Ores que je suis mort, je vai, je viens, je vire

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Seconde partie des Muses françoises, Texte établi par Despinelle, chez Matthieu Guillemot (p. 266).


SONNET.

 Ores que ie ſuis mort, je vai, ie viens, ie vire,
Et quand i’eſtoi viuant i’arreſtoi aux deſers,
Ie peuploi les rochers, or’ ie peuple les mers,
 Ie portoi fruict ſans vie, ores mon fruict reſpire,
Le Ciel me tempeſtoit, or’ l’onde me martire,
Ma mere m’aſſıt droit, & mon pere à l’enuers,
Ie ſuis autant le vert comme ie ſuis le pers,
Mes cheveux, m’eſbranloient, ore vne herbe m’inſpire.
 Ores ie vai ſans pieds guerroie ſans main,
I’enfante & engloutis mon pere & mon germain,
Ie ſuis dans l’Vniuers pleine de pluſieurs mondes.
 Deuine, richelet, eſt-ce point celle-là,
Qui griſe me vomit, & noire m’auala,
Qui me mit dans le feu me retirant de l’onde ?


A. D. V.