Aller au contenu

Méthode et invention nouvelle dans l’art de dresser les chevaux/Avertissment

La bibliothèque libre.


AVERTISSEMENT
SUR CETTE
SECONDE EDITION.



L A premiere Edition de cet Ouvrage parut l’an 1657. M. le Duc de Newcastle la fit imprimer à Anvers, où il s’étoit retiré après avoir ſignalé ſon zèle & ſa fidélité pour le Roy contre les Parlementaires. Exilé de ſa Patrie, & privé de ſes biens, il ſe conſoloit dans cet Aſyle par une occupation qui avoit toûjours fait les ſes delices. Dès fa plus tendre jeuneſſe il avoit pratiqué & étudié l’Art de monter à Cheval, lû les livres qui s’étoient faits ſur ce ſujet, & conſulté les perſonnes les plus habiles dans cet Art. Cette étude jointe à ſa propre experience lui fit découvrir pluſieurs défauts dans les maximes de ceux qui juſqu’alors avoient enſeigné cette Science : il s’attacha à les corriger, & inventa une nouvelle maniere de dreſſer toute ſorte de Chevaux. Malgré la ſituation fâcheuſe où il ſe trouvoit à Anvers, il acheta pluſieurs Chevaux de Barbarie & d’Eſpagne, & il ſe divertiſſoit à les exercer dans le Manege qu’il avoit fait bâtir exprés ; ce qui lui attiroit ſouvent des viſites des Princes & des Grands Seigneurs qui étoient alors dans les Pays-bas Catholiques. Comme on ſavoit qu’il avoit mis par écrit fes Obſervations, on le preſſa ſi fort de les donner au public, qu’il y conſentit, & publia ſa Nouvelle Methode de dreſſer les Chevaux, enrichie d’un grand nombre de figures en taille douce.

On ne rapportera pas icy tous les éloge que les Connoiſſeurs ont donné à cet Ouvrage : on ſe bornera à ce qu’en ont dit Meilleurs de Solleyſel & de la Gueriniere. Le premier parlant des Auteurs qui ont traité des Haras, dit « qu’il n’y en a aucun qui inſtruiſe plus particulierement que Monsieur le Duc de Newcastle, l’un des plus accomplis Seigneurs d’Angleterre, lequel a toûjours eu une tres belle écurie, dans laquelle on a vû des Chevaux parfaitement manier à tous les plus beaux airs. Depuis fort long temps, continue-t-il, il a eu tout le ſoin imaginable pour avoir dans ſes Haras des Chevaux excellens, & capables de reüſſir ; & comme il en faiſoit ſon principal divertiſſement, il n’a pas oublié d’y apporter toutes les précautions qui pouvoient luy donner ce plaiſir, & d’autant plus facilement qu’il n’a épargné ny dépenſe, ny ſoin pour y reüſſir. Il avoit par ſon expérience la connoiſſance des moyens pour y parvenir ; auſſi a-t-on veu ſortir de ſes Haras de tres beaux Chevaux, non ſeulement pour fournir ſes écuries, mais en core pour en gratifier ſes amis. Il eſt donc à préſumer que ce qu’il a donné au public ne peut manquer d’être excellent. » M. de Solleyſel ajoute que le Livre de ce Seigneur eſt rare, & que difficilement le peut-on recouvrer, tant à cauſe du prix exceſſif qu’il ſe vend, qu’à cauſe qu’il s’en eſt tiré tres peu d’exemplaires[1] .

Voici le jugement de M. de la Gueriniere. M. le Duc de Newcastle, dit-il, étoit un Seigneur Anglais Gouverneur de Charles II. Il a infiniment honoré la profeſſion par l’unique étude qu’il en a faite pendant tout le cours de ſa vie ; auſſi a-t-il paſſè pour le plus ſçavant Homme de cheval de ſon temps. Nous avons de lui un excellent livre in folio en François, imprimé à Anvers, & orné de Planches ; mais comme il n’en fit tirer que cinquante, dont il fit preſent à pluſieurs Princes & Seigneurs, & qu’il fit briſer les Planches, il eſt devenu ſi rare, qu’à peine peut-on le trouver[2].

Ces deux Auteurs ont raiſon d’atribuer la rareté de ce Livre au petit nombre d’exemplaires que M. le Duc de Newcastle en fit imprimer : mais M. de la Gueriniere ne devoit pas ajouter que cela vient auſſi de ce que ce Seigneur fit briſer les Planches. Les Planches n’ont jamais été briſées ; & elles ſont aujourd’hui dans la Bibliotheque de M. le Comte d’Oxford, qui par un effet de la protection genereuſe dont il honore les Lettres, a bien voulu permettre qu’on s’en ſervit pour donner cette ſeconde Edition.



  1. Le Parfait Mareſchal, &c. Par le Sieur de Solleyſel, Ecuyer, &c Tom. II. pag. 307 de la ſixiéme Edition de Paris 1685 in 4to.
  2. Ecole de Cavalerie &c. Par M. de la Gueriniere, Ecuyer du Rey. pag. 61 de l’Edition de Paris 1733, in fol.