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Notes sur le Grand-Pressigny et ses environs (2)

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Notes sur le Grand-Pressigny et ses environs (2)
Bulletin de la Société archéologique de TouraineVI (p. 343-369).
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Notes sur le Grand-Pressigny
et ses environs

Suite[1]

Liste des anciens propriétaires de la baronnie
du Grand-Pressigny

La terre-baronnie du Grand-Pressigny a été successivement possédée par : 1o les chanoines de Saint-Martin de Tours ; 2o la famille de Pressigny ; 3o celle de Craon ; 4o celle de Chabot ; 5o celle de Beauvau ; 6o celle de Prie ; 7o celle de Savoie-Villars ; 8o celle des Prez ; 9o celle de Brulart de Sillery ; 10o celle de Bertrand de la Bazinière ; 11o celle de Masson de Maisonrouge ; et 12o celle de Gilbert de Voisins.

I
Chanoines de Saint-Martin de Tours

Les premiers possesseurs du lieu ou domaine de Pressigny dont on retrouve des traces dans l’histoire sont les chanoines de Saint-Martin de Tours.

En 774, Charlemagne confirma la donation de Pressigny faite à Saint-Martin par Antlandus, abbé de Saint-Martin.

Les auteurs citent une charte de Charles le Chauve, datée de l’an 862, portant affectation à la mense des chanoines de Saint-Martin de Tours, entre autres biens, de Pressigny, avec une chapelle, un domaine seigneurial et d’autres dépendances considérables dont ils avaient été précédemment dépouillés soit par la négligence de leurs abbés, soit par le malheur des temps ou par d’autres circonstances.

En 920, Charles le Chauve approuva ces possessions.

Le roi Raoul, par un diplôme de l’an 930, leur en confirma de nouveau la jouissance avec exemption de tous les droits et redevances qui se percevaient à cette époque.

II
Famille de Pressigny

Les historiens ne nous fournissent que des renseignements contradictoires sur l’origine de la famille de Pressigny. Le Laboureur prétend qu’elle est issue d’une famille de Loudun ; Duchesne la fait descendre de la maison de Berrie ; d’autres lui donnent pour origine la maison de Beauçay. En présence de cette divergence nous ne pouvons qu’en appeler à de nouvelles et plus amples recherches de la part des généalogistes.

On serait assez porté à croire que les anciens membres de cette famille s’emparèrent du fief de Pressigny sur l’église de Saint-Martin de Tours à la faveur des désordres et de l’anarchie où la France se vit plongée lors de la décadence de la maison de Charlemagne. De la possession de ce fief leur vint sans doute le nom de Pressigny, qu’ils échangèrent plus tard contre celui de Sainte-Maure.

Guillaume de Pressigny, qui suit, est, après les chanoines de Tours, le plus ancien seigneur de Pressigny et le premier membre de la famille de ce nom dont nous ayons connaissance.

1. — Guillaume de Pressigny, Ier du nom

Guillaume de Pressigny se distingua dans les armes sous Philippe-Auguste, qui récompensa ses services en le nommant chevalier banneret en 1204. On sait que ce titre conférait le droit de faire porter sa bannière dans les armées du roi à la condition toutefois de fournir armé et équipé un contingent de cinquante lances. Cette bannière était carrée, tandis que celle des simples chevaliers était fendue en forme de queue d’hirondelle.

Il épousa, vers 1160, Avoie ou Avoise, dame de Sainte-Maure, fille unique de Guillaume de Sainte-Maure, et il reçut d’elle en dot la baronnie de Sainte-Maure et tous les autres biens de son père.

Après son mariage, il prit tantôt le nom de Pressigny, tantôt celui de Sainte-Maure, suivant les actes qu’il faisait dans l’une ou dans l’autre de ces seigneuries ; quelque fois aussi il prenait le titre de Pressigny-Sainte-Maure, mais il scellait toujours du sceau de Pressigny.

Il confirma en 1205 les exemptions du péage que Guillaume de Sainte-Maure, son beau-père, avait accordées à l’abbaye de la Merci-Dieu. Avoise sa femme, ses fils Josbert et Hugues, et ses filles Garcie, Areniburge, Pétronille et Domète, concoururent à cet acte.

Par un autre titre, qui porte la date de 1209, Guillaume de Pressigny, seigneur de Sainte-Maure, accorda, du consentement d’Avoise, sa femme, de Guillaume, son fils aîné et de ses autres enfants, aux religieux de la chartreuse du Liget, pour le rachat de ses péchés et de ceux de ses ancêtres, exemption pleine et entière du péage dans l’étendue de ses terres.

Sa femme et lui fondèrent dans l’église de Tours la chapelle Saint-Jacques, où leurs armes étaient peintes sur les vitraux.

Une charte, datée de 1213, de l’abbé, et des religieux de Saint-Julien, constate un accord fait entre le chapitre de Saint-Martin et le prévôt de Saint-Épain, d’une part, et Guillaume de Pressigny, seigneur de Sainte-Maure, de l’autre, au sujet des biens d’un certain Lambert, qui avait tué un homme. Ces biens ayant été confisqués appartenaient au seigneur de Sainte-Maure, mais le prévôt s’en empara le premier, et l’abbé de Saint-Julien, nommé commissaire avec son prieur et son sacristain, pour juger le différend, adjugea les biens au prévôt sans décider la question de droit. (Dom Housseau, nos 2359 et 2365.)

Artus, duc de Bretagne, venait de se laisser surprendre à Mirebeau par Jean-sans-Terre, son oncle, roi d’Angleterre, (1er août 1202). Quatre jours après cet éclatant fait d’armes, le roi d’Angleterre, par ses lettres patentes datées de Chinon, manda à Guillaume des Roches, sénéchal d’Anjou, de mettre entre les maius de Girard d’Athée, qui tenait pour le roi d’Angleterre, la terre de Guillaume de Pressigny, de la prendre sous sa garde et de la conserver au roi anglais ; quant à ses forteresses, ordre était donné de les raser. Il devait en outre laisser Girard saisir ceux qui avaient rompu le ban du roi Jean partout où il les trouverait et les mettre à rançon pour l’avantage commun du roi et du sénéchal. Guillaume de Pressigny était alors possesseur des deux seigneuries de Sainte-Maure et de Pressigny ; il tenait pour Philippe-Auguste. Le roi Jean ordonna de raser ces deux places fortes et de retenir les domaines entre ses mains jusqu’à la soumission de son vassal rebelle. (M. Salmon, Mémoires de la Société archéologique de Touraine, tome XIII.)

A la suite de ces événements, Guillaume de Pressigny fit construire le vieux château du Grand-Pressigny, dont le donjon ou tour carrée est encore debout.

Il établit vers 1190 un monastère au Grand-Pressigny, à la prière de Renald ou Renaud, abbé de Pont-Levoy.

Il eut de son mariage avec Avoise de Sainte-Maure : 1o Guillaume, qui suit ; 2o Josbert,qui va suivre ; 3o Hugues, doyen de Saint-Gatien et prieur de Loches en 1222-1229 ; 4o Garcie ; 5o Aremburge, femme de Renaud de Sublaines ; 6o Pétronille ; et 7o Domète.

2. — Guillaume, IIe du nom, fils du précèdent, dit de Sainte-Maure

Guillaume II de Pressigny, ou III de Sainte-Maure, laissa tout à fait le nom de Pressigny pour prendre celui de Sainte-Maure.

Il promit au roi que Guillaume de Faye ne prendrait les armes ni contre lui ni contre ses sujets, sous peine de 200 marcs d’argent ; il en donna acte en 1218.

Il fut l’un des bienfaiteurs du monastère de Beaugerais près de Loche, par un don qu’il fit à cette abbaye le 7 des ides d’octobre 1218, en exemptant les religieux de tout droit de péage dans l’étendue de ses terres. Ce titre est scellé de son sceau ayant pour légende : « S. Widelmi de Sa Maura ». Sur ce sceau il est représenté à cheval tenant d’une main l’épée haute et de l’autre l’écu de Sainte-Maure ; son cheval est caparaçonné des mêmes armes. (M. Martin.)

Il mourut sans postérité en 1223.

3. — Josbert, frère du précèdent

Josbert, seigneur de Pressigny, de Sainte-Maure, de Nouâtre, etc., succéda au précédent, son frère aîné.

Il ratifia au mois de janvier 1228 la fondation de la chapelle de Saint-Jacques, dont nous avons parlé, et il fut une des cautions du roi saint Louis pour son traité de paix avec le comte de Foix en 1229.

Il maintint, par des lettres en date de 1223, le monastère de Sainte-Croix de Poitiers dans la possession de certains droits sur les hommes de Saint-Romain et de Villèche. La même année il accorda le franc passage sur ses terres aux moines de Beaugerais. Le titre de cette dernière concession porte son sceau avec cette légende : « Sigillum Josberti de Sa Maura. » Il y est représenté à cheval, armé de toutes pièces, l’épée haute en une main ; de l’autre il tient un écu chargé d’une fasce, qui sont les armes de Sainte-Maure. Au contre-scel est un écu portant les armes de Pressigny.

La même année (1223), il confirma un don de 7 l. 1/2 tournois de rente affectée à l’érection d’une chapelle dans l’église de la Merci-Dieu, fait à cette église par Guillaume, son frère, à l’article de la mort. Cette donation fut approuvée tant par Josbert que par Hugues, son frère, alors son héritier présomptif, et il assigna cette rente sur le péage de Sainte-Maure, (Dom Housseau, no 2565.)

Il se croisa contre les Albigeois, et il fut un des chevaliers qui scellèrent de leur sceau le traité fait en 1229 au nom du roi saint Louis pour chasser les hérétiques des terres de Roger Bernard II, comte de Foix.

Josbert transigea en avril 1224 avec le chapitre de Saint-Martin, en présence du légat du pape, au sujet des injustices commises par lui contre les hommes de Saint-Epain, sujets de ce chapitre, et reçut 3000 s. et 10 l. tournois.

Cette même année il ratifia une donation faite par sa mère, Avoise, à l’église de Tours de 10 livres de rente pour y fonder son anniversaire ; il assigna cette rente sur les péages de Nouâtre. (Dom Housseau, no 2588.)

Encore en 1224, il transigea avec les religieux de Marmoutier au sujet des hommes de Saint-Épain. (Id., no 2596.)

En 1228, avec le consentement de sa femme, pour le repos de l’âme du comte de Vendôme, son beau-père, il exempta les religieux de Cormery de tous droits du péage coutumier sur ses terres. (Id. no 2661 ; M. Martin.)

Il épousa Agnès, fille de Bouchard V, comte de Vendôme, dont il eut : 1o Guillaume, qui suit ; 2o Josbert, chancelier de l’église de Saint-Martin de Tours, seigneur de Marans, de l’Alleu, de Loumeau, etc., et 3o Renaud de Pressigny, l’un des plus braves chevaliers de son temps. Il fut l’auteur de la branche cadette de Pressigny, qui reçut Etableau dans son patrimoine. (Voir la liste des seigneurs d’Etableau, que nous donnerons plus loin.)

Une charte dont la date nous est inconnue, constate que Mathieu Peloquin se disposant à faire le voyage de Jérusalem, emprunta de Josbert de Pressigny xxx livres. Josbert étant mort, Peloquin obtint de Guillaume de Pressigny et de sa mère la remise de sa dette à condition qu’il ferait une donation de 12 deniers de rente annuelle pour le repos de l’âme de Josbert. Il donna 6 deniers à l’abbaye de Luzay et 6 autres deniers à celle de Noyers, ainsi qu’à l’abbé Henry. (Dom Housseau.)

4. — Guillaume, IIIe du nom, fils du précèdent

Guillaume III de Pressigny (IV de Sainte-Maure), seigneur de Pressigny, de Sainte-Maure, la Croix-de-Bléré, le Plessis, Nouâtre, Chissay, etc.

Il fut présent en 1230 à une ordonnance rendue au château de Saumur par Charles, comte d’Anjou et de Provence, louchant le salaire des avocats en cour laye.

Il épousa Anne de Rançon, morte en 1302, dont il eut plusieurs enfants qui héritèrent en partie de Geoffroy, seigneur de Rançon et de Taillebourg, mort sans postérité. Cette succession fut la source d’un procès contre Hugues l’archevêque, qui fut jugé par Alphonse de France, frère de saint Louis, le 15 août 1269.

Il mourut en 1271, un an après saint Louis, qu’il accompagna probablement en Palestine.

Sa femme fut inhumée en l’abbaye de Suilly.

Guillaume, sur sa demande, obtint de Vincent, archevêque de Tours, la remise des tètes de sainte Maure et de sainte Britte, qui étaient renfermées avec les autres ossements dans une châsse en argent placée dans l’église de Sainte-Maure. Le titre constatant ce fait est en date du premier vendredi après le dimanche Reminiscere de l’année 1267.

Le seigneur d’Avoir, en Anjou, était vassal du seigneur de Sainte-Maure. Ils convinrent entre eux, par un concordat fait en 1268, que le seigneur d’Avoir servirait Guillaume pendant un an avec ses chevaliers dans le voyage de la Terre Sainte, où il devait accompagner saint Louis. Guillaume, en conséquence, s’engageait à payer à son vassal 1000 livres tournois. (Archives de Sainte-Maure ; M. Martin.)

Ses enfants furent : 1o Guillaume, qui suit ; 2o Pierre, seigneur de Montgoger, mort vers l’an 1324, époux de Mahaud de Nemours ; 3o Jeanne, femme de Pierre Charbonnel ; et 4o Isabeau qui épousa Philippe de Prie, seigneur de Buzançais et de Monpoupon, sénéchal de Beaucaire et de Nîmes, qui servit au siège d’Ypres en 1328.

Vers cette époque une Nicole de Pressigny épousa Renaud de Voyer, seigneur de Paulmy.

5. — Guillaume, IVe du nom, fils du précèdent

Guillaume IV de Pressigny (V de Sainte-Maure), seigneur de Pressigny, Sainte-Maure, Marcillac, Nouâtre, etc.

Il vivait en 1271 ; il mourut vers l’année 1300, et n’eut qu’une fille, Isabeau, qui hérita de tous ses biens.

Il avait épousé Blanche de Nemours, sœur de Mahaud, mariée à Pierre de Pressigny, frère dudit Guillaume.

Guillaume IV fit en 1271 déclaration de foi et hommage à Guillaume de Blaye, évêque d’Angoulême, et à Hélie Carel, abbé de Saint-Cybar, pour des domaines relevant de leurs seigneuries.

En juillet 1297 il fut caution d’Aliénor de Montfort, comtesse de Vendôme.

6. — Isabeau, fille du précèdent

Isabeau, dame de Pressigny, de Sainte-Maure, de Marcillac, etc.

Elle épousa en 1301 Amaury de Craon et porta la terre de Pressigny et ses autres biens dans la famille de Craon.

III
Famille de Craon

1. — Amaury de Craon, époux d’Isabeau de Pressigny

Isabeau de Pressigny-Sainte-Maure, par son mariage avec Amaury de Craon, porta, ainsi qu’on vient de le dire, tous ses biens et avec eux la terre de Pressigny dans la famille de Craon.

Amaury, son mari, seigneur de Sablé et de Briolet, fut, en 1292, le dernier sénéchal héréditaire des trois provinces de Touraine, Anjou et Maine.

Il fut nommé arbitre avec quelques autres seigneurs pour terminer le différend qui existait entre le roi Phillippe-le-Long, Eudes, duc de Bourgogne, et les nobles de Champagne et de Brie, a raison des hommages et de la manière de les faire.

Amaury de Craon était fils de Maurice de Craon et de Mahault de Malines.

Il mourut le 26 janvier 1332, âgé de cinquante-trois ans.

Il avait épousé : 1o Isabeau de Pressigny-Sainte-Maure, morte le 13 décembre 1310 et inhuminée aux Cordeliers d’Angers dans la chapelle de Craon ; et 2o Béatrix, dame de la Suze, fille de Jean IV de Coucy et de Jeanne de Dreux.

Sont issus du premier lit : 1o Maurice, seigneur de Craon et de Sablé, qui suit ; et 2o Guillaume, qui va suivre.

Du second lit : 1o Simon, mort le 26 janvier 1330 ; 2o Pierre, seigneur de la Suze, mort le 13 novembre 1376, époux en premier mariage de Marguerite de Pons et en seconde noces de Catherine de Mâchecoul. De ce second mariage est né Jean de Craon, seigneur de la Suze et de Chantocé, qui épousa Béatrix de Rochefort en premier mariage et Anne de Sillé en seconde union. De son premier mariage il eut entre autres enfants Marie de Craon, mariée vers 1404 à Guy de Laval, seigneur de Retz. De ce mariage est né le fameux Gilles de Laval, seigneur de Retz, maréchal de France, devenu célèbre par ses prodigalités et par ses crimes. Il fit égorger une quantité considérable d’enfants, dont il utilisait le sang dans ses pratiques de magie. Après dix ans d’impunité, l’évêque de Nantes lui fit faire son procès ; il fut condamné à être brûlé vif et l’arrêt fut exécuté à Nantes le 23 décembre 1440. 3o Jean, archevêque de Reims, d’abord évoque du Mans, mort le 26 mars 1373 ; 4o Béatrix, femme de Éon du Lodéac, morte le 26 septembre 1356 ; 5o Isabeau, morte sans alliance en 1333 ; et 6o Marguerite, religieuse, morte le 26 août 1336.

2. — Maurice, fils du précèdent

Maurice, VIIe du nom de Craon, seigneur de Craon et de Sablé.

Il fut baptisé en 1309 par Guillaume Lemaire, évêque d’Angers, et il mourut le 8 août 1330.

Il avait épousé Marguerite de Mello, dame de Sainte-Hermine, fille de Dreux de Mello, seigneur de Château-Chinon, Sainte-Hermine, etc., et d’Éléonore de Savoie.

Il en eut trois enfants : 1o Amaury, qui suit ; 2o Isabeau, qui va suivre ; et 3o Yolande, dont l’alliance est ignorée, mentionnée dans un arrêt du Parlement de Paris du dernier jour de février 1404.

Sa veuve épousa en secondes noces Jehan Châlon, seigneur d’Arlay.

3. — Amaury, fils du précèdent

Amaury, IVe du nom de Craon, comte de Dreux, vicomte de Thouars ; seigneur de Chantocé, Craon, Sablé, la Roche-Corbou, Chantocé, Ingrande, Sainte-Maure, etc.

Il épousa en 1324 Perronnelle de Thouars, sœur de Jean, comte de Roucy et fille de Louis, vicomte de Thouars et de Jeanne, comtesse de Dreux.

Il mourut sans postérité le 30 mai 1371 et fut inhuminé dans la chapelle de Craon, église des Cordeliers d’Angers. Sa veuve épousa en secondes noces Clément Rouant, seigneur de l’Ile-de-Rhé.

Dans le trésor des chartes du roi, au titre Craon, sont deux lettres d’Amaury à Charles V. Dans la première, du mois de janvier 1351, il dit qu’il a été chef de guerre et capitaine souverain pour lui ès pays de Touraine, d’Anjou et du Maine ; qu’il était à la prise des forteresses de Waas, de Rillé et de Loroux ; qu’il a servi à Saumur dans la compagnie de Bertrand du Guesclin, connétable de France. Dans la seconde, du 30 octobre 1367, il acquitte Charles V de ce qui lui était dû, tant à cause de ses gages et rançons qu’à cause des services qu’il lui avait rendus dans ses armées et dans celles de Philippe de Valois et du roi Jean. Cette pièce porte en même temps décharge au profit d’Amaury des sommes par lui reçues, pour l’entretien des gens de guerre.

Il fut fait prisonnier à la bataille de Poitiers.

Il servit les rois Philippe de Valois, Jean et Charles V.

Il fonda eu 1366 une chapelle dans l’église de Sainte-Maure.

Il donna le 2 janvier 1371 la ville et le château de Sablé à Louis Ier d’Anjou, roi de Naples et de Sicile, et lui vendit les terres de Sablé et de Precigné (proche et canton de Sablé, — ne pas confondre Précigné en Anjou avec Pressigny en Touraine), à la charge de récompenser ses héritiers en terre d’un revenu pareil en Anjou, Touraine ou Maine.

En 1357 et 1358, étant prisonnier des Anglais, il constitua pour ses mandataires,à l’effet d administrer ses biens pendant son absence, Péronnelle de Thouars, sa femme, Isabeau de Craon, dame de Laval, sa sœur, et autres.

4. — Isabeau, sœur du précèdent.

Après la mort de son frère, elle recueillit sa succession. Elle fut mariée trois fois : 1o en 1338, à Guy de Laval, Xe du nom, seigneur de Vitré, de Gaure, etc., mort sans postérité en 1348 ; 2o à Jean-Bertrand de Briquebec, vicomte de Fauquernon ; et 3o à Louis de Sully, souverain de Boisbelle en Berry, qui fit son testament en 1381 et mourut peu de temps après. De ce dernier mariage elle laissa une fille unique, Marie de Sully, qui épousa en premières noces Charles de Berry, mort avant la consommation de son mariage ; en secondes noces (1386), Guy, dit le Vaillant, seigneur de la Trémouille ; et en troisièmes, Charles, sire d’Albret, comte de Dreux.

Isabeau de Craon fit son testament le 25 septembre 1383 et mourut le 2 février 1384 ; elle fut enterrée dans l’église des Cordeliers d’Angers, chapelle des Craon. Ménage dit d’elle qu’elle fut cordelière après sa mort parce que, suivant sa volonté, elle avait été inhumée en habit de sainte Claire.

En 1372, étant à Tours, le vendredi après la Saint-Denis, en sa qualité de dame de Sainte-Maure et de Nouâtre, Isabeau de Craon accorda à l’abbaye et aux religieux de Noyers la permission d’enlever leurs fourches patibulaires qui étaient placées dans le voisinage des murs de Nouâtre et de les transférer au lieu dit le Bois-aux-Moines. Elle spécifia qu’en reconnaissance de cette permission,les religieux lui offriraient chaque année un chapeau de fleurs à la Fête-Dieu.

Le 16 juin 1376, elle céda à Louis, duc d’Anjou, roi de Naples et de Sicile, tous ses droits sur la terre de Sablé et sur celle de Précigné en Anjou, pour la somme de 10,000 francs d’or.

5. — Guillaume II, dit le Grand, second fils d’Amaury (no Ier)

Guillaume de Craon, dit le Grand, seigneur de Pressigny, Sainte-Maure, la Ferté-Bernard.etc, devint, du vivant d’Isabeau de Craon, qui précède, propriétaire de Pressigny et de Sainte-Maure ; on ne connaît pas le titre d’acquisition.

Il épousa Marguerite de Flandre, vicomtesse de Châteaudun, fille puînée de Jean de Flandre, seigneur de Nesle, vicomte de Châteaudun, et de Béatrix de Châtillon-Saint-Paul.

Il fut chambellan de Philippe de Valois et du roi Jean ; il remplaça le duc d’Anjou dans ces fonctions vers la fin de l’année 1357, et fut nommé lieutenant général des parties de Touraine, d’Anjou, du Maine et de Bretagne. Il porta depuis le titre de lieutenant général du duc de Normandie, dauphin de Viennois pour ces mêmes provinces.

Il mourut vers 1384, laissant de son mariage : 1o Guillaume, qui suit ; 2o Pierre, seigneur de Sablé et de la Ferté-Bernard, fameux sous Charles VI par sa haine et sa jalousie contre le connétable de Clisson, qu’il tenta d’assassiner le 14 juin 1391, rue Culture-Sainte-Catherine à Paris ; il fut tué à la bataille d’Azincourt en 1415 ; 3o Jean, seigneur de Domart, vidame de Laon, mort en 1400, époux de Marie de Châtillon ; 4o Guy, seigneur de Sainte-Julitte en Touraine, chambellan du roi Charles VI, marié à Jeanne de Chourses ; 5o Marie, femme en premières noces de Marc d’Anton et en secondes de Hervé, seigneur de Maury (1373), morte en 1401, dame de Saint-Aignan ; 6o Béatrix, mariée à Renaud de Maulevrier.

6. — Guillaume III, fils du précédent

Guillaume de Craon, vicomte de Châteaudun, baron de Pressigny, Sainte-Maure, la Ferté-Bernard, seigneur de Nouâtre, etc., chambellan du roi Charles VI.

Il fit hommage au roi pour la baronnie de Pressigny, le 6 septembre 1392.

Il épousa Jeanne, dame de Montbazon, Colombiers. Montsoreau, Ferrière-Larçon, etc., fille unique de Renaud, seigneur de Montbazonet d’Eustache d’Anthenaise ; elle était veuve en premier mariage de Simon, fils puîné de Bouchard VII, comte de Vendôme.

Jeanne lui apporte en mariage les seigneuries de Montbazon, Colombiers, Savonnières, Montsoreau, Ferrière-Larçon, Montcontour et plusieurs autres grandes terres. La terre de Ferrière-Larçon ne cessa plus, depuis, d’appartenir aux seigneurs de Pressigny.

Elle fit son testament en 1394 ; elle eut sa sépulture dans l’église des Cordeliers de Tours.

De son alliance avec elle, Guillaume laissa : 1o Guillaume, qui suit ; 2o Jean, qui va suivre ; 3o Marguerite, épouse de Guy de la Rochefoucauld, chambellan des rois Charles V et Charles VI ; elle devint ensuite dame de Sainte-Maure ; 4o Marie, qui va suivre, femme de Louis Chabot, dame de Pressigny ; 5o Isabelle, qui épousa Guillaume Odart, seigneur de Verrière, dans le Loudunais ; 6o Louise, qui épousa, le 17 septembre 1404, Milez de Hangest, dit Rabâche, écuyer d’honneur de Charles VI, et en secondes noces, Jean de Mailly, seigneur d’Auvilliers, etc. ; et 7o Jeanne, nommée dans le testament de sa mère.

7. — Guillaume IV, fils du précèdent

Vicomte de Châteaudun, seigneur de Sainte-Maure, etc.

Il mourut sans enfants après 1407. En cette même année, il recevait de Jean, son frère, l’hommage pour la seigneurie du Puy de Sepmes.

Le 26 juillet 1395, il avait été pourvu par son père de la tierce partie des villes, châteaux, châtellenies et terres patrimoniales ; le même jour, une transaction fut signée à Chinon entre lui et Guillaume de Craon, son père, à raison de la succession de Jeanne de Montbazon, sa mère.

8. — Jean, frère puîné du précèdent

Seigneur de Montbazon, Sainte-Maure, etc. ; il succéda à son frère.

Il fut grand échanson de France.

Le 7 novembre 1399, il épousa Jacqueline de Montagu, fille de Jean de Montagu, grand maître de la maison du roi Charles VI. Ce sire de Montagu, fils d’un notaire de Paris, anobli par le roi Jean en 1363, avait d’abord obtenu la confiance de Charles V et s’était successivement élevé au premier rang dans le royaume. Depuis plus de vingt ans, il gouvernait tout en France, spécialement les finances. Le duc de Bourgogne et le roi de Navarre conspirèrent sa perte ; il fut mis en jugement et condamné, puis décapité le 17 octobre 1409.

Jean de Craon fut tué à la bataille d’Azincourt en 1415 et ne laissa pas de postérité.

Sa succession, celle de Guillaume, son frère, décédé aussi sans postérité, et celles de leurs père et mère furent partagées par lettres patentes du roi Charles VI en date du 5 janvier 1419, et la baronnie de Pressigny échut à Marie de Craon, sa sœur.

9. — Marie, sœur du précèdent

Marie de Craon, dame de Montcontour, Jarnac, Marnes, Montsoreau, Colombiers, Savonnières, Pressigny, Verneuil, Ferrière, etc., épousa par contrat du 4 avril 1396, Maurice de Mauvinet, bailli de Chartres. Devenue veuve peu de temps après, elle épousa en secondes noces Louis Chabot qui suit, et par ce mariage la terre de Pressigny passa dans la maison Chabot.

IV
Famille Chabot

1. — Louis

Louis Chabot, seigneur du Petit-Château, de la Grève en Poitou, du Chantemerle, etc. ; fils de Thibault Chabot et d’Amicie de Sainte-Maure, devint, par son mariage avec Marie de Craon, seigneur et baron du Grand-Pressigny.

Il mourut en 1422. Ses enfants furent : 1o Thibault, qui suit ; 2o Renaud, qui fut la souche des seigneurs de Jarnac, conseiller et chambellan du roi, mort en 1476, marié en premières noces à Françoise de la Rochefoucault, fille de Guy II, et en secondes à Isabeau de Rochechouard ; 3o Jean, mort sans alliance ; et 4o Anne, morte aussi sans alliance.

2. — Thibault, fils du précèdent

Thibault Chabot, seigneur de la Grève, de Montcontour, de Montsoreau, de Pressigny, Ferrière-Larçon, Colombiers, etc. rendit hommage au roi le 14 mars 1422 pour les seigneuries de Pressigny, de Colombiers et de Ferrière.

Il eut pour tuteur Jean l’Orson, prieur d’Angles-aux-Chanoines.

Il fut tué à la journée de Patay (1428), où il combattit en héros.

Marié par contrat du 21 janvier 1422 à Brunissande, fille de Guillaume, seigneur d’Argenton, il laissa : 1o Louis, qui suit ; 2o Catherine, mariée par contrat passé à Saumur le 6 mars 1445 à Charles de Châtillon, conseiller et chambellan du roi, morte en 1466 ; 3o et Jeanne, femme de Jean de Chambes, seigneur de Montsoreau, premier maître d’hôtel du roi. De ce mariage est née Nicole de Chambes, qui épousa en secondes noces Louis d’Amboise. La fin tragique de Nicole de Chambes a été racontée par les auteurs : ayant négligé son mari pour Charles de France, duc de Guyenne, frère de Louis XI, elle fut empoisonnée à l’aide d’une pêche qui lui fut présentée dans un souper et qui fut partagée entre elle et son amant. Elle mourut en peu d’heures et le duc de Guyenne succomba quelques semaines plus tard.

3. — Louis, fils du précédent

Louis Chabot, chevalier, baron de Pressigny et d’Argenton, seigneur de Ferrière-Larçon, etc., conseiller et chambellan de Louis XI, chevalier de l’ordre du Camail.

Il demeura d’abord en la garde noble de sa mère, et il eut ensuite pour tuteur jusqu’à sa majorité Guillaume d’Argenton, son aïeul maternel.

En la personne de Brunissande,sa mère, il rendit hommage au roi le 8 février 1433 pour la terre de Pressigny.

Par acte du 28 octobre de la même année, Jean de Lestenou, seigneur de Bouc-Ferré, lui rendit hommage pour cette seigneurie.

Il assista en 1468 aux états généraux tenus à Tours ; il commanda le ban et l’arrière-ban du Poitou en 1472 et 1475.

Il mourut en 1486.

Il épousa : 1o par contrat du 3 juin 1442, Jeanne de Courcillon de Montbon, morte le 26 août 1472, fille de Guillaume, bailli et capitaine de Chartres ; 2o Hesseline Chapperon, dont il n’eut point d’enfants.

Sont nés de sa première union : 1o René, seigneur de la Grève, mort en juillet 1469 ; 2o Marie, qui épousa en premier mariage Joachim Bouault ; 3o Madeleine, mariée à Navarin d’Anglade (1469).

Louis Chabot vendit la baronnie de Pressigny à Bertrand de Beauvau et à Françoise de Brezé, sa seconde femme.

V
Famille de Beauvau

Dans ses Recherches historiques sur la ville d’Angers, page 223, M. Bodin donne sur l’origine de la famille Beauvau les renseignements suivants :

« Beauvau, anciennement Beauval, bella vallis, était un château à trois lieues de Baugé, qui avait pris son nom de sa position dans un beau vallon et l’avait donné ensuite au bourg, qui s’était formé auprès, ainsi qu’à l’une des plus illustres et des plus anciennes familles de l’Anjou, qui l’avait fait bâtir. Ce n’est que depuis quatre siècles que cette famille a changé son nom de Beauval en celui de Beauvau comme on le voit par les lettres du roi et de la reine de Sicile écrites l’an 1420 à Macé de Beauval, gouverneur de Tarente, qui s’y trouve indifféremment nommé Beauvau et Beauval..... La bannière de Beauvau avait un fond d’argent à 4 lions cantonnés de gueules, couronnés, armés et lampassés d’or ; pour cimier une hure de sanglier au naturel ; pour supports deux sauvages armés de massue ; le cri de guerre était « Beauval », et la devise était composée de deux troncs d’arbres liés par deux pointes de fer avec ces mots : Sans départir. »

1. — Bertrand de Beauvau

Bertrand de Beauvau, fils puîné de Jean II de Beauvau et de Jeanne de Tigny, baron de Briançon, chambellan du roi, gouverneur bailli de Touraine de 1446 à 1450, premier président de la Cour des comptes, grand conservateur des domaines du roi, capitaine des châteaux de Tours et d’Angers, sénéchal d’Anjou, grand maître d’hôtel de René, roi de Sicile.

Il devint baron de Pressigny au moyen de l’acquisition qu’il fit de cette terre de Louis Chabot.

11 fut auteur de la branche Beauvau-Pressigny en Touraine.

En 1448, le roi le choisit pour son ambassadeur eu Ecosse, avec l’évèque de Maillezais et Guillaume Cousinot, maître des requêtes, à l’effet de renouveler un traité d’alliance avec Jacques II.

On le voit figurer en 1458 dans un lit de justice dont M. de Barante donne la description en ces termes : « En 1458 un lit de justice présidé par le roi (Charles VII) se tint à Vendôme pour y juger le duc d’Alençon, accusé du crime de lèse-majesté. Tout s’y passa en grande pompe et grande cérémonie ; le roi était sur son siège royal. A ses pieds était assis le comte de Dunois. Le haut banc, à la droite, était occupé par les ducs d’Orléans, de Bourbon, les comtes d’Angoulême et du Maine, les comtes de Foix et d’Eu, et les comtes de Vendôme et de Laval. Au dessous d’eux, les trois présidents du Parlement, le grand-maître de France, l’amiral, le grand prieur, le marquis de Saluées, fils du duc de Savoie ; quatre maîtres des requêtes, le bailli de Senlis, deux conseillers du roi et trente-quatre seigneurs du Parlement. Au pied du trône, le chancelier. A la gauche, sur le haut banc, les pairs ecclésiastiques, quatre évêques et l’abbé de SaintDenis. Au-dessous, les seigneurs de la Tour d’Auvergne, de Torcy, de Vauvert, de Prie, de Pressigny ; les baillis de Touraine et de Rouen, les trésoriers, Tristan l’Hermite, prévôt des Maréchaux ; le prévôt de l’hôtel et trente-quatre seigneurs du Parlement. Sur un banc séparé, le procureur général et deux avocats du roi. Enfin, cinq greffiers sur un petit banc. »

Le même historien nous apprend encore qu’après la bataille de Montlhéry, à la suite de la Ligue du bien public, en 1465, le sire de Pressigny, président de la chambre des comptes, le comte du Maine et Jean Dauvet, premier président de Toulouse, venaient de la part du roi assister aux conférences qui se tenaient chaque jour dans le but d’amener la paix entre le roi (Louis XI) et les princes ligués.

Comme chargé de la garde des règlements, Bertrand de Beauvau assista au combat singulier qui eut lieu à Tours le 5 février 1446 entre l’Anglais Jean Châlons et Louis de Bueil, mari de la dame de Sainte-Julitte. Ce dernier fut tué dans ce combat. Une relation manuscrite de cette joute existe en Angleterre au British Muséum, de la collection Landsdown, et M. Salmon a pu s’en procurer une copie publiée dans le volume de 1859 des Mémoires de la société archéologique de Touraine.

En raison de son excentricité nous rapportons le texte d’un aveu rendu en 1458 par Bertrand de Beauvau au duc d’Anjou :

« Item, avons droit de mener ou faire mener le jour de la Trinité par mes gens et officiers, à la danse, toutes les femmes jolies qu’ils trouveront à Saumur et ès faubourgs tout le dit jour ; et sera tenue chacune femme jolie baillera mes dits officiers quatre deniers et un chapeau de roses ; et au cas qu’elles ne voudraient venir danser avec mesdits gens et officiers sur ce ordonné, pouront piquer d’un bâton qui sera marqué de mes armes, et sera ferré au bout en manière d’aiguillon la dite femme jolie qui sera refusante de venir danser comme dit est, trois fois es fesses. Et avec ce, moi et mes officiers, à celui jour, par chacun an, de contraindre toutes les femmes qui ne seront jolies, de bordeau, qui seront notoirement diffamées de ribaudie de venir à ladite danse avec les dites femmes jolies ou de me payer cinq sols. »

Bertrand de Beauvau est peint aux premiers vitraux de la cathédrale de Tours, à genoux, avec cinq de ses fils ; en regard dans la même vitre est sa seconde femme, Françoise de Brézé, avec leurs filles, et au-dessus, des armes qui sont d’azur à un écusson d’or vidé et rempli d’argent, en cœur, a l’orle de huit croisettes d’or, trois en chef, deux en fasce et trois en pointe.

La baronnie de Pressigny ayant été acquise par lui, conjointement avec sa seconde femme, dont les enfants, suivant leurs conventions matrimoniales, devaient succéder aux acquêts, le père ordonna, par son testament du 10 février 1468, que cette baronnie appartiendrait à Antoine, fils aîné de cette seconde femme.

Disgracié par Louis XI, Bertrand mourut à Angers le 30 septembre 1474.

Il fut marié quatre fois : 1o à Jeanne de la Tour-Landry ; 2o à Françoise de Brézé-Maulevrier (février 1437) ; 3o à Ides du Châtelet ; 4o et à Blanche d’Anjou, fille naturelle de René d’Anjou, roi de Sicile, dit le bon roi René. — On voit dans l’église des Grands-Cannes à Aix en Provence un assez beau mausolée de Blanche d’Anjou, avec l’épitaphe suivante, gravée en lettres gothiques : « Ci-gît Blanche d’Anjou, dame de Pressigny, fille naturelle de très hault et puissant prince Bené, roi de Jérusalem et de Sicile, d’Arragon, duc d’Anjou, de Bar, comte de Barcelonne, de Provence, qui trespassa le 17e jour d’avril 1470. » (Explications des cérémonies de la Fête-Dieu d’Aix en Provence, volume imprimé à Aix en 1777, page 27. — Communication de M. le comte de Chasteigner).

Du premier lit il eut : 1o Louis, mort jeune ; 2o Catherine femme de Philippe de Lenoncourt ; 3o Charlotte, mariée à Yves de Scépeaux, premier président du Parlement de Paris, morte en 1493 ; 4o Marguerite, mariée à N. de Maigneville ; 5o Jean, évêque d’Angers.

Du second lit : 1o Antoine, qui continua la postérité ; 2o Jean, mort sans alliance et qui va suivre ; 3o Jacques, qui va suivre, marié à Hardouine de Laval, mort sans postérité ; 4o Charles, depuis baron de Pressigny ; 5o Bertrand, marié à Louise de Fontaine-Guérin ; 6o Pierre, archidiacre d’Angers ; 7o Isabelle, mariée à Pierre de la Jaille ; 8o Mathurine, mariée à Charles de Maillé ; 9o Charlotte, mariée à N. de Saint-Simonian, seigneur des Préaux.

Enfin du troisième lit : 1o René, marié à Marguerite de Haussonville ; 2o Jean, mort sans alliance ; 3o Guyonne, qui épousa Jean Juvénal des Ursins, puis, en 1478, René de Laval, seigneur de Boisdauphin, Saint-Aubin, etc., qui vivait en 1504, et auquel Moréri attribue aussi le titre de seigneur de Pressigny, ainsi qu’à deux de ses descendants, Jean, son fils, et René, son petit-fils ; mais cette attribution ne paraît pas fondée.

2. — Antoine, fils du précèdent

Antoine de Beauvau, premier président de la Chambre des comptes, conseiller et chambellan du roi, chevalier de son ordre, comte de Policaste, baron de Pressigny et de Sillé-le-Guillaume. — Il prit du vivant de son père le titre de baron de Pressigny.

Il assista le 10 novembre 1449 à l’entrée de Charles VII dans la ville de Rouen. L’Histoire de René d’Anjou, tome II, page 79, et les Mémoires de la Société archéologique de Tourraine, 1859,page 317, nous apprennent qu’Antoine de Beauvau, âgé à peine de treize ans, fut armé chevalier lors de cette entrée royale, par Pierre de Brezé, son oncle, devant la porte de Beauvais, du côté des Chartreux, en présence du brillant cortège qui suivait le roi.

Sa mort est indiquée comme ayant eu lieu en mai 1489.

Il avait épousé Anne Hiugant, fille de Raoul Hingant, seigneur du Hac, et de Françoise de Saint-Amadour.

Il laissa : 1o Louis, qui suit ; 2o Marguerite, mariée à Gilles de Couvran, baron de Sacé.

3. — Louis, fils du précèdent

Louis de Beauvau, chevalier, baron de Pressigny, de Sillé, seigneur de Yaudoeuvre et de Pimpan, baron de Villequier, etc.

Il épousa Renaude Huré, dont il n’eut qu’un fils, René, marié à Olive le Masson.

Par acte du 11 juin 1489, il fit hommage au roi pour les terres de Pressigny et de Ferrière-Larçon.

Louis de Beauvau, baron de Villequier, seigneur de Pressigny-les-Quatre-Églises, est cité dans un acte du 10 mai 1493. Ce même jour il recevait l’aveu féodal pour le fief du Puy, en qualité de baron de Pressigny et à cause de la terre de Ferrière-Larçon, dont il était seigneur. C’est la première fois que les seigneurs de Pressigny paraissent avoir pris le titre de baron. (Dom Housseau, no 7399.)

Un long procès s’étant élevé entre lui et ses oncles à l’occasion des terres de Pressigny et de Ferrière-Larçon, il fut obligé de leur abandonner ces terres.

4. — Jean, oncle du précèdent

Jean de Beauvau, seigneur de Tigny, né du second mariage de Bertrand, ci-dessus.

Il mourut sans alliance.

5. — Jacques, frère du précèdent

Jacques de Beauvau, seigneur de Tigny, chevalier, seigneur de Ternay, baron du Grand-Pressigny.

Il épousa, sans laisser de postérité, Hardouine de Laval, fille de Guy de Laval, IIe du nom, seigneur de Loué, et de Charlotte de Sainte-Maure.

Par acte du 7 avril 1499, David de Lestenou, seigneur de Bouc-Ferré, lui consentait une déclaration féodale à raison de cette seigneurie.

Jacques de Beauvau est mentionné, comme seigneur de Pressigny, dans l’inscription gravée sur pierre placée au dessus de la porte d’entrée latérale de l’église du Grand-Pressigny. Cette inscription paraît indiquer que Jacques de Beauvau serait décédé en 1501, le 4 mai.

Le 4 mars 1498 il recevait l’aveu d’Antoine du Boys, écuyer, seigneur de la Charlottière et de la dîme de Favier.

Un acte du 3 juillet 1497 constate le même aveu dans ces termes : « Jacques Tigny, dit de Beauvau, baron de Precigny en Touraine, seigneur de Tarnay et dudit lieu de Tigny, salut, savoir faisons que aujourd’hui, à l’assignation de nos hommages dudit lieu de Precigny est venu par devers nous noble homme Antoine de Boys, écuyer, seigneur de la Charlottière et des dîmes de Favier, tenant eu la paroisse de St Martin de Precigny, lequel nous a fait les foy et hommage simples qu’il nous était tenu faire pour raison de ladite dîme, etc. »

Il est encore cité comme baron de Pressigny dans un acte du 25 février 1495 et dans un autre de 1499.

6. — Charles, frère du précèdent

D’après Chalmel, nous plaçons ici au rang des barons de Pressigny Charles de Beauvau, seigneur de Passavent, de Tigny, de Ternay, troisième fils de Bertrand de Beauvau et de Françoise de Brezé. — Après la mort de ses deux frères aînés Jean et Jacques, il aurait, suivant cet historien, succédé à la baronnie du Grand-Pressigny, qui lui aurait appartenu en vertu des conventions matrimoniales de sa mère.

Mais s’il posséda cette terre, sa possession fut de peu de durée, car, peu de temps après le décès de Jacques de Beauvau, qui précède, elle se trouvait appartenir à la famille de Prie.

Charles de Beauvau épousa : 1o Bonne de Chauverson, morte sans postérité ; 2o Barbe de Talanges.

Il mourut en 1508, laissant de Barbe de Talanges : 1o Jacques, dit de Tigny, marié à Anne d’Espinay ; 2o Jeanne, mariée à Edmond de Prie, baron de Buzençais, neveu de René de Prie, qui suit ; 3o Isabeau, mariée en 1512 à Jean de Seraucourt ; et 4o Charles, qui épousa Barbe de Choiseul, fille de Nicolas, seigneur de Praslin.

IV
Famille de Prie

Nous ne pouvons indiquer le titre qui rendit la famille de Prie propriétaire de la terre de Pessigny.

Afin de faciliter les recherches sur l’époque et la forme de la mutation qui s’opéra de la maison de Beauvau au profit de celle de Prie, il est utile d’entrer dans quelques renseignements généalogiques.

Antoine de Prie, seigneur de Buzançais, épousa Madeleine d’Amboise. De ce mariage sont issus plusieurs enfants, entre autres : 1o René, cardinal de Bayeux, 2o et Louis, seigneur de Buzançais, qui épousa Jeanne de Salazart.

Du mariage de Louis de Prie et de Jeanne de Salazart est issu Edmond de Prie, seigneur de Buzançais, qui mourut eu 1505 après avoir été marié deux fois, la première avec Jeanne de Beauvau, fille de Charles de Beauvau et de Barbe de Talange, dont il vient d’être parlé, et la seconde avec Anne de Chabannes, comtesse de Dammartin.

Edmond de Prie ne laissa pas d’enfants de son second mariage. De son union avec Jeanne de Beauvau, sa première femme, sont issus Gabriel et René, morts tous deux sans laisser de postérité, et ayant eu pour tuteur le cardinal René de Prie, leur grand-oncle.

Charles de Beauvau ayant survécu à Jeanne sa fille, et à Edmond de Prie, mari de celle-ci, ces derniers n’ont pas dû posséder la terre de Pressigny.

Il y a plus de probabilité pour que leurs enfants, Gabriel et René, en soient devenus propriétaires après le décès de Charles de Beauvau, leur aïeul, ou même de son vivant, comme représentant leur mère, soit à titre héréditaire, soit par suite d’arrangement de famille.

Un aveu dont nous allons parler plus loin semblerait indiquer que cette terre leur a appartenu conjointement avec le cardinal René de Prie, leur grand-oncle et, tuteur.

D’autres titres énoncés également plus loin feraient supposer que le cardinal René de Prie l’a possédée avant ses petits-neveux. Mais la possédait-il comme propriétaire exclusif, ou comme tuteur de ses petits-neveux, ou encore comme la détenant en communauté avec eux ? Les renseignements nous font défaut pour nous permettre de répondre avec certitude à ces questions.

La collection de dom Housseau, série concernant la baronnie du Grand-Pressigny, nos 7393 à 7494, doit contenir la solution de ce petit problème historique ; aussi regrettons-nous de ne pouvoir la consulter.

Provisoirement, nous introduisons et nous maintenons dans notre liste le cardinal René de Prie et ses deux petits-neveux Gabriel et René.

1. — René de Prie

Il était fils d’Antoine de Prie, seigneur de Buzançais, et de Madeleine d’Amboise, ainsi que nous venons de le dire.

« Né en 1451, mort à Lyre, près d’Evreux, en 1519 — Grâce à son cousin, le cardinal Georges d’Amboise, il devint archidiacre de Bourges, protonotaire apostolique, fut pourvu a de riches abbayes, reçut le titre d’aumônier du roi, puis l’évêché Bayeux en 1498. Après avoir suivi Louis XII dans son expédition contre les Génois, René de Prie obtint de Jules II le chapeau de cardinal (1507). Deux ans plus tard, malgré la défense du pape, alors en guerre avec le roi de France, il quitta Rome, alla assister au concile de Pise (1511), convoqué par Louis XII, et fut alors déclaré déchu du cardinalat, qui, à la mort, du pape, lui fut rendu. De Prie devint évêque de Limoges en 1510, de Lectoure en 1512, célébra en 1514 le mariage de Louis XII et de Marie d’Angleterre, et tint un synode à Bayeux en 1515. » (Dre Larousse, tome XIII, page 140.)

Les auteurs, jusque dans ces derniers temps, n’avaient pas fait figurer le cardinal de Prie au nombre des anciens possesseurs de la terre de Pressigny. Ceci fut considéré comme une lacune ou plutôt comme une erreur par M. Lambron de Lignim, qui, dans le volume de 1858 des Mémoires de la Société archéologique de Touraine, page 233, la signala dans les termes suivants.

« D’après Chalmel, en 1507, le baron de Pressigny était Charles de Beauvau, seigneur de Passavant, de Tigny et de Ternay, mort en 1508. Moreri dit, au contraire, que c’était Louis de Beauvau, seigneur de Sillé-le-Guillaume. Ni l’un ni l’autre de ces historiens n’est dans le vrai : deux actes passées devant Me Jacques Foussedouaire, notaire à Tours, contastent que le seigneur de Pressigny était alors révérend père en Dieu monseigneur René de Prie, cardinal du titre de Sainte-Sabine, évêque de Bayeux, puis de Therouanne, qui mourut le 6 septembre 1516. » (Le Dictionnaire Larousse dit 1519.)

M. Lambron se borne à donner la date des actes par lui cités : 14 décembre 1507 et 17 novembre 1510, sans en faire connaître les termes ; il importerait cependant de savoir en quel nom, dans quelles qualités et à quel titre il figure dans ces actes, afin de pouvoir reconnaître s’il était en réalité possesseur soit pour partie, soit pour la totalité, de la terre de Pressigny. — Les minutes’de Jacques Foussedouaire sont en l’étude de Me Scoumane, notaire à Tours.

Le 9 décembre 1502, la reine Anne de Bretagne étant à Loches, y reçut les foi et hommage de René de Prie, évêque de Bayeux. (Dom Housseau, no 7408.)

En 1502, le capitaine du château de Pressigny recevait du seigneur de la Celle-Guenand, pour monseigneur de Bayeux, douze chapons.

René de Prie, cardinal, évêque de Bayeux est encore cité : 1o comme baron du Grand-Pressigny dans un acte du 24 juillet 1511 (dom Housseau, no 7406) ; 2o comme seigneur temporel de Ferrière-Larçon, dans un autre acte du 22 septembre 1511. (Id., no 7400.)

Le 2 octobre 1515 il recevait dans les termes suivants, en son nom et en celui de ses deux neveux, Gabriel et René de Prie, l’hommage d’Imbert de Bastarnay, seigneur du Bridoré. « De vous très noble et très révérend père en Dieu, monseigneur René de Prie, cardinal, évêque de Bayeux et de Limoges, abbé du Bourg-de-Déols, de la Prée et de Miseray, aussi comme tuteur et curateur de messeigneurs vos nepveux de Busançois, Gabriel et René de Prie, barons dudit Busançois, nous Imbert de Bastarnay, chevalier de l’ordre du roy, son conseiller et chambellan ordinaire, baron du Bouchaige et d’Authon, seigneur de Montrésor et du Bridoré, tenons et avouons tenir de vous, à foy et hommage lige à cause et au regard de la baronnie, châtellenie et seigneurie de Precigny, c’est à savoir, notre chastel, châtellenie, terre, fief, justice et seigneurie du Bridoré, etc. » (Dom Housseau, no 7413.)

Après la mort du cardinal de Prie, la terre de Pressigny paraît avoir appartenu à Gabriel de Prie, son petit-neveu, qui suit.

2. — Gabriel, petit-neveu du précèdent

Fils d’Edmond de Prie et de Jeanne de Beauvau.

Chalmel, à l’article Buzançais, le qualifie de baron de Pressigny et de seigneur de Ferrière-Larçon.

Il épousa Jacqueline de Marans.

Il mourut, sans postérité. D’après Moréri sa mort aurait eu lieu en 1524 ; suivant d’autres auteurs, il aurait été tué à la bataille de Pavie, qui eut lieu en 1525.

Son frère René, qui suit, lui succéda.

3. — René, frère du précèdent

Mort également sans postérité.

D’après l’aveu du 2 octobre 1515, dont nous venons de donner un extrait, lui et son frère Gabriel paraîtraient avoir eu des droits de copropriété dans la terre de Pressigny.

Mais, dès avant la date indiquée comme étant celle du décès de Gabriel, la terre de Pressigny passa dans la maison de Savoie-Villars par suite de l’acquisition qui en fut faite par René de Savoie, vers 1522. Nous manquons de renseignements sur le titre de cette acquisition.

Malardier.
  1. Voir le Bulletin de 1879, page 424.