Origine et progrès de la puissance des Sikhs/Appendice

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DES MŒURS, DES LOIS ET DES COUTUMES DES SIKHS,


Par le capitaine W. Murray.




Savoir lire et écrire sont des connaissances peu répandues chez les Sikhs ; ce sont des sciences possédées presque exclusivement par les Hindous et les Moutsaddis musulmans, ou clercs, dont l’instruction se borne à savoir assez de persan pour être capable de tenir les comptes et la correspondance des chefs. Le gourmoukha, ou dialecte écrit du Penjab, n’est familier qu’à un très petit nombre de Sikhs ; et en général ils ont pour les langues persane et arabe une répugnance prononcée qui leur vient principalement des idées et des préjugés qu’ils nourrissent dès leur enfance contre toute chose, quelque utile et rationnelle qu’elle puisse être d’ailleurs, qui a quelque rapport ou quelque lien avec la religion et l’éducation des Musulmans.

Les affaires se font par témoignage oral, par arrangemens verbaux et promesses. Les monumens du droit n’existent que dans la mémoire des vieillards d’une localité, c’est la tradition qui conserve les vieilles coutumes. Le mensonge, la fraude et le parjure sont la conséquence naturelle d’un tel mode de conduire les affaires. L’argent, la crainte, l’intérêt sont autant de manières d’obtenir un serment, d’allumer une guerre civile, d’empêcher la découverte d’un criminel ou de le mettre l’abri du châtiment. Dans quelques circonstances, un accusé peut en appeler au Dibb, ou ordalie ; il doit plonger ses doigts dans l’huile bouillante ou porter dans ses mains un soc de charrue incandescent l’espace de 50 ou 100 yards, défiant son accusateur de se soumettre à la même épreuve, et s’il échappe sain et sauf, son innocence est déclarée et universellement reconnue,

La sorcellerie et la magie (djadou et moui) ont la plus grande influence sur la conduite et les actions des chefs-et des autres habitans des états sikhs. Une indisposition subite, un vomissement de sang ou un malaise insolite de la nature et de la cause desquels un Indien ne saurait se rendre un compte précis, sont le plus souvent attribués à la malice et à l’invention d’un ennemi ou à la jalousie d’un membre de la famille mal disposé contre le malade. Une effigie de cire ou de quelque autre substance, des fils de certaines couleurs, des ossemens humains découverts dans le domicile ou sur la personne d’un individu suspect sont des preuves irrécusables de crime et de malignité[1].

Les bons et mauvais présages[2], les jours heureux et malheureux, les heures particulières du jour et de la nuit convenables pour commencer un voyage ou rentrer chez soi, sont fidèlement observés par les Sikhs et les autres habitans du Penjab toutes les fois qu’ils entreprennent des affaires importantes où se livrent aux soins les plus ordinaires de lu vie. Avant d’entrer en campagne[3], après une visite de cérémonie à un ami éloigné ou un pélerinage, le mahourat, ou instant favorable pour le départ ou le retour doit être prédit par un pandit (et le pandit est, de son côté, guidé par les djomers, ou vents selon le point du compas d’où ils soufflent). Pour éloigner les fâcheuses conséquences qui résultent de pronostics funestes du de rêves sinistres, la charité est recommandée et en général pratiquée dans ces occasions par les hommes riches. Ces superstitions et cent autres préjugés absurdes viennent prendre place dans les affaires les plus solennelles de l’état. C’est une pratique ordinaire à Randjit Singh, lorsqu’il médite quelque entreprise importante, de faire placer sur le Granth Sohil (livre sacré des Sikhs) deux billets sur l’un desquels est écrit la promesse d’une chance favorable et sur l’autre la menace d’un revers[4] ; un enfant choisit alors entre les deux, et quel que soit celui qu’il apporte, Son Altesse est aussi satisfaite que si elle avait reçu une réponse du ciel même. La connaissance de ces superstitions est utile et même nécessaire. Sous des formes variées et de manières diverses, elles dirigent, dans le monde de l’Orient, les opinions, les affaires publiques et privées dans tous les rangs de la société, depuis le despote jusqu’au laboureur, depuis le soldat sur le champ de bataille jusqu’au criminel sur l’échafaud. Ce serait pour les officiers publics un devoir de chercher à gagner la confiance, à s’attirer l’affection des chefs et du peuple d’un pays conquis par la déférence et le respect de ces singularités et préjugés ; et c’est, dans la conduite des affaires, une connaissance bien utile que de savoir ainsi captiver les populations et agir sur elles. Pour s’adresser à de tels sentimens sans les offenser, il faut, dans toutes les circonstances, beaucoup de discrétion, de prudence et de jugement ; mais lorsqu’on y réussit, il devient facile, par de bons procédés secondés d’une adresse persuasive, de tirer l’homme ignorant de ses erreurs et de ses usages antiques pour lui faire apprécier les avantages qui résultent des progrès intellectuels et les bienfaits de la science et de la morale.

Dans les états sikhs, l’administration de la justice civile et criminelle est départie au serdar ou chef. Les crimes contre les personnes peuvent, comme au moyen-âge, s’expier à prix d’argent. Les amendes ne sont réglées par aucune loi et sont le plus souvent proportionnées arbitrairement aux moyens présumés du condamné dont la propriété est séquestrée et la famille incarcérée pour le contraindre à payer. Ces condamnations pécuniaires forment une branche du revenu du chef et sont une source féconde de richesses pour ses officiers, qui trop souvent ont recours aux plus cruels moyens pour arracher des aveux et extorquer de l’argent sous prétexte de délits réels ou imaginaires. Celui qui gagne son procès paie un shoukarana ou présent de reconnaissance, et celui qui est condamné acquitte un djarimana ou droit de pénalité. L’argent peut assurer la justice, mais le pauvre ne saurait rien obtenir. Celui-là a le plus de chance de succès qui a offert les présens les plus considérables, Dans un cas où le droit est clair et irrécusable, on traîne l’affaire en longueur pour faire augmenter les présens. Tous les officiers et les employés dans les districts et départemens suivent l’exemple du chef jusqu’à ce qu’enfin ils soient jetés dans un bora ou prison, et forcés d’abandonner une partie de leur butin. Lorsqu’ils ont satisfait la cupidité de leur supérieur, on les voit presque toujours reprendre leurs fonctions après avoir reçu un châle comme témoignage de faveur. La peine capitale est rarement infligée. Les criminels incorrigibles sont punis de la perte d’une main, du nez ou des oreilles. Il faut ajouter cependant que la mutilation est rare, car toutes les fois qu’un coupable a les moyens de payer ou peut fournir une caution respectable, il expie par l’argent les crimes les plus odieux[5].

Lorsqu’il s’est commis un daka (vol avec effraction) ou un kazzaki[6] (vol de grand chemin), on s’adresse au chef dans la juridiction de qui le crime s’est accompli pour obtenir justice. S’il la refuse, le chef dont le sujet a souffert recourt à la loi du talion, il enlève quelques centaines de têtes de bétail ou emploie quelque autre moyen de vengeanee. Cette méthode sommaire de s’indemniser de tous les vols accompagnés de circonstances aggravantes, est inévitable dans un pays où les petits chefs, leurs officiers et zemindars ne rougissent pas de protéger : les voleurs et de partager les fruits de leur coupable industrie.

Lorsqu’un vol est prouvé, soit par un mahar-khaï (aveu de l’un des voleurs), soit par la production d’un mouddo ou namouna (partage de l’objet volé), le plaignant doit d’abord payer le tchaharam (ou quart de la valeur de l’objet), comme honoraire du chef ou de son thanadar, avant de recouvrer le total de ses pertes. En outre, le mahar-khaï (voleur qui a fait aveu) stipule le plus souvent sa décharge de toute poursuite ultérieure, et l’assurance qu’aucune action ne sera exercée contre lui pour son kandi (dividende qu’il a pu obtenir dans les bénéfices du vol). Cette part des dépouilles retombe à la charge des autres voleurs qui la supportent par égalité.

S’il a été enlevé du bétail, c’est une coutume établie que quand le souragh-kadj, ou trace, conduit à la porte ou dans les propriétés d’un village, les zemindars de ce village doivent montrer que ces traces conduisent hors de leurs limites, et permettre que le village soit fouillé ou payer la valeur des animaux dérobés[7].

Les lois de succession à la propriété territoriale sont arbitraires dans les états sikhs ou diversement modifiées selon les usages, les intérêts et les préjugés des familles ; il est donc impossible de ramener ce système anomal à un principe fixe et certain. L’institution de l’héritage est différente pour les Mandjhis et les Malwa Sikhs ou Singhs. Les premiers, ainsi appelés du pays compris entre le Ravi et le Biah, d’où ils s’élancèrent d’abord pour conquérir le Penjab et la province de Sirhind, se furent bientôt, par leur caractère belliqueux, établis définitivement dans cette région. Les radjas de Patiala, Djhind et Naba, et le bhaï de Kheïthal, sont appelés chefs malwa. Les trois premiers ont pour ancêtre commun Phoul, qui était tchoudari d’un village près Balenda, et c’est de lui qu’on les nomme quelquefois collectivement Phoulkians. L’aïeul du bhaï de Keïthal ayant rendu quelques services à un gourou sikh, reçut le titre de bhaï ou frère, comme marque de distinction particulière. La personne des bhaïs a toujours été un objet de respect pour leurs serviteurs.

La succession réelle au personnelle à la propriété, a lieu chez les Mandjhis Singhs par le mode Bhaïkand on Tchoundaband. Le premier mode consiste dans le partage égal entre les fils de toutes les terres, forts, fiefs et objets mobiliers. Dans quelques circonstances, une double part est assignée au fils aîné, à titre de khartch-serdari, cormme cela se pratique dans la loi de Moïse[8]. Le tchoundaband consiste dans un partage égal, entre les mères pour les enfans mâles à qui elles ont donné naissance[9].

À la mort d’un Mandjhi Singh, décédé sans enfans du sexe masculin, ses frères ou ses neveux au premier degré ont droit à sa succession conjointement avec sa veuve ou ses veuves. Selon les sastras (si on peut les considérer comme réglant la propriété publique et les domaines des chefs) c’est le titre des veuves qui est le plus valide[10] ; mais les Sikhs, pour éviter de violer ouvertement la loi, ont adopté la coutume appelée karawa ou tchadar-dala qui s’observe dans toutes les familles, excepté dans celles des bhaïs. L’aîné des frères survivans donne à la veuve du défunt une robe blanche et le hith, ou anneau. Elle devient ainsi son épouse.

Cette pratique, conforme à la loi indienne et juive[11], est un préservatif contre l’incapacité des femmes. Sans doute, si l’on consultait les désirs de la veuve on lui verrait préférer la possession de la puissance et les charmes de la liberté, à l’alternative de sacrifier ses droits à un beau-frère pour prendre place parmi ses femmes. Mais le manque de modestie et de sentiment qui forme le caractère des femmes, a déterminé les hommes par nécessité et non par choix à adopter un usage qui doit, dans un si grand nombre de cas, répugner à leur nature et à leurs sentimens.

À défaut de frères et de neveux, la coutume la plus générale est de distribuer également les terres et les richesses mobilières entre les veuves des Mandjhis-Singhs.

L’adoption par les veuves n’est pas permise ; la ligne féminine est exclue de la succession. Cette disposition a pour but d’empêcher les biens de passer dans une famille étrangère.

Les inconvéniens et les abus qui naissent chez les familles mandjhis de la divisibilité indéfinie des proprietés, aggravée encore par la possession en commun, sont des maux évidens et sentis chaque jour plus vivement. On ne saurait remédier trop tôt aux vices de ce système.

Chez les Malwa Singhs, le droit d’aînesse est en vigueur, ei des djagirs ou portions de terre sont assignés aux fils cadets pour leur subsistance. C’est ainsi qu’on remédie aux inconvéniens que les lois ou la coutume ont amenés chez les familles mandjhis.

Les Malwa Singhs, si l’on en excepte les Bhaïs, ont admis l’usage du karawa, prévenant, par ce moyen, les disputes de succession entre les frères, les neveux et les veuves du mort.

Les bhaïs de Keïthal et d’autres places, tout en adoptant le karawa, n’ont cependant aucun égard aux réclamations des veuves, les droits passent aux frères ou neveux des chefs morts sans enfans mâles. Les veuves des bhaïs reçoivent un djagir pour subvenir aux frais de leur existence.

Les familles mahométanes établies dans les états sikhs qui ont été assez heureuses pour conserver leur fortune et l’ombre du pouvoir, rejettent les dispositions de leur légistateur, et se conduisent d’après des coutumes particulières. C’étaient les lois indiennes et mahométanes, telles qu’elles sont rapportées par le shara et le metakshara, qui réglaient l’héritage de la propriété territoriale. Très peu, si même il en était quelqu’une, des principautés de l’Inde devaient subsister dans leur intégralité, c’était le partage par égalité qui les régissait et amenait comme résultat l’extinction des grands états et l’anéantissement du pouvoir des chefs.

Lorsque la contrée conquise par les Sikhs eut été partagée comme elle est actuellement, les premières divisions par districts, telles que les avaient établies les empereurs de Delhi et telles que les rapportaient les kanoungos, ou livres de la loi, furent complètement effacées ; de vives discussions s’élevèrent relativement aux limites de chaque village et aux terrains vagues. Les cultivateurs commencèrent la querelle qui provoqua, dans le plus grand nombre des cas, un appel aux armes, et l’effusion du sang, avant qu’on pût entendre les parties et que la querelle fût décidée par des zemindars du voisinage, nommés pour tracer la ligne de démarcation et ayant juré par serment solennel d’agir avec impartialité[12]. Les parties nommèrent chacune un nombre égal de mounsifs ou arbitres ; chacune un, le plus souvent, mais quelquefois deux et trois. Ces commissaires traînaient presque toujours les affaires en longueur pendant des semaines et des mois entiers, car ils étaient entretenus et payés par les parties, caressés et menacés par leurs chefs, leurs parens, leurs amis, influencés par l’esprit de parti, gouvernés par la crainte et justifiaient jusqu’à un certain point le dicton commun parmi eux, pentch men parmésar. On eut recours le plus souvent à l’un des cinq modes ci-après d’accommoder ces différends. 1o Un partage égal du territoire en litige. — 2o La commission chargeait le plus âgé et le plus respectable de ses membres de tracer les limites, promettant de s’en rapporter à sa décision. — 3o Une moitié de la ligne de démarcation était tracée par les arbitres de l’une des parties, et la seconde moitié par les autres arbitres. — 4o La commission en référait en dernier ressort à la médiation d’un vieillard du voisinage dont les connaissances locales et l’expérience leur inspiraient le plus de confiance. — 5o Quelquefois la commission s’en remettait pour le partage à la sagesse de l’une des parties dort la probité et la réputation étaient bien connues.

Les discussions relatives aux limites des villages et accompagnées de circonstances graves entre les chefs et les cultivateurs de territoires contigus, sont excessivement fréquentes. Le droit au moindre espace de terre est contesté avec une obstination hors de toute proportion avec la valeur réelle de l’objet en litige. Les chefs et leurs sujets sont très peu scrupuleux sur la justice et la légitimité de leur cause ; il suffit, d’après les idées de justice des Sikhs, qu’une réélamation soit présentée pour qu’elle ait quelques chances de réussir ; et d’ailleurs, ils ne peuvent rien perdre au jugement d’arbitres qui n’ont intérêt qu’à conformer leur décision aux besoins et aux désirs de ceux qui les ont choisis.

Le meurtre résultant d’un conflit provoqué par une discussion rélative aux limites, est souvent expié chez les zemindars par un mariage, ou par le paiement d’une somme de 150 à 200 roupies, ou encore par l’abandon de 125 bigahs de terre. Cependant, en général, ils ont recours à la loi du talion ; et le khoun-baha, ou prix du sang, paraît une expiation insuffisante, surtout lorsque le crime a privé une mère de son fils favori, ou une épouse et ses enfans de l’appui de son époux.

Les réclamations rélatives aux îles et bancs d’alluvion situés sur une rivière entre deux manoirs sont décidées par ce qu’on appelle le katchmatch ou kishti banna. Cette pratique ou coutume assigne la terre au propriétaire de la rive, sur laquelle l’alluvion s’est formée et d’où les eaux se sont éloignées. Si une île se forme au milieu d’une rivière, et que les eaux tout à l’entour soient assez fortes pour porter des bateaux ; elle appartient de droit aux propriétaires établis sur les deux rives. Cette coutume n’est pas particulière aux états sikhs, elle est universelle dans l’Inde, autant du moins que ma connaissance des lois et usages locaux me permet de l’affirmer. C’est toujours le cours d’eau qui sert de limite entre deux propriétaires, même dans le cas où son lit viendrait à changer, bien que l’un doive y perdre tout ce l’autre y gagne. L’inimitié décidée de deux chefs ne les empêche que très rarement de se soumettre à un usage dans lequel chacun trouve ou espère un avantage prochain ou immédiat pour lui-même. En effet, les cours d’eau dans l’Inde sont soumis à des variations si fréquentes, qu’une saison des pluies peut vous faire regagner, et au-delà, ce que la précédente vous a coûté ; la chaleur de l’été, en desséchant le lit des rivières, n’occasione pas des variations moins fréquentes dans la propriété.

L’usage souvent abusif de l’ancien privilège des zemindars de barrer et détourner les cours d’eaux dans des kouls artificiels, des coupures, sous prétexte d’arroser leurs terres, engendre des disputes sanglantes. Après de vives dissensions, le résultat le plus ordinaire est un compromis qui règle pour les parties la jouissance des présens de la nature. Quelquefois, dans les propriétés limitrophes, les parties conviennent de se partager l’eau également par heure, par jour ou par volume ; d’autrefois une partie prend les deux tiers, et son voisin l’autre tiers, suivant les besoins respectifs de chacun. Les tenanciers dont les terres touchent aux montagnes où les cours d’eau prennent leur source, réclament une plus large part dans les eaux qu’ils répandentsur leurs terres par une multitude innombrable de rigoles faites avec beaucoup d’habileté par les cultivateurs. Ceux qui occupent des terres éloignées des sources, et dans des districts plus arides, réclament toujours pour que les cours d’eau ne soient pas dérangés de leur lit naturel qui leur donnerait à eux-mêmes assez d’eau pour arroser leurs moissons desséchées.

C’est une question de savoir jusqu’à quel point un propriétaire a le droit d’obstruer entièrement un cours d’eau naturel, et d’en approprier les eaux à son avantage exclusif et au détriment de ses voisins dont les droits devraient être respectés en tant qu’ils sont relatifs à cet objet de propriété. Ce qui paraîtrait le plus juste, ce serait le partage, autant que les circonstances le permettraient, des eaux et cours d’eau ; ce serait, quand les propriétaires du cours supérieur auraient satisfait leurs besoins essentiels, de permettre aux eaux de suivre leur lit naturel et d’arriver ainsi aux propriétaires du cours inférieur, soit pour l’irrigation des terres ou la consommation des habitans et de leurs troupeaux. Les torrens sont à sec pendant un mois de l’été, tandis que les fleuves qui sortent de l’Himalaya, sont toujours entretenus par la fonte des neiges, aussi le besoin d’eau dans les pays que ces derniers n’arrosent pas, se fait quelquefois sentir si cruellement, qu’à peine si les habitans, même ceux établis près des sources ou torrens, peuvent s’en procurer pour les premières nécessités de la vie, et que ceux dont les propriétés sont situées sur le cours inférieur de ces ruisseaux ne cessent de se plaindre de la diminution et souvent de la disparition complète des eaux. Après la saison des pluies on construit des barrages et écluses pour élever l’eau au niveau du terrain et faciliter les irrigations ; si l’on négligeait cette utile précaution, on verrait bientôt de grands espaces, que traversent maintenant des cours d’eau dans des chênaux profonds, devenir complètement rebelles à la culture. Les villages seraient dépeuplés au grand détriment de leurs propriétaires, les zemindars ne tarderaient pas à être ruinés. Pour prévenir les malheurs que cause le manque d’eau dans les districts arides, on remplace les écluses par des roues hydrauliques d’une construction extrêmement simple, qui amènent les eaux à un niveau d’où elles peuvent facilement se répandre dans les canaux d’irrigation. Les tcharras, ou sceaux de cuir, mis en mouvement par des bœufs sont universellement employés pour extraire l’eau des puits et rendent de grands services. Mais tous ces expédients ne remplacent que bien imparfaitement l’utilité et les avantages des réservoirs éclusés, surtout quand il faut tirer l’eau d’une distance de quelques milles. Chaque koul ou rigole d’irigation est un petit canal en miniature.

On fiance les enfans dès la première jeunesse ; les contrats sont débattus par les pères ou les proches parens qui, le plus souvent, sont influencés par des considérations pécuniaires et des motifs honteux, bien davantage que par le bonheur des enfans. Les difficultés relatives aux fiançailles (mangni) sont très communes, et il n’est pas rare, dans toutes les classes de la société, de voir manquer à une promesse de mariage (nata ou nisbat). Quelquefois l’une des parties contractantes allègue des maladies réélles ou imaginaires ; des défauts corporels comme un motif suffisant pour annuler le contrat ; d’autrefois, c’est une souillure reprochée à la famille ou la découverte que la jeune fille a été promise à deux, trois ou quatre familles dont les parens ou les tuteurs de la fiancée ont su extorquer de l’argent, des bijoux, des parures. Si les deux parties sont sujettes d’un même chef elles comparaissent devant lui, celui-ci par lui-même, ou par ses officiers, accommode le différend ou renvoie les parties devant un pentchayt dont les membres appartiennent à la même classe que les parties. Si le demandeur et le défendeur sont établis sur des territoires soumis à des juridictions diverses, et si l’un des chefs refuse de donner la satisfaction exigée par la coutume en pareils cas, on rejette la décision du pentchayt, la partie lésée s’indemnise par elle-même (gaha) ; elle enlève les sujets, les propriétés mobilières, les troupeaux de son adversaire et les détient jusqu’à ce que satisfaction soit rendue. Mais souvent aussi l’autre partie prend sa revanche, et ce pernicieux système donne souvent naissance à de cruels outrages, à de graves infractions contre la paix publique[13]

Il arrive souvent de voir un père ou tuteur condamné pour avoir marié sa fille ou sa pupile à un homme, après l’avoir promise à un autre. Le chef ou un pentchayt décide le plus souvent, dans ce cas, que le plaignant a droit d’épouser une autre femme de la famille, ou, si n’y en a pas, que les parens ou tuteurs doivent trouver à remplacer celle dont ils ont indûment disposé, ou enfin, dernier expédient auquel la partie lésée ne recourt qu’à contre-cœur, que l’argent dépensé par elle lui sera restitué avec intérêt, afin de pouvoir se procurer une nouvelle épouse.

Dans les familles djâts[14] et dans quelques autres des classes inférieures du Penjab, la coutume autorise un frère à épouser la veuve de son frère, par le moyen du karawah ou '

tchadardalna. (Voy. ce qui a été dit au sujet des héritages.) Les enfans issus de cette union sont légitimes et habiles à hériter des biens mobiliers ou immobiliers[15]. La veuve peut opter entre le frère ainé (djeth) ou le plus jeune frère ; cette dernière alliance est généralement préférée et regardée comme plus convenable. Si la veuve veut renoncer aux plaisirs du monde et rester chaste dans la maison de son beau-frère, elle est libre de le faire ; mais il faut dire que de telles résolutions sont très rares surtout de la part des jeunes femmes, et sont peu considérées chez une nation connue par le relâchement de ses mœurs et la facilité de sa morale.

À défaut de frères survivans, conformément à l’usage, c’est la famille de son beau-père qui règle le sort de la veuve, car dès l’instant où elle a quitté le toit paternel, elle est considérée comme la propriété d’un autre, elle cesse d’avoir une volonté libre. Lorsque les mariages se concluent d’une manière si brutale et si irrationnelle, on ne doit pas s’étonner si les faibles liens et les serviles obligations qui unissent la femme à son époux ne lui inspirent aucunebaffection sincère. Chaque jour on voit des femmes traduites devant des chefs ou leurs officiers pour manquemens à la fidélité conjugale, pour s’être soustraites par la fuite aux réclamations d’un père, d’une belle-mère, aux droits établis d’un djeth ou daïwar. Lorsqu’elles se refugient sur le territoire d’un chef étranger, il est souvent difficile d’obtenir leur extradition ; cependant les sollicitations d’un pentchayt, et surtout l’argument plus fort des représailles finissent presque toujours par être efficaces, et alors les infortunées, si dans un accès de désespoir elles ne prennent pas de l’opium ou ne se jettent pas dans un puits, en sont réduites à la nécessité de se soumettre à une loi barbare, sauf à la violer encore à la première occasion favorable. La pudeur et l’honneur sont des sentimens inconnus aux djâts[16] et aux tribus inférieures. Ils feront des recherches actives paur retrouver leurs femmes lorsqu’elles se sont enfuies, ils les poursuivront aussi long-temps qu’ils espèreront y gagner quelque chose, ils débattront même l’indemnité qui doit leur être allouée pour les enfans que l’adultère aura introduits dans leurs maisons, pour l’absence temporaire de leurs femmes, pour les dépenses et les soins qu’ils auront employés à les rechercher[17].

Les débiteurs et les banqueroutiers qui se soustraient par la fuite à leurs créanciers, trouvent protection dans les états voisins ; leur extradition n’est demandée que très rarement, et quand elle l’est, les chefs, même les moins puissans, ne l’accordent jamais. On promet, lorsque le délinquant en a les moyens, de le forcer à payer, de vérifier ses comptes pour s’assurer de ce qu’il doit. Il n’est pas rare de voir une députation composée des chefs ou des plus respectables habitans de la ville ou du village, dont un membre s’est enfui devant ses créanciers, se rendre auprès du chef chez qui le fugitif a trouvé un asile, et conclure avec lui des stipulations pour la sûreté personnelle du débiteur et son retour au milieu des siens, si toutefois il veut retourner.

Dans les états sikhs, il n’y a point d’impôts dont le produit soit destiné à secourir les indigens. Le plus grand nombre des faquirs appartiennent à un pant ou secte, et chaque secte a des temples dotés par les chefs de terres et de villages (appellés Oudous et Pouras) et entretenus par les fidèles, au moyen d’offrandes en nature ou en argent. Dans les villes importantes, des établissemens hospitaliers ont été fondés par les chefs et les habitans riches. On les nomme Sada Birt et tous les étrangers y sont logés et nourris gratis pendant un certain nombre de jours. Chaque temple hindou a son mahant ou chef, au-dessous de lui sont des tchelas ou acolytes qui parcourent la campagne, les villes, les villages, quêtent ou demandent l’aumône qui est la principale ressource de leur supérieur et d’eux-mêmes. D’ailleurs ils partagent libéralement leurs provisions avec les pauvres étrangers ou les voyageurs qui frappent à leur porte et désirent loger et prendre leurs repas dans le Thakour Dwara.

Les Musulmans ont leur pirzadas qui se soutiennent par leurs mourids ou disciples, dont ils reçoivent autant de niaz ou offrandes que ceux-ci peuvent leur en apporter : depuis le déclin des Musulmans et l’élévation des Sikhs, les pirzadas ont eu à souffrir la perte on au moins la diminution de leurs dotations en villages. Ils possèdent cependant encore une partie des terres qui leur furent données par les empereurs de Delhi. Elles dépendent de leurs principaux rozas, cimetières, collèges, mais les rentes qu’ils en retirent et le peu d’importance des offrandes des fidèles ne peuvent plus donner une existence honorable aux familles qui desservent les établissemens religieux, pour entretenir les khadims ou serviteurs qui doivent prier sur les tombeaux des saints.

Chaque village, indépendamment des droits fixes du forgeron, du charpentier, du blanchisseur, du balayeur, a ses malha ou dépenses extraordinaires supportées par les cultivateurs et qu’on nomme, à cause de cela, aya, gya ou droit d’aumônes pour les faquirs ou les voyageurs mendians. Les pentch ou chefs de villages chargés de recueillir le malha, le lèvent en argent sur leurs administrés, deux fois par an. Il arrive souvent que cette opération donne lieu à des altercations selon l’inclination réelle ou supposée des pentch, à leur imposer sous le spécieux et honorable prétexte de la charité, des sommes qui doivent rester dans la bourse de ceux qui les ont levées.

Les faquirs hindous et musulmans habitent l’intérieur ou les environs des villages. Chacun a son takiah ou demeure fixe ; de laquelle dépendent quelque mesures de terre, présent des zemindars qui sous bien d’autres rapports encore, prennent soin des saintes confréries afin d’en attirer les bénédictions.

La djinsi ou récolte est taxée selon le kan (évaluation), ou le bataï (répartition selon l’étendue de la terre) ; ces deux modes sont d’une application difficile. Il faut un homme habile et expérimenté pour estimer la quantité de grain produite par un champ. Le bataï est une opération pénible et vexatoire, elle exige l’assistance d’employés occupés à surveiller les divers kalwarah ou meules de grains qui sont dans la campagne. Les cultivateurs ne manquent jamais de les enlever pendant la nuit ; les orages et les pluies les endommagent souvent avant qu’on ait eu le temps de les serrer dans les greniers. Aussi dit-on communément : « Batai loutaï, » c’est-à-dire le bataï est un pillage. Quelques chefs prennent la moitié de la récolte, d’autres les deux cinquièmes, d’autres enfin, mais en très petit nombre, un quart. La canne à sucre, le coton, l’indigo, le pavot et toutes les terres désignées sous la dénomination de zabti, sont soumises à des taxes fixes, et la rente y est perçue en argent.

Dans les états sikhs, les terres appartenant aux villes ou villages sont divisées en pattis, tavafs, ou partagées entre les pentch ou zemindars qui sont responsables de la part du sirkar (fisc) ; dans quelques localités où il n’y a pas de chefs ostensibles, les terres sont estimées d’après le nombre des halsaris ou charrues. Cependant, si dans un village il se trouve vingt-cinq charrues et deux mille cinq cents mesures, les terres désignées sous le nom de djinsi et zabti sont partagées également entre les asamis ou hommes mariés, cent mesures à chacun qui doit payer une rente. En général, les pentch occupent quelques terres et de plus perçoivent un droit de cinq pour cent sur le produit net des impôts.

Le système du kan ou du bataï convient aux communautés agricoles, et aux chefs qui paient leurs soldats tous les six mois en nature ; cependant une faible partie de la solde se paie en argent, on la nomme poshaki (entretien) : ceci s’accorde encore avec les habitudes économiques des Sikhs. Mais ce qui est applicable aux petits états ne saurait convenir à un pays étendu et à un grand gouvernement[18].

Les principales causes de l’oppression du peuple sous la loi sikhe, viennent d’abord des exactions des sivaï-djama ou impôts extraordinaires, perçus en argent sur chaque village sous le nom général de hac haboubnazarbhet, et subdivisés en une foule de noms divers ; ensuite de la pratique inhumaine du karbegar ou corvée exigée gratuitement de la classe agricole ; enfin, des violences auxquelles toute la population est exposée de la part des soldats armés et retranchés dans des forts et des tours qui couvrent tout le pays.

Tous les chefs, petits ou grands, exercent le droit d’imposer le commerce, c’est un droit prescrit par l’usage. Cependant il est juste de dire que ces impôts, bien qu’ils se renouvellent tous les dix ou vingt milles, sont cependant légers. Une habitude nommée hounda-bara est très répandue dans la classe commerçante. Un négociant confie le commandement de sa caravane à un Nanakpoutra qui prend l’engagement, moyennant une certaine somme, de la conduire en acquittant les droits de Djaghadri à Amritsar, l’entrepôt des états sikhs. Les Nanakpoutras, en vertu du respect attaché à leurs personnes comme descendans de Nanak, fondateur de la secte des Sikhs, jouissent de certaines immunités et sont moins sujets que d’autres aux tracasseries de l’administration des douanes. Un bima ou marché d’assurance peut aussi se conclure à forfait avec les marchands nouharias, pour tous les pays de l’Inde. Un chef qui exercerait des vexations contre les commerçans, s’exposerait à perdre une partie de son revenu, car la route des marchandises changerait bien vite pour passer par le territoire d’un autre chef qui, avec le pouvoir de protéger les commerçans, aurait la volonté d’encourager le transit.

Les femmes sikhes ne montent pas sur le bûcher avec le cadavre de leurs maris. Une seule exception se présenta en 1805, dans la ville de Bouriah, à la mort du chef Raï Singh. La veuve se sacrifia refusant de jouir du douaire qui lui avait été assigné. Cependant il n’y a pas de lois contre les sattis. Dans tous les cas, elles sont regardées comme des victimes volontaires, et il n’est pas d’avis réels ou prétendus qu’elles ne reçoivent des fonctionnaires publics, de leurs parens et de leurs amis pour les détourner de leur funeste résolution. Ce n’est ni l’affection, ni le devoir qui causent ce crime contre soi-même, et cependant seuls ils pourraient l’excuser et donner au résultat de la superstition une apparence noble et respectable ; la fréquence des sattis le prouve ainsi que ce fait, que ce n’est pas seulement l’épouse favorite, mais toutes les épouses qui sont offertes en sacrifices sur le bûcher de leur époux[19].

Dans le plus grand nombre des cas de satti, on observa généralement que la parole de la victime lui a été arrachée dans un moment d’égarement ou dans le désespoir de la douleur. La multitude s’assemble aussitôt autour d’elle ou de sa maison ; les clameurs et le tumulte vont sans cesse croissant, et ne laissent plus le temps de la réflexion. L’honneur, la crainte, le devoir se réunissent pour raffermir la victime dans sa funeste résolution, accomplie avec autant de précipitation qu’elle a été formée[20].


FIN

  1. « La flamme innocente, dit Gibbon, qui consumait insensiblement une image de cire, pouvait peut-être tirer une puissante et pernicieuse énergie de l’imagination effrayée de la personne que l’on prétendait représenter par cette image. ». L’une des raisons du radja Djaswant Sing de Nabah, pour vouloir déshériter son fils aîné et son héritier, était que celui-ci s’était adonné avec un certain Bhaï Dighanou à certaines pratiques de maléfices et d’enchantemens qui devaient ruiner la santé de son père. Le serdar Bhou Singh de Roupour porta une plainte semblable contre son oncle Darva Singh ; et cependant ces deux hommes étaient d’un esprit beaucoup plus large et plus ferme que leurs voisins. Ratan Kounwar, veuve de Mehtab Singh, chef de Thanesar, avait adopté un pauvre enfant malade, à qui elle s’attacha d’une manière extraordinaire, espérant vainement qu’il pourrait un jour lui succéder dans ses biens. Cet enfant mourut en 1828, et Ratan Kounwar, dans l’excès de sa douleur, porta une plainte en forme contre son neveu Djamerat Singh, qu’elle accusait d’avoir causé par la magie la mort de son protégé. Elle ne put produire d’autres preuves que quelques habits et un prétendu ordre de poursuivre son fils jusqu’à la mort. La plainte fut écartée pour cause d’absurdité, et Ratan Kounwar se consola en adeptant un autre enfant. En septembre 1829, un thanadar de la rani de Thanesar pendit un brahmane suspect de magie. La rani renvoya le thanadar absous. (Note de l’auteur.)
  2. Entendre sur son côté droit chanter une perdrix lorsqu’on entre dans une ville ; — des grues volant de gauche à droite ; — la rencontre d’une personne découverte ; — le croassement d’une pie quand on entre dans une ville ou dans un village ; — un chien qui remue la tête et les oreilles quand vous quittez la maison ; — rencontrer un cadavre ou un brahmane ; — entendre pendant la nuit hurler la femelle d’un chacal ; — éternuer en entrant ou en sortant, etc., etc., sont autant de mauvais présages. — Quand le contraire arrive, c’est un bon présage. Entendre sur sa gauche le chant d’une perdrix ; — voir des grues volant de droite à gauche ; — rencontrer un mehtar ou un swiper ; — voir des perles dans son sommeil. — Pour un musulman rêver qu’il voit la lune, c’est pour lui l’heureux présage d’une entrevue avec le prophète, etc., etc. — Un riche marchand indien vint une fois d’Amritsar pour me parler d’affaires, il mourut à Loudiana du choléra-morbus ; ses serviteurs assuraient avec beaucoup de sérieux que tous les remèdes seraient impuissans, parce qu’à son entrée dans la ville le malade avait rencontré un homme de la caste de Goudjar, dont la tête était découverte. (Note de l’auteur.)
  3. Des voleurs amenés devant moi en 1819 avaient abandonné (sans doute pour conjurer le mauvais présage) deux pièces de mousseline peinte dont ils étaient chargés, parce qu’en quittant Karnal, où le vol avait été commis, ils avaient entendu un chacal hurler à leur droite. Les dessasoul ou mauvais jours sont samedi et lundi, si le vent souffle de l’est, dimanche et vendredi si de l’ouest ; mardi et mercredi si du nord ; jeudi si du sud. Si le vent souffle du côté opposé, ce sont des jours siddh djôg ou heureux. (Note de l’auteur.)
  4. Lorsque la division de Sirhind, entièrement composée de cipayes, dut marcher, en 1814, sous le commandement de sir David Ochterlony, contre le pays de Gourkha, Nand Singh, l’agent accrédité de Randjit Singh, dit que la première marche devait se faire un jour du Gasrah. On lui objecta que ce serait trop tôt, mais il insista pour qu’on fit au moins avancer les bagages et quelques hommes ce jour-là. On obtempéra à sa demande, et les succès constans qu’obtint cette division dans toutes ses opérations furent attribués bien plus au choix d’une heure favorable qu’à la prudence, à la sagesse et à la bravoure du commandant, des officiers et des soldats qui la composaient.(Note de l’auteur.)
  5. Des lois rendues sous Henri VIII, Édouard VI, Élisabeth et Jacques Ier, prononcent la perte de la main, droite ou gauche et celle des oreilles pour des délits qui ne paraîtraient pas, aux yeux d’un Sikh, mériter une légère amende. (Note de l’auteur.)
  6. Mot arabe ou turc. On dit dharvi dans le dialecte du Penjab. (Note de l’auteur.)
  7. Hume parlant des Anglo-Saxons, dit : Si un homme pouvait suivre la trace du bétail qu’on lui avait enlevé jusque dans les propriétés d’un autre, ce dernier était obligé de prouver que ces traces conduisaient hors de sa propriété ou de payer la valeur des animaux dérobés. (Note de l’auteur.)
  8. Deutéronome, chap. XXI, v. 15, 16 et 17.
  9. La pratique du Tchoundaband est conforme à la loi indienne. Veïara dit : « S’il y a plusieurs fils issus de différentes mères par un seul homme, égaux en nombre et en rang, le bien doit être divisé entre les mères, conformément au vrihaspari. » S’il y a plusieurs fils égaux en nombre et en rang issus d’un seul homme, mais nés de mères rivales, l’héritage leur sera partagé, conformément à la loi, en répartissant le bien entre leurs mères. (Note de l’auteur.)
  10. Dans le Bengale et dans la plus grande partie des provinces qui observent les sastras, excepté dans le Mithila, la veuve est exclue de l’héritage, elle ne recoit qu’une pension.
  11. Deutéronome, chap. XXV, v. 5, 6, 7, 8, 9 et 10. Yadjouwoleya dit : « Si un frère meurt sans postérité masculine, que son frère épouse sa veuve, conformément à la loi. » Manou règle ainsi cette espèce de mariage : « Elle a été mariée dans la forme convenable celle qui a été revêtue d’une robe blanche. »
  12. Le serment déféré aux arbitres était pour un Hindou le ganga-djal, le tchour, ou par le cuir des vaches sacrées, ou par la tête de son fils. Les Musulmans prêtaient serment par le Coran ou sur la tête de leur fils. Le tchour et le serment par la tête des enfans sont considérés comme les plus obligatoires. (Note de l’auteur.)
  13. Une demande fut présentée contre l’état de Patiala par un sujet du radja de Nabah qui réclamait le prix d’un bœuf évalué à 15 roupies, mais l’exercice des représailles avait fait monter la totalité de la somme à plus de 900 roupies. Entre les mêmes états et par les mêmes circonstances, une réclamation pour un objet de la valeur d’une roupie s’était élevée en quelques années à la somme de 1500 roupies.
  14. Il n’y a point de mariages entre les chefs djâts des Sikhs et les familles d’Alouwala et de Ramgarh, ces dernières étant kalals et thokas (domestiques et charpentiers), et étant considérées comme inférieures. (Note de l’auteur).
  15. Le radja actuel de Nabah, Djaswant Singh et six chefs de Singhpour sont mariés de cette manière. Le maha-radja Randjit Singh a encore été plus loin : il a épousé par karawah une femme fiancée à son père Maha Singh, et de plus Deïa Kounwar et Ratan Kounwar, veuves de Saheb Singh, chef Goujrat, et son oncle par sa mère. (Note de l’auteur.)
  16. Le vieux chef Tara Singh Gheïba disait souvent qu’un djât qui aurait perdu le nez pour quelque crime ne craindrait pas de rester encore dans le pays où ce malheur lui serait arrivé. Il voulait dire par là qu’ils étaient complètement étrangers au sentiment de la honte. (Note de l’auteur.)
  17. Deutéronome, chap. XXIII, v. 15 et 16.
  18. Randjit Singh, toutes les fois qu’il fut pressé par ses officiers d’abandonner le système des fermages pour y substituer le kan et le bataï, leur répondit toujours qu’il ne pouvait donner son temps et son attention à faire rentrer le grain dans les greniers. (Note de l’auteur.)
  19. Ceci fait allusion aux scènes effrayantes qui se passèrent à la mort des radjas de Koulou, Nahan, Djaswoul, etc. (Note de l’auteur.)
  20. En 1826, lorsqu’Ambala tomba entre les mains de la compagnie, la jeune femme d’un Brahmane, inconsolable de la perte de son mari mort en pays étranger, forma la résolution de se brûler avec ses parures. Un grand concours de peuple se forma autour d’elle dans la plus grande exaltation. J’étais alors absent, mais le mounshi, le thanadar et le soubadar, tous trois Hindous des classes élevées, prirent sur eux de prévenir le sacrifice. Ils dispersèrent la multitude et engagèrent la jeune femme à attendre la réponse à une dépêche qu’ils m’avaient expédiée. La menace d’emprisonner et de poursuivre les instigateurs, une pension de trois roupies par mois sauvèrent la victime. Elle vit aujourd’hui honorée dans sa famille et respectée de tous comme une satti, ce qui réfute l’idée généralement reçue, que la rétractation entraîne la honte et le mépris. À la mort du radja de Balaspour, en 1824 et de Nahan, en 1827, il n’y eut pas de satti ; cette coutume a disparu des états sikhs placés sous protection anglaise. (Note de l’auteur.)