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aussi voulut-elle s’arroger les mêmes privilèges. Donc ayant vu passer des voyageurs, elle alla se percher sur un arbre et là poussa de grands cris. À sa voix, les voyageurs se retournèrent, effrayés ; mais l’un d’eux prenant la parole dit : « Allons, amis, continuons notre chemin : ce n’est qu’une corneille, ses cris ne donnent pas de présage. »

Il en est ainsi chez les hommes : ceux qui rivalisent avec de plus forts qu’eux, non seulement ne peuvent les égaler, mais encore ils prêtent à rire.


171
LA CORNEILLE ET LE CHIEN

Une corneille offrant une victime à Athéna invita un chien au banquet du sacrifice. Le chien lui dit : « Pourquoi dépenses-tu ton bien à des sacrifices inutiles ? La déesse, en effet, te hait au point d’ôter toute créance à tes présages. » À quoi la corneille répliqua : « Mais c’est précisément pour cela que je lui sacrifie : je la sais mal disposée à mon égard et je veux qu’elle se réconcilie avec moi. »

C’est ainsi que beaucoup de gens n’hésitent pas à faire du bien à leurs ennemis, parce qu’ils en ont peur.


172
LES ESCARGOTS

L’enfant d’un laboureur grillait des escargots. En les entendant crépiter, il dit : « Misérables bêtes, vos maisons brûlent, et vous chantez ! »

Cette fable montre que tout ce qu’on fait à contre-temps est repréhensible.


173
LE CYGNE PRIS POUR L’OIE

Un homme opulent nourrissait ensemble une oie et un cygne, non point pour le même objet, mais l’un pour son