Notes Eneide/Livre X

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Traduction par divers traducteurs sous la direction de Charles Nisard.
Lucrèce, Virgile, Valérius Flaccus - Œuvres complètesFirmin Didot (p. 478).
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Nota. Le livre IX n’a donné lieu à aucune note.


LIVRE X.

v. 228…. Vigilasne, deum gens, Ænea ? Vigila, etc. Pour expliquer cette répétition, il est nécessaire de dire que cette expression était consacrée à Rome par les vestales, qui avaient coutume de l’adresser au grand pontife.

v. 315. Inde Lichan ferit, exsectum jam matre peremta, etc. Cette histoire d’un guerrier que le fer sauva à sa naissance, et qui périt par le fer, présente un contraste bien frappant, et fait naître une foule d’idées philosophiques. Lichas était venu au monde par l’opération césarienne, ainsi appelée parce qu’elle fut employée pour la naissance d’un enfant de la famille Julia, qui fut tiré du ventre de sa mère après la mort de celle-ci, et pour cette raison appelé César, quia matris alvus cæsa fuerat. Depuis ce temps tous les Jules prirent ce surnom. Cette opération a été tentée depuis avec succès sur des femmes vivantes.

v. 391… Laride Thymberque, simillima proles, etc. La mort de ces deux frères jumeaux, chéris de leurs parents, et tellement ressemblants que la différence de leurs blessures seule a pu les distinguer, est un des plus beaux exemples de l’art avec lequel Virgile sait entremêler ses récits de batailles à la peinture des vertus de la paix et des mœurs domestiques. On ne trouve rien de semblable dans Homère. M. de Puységur a placé l’auteur de l’Iliade au nombre des écrivains militaires : on doit s’étonner qu’il n’y ait point placé l’auteur de l’Enéide. Partout, dit le comte Algarotti, Virgile fait éclater ses connaissances guerrières, soit qu’il s’agisse d’asseoir un camp, soit qu’il faille l’attaquer ou le défendre ; il sait aussi bien faire marcher une armée que la mettre en ordre de bataille, et il place avec art les corps qu’il désigne dans les lieux où ils ont le plus d’avantage. Au reste, il n’est pas étonnant qu’il soit initié dans les secrets de l’art militaire : la plupart de ses amis, Pollion, Varus, Mécène, étaient guerriers.

Quoique les batailles de Virgile soient de la même époque que celles d’Homère, on ne peut nier qu’elles ne se ressentent des progrès que l’art de la guerre avait faits chez les Romains. On serait peut-être fondé à lui faire un reproche de cette espèce d’anachronisme ; mais on regrette plutôt que son sujet ne lui ait pas permis de nous faire connaître cet art funeste au point où l’avait porté l’habileté des Césars. Ses descriptions auraient peut-être fourni aux savants des notions plus précises que celles de Polybe.

v. 740… Te quoque fata Prospectant paria, etc. Les anciens croyaienl que les morts avaient le don de la divination ; il est bien naturel qu’Orode, si cruellement outragé par son vainqueur, désire et prévoie le juste châtiment de ses insultantes railleries. C’est ainsi que, dans le seizième livre de l’Iliade, Homère met dans la bouche de Patrocle expirant la prédiction de la mort d’Hector.