Mon encrier, Tome 1/Religion et religions

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Madame Jules Fournier (1p. 11-12).

RELIGION ET RELIGIONS[1]

C’est le titre d’un poème de Victor Hugo.

Cela pourrait être tout aussi bien celui d’un article sur la mentalité de quelques-uns de nos hommes publics. Nous voulons parler de ceux qui, ayant renié la foi catholique, n’en gardent pas moins le culte farouche du parti.

Il se trouve à Québec, par exemple, une bonne demi-douzaine de députés qui se vantent presque publiquement de ne plus croire « dans les balivernes des curés ».

Ils seraient indignés qu’on les soupçonnât d’être d’accord avec le pape ou les conciles sur la moindre question morale.

Ils affichent un égal dédain pour Lacordaire et pour Bossuet, pour Montalembert et pour Fénelon.

À leurs yeux Joseph de Maistre est un « idiot ». Ils appellent Louis Veuillot « un crétin ». Quant à Pascal, il avait, disent-ils, du génie, « mais il n’était pas sincère ».

Aussi ce n’est pas à eux que l’on fera jamais croire les absurdités du dogme romain. Eux, ils sont éclairés, ils sont avancés, ils n’ont pas de superstitions.

Ils disent cela. Et ils le pensent. Mais ils ont encore une religion : c’est celle du parti ; il leur reste encore un culte : c’est celui du pouvoir.

Ils n’acceptent plus l’autorité de saint Thomas d’Aquin, mais ils acceptent celle d’Ulric Barthe.

Ils ne croient plus en Jésus-Christ, mais ils croient toujours en Laurier.

  1. Nationaliste, 25 avril 1909.