Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/41

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ne pouvaient guère s’y méprendre, ils voyaient bien tout de suite qu’ils avaient affaire à une fille sage, fraîche de cœur autant que de figure.

Dans ces grandes villes, son costume s’était modifié beaucoup plus qu’elle-même. Bien qu’elle eût gardé sa coiffe, que les Bretonnes quittent difficilement, elle avait vite appris à s’habiller d’une autre façon. Et sa taille autrefois libre de petite pêcheuse, en se formant, en prenant la plénitude de ses beaux contours germés au vent de la mer, s’était amincie par le bas dans de longs corsets de demoiselle.

Tous les ans, avec son père, elle revenait en Bretagne, — l’été seulement comme les baigneuses, — retrouvant pour quelques jours ses souvenirs d’autrefois et son nom de Gaud (qui en breton veut dire Marguerite) ; un peu curieuse peut-être de voir ces Islandais dont on parlait tant, qui n’étaient jamais là, et dont chaque année quelques-uns de plus manquaient à l’appel ; entendant partout causer de cette Islande qui lui apparaissait comme un gouffre lointain — et où était à présent celui qu’elle aimait…

Et puis un beau jour elle avait été ramenée