Page:Ésope - Fables - Émile Chambry.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Pareillement les hommes qui sont aveugles sur leurs propres intérêts sont mal qualifiés pour conseiller leur prochain.



256


LES VOYAGEURS ET LA HACHE


Deux hommes voyageaient de compagnie. L’un d’eux ayant trouvé une hache, l’autre dit : « Nous avons trouvé une hache. — Ne dis pas, reprit le premier : nous avons trouvé, mais : tu as trouvé. » Quelques moments après, ils furent rejoints par ceux qui avaient perdu la hache, et celui qui l’avait, se voyant poursuivi, dit à son compagnon de route : « Nous sommes perdus. — Ne dis pas : nous sommes perdus, reprit celui-ci, mais : je suis perdu ; car, lorsque tu as trouvé la hache, tu ne m’as pas mis de moitié dans ta trouvaille. »

Cette fable montre que, si l’on n’a point de part aux heureux succès d’un ami, on ne lui est pas non plus fidèle dans le malheur.



257


LES VOYAGEURS ET LE PLATANE


En été, vers l’heure de midi, deux voyageurs, fatigués par l’ardeur du soleil, ayant aperçu un platane, se réfugièrent sous ses branches et, s’étendant à son ombre, se reposèrent. Or, ayant levé les yeux vers le platane, ils se dirent l’un à l’autre : « Voilà un arbre qui est stérile et inutile à l’homme. » Le platane prenant la parole : « Ingrats, dit-il, au moment même où vous jouissez de ma bienfaisance, vous me traitez d’inutile et de stérile. »

Il en est ainsi chez les hommes : certains sont si malchanceux que, même en obligeant leurs voisins, ils ne peuvent faire croire à leur bienfaisance.



258


LES VOYAGEURS ET LES BROUSSAILLES


Des voyageurs, cheminant sur le bord de la mer, arrivèrent