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l’essai, et l’ayant amené parmi ses ânes à lui, il le plaça devant le râtelier. Or l’âne, délaissant tous les autres, alla se mettre près du plus paresseux et du plus glouton. Comme il ne faisait rien, l’homme lui passa un licol, l’emmena et le rendit à son propriétaire. Celui-ci lui demandant si l’épreuve qu’il avait faite ainsi était probante, il répondit : « Moi, je n’ai nul besoin d’une autre épreuve : je suis sûr qu’il est tel que le camarade qu’il a choisi entre tous. »

Cette fable montre qu’on nous juge pareils à ceux dont nous aimons la compagnie.

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L’ÂNE SAUVAGE ET L’ÂNE DOMESTIQUE


Un âne sauvage ayant vu un âne domestique dans un endroit bien exposé au soleil, s’approcha pour le féliciter de son embonpoint et de la pâture dont il jouissait. Mais dans la suite l’ayant vu chargé d’un fardeau et suivi de l’ânier qui le frappait avec un gourdin, il s’écria : « Oh ! je ne te félicite plus ; car je vois que c’est au prix de grands maux que tu jouis de ton abondance. »

C’est ainsi qu’il n’y a rien d’enviable dans les avantages qu’accompagnent les dangers et les souffrances.

265


L’ÂNE QUI PORTE DU SEL


Un âne portant du sel traversait une rivière ; il glissa et tomba dans l’eau. Alors le sel se fondit, et il se releva plus léger, et fut enchanté de l’accident. Une autre fois, comme il arrivait au bord d’une rivière avec une charge d’éponges, il crut que, s’il se laissait tomber encore, il se relèverait plus léger, et il fit exprès de glisser. Mais il advint que les