on gardait un silence profond sur les inconséquences, pour ne pas dire pis, de la duchesse de Bourgogne ? C’est que la trop grande bonté de Louis XVI encourageait parmi les courtisans l’audace et la calomnie, quand, sous Louis XIV au contraire, le plus prompt châtiment aurait atteint l’audacieux qui eût exercé la malignité de ses propos contre une personne placée près du trône.

    La duchesse d’Orléans le fait assez connaître. « Madame de Maintenon, ajoute-t-elle, avait défendu à la duchesse du Lude de gêner la duchesse de Bourgogne, pour ne pas la fâcher, attendu qu’étant de mauvaise humeur, la dauphine ne pouvait divertir le roi. Elle avait aussi menacé de son courroux éternel quiconque serait assez téméraire pour dénoncer la dauphine auprès du roi. »

    (Note de l’édit.)
  5. On trouve dans la Vie de Marie Leckzinska, par l’abbé Proyart, les détails suivans sur les occupations de cette princesse :

    « Au sortir de son dîner, elle donnait encore des audiences. Elle entrait ensuite dans ses petits appartemens où elle s’amusait à jouer de quelque instrument, à peindre au pastel ou à faire usage d’une fort petite et fort jolie imprimerie. Elle ne peignait que des tableaux de dévotion dont elle faisait présent à des communautés religieuses et à des personnes qui avaient le goût de la piété. Il lui en restait à sa mort un cabinet entier qu’elle laissa par son testament à sa dame d’honneur. Elle imprimait, pour les distribuer comme ses tableaux, des prières, des sentences et des maximes de morale. Le dauphin l’ayant un jour trouvée occupée de ce travail, se récria, avec sa gaieté ordinaire, sur le scandale qu’elle lui donnait avec son imprimerie clandestine. La reine lui fit présent d’une collection des ouvrages sortis de sa presse, et lui demanda s’il ne serait pas curieux d’apprendre le métier à son école ? « Pas du tout, répondit le prince ; à moins que ce ne soit pour imprimer un règlement bien sévère contre l’abus qu’on fait aujourd’hui de l’imprimerie. »

    (Note de l’édit.)
  6. Je ne prétends affaiblir en rien le sens de l’honorable épithète donnée par la reine à ses amis ; mais la fidélité de l’histoire m’oblige à rapporter le passage suivant des Mémoires de madame du Hausset.

    « J’étais surprise, dit-elle, de voir depuis quelque temps la duchesse de Luynes, dame d’honneur de la reine, venir en secret chez Madame. Ensuite elle y vint sans se cacher ; et, un soir, Madame s’étant mise au lit, me dit : « Ma chère bonne, vous allez être bien contente, la reine me donne une place de dame du palais ; demain je lui serai présentée : il faut me faire bien belle. » J’ai su que le roi n’était pas aussi aise qu’elle ; il craignait le scandale, et qu’on ne crût qu’il avait forcé la reine à cette nomination. Mais il n’en était rien. On représenta à cette princesse que c’était un acte héroïque d’oublier le passé ; que tout scandale serait effacé, quand on verrait Madame tenir à la cour par une place honorable ; et que ce serait une preuve qu’il n’y avait plus que de l’amitié entre le roi et sa favorite. La reine la reçut très-bien ; les dévots se flattèrent d’être protégés par Madame, et chantèrent pendant quelque temps ses louanges. Plusieurs amis du dauphin venaient en particulier voir Madame, excepté le chevalier Du Muy ; et quelques-uns obtinrent des grades. Le roi avait pour eux le plus grand mépris et ne leur accordait rien qu’en rechignant.

    » Ce moment est celui où j’ai vu Madame le plus satisfaite. Les dévotes venaient chez elle sans scrupule et ne s’oubliaient pas dans l’occasion. Madame de Luynes avait donné l’exemple. Le docteur Quesnay riait de ce changement de décoration et s’égayait aux dépens des dévotes. « Cependant, lui disais-je, elles sont conséquentes et peuvent être de bonne foi. — Oui, disait-il, mais il ne faut pas qu’elles demandent rien. » (Journal de madame du Hausset.)

    (Note de l’édit.)
  7. Le président Hénault, qui ne voulait pas être fameux par ses soupers, mais qui l’est, à bien plus juste titre, par sa Chronologie, était surintendant de la maison de la reine. Il faisait le charme de sa société intime, comme il avait été dans sa jeunesse l’ornement de la cour de Sceaux, chez la duchesse du Maine. On a de lui des couplets, des pièces de théâtre, et même une tragédie de Marius, jouée avec quelque succès en 1715. Mais ses tragédies sont au-dessous de ses chansons ; et le président Hénault n’eût laissé que les souvenirs d’un homme aimable, sans la juste célébrité que l’Abrégé chronologique assure à l’écrivain.
    (Note de l’édit.)
  8. « Madame de Tallard, dit Soulavie, aimait le jeu et les veilles, avait de l’esprit, de la dignité et de la noblesse dans l’expression. Elle nomma, pour son exécuteur testamentaire, Chauvelin, ancien garde-des-sceaux, et distribua avant sa mort ses bijoux et ses tabatières. Elle prit ce jour-là le plus beau de ses diamans, le mit à son doigt ; et comme sa femme de chambre voulait le lui ôter pour le mettre en lieu de sûreté : « Je dois mourir bientôt, lui dit-elle, et j’ai légué dans mon testament, à M. de Chauvelin, le diamant que je porterai à ma mort. » Madame de Tallard s’était fait, dans sa place de gouvernante des enfans de France, 115,000 livres de rentes du roi, parce que, à chaque nouvel enfant, les appointemens augmentaient de 35,000 livres. Cette augmentation était stable, même après l’éducation. Elle s’était séparée de gré à gré de son mari, faisait une très-grande dépense et devait immensément. La malignité, peut-être la calomnie, la poursuivirent même après sa mort. » (Anecdotes de la cour de France pendant la faveur de madame de Pompadour, par Soulavie.)
    (Note de l’édit.)
  9. Ce trait honore le cœur et la piété filiale de Marie Leckzinska. Cette princesse avait autant d’esprit que de sensibilité, si l’on en juge par plusieurs traits qui lui échappaient dans la conversation, et que l’abbé Proyart a recueillis. Plusieurs sont remarquables par le fond des idées, et souvent aussi par un tour ingénieux et vif.

    « Nous ne serions pas grands sans les petits. Nous ne devons l’être que pour eux. » (P. 240.)

    « Tirer vanité de son rang, c’est avertir qu’on est au-dessous. » (P. 240.)

    « Un roi qui commande le respect pour Dieu est dispensé de le commander pour sa personne. » (Ibidem.)

    « La miséricorde des rois est de rendre la justice ; et la justice des reines, c’est d’exercer la miséricorde. » (P. 241.)

    « Les bons rois sont esclaves, et leurs peuples sont libres. » (Ibidem.)

    « Le contentement voyage rarement avec la fortune ; mais il suit la vertu jusque dans le malheur. » (Ibidem.)

    « Ce n’est que pour l’innocence que la solitude peut avoir des charmes. » (P. 242.)

    « S’estimer grand par le rang et les richesses, c’est s’imaginer que le piédestal fait le héros. » (Ibidem.)

    « Plusieurs princes ont regretté, à la mort, d’avoir fait la guerre ; nous n’en voyons aucun qui se soit repenti alors d’avoir aimé la paix. » (Ibidem.)

    « Une personne sensée juge d’une tête par ce qu’il y a dedans ; les femmes frivoles par ce qu’il y a autour. » (P. 245.)

    « Les courtisans nous crient : Donnez-nous sans compter ! et le peuple : Comptez ce que nous vous donnons ! »

    On trouvera, lettre (L), sur le caractère de cette princesse, des détails et des anecdotes qui la font encore mieux connaître.

    (Note de l’édit.)